Bibliotheca Classica Selecta - Énéide - Chant IX (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page précédente - Page suivante
ÉNÉIDE, LIVRE IX
SIÈGE DU CAMP TROYEN - NISUS ET EURYALE
Turnus assiège le camp troyen (9, 1-167)
Turnus se heurte aux Troyens retranchés (9, 1-68)
Junon, par l'intermédiaire d'Iris, engage Turnus à profiter de l'absence d'Énée pour s'emparer du camp troyen. Le Rutule se met en marche avec une troupe impressionnante. (9, 1-32)
Les Troyens se conforment aux directives d'Énée et se bornent à résister derrière leurs retranchements, renonçant à engager le combat. Turnus, furieux comme un loup affamé ne parvenant pas à pénétrer dans une bergerie, cherche un moyen de faire sortir les Troyens du camp. (9, 33-68)
Atque ea diuersa penitus dum parte geruntur, Irim de caelo misit Saturnia Iuno audacem ad Turnum. Luco tum forte parentis Pilumni Turnus sacrata ualle sedebat. |
Pendant qu'au loin se déroulent ces événements, du haut du ciel, Junon la Saturnienne envoie Iris au bouillant Turnus. À ce moment là, par hasard Turnus était assis dans un vallon sacré du bois de son ancêtre Pilumnus. |
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Ad quem sic roseo Thaumantias ore locuta est : « Turne, quod optanti diuom promittere nemo auderet, uoluenda dies en attulit ultro. Aeneas urbe et sociis et classe relicta sceptra Palatini sedemque petit Euandri. |
De sa bouche de rose, la fille de Thaumas lui dit : « Turnus, ce qu'aucun dieu n'eût osé te promettre, le jour qui se déroule maintenant te l'a apporté spontanément. Pour rejoindre le royaume du Palatin et la demeure d'Évandre, Énée a quitté sa ville, ses compagnons et sa flotte. |
9, 5 |
Nec satis : extremas Corythi penetrauit ad urbes Lydorumque manum collectos armat agrestis. Quid dubitas ? Nunc tempus equos, nunc poscere currus. Rumpe moras omnis et turbata arripe castra. » Dixit et in caelum paribus se sustulit alis |
Et ce n'est pas tout : il a gagné les cités lointaines de Corythus, rassemblé et est en train d'armer une troupe de paysans Lydiens. Pourquoi hésiter ? C'est le moment d'appeler chars et chevaux. Cesse de tarder et empare-toi du camp en désarroi ». Elle parla et, de ses ailes déployées, remonta vers le ciel, |
9, 10 |
ingentemque fuga secuit sub nubibus arcum. Adgnouit iuuenis duplicisque ad sidera palmas sustulit ac tali fugientem est uoce secutus : « Iri, decus caeli, quis te mihi nubibus actam detulit in terras ? Vnde haec tam clara repente |
traçant dans sa fuite un immense arc-en-ciel sous les nuages. Le jeune homme la reconnut et, les deux mains levées vers les astres, la suivit qui fuyait en lui disant : « Iris, parure du ciel, qui t'a envoyée à moi à travers les nues et t'a fait descendre sur terre ? D'où vient cette clarté soudaine ? |
9, 15 |
tempestas ? Medium uideo discedere caelum palantisque polo stellas. Sequor omina tanta, quisquis in arma uocas. » Et sic effatus ad undam processit summoque hausit de gurgite lymphas, multa deos orans, onerauitque aethera uotis.
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Je vois le ciel s'entrouvrir par le milieu, et les étoiles errer sous sa voûte. Je m'incline devant de si grands présages, qui que tu sois pour m'appeler aux armes. » Sur ces paroles, il s'avança vers le fleuve, puisa de l'eau à la surface des ondes, et, priant longuement les dieux, il emplit le ciel de ses voeux.
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9, 20 |
Iamque omnis campis exercitus ibat apertis, diues equum, diues pictai uestis et auri ; Messapus primas acies, postrema coercent Tyrrhidae iuuenes, medio dux agmine Turnus, uertitur arma tenens et toto uertice supra est. |
Déjà toute l'armée s'avançait dans la plaine dégagée, riche en chevaux, riche en vêtements brodés d'or ! Messapus conduit les premiers rangs ; les jeunes fils de Tyrrhus ferment la marche et leur chef, Turnus, tient le milieu de la colonne : [il va et vient, les armes à la main, les dépassant de toute une tête.] |
9, 25 |
Ceu septem surgens sedatis amnibus altus per tacitum Ganges aut pingui flumine Nilus cum refluit campis et iam se condidit alueo.
Hic subitam nigro glomerari puluere nubem prospiciunt Teucri ac tenebras insurgere campis. |
Ainsi s'avance le Gange profond, nourri de sept rivières paisibles, et coule sans bruit ; ainsi coule le Nil, aux eaux fécondantes, lorsqu'il a reflué de la plaine et s'est déjà retiré au creux de son lit.
Les Troyens voient soudain un noir nuage de poussière, s'amonceler et les ténèbres envahir la plaine. |
9, 30 |
Primus ab aduersa conclamat mole Caicus : « Quis globus, o ciues, caligine uoluitur atra ? Ferte citi ferrum, date tela, ascendite muros, hostis adest, heia ! » Ingenti clamore per omnis condunt se Teucri portas et moenia complent. |
Caïcus, d'une tour de guet, est le premier à s'écrier : « Amis, quelle est cette masse déferlant dans l'obscurité profonde ? Vite, apportez des armes, amenez des javelots, escaladez les murs ! L'ennemi est là, hélas ! » Suite à cet immense cri, les Troyens, par toutes les portes, se mettent à l'abri et occupent les remparts. |
9, 35 |
Namque ita discedens praeceperat optumus armis Aeneas : siqua interea fortuna fuisset, neu struere auderent aciem neu credere campo ; castra modo et tutos seruarent aggere muros. Ergo etsi conferre manum pudor iraque monstrat, |
Car en partant Énée, guerrier expérimenté, avait donné ses ordres : au cas où pendant son absence surviendrait un coup du sort, ils ne devaient ni risquer une bataille rangée ni se fier à un combat en plaine, mais se borner à préserver le camp et les murs, à l'abri de la levée de terre. Dès lors, en dépit de la fierté et de la colère qui les poussent à se battre, |
9, 40 |
obiciunt portas tamen et praecepta facessunt armatique cauis expectant turribus hostem.
Turnus ut ante uolans tardum praecesserat agmen uiginti lectis equitum comitatus, et urbi improuisus adest ; maculis quem Thracius albis |
ils barrent les portes et accomplissent les consignes : en armes, ils attendent l'ennemi depuis les tours creuses de l'enceinte.
Turnus, qui avait volé à l'avant de la lente colonne avec une escorte de vingt cavaliers d'élite, se présente à l'improviste devant la ville ; il monte un cheval thrace, à la robe mouchetée de blanc ; |
9, 45 |
portat equus cristaque tegit galea aurea rubra. « Ecquis erit, mecum, iuuenes, qui primus in hostem ? En, » ait et iaculum attorquens emittit in auras, principium pugnae, et campo sese arduus infert. Clamore excipiunt socii fremituque sequuntur |
un casque doré orné d'un rouge panache le protège. « Eh, jeunes gens, qui sera le premier à foncer avec moi sur l'ennemi ? Allons ! », dit-il, et le faisant tournoyer , il lance son javelotans les airs, marquant le début du combat ; puis fougueux il s'avance dans la plaine. Ses hommes répondent par des clameurs, et le suivent dans un bruit effrayant. |
9, 50 |
horrisono : Teucrum mirantur inertia corda, non aequo dare se campo, non obuia ferre arma uiros, sed castra fouere. Huc turbidus atque huc lustrat equo muros aditumque per auia quaerit. Ac ueluti pleno lupus insidiatus ouili |
Ils s'étonnent de l'inertie troyenne : des hommes qui ne s'engagent pas dans un terrain égal, qui ne font pas front avec leurs armes, mais qui se terrent dans leur camp ! Irrité, Turnus, sur sa monture, va et vient, inspecte les murs, cherchant un passage détourné, tel un loup embusqué devant une bergerie pleine, |
9, 55 |
cum fremit ad caulas, uentos perpessus et imbris, nocte super media ; tuti sub matribus agni balatum exercent, ille asper et improbus ira saeuit in absentis, collecta fatigat edendi ex longo rabies et siccae sanguine fauces : |
hurlant devant la clôture, endurant le vent et la pluie, bien tard dans la nuit ; à l'abri sous leurs mères, les agneaux bêlent sans relâche et lui, ardent et opiniâtre, exerce sa colère contre des proies absentes ; depuis longtemps, la rage de manger le tenaille et sa gueule sèche est assoiffée de sang. |
9, 60 |
haud aliter Rutulo muros et castra tuenti ignescunt irae, duris dolor ossibus ardet. Qua temptet ratione aditus et quae uia clausos excutiat Teucros uallo atque effundat in aequum ? |
La même rage embrase le Rutule en arrêt devant les murs, la même douleur tenace lui brûle les os. Par quel moyen tenter le passage, comment faire sortir les Troyens enfermés dans leurs murailles et les faire se répandre dans la plaine ? |
9, 65 |
Turnus incendie les vaisseaux qui seront miraculeusement sauvés (9, 69-122)
Pour contraindre les Troyens à sortir de l'enceinte du camp, Turnus met le feu à leurs vaisseaux. Mais Cybèle, la mère des dieux, qui avait permis à Énée de fabriquer des navires avec des arbres de Phrygie qui lui étaient consacrés, obtient de Zeus/Jupiter la promesse d'assurer à ces navires une sorte d'immortalité. (9, 69-106)
Suite à cette promesse, Jupiter ordonne que les navires, qui ont assuré le passage des Troyens en Italie, soient miraculeusement transformés en nymphes, tandis qu'une voix céleste recommande aux Troyens de ne pas chercher à les sauver (9, 107-122).
Classem, quae lateri castrorum adiuncta latebat, |
La flotte troyenne jouxtant un côté du camp était bien cachée, |
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aggeribus saeptam circum et fluuialibus undis, inuadit sociosque incendia poscit ouantis atque manum pinu flagranti feruidus implet. Tum uero incumbunt, urget praesentia Turni, atque omnis facibus pubes accingitur atris. |
entièrement protégée par des levées de terre et les eaux du fleuve. Turnus l'assaille, exige de ses compagnons enthousiastes d'y bouter le feu, et lui-même dans son ardeur tient dans sa main un pin enflammé. Alors tous s'appliquent, stimulés par la présence de Turnus, et les jeunes gens s'arment de torches funestes. |
9, 70 |
Diripuere focos ; piceum fert fumida lumen taeda et commixtam Volcanus ad astra fauillam.
Quis deus, o musae, tam saeua incendia Teucris auertit ? Tantos ratibus quis depulit ignes ? Dicite. Prisca fides facto, sed fama perennis. |
Ils les ont dérobées aux foyers allumés : le pin fumant crée une lueur enfumée et Vulcain projette au ciel la cendre qui s'y mêle.
Muses, quel dieu évita aux Troyens un si cruel incendie ? Qui écarta des navires un si grand feu ? Dites-le-moi : c'est une croyance ancienne, mais son renom est durable. |
9, 75 |
Tempore quo primum Phrygia formabat in Ida Aeneas classem et pelagi petere alta parabat, ipsa deum fertur genetrix Berecyntia magnum uocibus his adfata Iouem : « Da, nate, petenti, quod tua cara parens domito te poscit Olympo. |
Au temps où sur l'Ida de Phrygie, Énée construisait sa flotte et se préparait à prendre le large, la mère des dieux, la Bérécyntienne elle-même adressa, dit-on, ces paroles au grand Jupiter : « Mon fils, accorde à ta mère bien-aimée, qui t'implore ce qu'elle te demande, à toi qui as dompté l'Olympe. |
9, 80 |
Pinea silua mihi, multos dilecta per annos lucus in arce fuit summa, quo sacra ferebant, nigranti picea trabibusque obscurus acernis : has ego Dardanio iuueni, cum classis egeret, laeta dedi ; nunc sollicitam timor anxius angit. |
J'avais une forêt de pins que j'ai protégée nombre d'années durant, un bois sacré au sommet d'une colline, où l'on apportait des offrandes, c'était un bois obscur de noirs sapins et de troncs d'érables. Je les offris de bon coeur au jeune Dardanien, qui avait besoin d'une flotte ; à présent, je me fais du souci, une peur angoissée m'accable. |
9, 85 |
Solue metus atque hoc precibus sine posse parentem : ne cursu quassatae ullo neu turbine uenti uincantur, prosit nostris in montibus ortas. » Filius huic contra, torquet qui sidera mundi : « O genetrix, quo fata uocas, aut quid petis istis ? |
Dissipe mes craintes, et permets que la prière d'une mère ait ce pouvoir : nulle traversée ne doit briser ces nefs, nulle tempête ne doit les perdre ; le fait d'être nées sur ma montagne doit leur être salutaire. » Son fils, qui fait tourner les astres du monde, lui répond : « Mère, où veux-tu amener le destin ? Que veux-tu pour ces arbres ? |
9, 90 |
Mortaline manu factae immortale carinae fas habeant certusque incerta pericula lustret Aeneas ? Cui tanta deo permissa potestas ? Immo ubi defunctae finem portusque tenebunt Ausonios olim, quaecumque euaserit undis |
Des nefs, dues à des mains mortelles, auraient le privilège de l'immortalité ? Énée traverserait en toute quiétude des périls inquiétants ? Quel dieu jamais a bénéficié d'un si grand pouvoir ? Bien plus, quand, leur tâche accomplie, elles seront parvenues aux ports d'Ausonie, à toutes celles qui auront échappé aux flots |
9, 95 |
Dardaniumque ducem Laurentia uexerit arua, mortalem eripiam formam magnique iubebo aequoris esse deas, qualis Nereia Doto et Galatea secant spumantem pectore pontum. » Dixerat idque ratum Stygii per flumina fratris, |
et transporté le chef dardanien jusqu'aux champs des Laurentes, j'enlèverai leur forme mortelle, et elles deviendront sur mon ordre déesses de la vaste mer, comme les Néréides, Doto et Galatée, qui fendent de leur buste l'écume des flots ». Il avait parlé, et, jurant par le cours du Styx son frère, |
9, 100 |
per pice torrentis atraque uoragine ripas adnuit et totum nutu tremefecit Olympum.
Ergo aderat promissa dies et tempora Parcae debita complerant, cum Turni iniuria Matrem admonuit ratibus sacris depellere taedas. |
et par ses rives brûlantes de noirs tourbillons de poix, il fit un signe de tête, et ce geste fit trembler tout l'Olympe.
Or le jour promis était là et accomplis les temps impartis par les Parques, quand l'outrage de Turnus avertit la Mère des dieux qu'il fallait éloigner les torches des nefs sacrées. |
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Hic primum noua lux oculis offulsit et ingens uisus ab Aurora caelum transcurrere nimbus Idaeique chori ; tum uox horrenda per auras excidit et Troum Rutulorumque agmina complet : « Ne trepidate meas, Teucri, defendere nauis |
Tout d'abord, une lumière inconnue brilla aux yeux de tous, on vit un nuage énorme parti de l'Orient et traversant le ciel et les choeurs de l'Ida ; une voix terrible retentit dans les airs, emplissant toutes les oreilles dans les rangs Troyens et Rutules : « Troyens, ne vous empressez pas de défendre mes navires, |
9, 110 |
neue armate manus : maria ante exurere Turno quam sacras dabitur pinus. Vos ite solutae, ite deae pelagi : genetrix iubet. » Et sua quaeque continuo puppes abrumpunt uincula ripis delphinumque modo demersis aequora rostris |
et n'armez point vos bras ; Turnus pourra mettre feu à la mer plus tôt qu'incendier ces pins sacrés. Vous, déesses marines, partez, vos liens sont détachés ; c'est votre Mère qui l'ordonne ». Aussitôt, toutes les poupes ancrées au rivage rompent les amarres et, telles des dauphins, enfonçant leurs rostres dans les flots, |
9, 115 |
ima petunt. Hinc uirgineae mirabile monstrum quot prius aeratae steterant ad litora prorae reddunt se totidem facies pontoque feruntur. |
elles gagnent les profondeurs. Alors, prodige extraordinaire ! , [en nombre égal à celui des proues d'airain autrefois sur le rivage,] des figures de jeunes filles reparaissent et sont emportées sur la mer. |
9, 120 |
Veillée de siège au camp de Turnus (9, 123-167)
Turnus considère ce miracle qui provoque l'affolement général comme un signe défavorable aux Troyens et ne fait que redoubler d'audace, de détermination, de confiance en son propre destin. (9, 123-145)
Le Rutule exhalté encourage ses hommes et prend des dispositions pour l'assaut fixé au lendemain. En attendant, les assaillants passent dans leur camp une nuit de détente à jouer, à boire et à dormir. (9, 146-167)
Obstipuere animis Rutuli, conterritus ipse turbatis Messapus equis, cunctatur et amnis |
Les Rutules sont frappés de stupeur, Messapus même est effrayé et ses chevaux affolés ; le fleuve Tiberinus lui aussi hésite ; |
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rauca sonans reuocatque pedem Tiberinus ab alto. At non audaci Turno fiducia cessit ; ultro animos tollit dictis atque increpat ultro : « Troianos haec monstra petunt, his Iuppiter ipse auxilium solitum eripuit, non tela neque ignes |
grondant de sa voix rauque, il reflue, loin du large. Mais Turnus n'a rien perdu de son audacieuse assurance ; bien plus, il ranime les courages et même invective ses hommes : « Ces prodiges concernent les Troyens ; Jupiter lui-même leur a retiré leur recours familier, les bateaux qui n'ont attendu |
9, 125 |
exspectans Rutulos. Ergo maria inuia Teucris nec spes ulla fugae : rerum pars altera adempta est. Terra autem in nostris manibus, tot milia gentes arma ferunt Italae. Nil me fatalia terrent, siqua Phryges prae se iactant, responsa deorum : |
ni les traits ni les feux rutules. Ainsi, les mers sont fermées aux Teucères, et pour eux nul espoir de fuite : une moitié de l'univers leur a été enlevée. La terre, elle, est entre nos mains : les peuples d'Italie apportent tant de miliers d'armes ! Je ne redoute point les arrêts du destin, même si les Phrygiens se prévalent de réponses divines ; |
9, 130 |
sat fatis Venerique datum, tetigere quod arua fertilis Ausoniae Troes. Sunt et mea contra fata mihi, ferro sceleratam exscindere gentem, coniuge praerepta : nec solos tangit Atridas iste dolor solisque licet capere arma Mycenis. |
les destins et Vénus déjà ont eu leur part, puisque les Troyens ont atteint les riches terres de l'Ausonie. À moi sont réservés des destins tout autres : anéantir par le fer une nation criminelle qui m'a arraché une épouse ; les Atrides ne sont pas les seuls à connaître cette douleur et Mycènes la seule libre de prendre les armes. |
9, 135 |
Sed periisse semel satis est : peccare fuisset ante satis penitus modo non genus omne perosos femineum. Quibus haec medii fiducia ualli fossarumque morae, leti discrimina parua, dant animos. At non uiderunt moenia Troiae |
Mais il suffit qu'ils aient péri une fois. Il leur aurait suffi de commettre cette première faute, pourvu qu'ils aient profondément abhorré presque toute la race féminine. Cette confiance en un mur qui nous sépare, ces retards qu'ils attendent des fossés, maigres séparations d'avec la mort, tout cela ranime leur courage. Pourtant, n'ont-ils pas vu se consumer |
9, 140 |
Neptuni fabricata manu considere in ignis ?
Sed uos, o lecti, ferro qui scindere uallum apparat et mecum inuadit trepidantia castra.' Non armis mihi Volcani, non mille carinis est opus in Teucros ; addant se protinus omnes |
dans les flammes les murs de Troie, faits de la main de Neptune ?
Mais, qui d'entre vous, compagnons d'élite, est prêt, le fer à la main, à arracher cette palissade et à envahir avec moi leur camp terrorisé ? Non, je n'ai pas besoin des armes de Vulcain, ni de mille vaisseaux pour attaquer les Troyens. Que tous les Étrusques se les allient sur le champ, |
9, 145 |
Etrusci socios, tenebras et inertia furta Palladii caesis summae custodibus arcis ne timeant, nec equi caeca condemur in aluo : luce palam certum est igni circumdare muros. Haud sibi cum Danais rem faxo et pube Pelasga |
ils n'auront à craindre ni les ténèbres, ni le vol honteux du Palladium, après le massacre des gardiens de la forteresse ; nous ne nous cacherons pas dans le ventre aveugle d'un cheval : leurs murs, c'est certain, ouvertement, en plein jour seront entourés de feu, Je les forcerai à reconnaître qu'ils n'ont pas affaire à des Grecs |
9, 150 |
esse ferant, decumum quos distulit Hector in annum. Nunc adeo, melior quoniam pars acta diei, quod superest, laeti bene gestis corpora rebus procurate, uiri, et pugnam sperate parari. »
Interea uigilum excubiis obsidere portas |
ni à une armée pélasge, qu'Hector tint en échec pendant dix années. Maintenant donc, ô guerriers, contents des exploits accomplis, la meilleure partie du jour étant passée, consacrez ce qu'il en reste, à vous reposer, et attendez-vous au combat qui se prépare ».
Cependant, on charge Messapus de poster des vigiles aux portes, |
9, 155 |
cura datur Messapo et moenia cingere flammis. Bis septem Rutuli, muros qui milite seruent, delecti ; ast illos centeni quemque sequuntur purpurei cristis iuuenes auroque corusci. Discurrunt uariantque uices fusique per herbam |
et d'entourer tout le retranchement de feux de bivouac. Quatorze Rutules sont désignés pour garder les murs avec leurs hommes, chacun d'eux a sous ses ordres une centaine de jeunes gens, parés d'aigrettes de pourpre et tout rutilants d'or. Ils courent en tous sens et à tour de rôle assurent les gardes ; |
9, 160 |
indulgent uino et uertunt crateras aenos. Conlucent ignes, noctem custodia ducit insomnem ludo. |
étendus sur le gazon, ils se complaisent à boire du vin, et retournent les cratères de bronze. Les feux brillent partout et les gardes passent à jouer une nuit sans sommeil. |
9, 165 |
Notes (9, 1-167)
ces événements (9, 1). Les événements racontés dans le livre huit, à savoir la visite d'Énée à Pallantée, puis son départ vers le camp étrusque à Caeré / Agylla, où Vénus viendra lui remettre l'armure fabriquée à son intention par Vulcain.
Iris, fille de Thaumas (9, 2 et 5). Iris, dont il a déjà été question en 4, 694 et 4, 700, ainsi qu'en 5, 606, était, un peu à la manière d'Hermès, une messagère, chargée de porter aux hommes les messages des dieux. Elle est symbolisée par l'arc-en-ciel, qui sert de liaison entre la Terre et le Ciel (cfr 9, 15). On la trouve souvent au service de Zeus et surtout d'Héra, dont elle apparaît presque comme la servante. Dans la mythologie, elle est la fille d'Électre et de Thaumas, ce dernier étant l'un des fils de Pontos (la Mer) et de Gaia (la Terre). Pour en revenir à l'intervention d'Iris chez Virgile, on pourrait y voir une influence homérique, lorsque dans l'Iliade, 18, 165-203, également sur ordre de Junon, Iris vient trouver Achille et le presse de s'armer.
Pilumnus (9, 4). Fils de Faunus, et donc bisaïeul de Turnus, Pilumnus a déjà été présenté en 7, 372 et sera mentionné encore plus loin, notamment en 10, 76 et en 12, 83. C'était une divinité romaine assez obscure : il passe pour avoir inventé le pilon à broyer le grain (pilum, d'où son nom), et, avec d'autres divinités secondaires, il est censé protéger le nouveau-né et sa mère contre les attaques de Silvain, en battant le seuil avec son pilon. Virgile en a fait un roi mythique de l'Italie. On ne sait pas pourquoi Turnus était dans le bois sacré de son aïeul, qu'il est d'ailleurs illusoire de vouloir identifier. Peut-être y attendait-il une manifestation divine ? On songera à Latinus se retirant, au début du chant 7, dans le lucus de son père Faunus pour y attendre ses avis (7, 81-101).
Palatin (9, 9). C'est la visite d'Énée à Pallantée, auprès d'Évandre.
Les cités de Corythus (9, 10) Sur Corythus et l'importance que prend dans l'Énéide la modification apportée par Virgile à la généalogie de Dardanus, voir 7, 209. L'expression « les cités de Corythus » désigne l'Étrurie. On sait (cfr 8, 597ss) qu'Énée est parti prendre le commandement d'une puissante armée étrusque réunie près de Caeré.
Lydiens (9, 11). Une tradition ancienne voulait que les Étrusques soient un peuple originaire de Lydie, venu s'installer en Italie. Cfr 8, 479, et la note à propos d'Agylla. La façon dont Iris désigne l'armée étrusque est dépréciative : ce sont des Lydiens, c'est-à-dire des orientaux efféminés. Ce sont aussi des paysans.
Je vois le ciel etc... (9, 20ss). Comme l'explique J. Perret (Virgile. Énéide, III, 1980, p. 172), il s'agit d'un prodige redoutable recensé par les Romains et bien décrit dans les ouvrages spécialisés. D'après Servius, le désordre des étoiles le rendait plus inquiétant encore. « À l'heure même, écrit J. Perret, où Énée reçoit de sa mère un signe éclatant de la faveur divine (8, 533), c'est un univers disloqué, chaotique qui s'ouvre au-dessus de la tête de son adversaire. De surcroît, le poète nous invite à constater l'égarement de Turnus, capable de voir dans ce ciel crevassé un encouragement pour lui. Il commettra un contre-sens analogue sur ce que signifie la métamorphose miraculeuse des vaisseaux troyens (9, 126-133). »
Messapus (9, 27). Un des chefs importants de l'armée des Italiens (cfr 7, 691-695, fils de Neptune. On le retrouve dans les livres 7 à 12 (cfr par exemple 8, 6 ; 9, 124, 160, 351, 365, 458, 523 ; 10, 354 et 749 ; 11, 429, 464, 518, 520, 603 ; 12, 128, 289, 294, 488, 550, 661).
Les fils de Tyrrhus (9, 27). Pour ce Tyrrhus, maître du troupeau de Latinus, et pour ses fils, cfr 7, 484-486.
Il va et vient etc... (9, 29). Ce vers, répété de 7, 784, n'appartient pas aux meilleurs manuscrits.
Caïcus (9, 35). Troyen qui, en 1, 183, commandait un des bateaux pris dans la tempête. C'est aussi le nom d'un fleuve de Mysie (Cicéron, Pro Flacco, 72). Virgile est coutumier de ce type de dénomination.
devant la ville (9, 48). En fait, le camp troyen n'est pas une véritable ville. Mais dans tout le livre 9, Virgile entretiendra l'ambiguïté. Ainsi le uallum (simple retranchement de bois) sera parfois présenté comme les murailles d'une ville. Le souvenir du siège de Troie n'est pas absent du récit.
cheval thrace (9, 49). En Grèce, dès l'époque archaïque, la Thrace était réputée pour ses chevaux. En 5, 565-566, lors du carrousel troyen, le jeune Priam monte un cheval du même type que celui de Turnus.
le début du combat (9, 53). Geste symbolique de défi, mais qui évoque celui du pater patratus des Féciaux qui déclarait la guerre en lançant un javelot sur le territoire ennemi (Tite-Live, 1, 32, 12-14).
par des clameurs (9, 54). Les manuscrits hésitent dans ce vers entre clamore et clamorem. La traduction proposée ici correspond à la leçon clamore.
tel un loup (9, 59-66). Cfr Iliade, 11, 548 ; 12, 299-308, ainsi que Odyssée, 6, 130-136 pour des comparaisons avec des lions affamés.
fleuve (9, 70). Il s'agit du Tibre.
foyers allumés (9, 75-76). On a donc pris des brandons enflammés dans les foyers domestiques ou peut-être même sur les autels des dieux.
Bérécyntienne (9, 80-83). Le Bérécynte était l'un des sommets de l'Ida phrygien. C'est là qu'était adorée Cybèle, d'où son épiclèse de Bérécyntienne. Voir aussi plus loin, 9, 618n. L'intérêt d'Auguste pour cette divinité (la Grande Mère des Dieux de l'Ida ; cfr 9, 109n) pourrait expliquer sa présence dans l'Énéide (cfr 2, 788-789, à propos de Créuse ; 7, 139, où Cybèle figure parmi les divinités invoquées par Énée).
mon fils (9, 83). En fait, Jupiter était fils de Saturne et de Rhéa, laquelle a souvent été confondue avec Cybèle. Cette dernière n'était-elle pas d'ailleurs la Grande Mère des Dieux ?
qui as dompté l'Olympe (9, 84). Allusion à la victoire de Jupiter sur les Titans et les Géants révoltés contre lui.
forêt de pins (9, 85). Le pin était l'arbre de Cybèle. C'est sous un pin qu'Attis se serait émasculé, et le sang qui avait coulé de sa blessure aurait donné naissance à des violettes tout autour de l'arbre. À l'époque impériale, dans le culte romain de Cybèle et d'Attis, le pin jouait aussi un grand rôle.
jeune Dardanien (9, 88). Il s'agit d'Énée, descendant lointain de Dardanus (par Erichtonius, Tros, Assaracus, Capys et Anchise).
qui fait tourner les astres (9, 93). Ce vers met en avant un aspect important de la puissance de Jupiter (cfr 4, 269), qui va toutefois paraître limitée dans les vers suivants. Les dieux eux-mêmes, on le sait, sont soumis au destin.
celles qui auront échappé aux flots (9, 99). Au départ de Troie, les navires étaient vingt ; quinze seulement parvinrent au Latium (cfr 1, 113-123 et 1, 584 ss pour la perte d'un vaisseau ; 5, 699 pour la perte de quatre autres). Énée en ayant pris deux pour aller chez Évandre, les navires devenus nymphes seraient donc au nombre de treize.
Doto et Galatée (9, 103). Deux filles de Nérée, l'une, Doto, est chez Homère une suivante de Thétis ; l'autre, Galatée, fut aimée par le cyclope Polyphème.
jurant par le fleuve (9, 104). Pluton, frère de Jupiter, régnait sur les Enfers, où coulait le Styx. Le serment par le Styx était sacré, même pour les dieux (cfr 6, 323-324). Le motif du signe de tête de Jupiter, qui fait trembler l'Olympe (9, 106), est inspiré d'Homère (Iliade, 1, 528-530) et souvent repris (Catulle, 64, 204-206 ; Horace, Odes, 3, 1, 8).
les temps impartis par les Parques (9, 105). Les Parques sont les filles de la Nuit, chargées de filer le destin des mortels. Dans les représentations, Clotho tient la quenouille, Lachésis porte un globe ou des tablettes, et Atropos avec des ciseaux coupe le fil de la vie.
l'outrage de Turnus (9, 108). Turnus, en ordonnant d'incendier les navires, enfreignait le droit en offensant Cybèle (même s'il ne connaissait pas la promesse de Zeus !). À moins d'interpréter, sur la suggestion de Servius, iniuria comme synonyme de uiolentia.
la Mère des dieux (9, 109). C'est Cybèle, la Bérécyntienne, la Grande Mère des Dieux de l'Ida (cfr supra 9, 80-83n).
Les choeurs de l'Ida (9, 112). Ce sont les Corybantes (cfr 3, 111 : « l'airain des Corybantes »), qui formaient la suite de Cybèle ; ils se déplacent sur le nuage venu de l'Orient, accompagnant la déesse qui vient au secours des navires.
Rutules (9, 113). Le terme, comme c'est souvent le cas, désigne l'ensemble des forces des Latins.
prodige extraordinaire (9, 120). La transformation de navires en nymphes maritimes n'est pas courante dans la littérature ancienne. Homère avait bien conféré aux vaisseaux des Phéaciens, qui n'ont ni gouvernail ni pilote, une intelligence humaine et le don de connaître tous les pays du monde (Odyssée, 8, 557). De son côté, Apollonius de Rhodes (Argonautiques, 1, 525) avait prêté au navire Argo une voix humaine. [M. Rat, Virgile, 1965, p. 385, n. 2420]. Mais ce n'est pas du tout la même chose. Le récit de Virgile sera repris par Ovide, Mét., 14, 527-565.
en nombre égal (9, 121). Ce vers est généralement considéré comme interpolé.
Messapus (9, 123). Cfr supra 9, 27. En 7, 691, il était présenté comme fils de Neptune. Malgré son habitude de la mer, il est effrayé par ce qu'il voit. Au même passage du chant 7 (7, 691), il apparaissait comme « dompteur de chevaux » ; rien d'étonnant dès lors qu'il soit ici entouré de chevaux, lesquels sont affolés aussi.
Tibérinus (9, 124). Cfr plus haut 7, 25-36 et 8, 31-65. Le fleuve Tibre a des réactions qui s'apparentent à des prodiges : cfr en 8, 86-89, la manière dont ses eaux facilitent le voyage d'Énée vers Pallantée.
leur recours familier (9, 128-129). C'est-à-dire leurs bateaux, qui leur ont été d'un si grand secours depuis leur départ de Troie. En fait, ici aussi, comme c'était déjà le cas en 9, 20n, Turnus se trompe lourdement sur le sens du prodige. Il croit que la disparition des bateaux des Troyens représente pour ses ennemis le début de la fin, puisque dorénavant ils ne pourront plus s'échapper. Les Rutules allaient détruire les bateaux, qui sont partis sans même attendre leurs traits et leurs incendies.
Désormais les mers (9, 130-133). Ces vers expriment un dilemme qui sera repris en 10, 377-379 par Pallas.
Une moitié de l'univers (131). Les Troyens ne peuvent fuir par mer, puisqu'ils n'ont plus de navires, ni par terre, puisque les Latins maîtrisent le terrain.
Je ne redoute point les arrêts du destin (9, 133). Turnus répond à une objection implicite, qui serait « Le destin semble favorable aux Troyens ». Ce n'est pas la première fois queTurnus se montre relativement désinvolte. Cfr par exemple son attitude face à la prêtresse Calibé, alias Allecto, en 7, 435-444.
les réponses divines (9, 134). Les réponses des dieux, dont pourraient se targuer les Troyens, sont tous les oracles, évoqués à diverses reprises, et notamment par exemple en 7, 239-242, quand Ilionée dit avec assurance à Latinus que ce sont les destins qui ont voulu le retour des Troyens sur la terre de leur ancêtre Dardanus.
mes destins tout autres (9, 136). Turnus songe probablement ici aux directives d'Allecto (7, 421-434) et au message délivré par Iris, un peu plus haut, en 9, 6-13.
m'a arraché une épouse... Atrides... Mycènes... (9, 137-139). Il s'agit de Lavinia, qui lui avait été promise et que Latinus envisage maintenant de donner en mariage à Énée. Manifestement Turnus la considérait déjà comme son épouse. Un rapprochement est établi avec Hélène, l'épouse de Ménélas, un des Atrides, dont le rapt provoqua l'entrée en guerre des Grecs contre les Troyens, sous la direction d'Agamemnon, frère de Ménélas, roi de Mycènes. Pour Turnus, le fait d'avoir été dépossédé de Lavinia justifie la guerre qu'il veut mener contre les Troyens, tout comme le rapt d'Hélène justifiait la guerre de Troie.
Cette première faute (9, 140). La première faute des Troyens, c'est-à-dire le rapt d'Hélène, causa une première fois leur perte ; s'ils avaient maudit à jamais les femmes, ils n'auraient pas eu de prétention sur Lavinia et n'auraient pas été entraînés dans cette guerre italienne qui, dans l'esprit de Turnus, va une nouvelle fois causer leur perte.
Ils font confiance etc... (9, 142-145). Argument a fortiori : les Troyens se croient forts, derrière leur retranchement (un simple uallum). Ils semblent avoir oublié que les murailles de Troie se sont écroulées dans les flammes. Il s'agissait pourtant de véritables fortifications, qui en outre avaient été bâties par le père de Priam, Laomédon, assisté de Neptune et d'Apollon.
des armes de Vulcain, ni de mille vaisseaux (9, 148). Il s'agit des armes forgées par Vulcain pour Achille, à la demande de Thétis (Iliade, 19, 1-18), et non de celles forgées par Vulcain pour Énée, à la demande de Vénus (cfr 8, 608-625). Les mille vaisseaux désignent la flotte grecque qui a attaqué Troie sous les ordres d'Agamemnon.
Ils n'auront à craindre etc... (9, 150-153). Les Grecs, pour abattre Troie, ont eu recours à la ruse ; Turnus, lui, agira ouvertement. Allusion au vol du Palladium par Ulysse et Diomède qui eut lieu pendant la nuit (cfr le récit de Sinon chez Virgile en 2, 163-170). Turnus fait également allusion au cheval de Troie, dans lequel les Grecs s'étaient cachés.
pélasge (9, 155). Les textes antiques désignent sous le nom de Pélasges un groupe de populations mythiques qu'ils localisent dans plusieurs coins de la Grèce et de la mer Égée (cfr 8, 600 ). Le terme « pélasge » est ici utilisé dans le sens de « grec » (cfr aussi 1, 624 et 2, 83). Les Latins et les Rutules seront des ennemis bien plus redoutables que les Grecs, tenus en échec pendant dix ans par Hector, qui symbolise les Troyens.
Entre-temps, Messapus etc... (9, 159). Messapus a déjà été présenté plus haut dans le chant (9, 27 et 9, 123) comme le responsable de l'armée. C'est lui, ici, qui veille à la sécurité du camp des Rutules, c'est-à-dire en fait de tous les Latins (cfr plus haut, 9, 113n). Virgile imagine l'armée organisée en quatorze sections (deux fois sept, chiffre sacré pour les Anciens). Une telle division en quatorze ne correspond pas à ce que nous savons de l'armée romaine, mais la centurie (les cent hommes mentionnés ici) était une division de l'armée romaine. Cela dit, bien des gestes évoqués par Virgile ici et dans les vers suivants doivent correspondre à des réalités de la vie d'un camp militaire romain, entouré d'ennemis.
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