Bibliotheca Classica Selecta - Fastes d'Ovide (Introduction) - Livre 6 (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page précédente - Page suivante
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Les Matralia : origine, légendes et rites liés à Ino/Mater Matuta (6,469-568)
Après le lever du Dauphin, le 10 juin, les Matrones célèbrent, le 11 juin, la fête des Matralia en l'honneur de Mater Matuta. Ovide invoque l'aide de Bacchus, pour comprendre les particularités rituelles liées au culte de cette divinité qu'il assimile à Ino et à laquelle le roi Servius Tullius dédia un temple au Forum Boarium. (6,469-484)Ino, à la mort de sa soeur Sémélé, avait recueilli et nourri le bébé Dionysos. Son époux Athamas, rendu fou par Héra, avait tué un de leurs deux enfants, Léarque. Ino alors s'enfuit avec leur second fils Mélicerte et du haut d'un rocher se précipita dans les eaux de l'Isthme de Corinthe. La mère et l'enfant furent recueillis par les Néréides et parvinrent à l'embouchure du Tibre, abordant ainsi au royaume d'Évandre. Les Bacchantes latines, poussées par Héra, ayant cherché à lui arracher Mélicerte, Ino cria à l'aide, en invoquant les dieux du lieu. Hercule, l'hôte d'Évandre, vint la secourir et mit les Bacchantes en fuite. (6,485-526)
Ino fut accueillie en hôte par Carmenta, qui lui offrit de simples galettes, ce qui expliquerait l'offrande des galettes à la déesse lors des Matralia ; ensuite la prophétesse annonça à Ino et Mélicerte la fin de leurs épreuves, leur nouveau statut de divinités marines, et leurs nouveaux noms : Ino et Mélicerte seront respectivement Matuta et Portunus à Rome, Leucothée et Palémon en Grèce. (6,527-550)
Enfin, Ovide explique l'interdiction faite aux esclaves de participer aux Matralia, puis signale que Matuta ne doit pas être invoquée par une mère pour ses propres enfants, avant de mentionner, à cette même date du 11 juin, la commémoration de deux défaites romaines au cours de la guerre sociale. (6,551-568)
Mais dès que les ânons aux longues oreilles sont dépouillés de leurs violettes, |
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et que les meules dures écrasent les grains de Cérès, le matelot, du haut de sa poupe, dit : "Nous verrons le Dauphin, lorsque la nuit humide sera levée et aura chassé le jour ". Déjà, Tithon de Phrygie, tu te plains d'être délaissé par ton épouse et Lucifer le vigilant quitte les eaux de l'Orient. |
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Allez, braves mères (les Matralia sont votre fête), offrez à la déesse thébaine des galettes dorées ! Une place très fréquentée proche des ponts et du Grand Cirque, tient son nom de la statue de boeuf qui s'y trouve. C'est en lieu et à cette date, dit-on, que Servius, le sceptre à la main, |
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offrit à Mater Matuta un temple saint. Qui est cette déesse ? Pourquoi écarte-t-elle ses servantes du seuil du temple - car elle les écarte - et pourquoi exige-t-elle des gâteaux grillés ? Bacchus aux cheveux couronnés de lierre et de grappes, s'il est vrai que tu es de sa famille à elle, dirige l'oeuvre du poète ! |
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À cause d'une complaisance de Jupiter, Sémélé avait été foudroyée : Ino te recueille tout enfant et met tous ses soins et son zèle à te nourrir. Le coeur de Junon se gonfle de colère, parce qu'Ino élevait l'enfant arraché du sein d'une rivale : mais c'était le sang de sa soeur. Alors Athamas est pris de folie, victime d'une hallucination, |
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et toi, petit Léarque, tu tombes, frappé par la main de ton père. Sa mère Ino, affligée, avait mis au tombeau les restes de Léarque et accompli devant le pitoyable bûcher tous les devoirs voulus. Puis, telle qu'elle était, les cheveux arrachés en signe de deuil, elle s'élança et t'enleva de ton berceau, Mélicerte. |
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Serrée en un petit espace, battue de deux côtés par les eaux, une terre à elle seule refoule deux étendues marines. Ino éperdue y parvient, serrant son bébé dans ses bras, et du haut d'un rocher, elle s'élance avec lui dans l'abîme. Indemnes, les malheureux sont recueillis par Panope et la foule de ses soeurs, |
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qui en une douce glissade les emportent à travers leur royaume. Elle ne s'appelle pas encore Leucothée, ni l'enfant Palémon, quand ils touchent à l'embouchure du Tibre aux nombreux tourbillons. Il y avait un bois sacré, lié à Sémélé ou à Stimula, on ne sait ; selon la tradition, il fut habité par les Ménades d'Ausonie. |
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Ino leur demande quel peuple habite cette contrée. Elle apprend que ce sont des Arcadiens et qu'Évandre est leur roi. En dissimulant sa divinité, la Saturnienne insidieusement excite les Bacchantes du Latium, avec ces paroles mensongères : "Vous êtes des proies trop faciles, votre coeur est complètement abusé, |
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cette visiteuse ne vient pas en amie participer à nos choeurs ; elle cherche, en recourant à la ruse, à connaître nos rites sacrés ; mais elle possède un gage avec lequel nous pourrons la punir". Elle avait à peine fini de parler, que les Thyiades emplissent l'air de leurs hurlements, leurs cheveux répandus sur leurs épaules, |
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et, portant leurs mains sur Ino, luttent pour lui arracher l'enfant. Celle-ci invoque des dieux qu'elle ne connaît pas encore : "Dieux et occupants de ces lieux, secourez une mère en détresse !" Ses cris frappent les rochers tout proches de l'Aventin. Le héros de l'Oeta avait poussé ses vaches d'Ibérie près de la rive ; |
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il l'entend, et alerté presse le pas en direction de sa voix. À l'arrivée d'Hercule, celles qui à l'instant allaient lui faire violence tournèrent le dos, fuyant honteusement comme des femmelettes. "Que cherches-tu par ici, tante de Bacchus ?", dit-il, car il l'avait reconnue, "Toi et moi serions-nous par hasard persécutés par la même divinité ?" |
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Elle raconte une partie de son histoire, mais en présence de l'enfant, elle se garde de tout dire, honteuse de la folie qui l'a poussée au crime.
La Rumeur, véloce comme on sait, vole de ses ailes agitées, et ton nom, Ino, revient bien souvent sur ses lèvres. Tu entras, dit-on, dans la demeure rassurante de Carmenta, |
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où, accueillie en hôte, tu apaisas ta longue faim. Selon la tradition, la prêtresse de Tégée, de sa propre main, s'empressa de préparer des galettes, qu'elle fit cuire sur un feu allumé à la hâte. Lors des Matralia, de nos jours encore la déesse apprécie ces galettes. Un empressement rustique lui fut plus agréable qu'un art recherché. |
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"Maintenant ô prophétesse", dit Ino, "dévoile-moi le sort qui m'attend, si tu le peux ; ajoute cette faveur, je te prie, à ton hospitalité". Après un court délai, la prophétesse, visitée par les puissances célestes sent sa poitrine tout entière s'emplir de son dieu. En un instant, il eut été à peine possible de la reconnaître, |
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tant elle paraissait plus sainte et plus grande que peu auparavant. "Je t'annonce du bonheur ; réjouis-toi, Ino, tu es au bout de tes épreuves", dit-elle, "et assiste toujours ce peuple, lui assurant la prospérité ! Tu seras une divinité marine ; ton fils aussi appartiendra à la mer. Adoptez un autre nom, dans les eaux qui sont maintenant les vôtres ! |
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Leucothée dans les eaux grecques, tu seras appelée Matuta dans les nôtres ; la juridiction sur les ports appartiendra entièrement à ton fils : nous, nous l'appelons Portunus et dans sa langue, son nom sera Palémon. Allez, je vous en prie, soyez tous deux équitables pour notre contrée !" Ino avait acquiescé et engagé sa bonne foi ; leurs épreuves prirent fin, |
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leurs noms furent changés : l'un est un dieu, l'autre une déesse.
Vous demandez pourquoi elle interdit aux servantes l'accès de son sanctuaire : elle les hait, et je vais vous donner la raison de sa haine, si elle le permet. Une de tes servantes, fille de Cadmus, avait l'habitude de se soumettre aux étreintes répétées de ton époux. |
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Le méchant Athamas l'aimait en secret : par elle, il découvrit qu'on donnait aux agriculteurs des semences grillées. Ino sans doute nie avoir commis cet acte, mais la tradition le lui attribua : voilà pourquoi la classe des servantes est l'objet de sa haine. Cependant, une mère pieuse ne l'invoquera pas pour ses enfants : |
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personnellement elle paraît avoir été une mère peu heureuse. Vous lui confierez plus sagement les rejetons d'une autre mère : elle fut plus utile à Bacchus qu'à ses propres enfants. Rutulius, on rapporte que Matuta t'a dit : "Où cours-tu ? Le jour de ma fête, consul, tu tomberas sous l'ennemi Marse". |
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Ces paroles se réalisèrent, et le fleuve Tolénus empourpré roula des eaux mêlées de sang. Au cours de l'année suivante, à la même date, Didius fut abattu, donnant ainsi à l'ennemi des forces redoublées. |
Servius et la Fortune - Concorde : 11 juin (suite) (6,569-648)
Un temple à Fortuna, dédié le 11 juin au Forum Boarium par Servius Tullius, recèle une statue du roi dissimulée sous des toges. À son habitude, Ovide propose d'abord deux explications, qui ne semblent pas emporter son adhésion. Soit Fortuna, honteuse de la liaison qu'elle eut avec le roi, un simple mortel, veut dissimuler son effigie en la voilant ; soit, on aurait soustrait la statue aux regards, pour atténuer les manifestations de deuil du peuple affecté par la mort du roi. (6,569-584)Puis Ovide propose de cette coutume une troisième explication liée à la mort de Servius Tullius, dont le cadavre fut outragé par sa fille Tullia ; celle-ci avait même osé pénétrer dans le temple où la statue du roi se serait voilé la face, refusant de voir son abominable fille. Telle serait l'origine de l'interdiction de dévoiler cette statue. (6,585-624)
Ovide rappelle enfin que cette statue avait été sauvée lors d'un incendie du temple, parce que Servius Tullius, né miraculeusement de l'union d'une captive de la reine Tanaquil avec un membre viril apparu dans le foyer royal, n'était autre que le fils de Vulcain, le dieu du feu, qui manifesta sa paternité par l'apparition d'un prodige. (6,625-636)
Le même jour on commémore la dédicace d'un temple à Concorde, élevé par Livie, en témoignage de la concorde qui régnait entre elle et Auguste. Ce sanctuaire était voisin du Portique de Livie, sur l'ancien emplacement d'une vaste demeure léguée à Auguste. (6,637-648)
Fortuna, ce même jour, en ce même site, le même fondateur t'éleva un temple. |
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Mais qui est celui qui se cache sous ces toges superposées ? À l'évidence, c'est Servius ; mais sur la raison de cette dissimulation, les avis divergent, et le doute règne aussi dans mon esprit. La déesse hésite à reconnaître ses amours clandestines ; elle rougit, elle un être céleste, d'avoir partagé la couche d'un mortel. |
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En effet, elle a brûlé d'une passion irrépressible pour le roi, le seul homme à l'égard de qui elle ne se montra pas aveugle. Elle avait l'habitude d'entrer chez lui, la nuit, par une petite fenêtre : c'est de là que la porta Fenestella tient son nom. Elle a honte maintenant ; elle cache sous un voile les traits aimés, |
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et plusieurs toges recouvrent le visage du roi. Ou n'est-il pas plus vrai de dire que, après les funérailles de Tullius, le peuple était bouleversé par la mort du paisible vieillard ; que la douleur était sans mesure, et s'accroissait à la vue de l'image royale, jusqu'au moment où celle-ci fut dissimulée sous les toges ? |
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Il me faut chanter une troisième raison, sur un espace plus étendu mais je contiendrai mes chevaux, en les dirigeant. Tullia, qui avait contracté son mariage au prix d'un crime, avait l'habitude de stimuler son mari par ces paroles : "À quoi nous sert-il d'être pareils, coupables, toi du meurtre de ma soeur, |
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moi de celui de ton frère, si nous nous satisfaisons d'une vie honnête ? Mon époux et ta femme auraient dû rester en vie si nous n'étions pas prêts à une entreprise plus audacieuse. Je t'apporte en dot la tête et le trône de mon père ! Si tu es un homme, saisis les avantages stipulés par la dot ! |
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Le crime est affaire de roi : tue ton beau-père, deviens roi et trempe nos mains dans le sang paternel !" Enflammé par ces propos, de simple particulier qu'il était, il s'était installé sur le trône ; la foule stupéfaite se rue pour prendre les armes ; sang et carnage s'en suivent ; et le roi affaibli par l'âge est vaincu : |
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son gendre, le Superbe, tient le sceptre arraché à son beau-père. Massacré au pied de l'Esquilin, où se trouvait son palais, il s'affale, couvert de sang, sur le sol durci. Sa fille, avec l'intention d'entrer en voiture dans la demeure paternelle, s'avançait, hautaine et intrépide, à travers les rues. |
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Quand le cocher aperçut le cadavre, il fondit en larmes et s'arrêta ; elle s'en prit à lui en ces termes : "Vas-tu avancer ou attends-tu le prix amer de ta piété ? Fais passer les roues sur son visage, te dis-je, même si elles se dérobent !" Une preuve sûre de cet acte, c'est la rue du Crime qui tient son nom de cette femme ; |
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et cet acte reste à jamais frappé d'un blâme indélébile. Et pourtant, après cela, elle osa pénétrer dans le temple, oeuvre de son père. Je dirai ce qui s'est passé : c'est surprenant certes, mais pourtant authentique. Il y avait, installée sur un trône, la statue représentant Tullius ; elle se mit, raconte-t-on, la main devant ses yeux |
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et une voix se fit entendre : "Cachez mon visage, afin qu'il ne voie pas la face criminelle de ma fille !" On apporte un vêtement pour le recouvrir ; Fortuna interdit de l'enlever et du fond de son temple, elle prend elle-même la parole : "Le jour où Servius apparaîtra, le visage découvert, |
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sera le premier qui verra abandonner toute pudeur". Évitez, matrones, de toucher les vêtements frappés d'interdit ; il vous suffit de réciter à voix haute les prières rituelles ; laissez toujours couverte d'un manteau romain la tête de celui qui fut le septième roi dans notre ville ! |
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Ce temple brûla un jour : mais la statue fut épargnée par ce feu ; Mulciber en personne avait apporté son aide à son fils. En effet, Tullius avait pour père Vulcain, et pour mère Ocrisie, une habitante de Corniculum, d'une beauté très remarquable. Après un sacrifice accompli selon l'usage, Tanaquil, qu'elle accompagnait, |
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lui ordonna de verser du vin dans le foyer décoré ; Là, parmi les cendres, se dressa, ou parut se dresser la forme d'un phallus, réalité ou apparence ? Plutôt réalité. Sur ordre de la reine, la captive s'assied sur le foyer : ainsi conçu, Servius tient du ciel la semence de sa lignée. |
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Son père le lui signifia lorsqu'il lui entoura la tête d'un éclair brillant et fit scintiller dans ses cheveux une aigrette de feu.
À toi aussi, Concorde, Livie a dédié un temple magnifique en témoignage de la concorde qu'elle assura à son époux aimé. Sachez-le pourtant, générations à venir : là où se trouve actuellement |
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le portique de Livie, était construite une immense demeure ; cette maison a elle seule était comme une ville et occupait plus d'espace que n'en occupent de nombreuses cités à l'intérieur de leurs murailles. Elle fut complètement rasée, non sur une accusation d'aspiration au trône, mais parce que son luxe même paraissait nocif. |
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César consentit à démolir de fond en comble ces constructions si imposantes et à perdre tant de richesses dont il était l'héritier : C'est ainsi qu'on exerce la censure et qu'on donne des exemples, lorsque, étant juge, on fait soi-même ce que l'on recommande aux autres. |
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ânons... meules (6,469-470). Les Vestalia, qui étaient aussi un jour de fête pour les ânes et les meuniers (6, 311 et 6, 348) sont donc terminés.Dauphin (6,471). Lever de la constellation du Dauphin, datée ici du 10 juin, et du 17 juin en 6, 720, où on la retrouvera. Il a été question de cette constellation en 1, 457-458, et surtout en 2, 79-118 (récit de son catastérisme).
Tithon... Lucifer (6,473-474). La lourde périphrase indique qu'on passe au 11 juin. Tithon (de Phrygie, c'est-à-dire ici de Troie), l'époux de l'Aurore, était le fils de Laomédon et le frère de Priam (cfr 1, 461). Quant à Lucifer, c'est Vénus, l'étoile du matin (cfr 2, 149 et 5, 548).
Matralia (6,475). Les Matralia du 11 juin étaient consacrés à Mater Matuta, la déesse de l'aurore. Son temple, comme le précisera Ovide plus loin, était situé au Forum Boarium. Trois données rituelles sont citées par le poète : on offre des galettes à la déesse (6, 476 et 482 ; 6, 533) ; on écarte les servantes du sanctuaire (6, 481-482) ; les mères la prient non pour leurs propres enfants, mais pour les enfants d'une autre, en fait de leur sur (6, 559-562). G. Dumézil a expliqué les deux derniers rites, les seuls réellement significatifs, par la comparaison indo-européenne, en faisant intervenir un mythe védique. En substance l'Aurore est la sur de la Nuit dont l'enfant est le Soleil. L'Aurore s'occupe du Soleil, l'enfant de sa sur, qu'elle fait apparaître, après avoir chassé les Ténèbres. Les Romains qui avaient conservé certaines données rituelles anciennes avaient totalement oublié le mythe qui, à l'origine, devait les sous-tendre. Pour trouver des explications, ils ont pris dans la mythologie grecque la légende de Ino-Leucothée, qui offrait une situation homologue. Mais cet habillage grec est artificiel.
déesse thébaine (6,476). C'est Ino qui est ici désignée par cette périphrase : elle est en effet la fille du roi Cadmos de Thèbes. Le nom Ino n'apparaîtra qu'en 6, 486.
statue de boeuf (6,478). Il s'agit du Forum Boarium ("Marché aux Bufs"), situé sur la rive gauche du Tibre (il y avait là plusieurs ponts) entre le Vélabre et le Grand Cirque. Pline (Histoire naturelle, 34, 10) y signale un grand buf en bronze, uvre de Myron. Ovide renverse le rapport entre la statue et la place : le marché, et son nom ont amené la statue.
Servius (6,479). La tradition en attribuait la fondation à Servius Tullius, le sixième roi de Rome, et l'archéologie date du VIe siècle a.C. les plus anciens vestiges découverts. Servius passe pour un grand fondateur de temples. Il sera fait mention en 6, 569-570 d'un autre temple célèbre dédié par le même roi à Fortuna.
Bacchus (6,483). La suite du texte fera comprendre pourquoi c'est à Bacchus que s'adresse ici à Ovide pour avoir des explications. Bacchus est en effet le fils de Sémélé, et celle-ci est la soeur d'Ino, à laquelle sera identifiée la Mater Matuta romaine. Le lierre (1, 393 ; 3, 767) et les pampres sont les attributs privilégiés de Bacchus.
Sémélé (6,485). Fille de Cadmos, roi de Thèbes, et d'Harmonie, elle fut aimée de Jupiter, et conçut de lui un enfant ; mais elle fut victime de la jalousie de Héra-Junon, qui la persuada perfidement d'exiger de son amant de se montrer à elle dans toute sa puissance. S'étant engagé par le Styx à accomplir un de ses voeux, Zeus ne put se dérober et Sémélé fut aussitôt foudroyée. Il arracha cependant le fétus du futur Dionysos-Bacchus, qu'il cousit dans sa cuisse pour que s'achève la gestation. Son histoire est rapportée plus en détail dans Métamorphoses, 3, 253-315, avec toutefois quelques différences. Dans les Métamorphoses, Ino recueille le petit Bacchus pour le confier aux nymphes de Nysa ; ici Ino met tous ses soins et son zèle à le nourrir. Sur Sémélé et la naissance de Bacchus, voir aussi Fastes, 3, 503-504 et 3, 715-719.
se gonfle de colère (6,487). Héra-Junon s'est déjà attaquée à Sémélé ; elle va dans un deuxième temps attaquer les proches de Sémélé et d'Ino, en l'occurrence Athamas.
Athamas... Léarque... Mélicerte (6,489-494). Athamas avait d'abord épousé Néphélé, qui lui avait donné Phrixos et Hellé (voir 3, 852 ; 4, 715 et 4, 903). Après avoir répudié Néphélé, il épouse Ino dont il eut deux enfants Léarque et Mélicerte. Frappé de folie par Héra, Athamas tue Léarque. Ino s'enfuit avec leur autre fils, Mélicerte.
une terre (6,496). Il s'agit de l'Isthme de Corinthe.
dans l'abîme (6,498). Elle se jette dans la mer avec son fils.
Panope (6,499). Une des 100 Néréides, filles de Nérée et Doris, divinités marines.
Leucothée (6,501). Leucothée ("la Déesse Blanche" en grec) est une divinité grecque, vénérée, semble-t-il, dans l'ensemble de la Grèce (par ex. Délos, Chéronée, Téos). Ses fêtes sont liées à des pratiques d'initiation et à des rites d'inversion sociale, dont les caractéristiques exactes nous échappent. Si elle a une existence propre, elle apparaît très vite associée ou identifiée à Ino. C'est déjà le cas chez Homère, Odyssée, 5, 333-335 : "Mais Ino l'aperçut [= Ulysse], la fille de Cadmos aux chevilles bien prise, qui, jadis simple femme et douée de la voix, devint au fond des mers Leucothéa et tient son rang parmi les dieux" (trad. V. Bérard). On voit donc qu'Ovide a tort d'affirmer qu'Ino n'était pas encore Leucothée lorsqu'elle arriva en Italie. La mythologie grecque connaît Ino-Leucothée.
Palémon (6,501). Palémon est un nom porté par plusieurs personnages, mais le plus célèbre est le fils de Ino-Leucothée. Son histoire a déjà été évoquée plus haut. Avant d'être divinisé, il s'appelait Mélicerte et c'était l'enfant d'Athamas et d'Ino. Après le meurtre de Léarque par Athamas, Ino s'était enfuie avec lui et s'était suicidée avec lui. Des honneurs divins lui furent accordés : sous le nom de Palémon, il devint un dieu marin à l'origine des Jeux Isthmiques et il protégea les navigateurs. Ainsi chez Euripide (Iphigénie en Tauride, 270-271), un personnage s'adresse à lui en ces termes : "O fils de Leucothée-la-marine, Sauveur des nefs, ô monseigneur Palémon, sois propice !" (trad. L. Parmentier, H. Grégoire). Ainsi, Mélicerte lui aussi était déjà devenu Palémon dans la mythologie grecque, bien avant d'arriver à Rome. En réalité, les Romains identifieront Palémon-Mélicerte à leur dieu Portunus (6, 547), tout comme ils identifieront Ino-Leucothée à leur Mater Matuta.
un bois sacré (6,503-504). L'épigraphie (C.I.L., VI, 9897) conserve le souvenir de l'existence à Rome d'un lucus Semeles, proche du Tibre (non loin de l'Aventin, dira Ovide en 6, 518). Il joue un rôle dans le scandale des Bacchanales en 186 a.C., où il porte dans le récit de Tite-Live (39, 12, 4) le nom de lucus Stimulae.
Stimula (6,503). Stimula pourrait être une vieille divinité italique, qui aurait été rapprochée de Sémélé, à cause de la ressemblance de leurs noms. Stimula, si cette divinité existe, pourrait se traduire en français par "celle qui aiguillonne" ; ce serait en somme une sorte d'instigatrice du délire bachique. Mais il pourrait s'agir aussi d'une simple "déformation populaire de Sémélé" (A. Ernout).
Ménades d'Ausonie (6,504). Les "Ménades d'Ausonie" sont les Bacchantes d'Italie. "En tant que mère de Bacchus, Sémélé a été associée aux mystères dionysiaques, au même titre que les Ménades [ ] qui sont les compagnes habituelles du thiase bacchique: cf. Fastes, 4, 458)" (R. Schilling).
Arcadiens... Évandre (6,505-506). Sur les Arcadiens et leur installation en Italie sous la conduite d'Évandre, voir notamment le long récit d'Ovide à propos des Carmentalia (1, 469-542).
Saturnienne (6,507). Héra (Junon) joue ici le rôle d'instigatrice que lui a donné l'Énéide, par exemple au chant VII, dans ses interventions avec Allecto (7, 323-340) et lors de l'ouverture des Portes de la Guerre (7, 572-622). On songera aux mères du Latium et à leurs churs bachiques (7, 373-405).
un gage (6,512). Son fils, Mélicerte, alias Palémon.
Thy(i)ades (6,513). Ou Bacchantes, faisant partie des choeurs de Dionysos. Le terme est également utilisé par Virgile (Énéide, 4, 302).
héros de l'Oeta (6,519). Hercule (Héraclès) va venir au secours d'Ino. La périphrase "rappelle qu'Hercule fera brûler sur le bûcher de l'Oeta sa dépouille mortelle, afin de devenir dieu" (H. Le Bonniec). L'Oeta est une montagne au sud de la Thessalie.
ses vaches d'Ibérie (6,519). Sous le règne d'Évandre, Hercule, qui ramenait d'Espagne (Ibérie) le troupeau de Géryon, était passé par l'Italie sur le site de la future Rome, où il avait eu affaire au brigand Cacus (voir 1, 543-586 et 5, 643-650).
tante de Bacchus (6,523). Ino étant la soeur de Sémélé, Dionysos-Bacchus était donc son neveu (voir 6, 483).
la même divinité (6,524). Héra-Junon poursuivait aussi de son hostilité Héraclès-Hercule, qui était né des amours de Zeus et d'Alcmène. Pour ne citer que deux exemples, on rappellera d'abord qu'Héra avait envoyé deux serpents contre Héraclès et son frère, qui venaient de naître et qui reposaient dans leur berceau ; Héraclès les saisira à la gorge et les étouffera. Plus tard Héra le frappera de folie, l'amenant ainsi à massacrer une partie de sa propre famille.
crime (6,526). En se suicidant, Ino avait entraîné dans la mort son fils Mélicerte (6, 497). D'autre part, c'était aussi une criminelle en ce sens qu'elle avait tenté de supprimer Phrixos et Hellé, nés d'un premier mariage de son époux Athamas avec Néphélé (2, 628 et 3, 852).
Rumeur (6,527). On songe ici à la description de la Renommée (Fama) chez Virgile, Énéide, 4, 173-190 et chez Ovide, Métamorphoses, 12, 39-63.
Carmenta (5,529). La mère d'Évandre, dont il a été beaucoup question dans les Fastes à l'occasion des Carmentalia (1, 469-542 ; 1, 627-628).
prêtresse de Tégée (6,531). Tégée est le nom d'une cité en Arcadie. L'expression "de Tégée" est une métonymie courante pour "d'Arcadie" (1, 545 ; 1, 627-628).
prophétesse (6,535). Carmenta a le don de prophétie (cfr par exemple 1, 473-476).
tu seras appelée Matuta (6,545). Il est difficile de dater avec précision l'assimilation de Mater Matuta à l'Ino-Leucothée grecque. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'elle était acquise à la fin de la République (Cicéron, De la nature des dieux, 3, 39).
Portunus (6,547). Portunus était un ancien dieu romain, qui possédait un flamine (flamen Portunalis) et une fête, les Portunalia, au 17 août. Il semble qu'à l'origine il présidait aux portes et aux ports (scholie de Vérone à Virgile, Énéide, 5, 241), un "confrère" de Janus en quelque sorte. Son temple, un des mieux conservés de Rome, s'élevait non loin du Tibre, près du pont Aemilius : il fut présenté longtemps comme celui de la Fortune Virile.
leurs noms furent changés (6,550). Les interprétations des divinités d'une religion à l'autre sont parfois bien particulières. Citons deux passages de G. Dumézil : "Le sort de Matuta à l'époque des interpretationes est intéressant : comme aucune déesse grecque ne lui correspondait dans sa fonction centrale (Eôs aux doigts de rose n'était qu'une figure littéraire), c'est à Leukothéa qu'elle a été savamment assimilée, à la faveur de deux analogies de détail dans le rituel. Elle n'en est pas moins restée, dans la conscience des Romains, la déesse Aurore. Mais la mythologie de Leukothéa, reversée sur elle, a, d'une part, fait oublier l'ancienne et d'autre part, lui a créé un lien avec une divinité qui primitivement ne la concernait en rien : Portunus, qui, assimilé à Palaemôn, devint son fils" (G. Dumézil, La religion romaine archaïque, 1974, p. 71). Et ailleurs G. Dumézil écrit : "Quand les Romains, vers la fin de la République, à cause d'un trait de rituel commun et peut-être de la notion de 'blancheur', eurent interprété leur déesse Aurore, Mater Matuta, en Leucothéa, toute la légende de celle-ci se transporta sur celle-là, et, Leucothéa ayant pour fils Mélicerte-Palaemon, Matuta se trouva chargée du rôle inattendu de mère de Portunus, assimilé lui-même à Mélicerte pour le rapport que l'un et l'autre ont avec l'eau" (G. Dumézil, La religion romaine archaïque, 1974, p. 267).
interdit aux servantes (6,551). Un des rites bien connus des Matralia romains est l'expulsion des servantes hors du temple de Mater Matuta. Ovide n'est pas le seul auteur à en faire état : on le trouve également signalé chez Plutarque (Vie de Camille, 5, 2 ; Questions romaines, 16). Le voici décrit par G. Dumézil (La religion romaine archaïque, 1974, p. 67) : "Alors que le temple de Matuta est normalement interdit à la gent servile, les dames réunies pour la fête introduisent exceptionnellement dans l'enceinte une esclave, qu'elles expulsent ensuite avec gifles et coups de verges". La comparaison indo-européenne est éclairante. Dans le monde védique, "les hymnes présentent le phénomène naturel du point du jour comme le refoulement violent des ténèbres, de 'la' ténèbre, assimilée à l'ennemi, au barbare, au démoniaque [ ], au danger, etc., par l'Aurore ou par la troupe des Aurores. [ ] C'est ce que miment aussi dans les Matralia les bonae matres, [ ] contre une esclave qui doit représenter, par opposition à elles-mêmes, l'élément mauvais et mal né". La date de la fête n'est pas anodine : on approche du solstice d'été : "C'est au moment où les jours, comme fatigués, réduisent à presque rien leur croissance pour bientôt se mettre à décroître, que la déesse Aurore se fait le plus intéressante pour les hommes." (G. Dumézil, La religion romaine archaïque, 1974, p. 344). Le sens du rite n'était plus compris par les Romains. Ovide l'interprète ici à travers la mythologie grecque et un épisode tiré de la légende d'Athamas : ce dernier aurait trompé Ino avec une esclave. Plutarque, dans les Questions romaines, 16, fera de même.
des semences grillées (6,556). Allusion à un épisode faisant intervenir l'hostilité d'Ino à l'égard de Phrixos et d'Hellé, les enfants qu'Athamas avait eu de son union avec Néphélé. Pour provoquer une famine dans le pays, Ino avait remis aux paysans des semences grillées, donc impropres à la germination. Athamas avait envoyé consulter le dieu de Delphes, mais le messager était "aussi corrompu" que les semences : il annonce que l'oracle exige la mort d'Hellé et de Phrixos. L'épisode est évoqué en 3, 853-876.
pas pour ses enfants (6,559). C'est l'autre rite spécifique des Matralia, qui est également rapporté par Plutarque (Questions romaines, 17) : "Pourquoi les femmes implorent-elles cette déesse non pour leurs enfants mais pour ceux de leurs surs?". Ici encore c'est la comparaison indo-européenne, en l'espèce les données védiques, qui fournit la clé originale : la déesse Aurore, sur de la Nuit, cajole affectueusement son neveu le Soleil, le fils de sa soeur. Ce "pan de mythologie naturaliste" n'a plus été compris par les Romains qui, ici aussi, sont allés chercher une explication dans la mythologie grecque, en l'occurrence dans l'histoire de Sémélé, d'Ino et de Bacchus (cfr 6, 483-485).
Rutilius (6,563). Publius Rutilius Lupus, consul en 90 a.C., fut abattu par les Marses au cours de la Guerre Sociale, dite aussi Guerre des Marses.
Tolénus (6,565). C'est le nom de la petite rivière d'Italie centrale près de laquelle fut tué le consul.
Didius (6,568-569). Un certain Titus Didius, consul en 98 a.C., participa à la Guerre Sociale, où il serait mort en 89.
Fortuna (6,569). Une ancienne divinité romaine, aux multiples fonctions qui ne sont pas simples à cerner, et qui fut identifiée avec la déesse grecque du hasard (Tychè). Rome connaissait de nombreux cultes à la déesse Fortuna. Il a déjà été question de la "Fortune de Rome" (1, 209), de la "Fortune Virile" (4, 145-151), de plusieurs temples à la "Fortune Publique sur le Quirinal" (4, 373-376 ; 5, 729-730). À la date du 24 juin, en 6, 775-784, Ovide parlera de la fête et du sanctuaire de Fors Fortuna, sur la rive droite du Tibre. La Fortune dont il est question ici ne porte pas d'épiclèse attestée dans l'antiquité avec certitude ; sa signification originelle exacte n'est d'ailleurs pas claire, et les modernes la désignent souvent par référence à l'emplacement de son temple : "La Fortune du Forum Boarium".
même jour (6,569). Le temple de Fortuna a la même date anniversaire (11 juin) que celui de Mater Matuta dont il vient d'être question. En ce qui concerne son emplacement, non seulement il se dresse comme lui au Forum Boarium, mais sur la même base que lui ; les deux temples (Mater Matuta et Fortuna) sont côte à côte et se ressemblent d'ailleurs tellement qu'on parle couramment à leur propos des "temples jumeaux du Forum Boarium" et qu'on éprouve encore des doutes aujourd'hui sur la divinité propriétaire de l'un et de l'autre. D'autre part, en ce qui concerne leur fondateur, ils sont tous les deux attribués à Servius Tullius, le sixième roi de Rome (6, 479-480, pour le temple de Mater Matuta).
toges superposées (6,570). Une particularité de ce temple est qu'il renferme une très vieille statue recouverte d'un amoncellement de toges. Ovide va s'intéresser à cette statue et particulièrement à la signification de cette accumulation de vêtements.
À l'évidence... Servius (6,571). Selon la tradition, Servius Tullius entretient des rapports particuliers avec Fortuna, ce que les auteurs anciens racontent à leur manière. Pour le dire en bref, Servius a connu des hauts et des bas spectaculaires : d'origine humble, parfois même servile, il est arrivé au pouvoir suprême, mais il a terminé sa vie tragiquement sous les coups de son gendre (le futur Tarquin le Superbe) et de sa fille (Tullia). C'est un bel exemple de ce que peut la Fortune : exalter quelqu'un ou le détruire. Il sera davantage question en 6, 573-576 des relations amoureuses entre le roi et la déesse.
amours clandestines (6, 573). Plusieurs versions racontent que Fortuna venait retrouver le roi dans sa chambre, un récit qui fait songer, mutatis mutandis, aux "affinités électives" entre Numa et la déesse Égérie ; il ne faut pas y voir, avec certains modernes, le souvenir atténué d'une hiérogamie rituelle.
aveugle (6,576). L'aveuglement de la Fortune est un topos littéraire et la déesse est souvent représentée les yeux bandés. On citera Cicéron, De amicitia, 54: "Non seulement la Fortune est aveugle, mais elle rend aveugles la plupart de ceux qu'elle a embrassés". En réalité, cette conception répond davantage à la Tychè hellénistique qu'à la vieille Fortuna romaine.
porta Fenestella (6,578). Emplacement inconnu de ce qui pourrait n'être qu'une "petite fenêtre" (c'est le sens du mot latin Fenestella).
funérailles de Tullius (6,581). La mort tragique du roi Servius Tullius, qui fut assassiné par son gendre Lucius Tarquin, le futur Superbe, et outragé par sa fille Tullia Minor qui n'hésita pas à rouler en char sur son cadavre, est racontée en détail par Tite-Live, 1, 46-48, par exemple. "Selon Denys d'Halicarnasse (4, 40), le peuple éprouva un si violent chagrin à la mort de Servius que Tarquin, craignant des troubles, n'osa pas lui accroder 'un enterrement royal'." (H. Le Bonniec)
sur un espace plus étendu (6,585). Comparaison courante. Le poète règle son récit comme le conducteur dirige son char. L'un et l'autre évoluent sur un espace plus ou moins étendu.
Tullia... (6,587). Servius Tullius avait deux filles Tullia Maior et Tullia Minor, qui avaient épousé les deux fils (ou petits-fils, selon les sources) de Tarquin l'Ancien. En réalité, les caractères des conjoints n'étaient pas bien assortis. Une des filles, celle qui était ambitieuse et violente, avait épousé le pacifique Arruns, alors que l'ambitieux Lucius était le mari de l'autre sur, femme faible et douce qui paralysait son audace. Les deux personnages ambitieux, violents et sans scrupules, s'étaient d'abord débarrassés de leurs conjoints respectifs ; ils s'étaient alors remariés entre eux et avaient décidé de supprimer le vieux roi. On a pu comparer la "méchante Tullia" (Tullia minor) à une Lady Macbeth romaine.
son mariage (5,587). Il s'agit bien sûr de son second mariage, après qu'elle eût fait disparaître son premier mari.
Esquilin (6,601). Une des collines de Rome que le roi Servius avait intégrée dans la ville, et où il s'était installé lui-même. Voir Tite-Live, 1, 44, 3.
le cadavre (6,605). Le corps du vieux roi, tombé en pleine rue sous les coups des assassins envoyés par le couple infernal, bloquait le passage de la voiture. Tullia ordonna à son cocher d'écraser le cadavre.
le prix amer de ta piété (6,607). "Si tu n'obéis pas, tu vas payer très cher la piété que tu as pour le roi".
la rue du Crime (6,609). Ainsi s'appelle une rue de Rome (en latin uicus Sceleratus), censée devoir son nom au tragique événement qui s'y était déroulé.
oeuvre de son père (6,611). Rappelons que le temple de Fortuna, où se trouvait la statue voilée, avait été construit par son père Servius Tullius.
manteau romain (6,623). La tradition précisait que les voiles qui recouvraient la statue étaient des toges, vêtements du citoyen romain.
septième roi (6,624). Servius Tullius est le sixième des sept rois de la Rome royale, sauf si l'on intègre dans la série - ce qui est le cas ici - le roi sabin Titus Tatius, qui partagea le trône avec Romulus au temps de la royauté double (Tite-Live, 1, 13, 8).
temple brûla (6,625). En 213 a.C., un incendie ravagea les temples de Fortuna et de Mater Matuta, au Forum Boarium. La statue seule fut épargnée par les flammes, une sorte de miracle. Voir Tite-Live, 24, 47, 15.
Mulciber (6,627). Muciber (cfr 1, 554) est un surnom appliqué à Vulcain, le dieu du feu et le dieu forgeron.
Vulcain ... Ocrisie... Tanaquil... (6,627). La légende racontée ici fait de Servius Tullius, le fils de Vulcain et d'Ocrisie, né dans des circonstances assez étranges, auxquelles Ovide va faire allusion un peu plus loin (6, 629-634). Si Vulcain est le dieu du feu, Ocrisie (ou Ocresie), la mère de Servius, est présentée comme originaire de la ville latine de Corniculum : capturée par les troupes de Tarquin l'Ancien, elle aurait été emmenée au palais royal de Rome et serait devenue l'esclave de Tanaquil, épouse du roi.
la forme d'un phallus (6,631). Denys d'Halicarnasse (4, 2, 1-3) fait également état, avec quelques variantes, de cette conception miraculeuse de Servius Tullius. Il raconte "qu'après l'érection d'un membre viril dans le foyer du palais, Ocrisia fut invitée, à l'instigation de Tarquin, à s'unir à lui". Ce thème de la conception par le feu d'un héros fondateur n'est pas rare dans le monde indo-européen. Le fondateur de Préneste, Caeculus, est également un fils de Vulcain (Virgile, Énéide, 7, 678-681). Il existe toutefois d'autres récits sur les origines de Servius Tullius : son père, par exemple, aurait été un noble de Corniculum, nommé Servius Tullius (Tite-Live, 1, 39, 5-6).
aigrette de feu (6,636). Autre légende courant sur les origines de Servius Tullius. On verra par exemple le récit de Tite-Live (1, 39, 1-3) : lorsque l'enfant, tout petit encore, dormait dans son berceau, sa tête fut entourée de flamme. D'habitude, ce type de prodige signale que le bénéficiaire jouira d'une destinée hors du commun. Ici, Ovide y voit la preuve de la paternité du dieu du feu.
Concorde... Livie... (6,637). L'impératrice Livie, épouse d'Auguste, avait dédié un temple à Concorde, sur lequel nous ne possédons pas beaucoup de renseignements. Il s'élevait sans doute sur le mont Oppius, là où Auguste avait fait construire le Portique de Livie dont il sera question en 6, 640. Pour d'autres informations sur la Concorde, voir 1, 637-650.
portique de Livie (6,640). En 15 a.C., le chevalier Vedius Pollion, réputé très cruel, avait légué en héritage à Auguste son immense demeure, que l'empereur fit raser. Quelques années plus tard, Auguste fit construire sur le site un magnifique portique auquel il donna le nom de Livie (Suétone, Auguste, 29, 6).
accusation d'aspiration au trône (6,643). Grief considéré comme très grave à Rome, dès l'avènement de la République. Il y eut effectivement plusieurs cas célèbres de Romains qui payèrent de leur vie l'accusation, fondée ou non, d'aspirer à la royauté (cfr par exemple le Manlius Capitolinus de 6, 185-190). Ce n'était pas le cas, précise Ovide, de Pollion.
censure (6,647). Ovide habilement tourne un compliment à Auguste, dont on sait qu'il n'exerça jamais officiellement les fonctions de censeur (Suétone, Auguste, 27, 11).
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