Bibliotheca Classica Selecta - Fastes d'Ovide (Introduction) - Livre 4 (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page précédente - Page suivante
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23 avril : Fête de Vénus et Vinalia (4,863-900)
Le 23 avril, consacré aux Vinalia, est aussi dédié à Vénus ; les prostituées en particulier célèbrent la déesse, et on commémore au temple de Vénus près de la Porte Colline l'arrivée à Rome de Vénus Érycine, venue de Sicile à la suite d'un oracle sibyllin. (4,863-876)Mais les Vinalia sont surtout une fête en l'honneur de Jupiter : l'explication remonte à la légende d'Énée ; comme Turnus et lui prétendaient tous deux régner sur les Latins, une guerre les opposa ; pour obtenir l'alliance de l'Étrusque Mézence, Turnus s'engage à lui donner une partie des vins du Latium. De son côté, Énée promet d'offrir à Jupiter, en cas de victoire, les prémices des vendanges latines. Suite à la défaite de Mézence et Turnus, Jupiter reçoit à juste titre cet hommage du Latium, lors des Vinalia. (4,877-900)
J'ai parlé de Palès : je parlerai de même des Vinalia. Un jour cependant s'intercale entre les deux fêtes. |
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Filles publiques, célébrez la puissance de Vénus. Vénus veille grandement aux gains des professionnelles de l'amour. Offrez-lui de l'encens ; demandez-lui la beauté et la faveur du peuple, réclamez-lui l'art des caresses et des paroles enjouées. Et donnez à votre souveraine, avec son myrte, la menthe qu'elle aime |
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et des tresses de jonc recouvertes de roses entrelacées. Il convient maintenant de se rendre au temple voisin de la Porte Colline ; il tient son nom d'une colline sicilienne. Quand Claudius en armes s'empara de Syracuse, la ville d'Aréthuse, et te conquit toi aussi, Éryx, au cours de la guerre, |
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suite à un oracle de la Sibylle bien vivante, on transféra Vénus qui préférait être honorée dans la ville où vivait sa race.
Vous voulez savoir pourquoi on appelle la fête de Vénus les Vinalia et pourquoi ce jour est consacré à Jupiter. Une guerre devait décider qui de Turnus ou d'Énée serait le gendre |
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d'Amata, la Latine ; Turnus demande avec insistance l'aide des Étrusques. Mézence était célèbre, et redoutable quand il était revêtu de ses armes ; grand sur sa monture, il était plus imposant encore debout, en pied ; Turnus avec ses Rutules tente de l'attirer dans son camp. Le chef étrusque lui rétorque : |
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"J'ai de la vaillance, et qui n'est pas rien : en témoignent mes blessures et mes armes, souvent aspergées de mon sang. Toi qui demandes de l'aide, accorde-moi une toute petite récompense, partage avec moi le prochain moût de tes cuves. Il ne faut pas tarder : à vous de donner, à moi de vaincre. |
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Ah ! Comme Énée voudrait que ma demande soit refusée !" Les Rutules étaient d'accord. Mézence revêt ses armes ; Énée s'arme aussi et s'adresse à Jupiter : "La vendange de l'ennemi a été promise au roi tyrrhénien ; C'est toi, Jupiter, qui emporteras le moût du vignoble du Latium !" |
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Les souhaits les meilleurs l'emportent : le grand Mézence s'écroule et, la rage au coeur, heurte le sol. L'Automne arriva, tout barbouillé des raisins que l'on foule : il est juste de rendre à Jupiter les vins qu'on lui doit ; c'est pour cela que ce jour est appelé Vinalia ; |
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Jupiter le revendique et se réjouit qu'il fasse partie de ses fêtes. |
Du 25 au 28 avril : Robigalia - Flora - Vesta et Auguste (4,901-954)
Le 25 avril, date du coucher du Bélier et du lever du Chien, ont lieu les Robigalia. Le flamen Quirinalis mène en procession une foule en vêtements blancs, vers le bois sacré de Robigo. Après lui avoir sacrifié une chienne et une brebis, le prêtre s'adresse à Robigo, divinité de la "Rouille", plus dévastatrice pour les moissons que les intempéries ou la canicule. Il la supplie d'épargner les moissons et de s'en prendre plutôt aux armes, désormais inutiles, en ces temps de paix. (4,901-932)Après les offrandes rituelles, le flamen apprend au poète intrigué que l'immolation inhabituelle d'une chienne lors des Robigalia est liée à la constellation du Chien, qui, avant d'être métamorphosé, était le chien d'Icaros. (4,933-942)
Le 28 avril commencent les jeux scéniques en l'honneur de Flora, qui se déroulent jusqu'au 1er mai. Mais c'est surtout le jour où Auguste, avec l'aval des sénateurs, avait introduit Vesta dans sa demeure du Palatin, qui abritait désormais trois divinités : Vesta, Phébus et Auguste lui-même. (4,943-954)
Lorsque avril atteindra les six jours qui lui restent, la saison du printemps sera au milieu de sa course ; en vain tu chercheras le bélier d'Hellé, l'Athamantide ; les averses donnent le signal et le Chien se lève. |
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Ce jour-là, alors que je revenais de Nomentum à Rome, au milieu de la route, je rencontrai une foule vêtue de blanc : un flamen se dirigeait vers le bois sacré de l'antique Robigo, pour offrir aux flammes la fressure d'une chienne et d'une brebis. Aussitôt je m'approchai, pour ne pas rester ignorant de ce rite. |
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Voici les paroles que prononça ton flamen, ô Quirinus : "Âpre Robigo, épargne les plantes de Cérès, et laisse s'agiter au-dessus du sol leurs extrémités délicates. Permets aux semailles, nourries par les astres, de croître sous un ciel clément, en attendant d'être mûres pour la faucille. |
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Ta puissance n'est pas anodine : les froments que tu as piqués, le paysan affligé les considère comme perdus. Ni vents ni averses ne causent autant de tort à Cérès, et les moissons brûlées par la gelée blanche pâlissent moins que lorsque Titan darde ses rayons sur les chaumes humides : |
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c'est alors, redoutable déesse, que se manifeste ta colère. Épargne les moissons, je t'en prie, et écarte tes mains rugueuses ; ne fais point de tort aux cultures ; contente-toi d'en avoir le pouvoir. Et acharne-toi, non pas contre les tendres semailles mais contre le fer solide, et fais périr en premier l'élément qui peut en perdre d'autres. |
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Ce sera plus utile si tu ronges les épées et les traits destructeurs : on n'a pas besoin de ces armes ; le monde vit en paix. Que maintenant brillent les sarcloirs, le dur hoyau et le soc incurvé, qui sont les richesses de la campagne ; la rouille abîmera les armes, et si quelqu'un tente de tirer une épée de son fourreau, |
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qu'il l'y sente bloquée après une longue période d'attente. Mais toi, ne nuis pas à Cérès, et qu'en ton absence, le paysan puisse toujours s'acquitter de ses voeux envers toi."
Le flamen avait fini. À sa droite se trouvait une serviette effilochée, et, près d'une soucoupe de vin pur, une boîte à encens. |
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Il offrit dans le foyer l'encens, le vin et les viscères d'une brebis de deux ans ainsi que, -- je l'ai vu -- , la fressure infâme d'une chienne immonde. Puis il me dit (je m'étais informé) : "Tu veux savoir pourquoi on fait le sacrifice d'une victime inhabituelle ? Apprends-en la raison. Dès l'apparition de la constellation du Chien, -- le chien d'Icaros dit-on, -- |
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la Terre brûlée a soif et la moisson mûrit prématurément. C'est au lieu du chien astral qu'on immole un chien sur l'autel, acte que rien ne justifie, si ce n'est que la victime porte le nom de chien."
Lorsque la Tithonienne a délaissé le frère du Phrygien Assaracus et par trois fois a levé sur l'immense univers sa lumière matinale, |
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une déesse arrive, parée de mille couronnes de fleurs de toutes couleurs ; la scène d'habitude présente des jeux assez libertins. Et la fête sacrée de Flora se termine aux Calendes de mai. J'y reviendrai alors ; à présent, une tâche plus importante me presse. Vesta, réserve-toi ce jour : le seuil d'un parent a accueilli Vesta ; |
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ainsi l'ont équitablement décidé les sénateurs. Phébus occupe une partie du palais ; une autre partie échoit à Vesta ; Auguste est le troisième dieu à occuper ce qui reste après eux. Vivent les lauriers du Palatin et vive le palais, orné de chêne : à lui seul, il héberge trois dieux éternels. |
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entre les deux fêtes (4,864). Les Parilia du 21 avril et les Vinalia. En fait la fête des Vinalia, liée au vin dont elle porte le nom (vinum en latin), s'articule en deux temps : les Vinalia priora du 23 avril (en question ici) et les Vinalia rustica, célébrés les 9 et 10 août. Durant les Vinalia du 23 avril, on ouvrait les fûts remplis l'automne précédent et on offrait le premier jet en libation à Jupiter. La recherche étiologique faisait remonter cette fête au voeu prononcé par Énée de consacrer la vendange du Latium à Jupiter s'il parvenait à vaincre Turnus. Les Vinalia rustica du mois d'août, pour leur part, inauguraient les vendanges. On immolait des agneaux à Jupiter, avant que le flamine du dieu ne coupe les premières grappes. Si Jupiter exerçait ainsi son patronage sur le vin, c'est parce que ce dernier était une boisson enivrante, aux puissances merveilleuses : à ce titre elle relevait du dieu souverain (R. Schilling et G. Dumézil).L'association de Vénus aux Vinalia de Jupiter est secondaire ; elle ne remonte guère plus haut que le IIIe siècle. En tout cas, en 295 a.C. déjà, Fabius Gurges avait voué à Vénus Obsequens (= "propice, exauçant les prières") un temple près du Grand Cirque qui avait pour date anniversaire le 19 août, jour des Vinalia d'été. Une seconde association entre Vénus et les Vinalia eut lieu lors de la deuxième guerre punique. Le temple à Vénus Érycine (cfr paragraphe suivant), qui fut consacré en 215 a.C. sur le Capitole, avait comme date anniversaire le 23 avril, jour des Vinalia de printemps. D'énormes quantités de vin étaient à cette date versées au ruisseau à partir de son temple.
Cette Vénus Érycine était en fait une Aphrodite vénérée sur le Mont Éryx en Sicile et présentant de forts traits orientaux (notamment la présence de prostituées sacrées). Cette divinité semblait avoir été favorable à Rome dans ses luttes contre les Carthaginois, et cela dès la première guerre punique. Ce n'était pas pour surprendre les Romains qui, à cette époque déjà, associaient Vénus aux origines de leur peuple. C'est cette Aphrodite sicilienne qui fut introduite à Rome sous le nom de Vénus Érycine.
En fait, elle reçut deux temples. En 217 a.C., après la défaite de Trasimène, le consul Quintus Fabius Maximus, le petit-fils de Fabius Gurges, lui voua, après consultation des Livres Sibyllins un sanctuaire sur le Capitole, qui fut dédié en 215 a.C. et qui avait comme date anniversaire les Vinalia de printemps (on en a parlé plus haut). Son culte était strictement conforme aux usages romains. Un second temple fut promis à Vénus Érycine en 184 a.C. par le consul Porcius Licinius. Élevé près de la Porte Colline (cfr 4, 871), il fut dédié en 181 a.C. Si son culte, plus proche de celui de l'Aphrodite sicilienne, restait "fortement marqué d'exotisme érotique", il n'avait toutefois pas conservé toutes les pratiques originelles. (On songera aux opérations de "romanisation", qui avaient accompagné l'introduction de Cybèle ; cfr n. à 4, 181). Ainsi par exemple son sanctuaire ne connaissait pas le rituel des prostituées sacrées. Il était toutefois bien fréquenté par les filles légères de la capitale. C'est de son culte qu'Ovide va traiter dans ce passage.
filles publiques... (4,865-870). Comme on l'a dit dans la note précédente, le culte de Vénus Érycine, près de la Porte Colline, accueillait les hommages des prostituées.
son myrte (4,869). Cfr 4, 15.
Porte Colline (4,871). Une porte dans la muraille servienne, au nord-est de Rome. C'est au départ de cette porte que divergeaient la via Nomentana, qui conduisait à Nomentum (cfr 4, 905) et la Salaria qui menait au pays des Sabins.
colline sicilienne (4,872). Le Mont Éryx, au nord-est de la Sicile, qui domine Drépane (aujourd'hui Trapani). Les Romains y résistèrent courageusement aux attaques carthaginoises lors de la première guerre punique, et ils attribuèrent ces succès à la protection d'Aphrodite qui y avait un sanctuaire.
Claudius (4,873). M. Claudius Marcellus est un général romain célèbre. Lors de la deuxième guerre punique, il fit preuve d'une grande détermination après le désastre de Cannes en 216 a.C. Il s'empara notamment de Syracuse en 212 a.C., après un siège de trois ans. Pour sa défense, la ville bénéficiait de l'aide d'Archimède (Tite-Live, 24, 34), qui fut tué par un soldat romain après la chute de la cité.
Aréthuse (4,873). C'est la fontaine baignant Syracuse (cfr 4, 423).
Éryx... (4,874-875). Ovide n'est pas ici très précis.Ce ne sont pas les victoires de Marcellus en Sicile qui décidèrent les Romains à introduire Vénus Érycine à Rome. Comme on l'a dit plus haut (cfr note au vers 864), le sanctuaire à la déesse sur le Capitole avait été promis en 217 par Quintus Fabius Maximus, et dédié en 215 a.C.
un oracle de la Sibylle (4,875). Quintus Fabius Maximus avait promis le sanctuaire après consultation des Livres Sibyllins.
Turnus... Énée... Amata (4,879-880). Ovide, à son habitude, ne fait que des allusions très brèves à des légendes ultra-connues de son temps, d'où l'utilité pour le lecteur moderne de se reporter à d'autres textes, par exemple la deuxième partie de lÉnéide de Virgile. Disons simplement ici qu'au moment de l'arrivée dÉnée dans le Latium, régnaient sur le pays le roi Latinus et la reine Amata. Turnus, roi des Rutules, était fiancé à leur fille Lavinia. Contre la volonté de sa femme, Latinus conclut un traité avec Énée, à qui il promit son trône et sa fille. Les deux rivaux, après s'être cherché des alliés, se firent une guerre qui embrasa toute lItalie, et qui se termina par la victoire totale dÉnée.
Mézence (4,881). Dans l'Énéide de Virgile, Mézence, roi étrusque de Caeré, est un des alliés de Turnus, et donc un des adversaires d'Enée. Il était connu pour sa cruauté envers ses propres sujets, et pour son impiété. Virgile (Énéide, 7, 648) le présente comme un "contempteur des dieux". Toujours selon Virgile, il fut tué par Énée en combat singulier au cours de la guerre. C'est la fin du livre 10 de l'Énéide (10, 833-908).
En fait, l'histoire que présente Ovide et qui sert de légende étiologique à la fête des Vinalia, n'est racontée ni par Virgile ni par Tite-Live. Si l'on en croit les Saturnales de Macrobe (3, 5, 10), elle figurait chez Caton : "Caton dit que Mézence avait donné l'ordre aux Rutules de lui offrir les prémices [du vin] au lieu de les offrir aux dieux. Tous les Latins, par crainte d'un ordre semblable, firent le voeu suivant : 'Jupiter, si tu tiens à ce que nous t'offrions ces dons plutôt qu'à Mézence, donne-nous la victoire'" (trad. M. Chassignet). D'autres témoignages antiques font également état de cette anecdote.
les six jours qui lui restent (4,901). Tournure compliquée pour désigner le 25 avril, quOvide semble considérer comme le milieu du printemps, de façon un peu approximative à nos yeux.
le bélier d'Hellé, l'Athamantide (4,903). Sur ce bélier ainsi que sur la légende de Phrixos et d'Hellé, les enfants d'Athamas, voir 3, 852. Sur Hellé, cfr aussi 4, 715. Sur la constellation du Bélier, voir 3, 851. Comme souvent chez Ovide, les données astronomiques sont imprécises.
le Chien (4,904). Les astronomes distinguent deux constellations du Chien. Le Grand Chien (Canis maior) est une constellation de l'hémisphère austral, qui possède l'étoile la plus belle et la plus brillante du ciel, Sirius, appelée aussi Canicula. Le Petit Chien (Canis minor) est une constellation de l'hémisphère boréal. Ici encore, la date du lever de cette constellation ne correspond pas aux réalités astronomiques. Ovide ne semble connaître qu'une seule constellation du Chien. Sur le Grand Chien, voir Astronomie Virtuelle ou Chevaliers du Zodiaque ; sur le Petit Chien, voir Astronomie virtuelle ou Chevaliers du Zodiaque.
Ce jour-là (4,905). Un 25 avril donc.
Nomentum (4,905). Nomentum (aujourd'hui Mentana) était une petite ville située au nord-est de Rome, sur la via Nomentana qui partait de la Porte Colline (cfr n. à 4, 871).
flamen (4,907). Le vers 910 nous apprend quil sagit du flamen Quirinalis, prêtre particulier de Quirinus, le troisième dieu de la triade précapitoline. Le flamine de Jupiter par exemple est déjà intervenu à plusieurs reprises (par exemple n. à 1, 587 ; n. à 2, 21 et n. à 2, 27 ; 2, 282). Il y avait trois flamines majeurs (ceux de Jupiter, de Mars et de Quirinus) et douze flamines mineurs : Flora en possédait un (n. à 4, 945), ainsi que Carmenta, dont il a été beaucoup question au premier chant (par exemple n. à 1, 463).
vêtue de blanc (4,906). Sur les vêtements blancs, cfr par exemple 1, 79-80 ; 2, 654 ; 4, 619-620 (fêtes de Cérès).
Robigo (4,907). Robigus, appelé ici Robigo, était la personnification divine de la rouille ou nielle du blé (robigo), "une des rares puissances mauvaises qui reçoivent un culte" (G. Dumézil). On lui sacrifiait un chien roux et un mouton pour écarter ses maléfices. Lusage voulait que l'on brûle les entrailles des animaux (fressure) pour les offrir aux dieux, et que les assistants se partagent la viande. Comme le Calendrier (épigraphique) de Préneste place le sacrifice au "cinquième mille de la via Claudia", la localisation donnée ici par Ovide embarrasse quelque peu les commentateurs modernes. Pour revenir de Nomentum (cfr 4, 905), le poète aurait dû emprunter la via Nomentana et non par la via Claudia, mais peut-être n'avait-il pas suivi la route la plus directe.
une chienne et une brebis (4,909). Ovide féminise les victimes (en réalité on sacrifiait au dieu un chien et un mouton). Ce n'est pas simple à expliquer. D'une part, Ovide n'est pas toujours très précis sur le sexe des animaux sacrifiés ; d'autre part, il a féminisé la divinité bénéficiaire du sacrifice, appelant le dieu Robigus (un mot masculin) du nom même de la rouille, Robigo (un mot féminin). Or, il existe une règle rituelle voulant qu'on sacrifie un animal mâle à un dieu mâle, et un animal femelle à une déesse. Se serait-il conformé à cet usage religieux ? À moins qu'il n'ait confondu entre les Robigalia du 25 avril et une fête mobile, l'Augurium canarium, qui tombait vers la même date et qui comportait le sacrifice de chiennes rousses "afin de préserver les moissons des rigueurs de la canicule" (cfr R. Schilling). Quoi qu'il en soit, le sacrifice du chien est rare dans la liturgie romaine.
Titan (4,919). Désigne le Soleil, fils du Titan Hypérion. C'est assez courant dans les Fastes (1, 617 ; 2, 73 ; 4, 180).
acharne-toi (4,923). "Ovide infléchit ingénieusement la prière pour en faire un éloge de la paix augustéenne (cfr 1, 709-724). Mais ce développement n'a rien de liturgique" (H. Le Bonniec).
serviette (4,933). On s'en servait dans le culte pour s'essuyer les mains.
brebis de deux ans (4,935). En 2, 70 aussi, on offrait sur le Capitole une bête de deux ans. C'était une victime adéquate, dont il est souvent question dans lÉnéide de Virgile.
la fressure infâme d'une chienne (4,936). Cfr la n. à 4,909.
Icaros (4,939). Ou Icarios. Fils du roi Oebalos de Lacédémone, Icarios offre lhospitalité à Dionysos, qui le récompense en lui offrant une outre de vin (ou en lui apprenant lart de cultiver la vigne). Il abreuve de vin des bergers de lAttique qui, devenus ivres et se croyant empoisonnés, le tuent et abandonnent son cadavre... Daprès Hygin, Fabulae, 130, sa fille Érigoné, grâce au flair de leur chien Méra, retrouve Icaros, et se pend... Dionysos les métamorphose : Icaros devient Arctophylax ou Arcturus (mais, pour Ovide, Fastes, 2, 190 et 3, 405, cest Arcas, le fils de Callisto, qui devient Arctophylax !), Erigoné devient la Vierge, et Méra, la Chienne (Canicula, c'est-à-dire Sirius, l'étoile la plus brillante de la constellation du Grand Chien). Cfr aussi 5, 723-724.
Tithonienne... Assaracus (4,943-944). Tournure recherchée pour désigner le 28 avril. La Tithonienne est lAurore, épouse de Tithon, fils de Laomédon, et petit-fils dIlus, qui était le frère dAssaracus. Ovide sest un peu perdu dans cette généalogie fameuse. Cfr aussi 1, 461 et 3, 403.
Une déesse (4,945). Le vers 947 nous apprendra quil sagit de Flora, que le Calendrier épigraphique de Préneste définit comme la déesse "qui préside à la floraison générale". Elle possédait un flamine, et la date anniversaire de son temple près du Grand Cirque était précisément le 28 avril. Elle bénéficiait de jeux, les ludi Florales, institués en 238 a.C., après consultation des Livres Sibyllins, "pour obtenir une heureuse issue de toute la floraison" (Pline, Histoire naturelle, 18, 286). À l'époque d'Ovide, ces jeux duraient du 28 avril au 3 mai et consistaient notamment en jeux scéniques. Il sera abondamment question de Flora et de sa fête en 5, 183-378.
jeux assez libertins (4,946). Les Pères de l'Église ont souvent tonné sur le caractère lascif de ces spectacles (Lactance, Institutions divines, 1, 20, 10).
Vesta (4,949). La déesse était d'origine troyenne, et donc apparentée à Auguste. En effet l'empereur était le fils adoptif de Jules César, dont la gens prétendait se rattacher au fils d'Énée, Ascagne-Iule. En 3, 426, Ovide fait d'Auguste un parent de Vesta ("cette tête qui est de ton sang"). Auguste avait une vénération particulière pour cette déesse. Après sa désignation comme Grand Pontife, en 12 a.C., il avait, avec l'approbation du sénat, consacré à Vesta au moins un autel et une statue dans son palais du Palatin. Certains modernes ont même songé à un véritable sanctuaire.
Phébus (4,951). Apollon-Phébus était considéré par Auguste comme son protecteur attitré ; et l'empereur, dès 28 a.C., avait consacré au dieu un temple sur le Palatin.
lauriers... chêne (4,953-954). Couronne de chêne civique (cfr 1, 614) et garnitures de lauriers pour lentrée de sa demeure étaient des distinctions octroyées à Auguste par le Sénat, en 27 a.C.
trois dieux éternels (4,954). Vesta, Apollon et... Auguste. Ovide ne ménage pas ses hommages à la famille impériale (cfr 3, 421).
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