Bibliotheca Classica Selecta - Énéide - Chant VIII (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page précédente - Page suivante
ÉNÉIDE, LIVRE VIII
LA ROME FUTURE : PALLANTÉE - BOUCLIER D'ÉNÉE
Évandre accorde son aide à Énée et l'associe au culte d'Hercule (8, 102-189)
Arrivés aux portes de la ville, les Troyens aperçoivent Évandre présidant une cérémonie rituelle en l'honneur d'Hercule. Pallas, le fils d'Évandre, se porte à leur rencontre et, bientôt rassuré sur les intentions d'Énée, propose de l'introduire auprès de son père. (8, 102-125)
Énée rappelle d'abord les liens unissant leurs deux lignées et propose une alliance militaire contre les Dauniens (= les Rutules), leur adversaire commun. (8, 126-151)
Évandre, se souvenant d'avoir admiré Anchise dans sa jeunesse, promet son aide à Énée. Ensuite, il invite les Troyens à s'associer au culte annuel qu'il est en train de célébrer en l'honneur d'Hercule. (8, 152-189)
Forte die sollemnem illo rex Arcas honorem Amphitryoniadae magno diuisque ferebat ante urbem in luco. Pallas huic filius una, |
Ce jour-là, justement, le roi arcadien offrait un sacrifice solennel au noble fils d'Amphitryon et à d'autres divinités, dans un bois sacré aux portes de la ville. Avec lui, son fils Pallas, avec lui, |
|
una omnes iuuenum primi pauperque senatus tura dabant, tepidusque cruor fumabat ad aras. Vt celsas uidere rates atque
inter opacum adlabi nemus et tacitis incumbere remis, terrentur uisu subito cunctique relictis |
par cette vision soudaine, et quittant les tables, tous se lèvent en bloc. |
8, 105 |
consurgunt mensis. Audax quos rumpere Pallas sacra uetat raptoque uolat telo obuius ipse et procul e tumulo : « Iuuenes, quae causa subegit ignotas temptare uias, quo tenditis ? » inquit. « Qui genus, unde domo ? Pacemne huc fertis an arma ? » |
L'audacieux Pallas
interdit
d'interrompre les rites sacrés et, saisissant son javelot, il vole vers eux et, du haut d'un tertre de loin, il dit : « Jeunes gens, quelle raison vous pousse à explorer des routes inconnues ? Où allez-vous ? De quelle race, de quelle patrie êtes-vous? Apportez-vous la paix ou la guerre ? » |
|
Tum pater Aeneas puppi sic
fatur ab alta paciferaeque manu ramum praetendit oliuae : « Troiugenas ac tela uides inimica Latinis, quos illi bello profugos egere superbo. Euandrum petimus. Ferte haec et dicite lectos |
Nous venons voir Évandre. Rapportez-lui ceci et dites-lui |
8, 115 |
Dardaniae uenisse duces socia arma rogantis. » Obstipuit tanto percussus nomine Pallas : « Egredere o quicumque es » ait « coramque parentem adloquere ac nostris succede penatibus hospes. » excepitque manu dextramque amplexus inhaesit. |
D'un geste il le reçut, l'embrassa, lui serra longuement la main. |
8, 120 |
Progressi subeunt luco fluuiumque relinquunt. Tum regem Aeneas dictis adfatur amicis : « Optume Graiugenum, cui me Fortuna precari et uitta comptos uoluit praetendere ramos, non equidem extimui, Danaum quod ductor et Arcas |
Alors Énée adresse au roi des paroles amicales : « Ô le meilleur des Grecs, à qui la volonté de la Fortune m'impose d'adresser des prières et de tendre des rameaux ornés de bandelettes, je n'ai pas été effrayé du fait que tu aies été un chef grec, un Arcadien, |
8, 125 |
quodque a stirpe fores geminis coniunctus Atridis ; sed mea me uirtus et sancta oracula diuom cognatique patres, tua terris didita fama, coniunxere tibi et fatis egere uolentem. Dardanus, Iliacae primus pater urbis et auctor, |
Dardanus, le premier père de la ville d'Ilion, son fondateur, |
8, 130 |
Electra, ut Grai perhibent.
Atlantide cretus, aduehitur Teucros ; Electram maxumus Atlas edidit, aetherios umero qui sustinet orbes. Vobis Mercurius pater est, quem candida Maia Cyllenae gelido conceptum uertice fudit ; |
|
8, 135 |
at Maiam, auditis si quicquam credimus, Atlas, idem Atlas generat, caeli qui sidera tollit. Sic genus amborum scindit se sanguine ab uno.
His fretus non legatos
neque prima per artem temptamenta tui pepigi : me, me ipse meumque |
de premières approches avec toi par artifice : je suis venu en personne, |
8, 140 |
obieci caput et supplex ad limina ueni. Gens eadem, quae te, crudeli Daunia bello insequitur ; nos si pellant, nihil afore credunt,
quin omnem Hesperiam
penitus sua sub iuga mittant et mare quod supra teneant quodque adluit infra. |
Les Dauniens, ce peuple qui te poursuit, nous combat cruellement ; ils croient que, s'ils nous repoussaient, rien ne les empêcherait, de soumettre complètement sous leur joug toute l'Hespérie, baignée tant par la mer Supérieure que par la mer Inférieure. |
8, 145 |
Accipe daque fidem : sunt nobis fortia bello pectora, sunt animi et rebus spectata iuuentus. »
Dixerat Aeneas. Ille os oculosque loquentis iamdudum et totum lustrabat lumine corpus. Tum sic pauca refert : « Vt te, fortissime Teucrum, |
Reçois ma confiance, donne-moi la tienne. Nous avons, pour combattre, des coeurs vaillants, du courage, une jeunesse signalée pour ses exploits. »
Énée avait fini de parler. Depuis un moment, pendant son dicours, Évandre observait son visage, ses yeux, son corps tout entier. Alors il intervient brièvement : « Ô toi, le plus vaillant des Troyens, |
8, 150 |
accipio agnoscoque libens ! Vt uerba parentis et uocem Anchisae magni uoltumque recordor ! Nam memini Hesionae uisentem regna sororis Laomedontiaden Priamum, Salamina petentem, protinus Arcadiae gelidos inuisere finis. |
et chemin faisant, il vint visiter la fraîche région de l'Arcadie. |
8, 155 |
Tum mihi prima genas uestibat flore iuuentas, mirabarque duces Teucros, mirabar et ipsum Laomedontiaden, sed cunctis altior ibat Anchises : mihi mens iuuenali ardebat amore compellare uirum et dextrae coniungere dextram. |
d'interpeller le héros et de serrer sa main dans la mienne. |
8, 160 |
Accessi et cupidus Phenei sub moenia duxi. Ille mihi insignem pharetram Lyciasque sagittas discedens chlamydemque auro dedit intertextam frenaque bina meus quae nunc habet aurea Pallas. Ergo et quam petitis iuncta est mihi foedere dextra, |
Dès lors, cette dextre que vous sollicitez je l'ai unie à la vôtre |
8, 165 |
et lux cum primum terris se crastina reddet, auxilio laetos dimittam opibusque iuuabo. Interea sacra haec, quando huc uenistis amici, annua, quae differre nefas, celebrate fauentes nobiscum et iam nunc sociorum adsuescite mensis. » |
en signe d'alliance, et demain, dès que la lumière reviendra sur terre, je vous renverrai, heureux de mon secours, et de l'aide de mes ressources. D'ici là, puisque vous êtes venus ici en amis, célébrez avec nous dans la ferveur ces rites annuels, qu'il est sacrilège de différer, et désormais soyez des familiers à la table de vos alliés ».
|
8, 170 |
Haec ubi dicta, dapes iubet et sublata reponi pocula gramineoque uiros locat ipse sedili praecipuumque toro et uillosi pelle leonis accipit Aenean solioque inuitat acerno. Tum lecti iuuenes certatim araeque sacerdos |
Sur ces paroles, il fait rapporter les mets du banquet et les coupes déjà enlevées ; il installe lui-même ses hôtes sur des sièges de gazon, et accueille spécialement Énée sur un lit, garni d'un coussin et d'une peau de lion velu, l'invitant à prendre place sur un trône d'érable. Puis, des jeunes gens choisis et le prêtre de l'autel s'empressent |
8, 175 |
uiscera tosta ferunt taurorum onerantque canistris dona laboratae Cereris Bacchumque ministrant. Vescitur Aeneas simul et Troiana iuuentus perpetui tergo bouis et lustralibus extis. Postquam exempta fames et amor compressus edendi, |
d'apporter les chairs grillées de taureau, d'emplir des corbeilles de galettes de fine farine de Cérès et de servir la liqueur de Bacchus. Énée ainsi que les jeunes Troyens reçoivent comme nourriture le dos entier d'un taureau et les entrailles lustrales. Lorsqu'ils eurent apaisé leur faim et satisfait leur appétit, |
8, 180 |
rex Euandrus ait : « Non haec sollemnia nobis, has ex more dapes, hanc tanti numinis aram uana superstitio ueterumque ignara deorum inposuit : saeuis, hospes Troiane, periclis seruati facimus meritosque nouamus honores ». |
le roi Évandre expliqua : « Ces cérémonies annuelles, ces banquets traditionnels, cet autel dédié à une si grande divinité, ce n'est pas une vaine superstition ignorante des anciens dieux qui nous les impose : nous les faisons, ayant échappé à de cruels périls, ô Troyen, notre hôte, et nous renouvelons des honneurs bien mérités. » |
8, 185 |
Notes (8, 102-189)
sacrifice solennel (8, 102). L'adjectif latin solemnis, qui a donné le français « solennel », signifie au sens propre « qui revient chaque année ». Il s'agit d'une fête annuelle, célébrée à Rome en l'honneur d'Hercule et qui se déroulait sur le Grand Autel du dieu (ara maxima) au Forum Boarium, non loin du Tibre. Les auteurs anciens nous apprennent qu'il s'agissait primitivement d'un culte gentilice, organisé par deux familles, les Potitii et les Pinarii (cfr 8, 269-270). C'est seulement en 312 a.C.n., au moment de la censure d'Appius Claudius qu'il passa aux mains de l'État. Il fut alors célébré annuellement par le préteur urbain le 12 août. La victime était d'ordinaire un taureau. Non seulement la cérémonie se déroulait selon le rite grec, mais elle comportait diverses particularités. Ainsi par exemple on n'y mentionnait aucun autre dieu qu'Hercule et une exclusion rituelle frappait femmes, chiens et mouches. Rome comptait plusieurs sanctuaires consacrés à Hercule, mais celui de l'ara maxima était le plus important. Et probablement le plus ancien, car la tradition en faisait remonter la création à l'époque d'Évandre, bien avant donc la fondation proprement dite de Rome par Romulus et Rémus. Dans certaines versions, le culte est établi par Évandre, dans d'autres versions, par Hercule lui-même. Les récits étiologiques liés à sa fondation font intervenir un personnage du nom de Cacus, qu'on retrouvera plus loin.
fils d'Amphitryon (8, 103). La périphrase (qu'on rencontre aussi en 8, 214) désigne Héraclès / Hercule. En réalité ce dernier était le fils de Jupiter et d'Alcmène. Cette dernière avait été abusée par Jupiter, qui avait pris les traits de son époux Amphitryon.
à d'autres divinités (8, 103). Précision curieuse. En effet, s'il était habituel à Rome d'invoquer d'autres dieux à côté de celui qui était le destinataire du sacrifice, lors de la cérémonie à l'ara maxima, on ne mentionnait le nom d'aucune autre divinité qu'Hercule, s'il faut en croire en tout cas les informations en notre possession (Varron, chez Plutarque, Questions romaines, 90). Mais Virgile, rappelons-le, n'est pas tenu à une reconstitution historique minutieuse de la cérémonie. On observera d'ailleurs que la description qui va suivre ne fait pas état des Pinarii et des Potitii (il n'en sera question que plus loin, en 8, 269-270). Ceux qui officient sont Évandre et son fils, entourés de l'élite de la jeunesse et des sénateurs. Cela ne correspond pas non plus à ce que nous savons du culte d'Hercule à l'ara maxima (cfr aussi, 8, 279).
les tables (8, 110). Le mot « table » a plusieurs sens en latin, soit une sorte d'autel sur lequel on disposait les offrandes aux dieux, soit des tables sur lesquelles mangeaient les participants au repas sacré. Il apparaîtra plus loin (8, 174) que les Arcadiens de Pallantée étaient en train de prendre le repas rituel lors de l'arrivée d'Énée. Cfr aussi 8, 279.
interdit d'interrompre (8, 110). Interrompre volontairement une cérémonie religieuse était interdit, une interruption involontaire étant par ailleurs considérée comme un mauvais présage. Généralement, un rite interrompu devait être recommencé.
un rameau d'olivier en gage de paix (8, 116). Sur cette fonction du rameau d'olivier, voir par exemple le récit de l'ambassade troyenne à Latinus en 7, 153-155, ou celui de l'ambassade latine envoyée à Énée pour lui demander une trève en 11, 101.
ce nom si prestigieux (8, 121). Le nom prestigieux de Dardaniens, c'est-à-dire de Troyens.
le meilleur des Grecs (8, 127-142). Ce long discours d'Énée renseigne le lecteur sur la généalogie d'Évandre, ainsi que sur les liens de parenté qui unissent ce dernier à Énée et qui les font remonter tous deux à Zeus / Jupiter.
allié des deux Atrides (8, 130). Il a été question déjà d'Évandre dans une note aux vers 8, 51-58. On n'avait pas dit alors que la tradition antique hésitait sur son père et sur sa mère. Certaines versions en font le fils d'Hermès / Mercure et d'une nymphe prophétesse, connue sous divers noms, dont le plus célèbre en milieu romain est probablement Carmenta (en réalité une divinité du chant prophétique vénérée à Rome). Selon d'autres versions, Évandre aurait un père humain, Echémos de Tégée, et comme mère, Timandra, une des filles de Tyndare et de Léda. Il appartiendrait ainsi à la famille des Dioscures, d'Hélène et de Clytemnestre, et serait donc apparenté aux Atrides. Énée tient à bien marquer qu'il n'est pas effrayé par cette origine d'Évandre qui pouvait en faire un ennemi des Troyens. D'autres éléments, plus importants, doivent être pris en compte.
la parenté de nos ancêtres (8, 132). Énée et Évandre ont des ancêtres communs. Pour dire les choses en quelques mots, Dardanus (cfr 1, 38n et 1, 380n), dont descendent Assaracus et Anchise, était le fils de Jupiter et d'Électra, une fille d'Atlas. Évandre était fils d'Hermès / Mercure, dont la mère Maia était aussi une fille d'Atlas. Les deux héros sont donc parents par Atlas. (Il faut reconnaître que ces généalogies sont très compliquées, et que Virgile n'est pas ici très explicite !)
Dardanus (8, 134). De ce fondateur de Troie, qui passe pour en avoir été le premier roi, il a déjà été longuement question au livre sept dans le discours de Latinus aux Troyens (7, 192-211). On a dit alors que Virgile avait profondément modifié la tradition antérieure pour faire de Dardanus un Italien. De cette transformation, il ne sera pas question dans le discours d'Énée à Évandre.
Électre, la fille d'Atlas (8, 135). Fils du Titan Japet, et donc frère de Prométhée et d'Épiméthée, Atlas participa à la guerre des Titans contre Jupiter, et fut pour cela condamné à porter le ciel sur ses épaules et à en faire tourner l'axe (cfr 1, 741 ; 4, 482 ; 6, 796 ; 8, 137). Il donna son nom au mont Atlas (Afrique du Nord). Il eut plusieurs enfants, dont les Pléiades Électra, mère de Dardanus, et Maia, mère de Hermès.
Teucères (8, 136). Avant l'arrivée de Dardanus, la Troade était aux mains de Teucer, censé venir de Crète. Il accueillit Dardanos et lui donna sa fille, Batiéia. Cette union donna naissance à toute la lignée des rois de Troie, dans l'ordre, après Dardanus : Érichthonios, Tros, Ilos, Laomédon et Priam.
Maia (8, 138). Nymphe du mont Cyllène, au nord de l'Arcadie, qui conçut le dieu Hermès d'une union avec Zeus. Une ancienne divinité latine, Maia, qui à l'origine n'avait rien à voir avec la Maia grecque, fut assimilée à cette dernière et passa pour la mère de Mercure.
Dauniens (8, 146). Les Dauniens sont au sens strict les descendants de Daunus, père de Turnus (7, 372n). Ce sont donc les Rutules, mais le mot est ici utilisé dans un sens plus général pour désigner les Rutules et leurs alliés, les Latins.
les mers Inférieure et Supérieure (8, 149) : il s'agit de la mer Tyrrhénienne et de la mer Adriatique. Les cartes anciennes étaient « orientées », c'est-à-dire qu'elles plaçaient l'est en haut. L'Italie se présentait donc étendue horizontalement, avec au-dessus la mer Adriatique et en dessous la mer Tyrrhénienne.
Hésione (8, 157-159). Hésione, la soeur de Priam, avait épousé Télamon, le roi de Salamine. De Salamine, Priam est censé avoir gagné l'Arcadie montagneuse, et donc froide.
Laomédon (8, 158). Un des rois de Troie, père de Priam et d'Hésione (cfr 8, 136n et 8, 291n).
la jeunesse revêtait mes joues de sa première fleur (8, 160). Image homérique (Od., X, 279 ; XI, 319), plusieurs fois reprise par Virgile (9, 181 ; 10, 324).
Phénée (8, 165). Ville d'Arcadie, proche du mont Cyllène.
flèches de Lycie (8, 167). Les Lyciens étaient des archers renommés (cfr 7, 816 et 11, 773).
chlamyde (8, 167). La chlamyde était un manteau léger et court, provenant de la Thessalie ou de la Macédoine, et qui fut de là introduit dans les autres régions de la Grèce. Il a été présenté en 3, 484, lorsque Andromaque, à Buthrote, en offre une à Ascagne. Didon en porte une (4, 137), de même que Pallas, lorsqu'il quitte Pallantée avec Énée et les Arcadiens pour rejoindre l'armée étrusque (8, 588). Celle de Chlorée (11, 775), qui séduira Camille, était particulièrement soignée.
je vous renverrai (8, 170). Didon avait dit la même chose à Ilionée et aux Troyens (cfr 1, 571).
il est sacrilège de différer (8, 173). Rappel de 8, 110, où Pallas était intervenu pour empêcher d'interrompre la cérémonie rituelle.
rapporter les mets du banquet (8, 175). Apparemment le banquet sacré avait été interrompu. Il est donc repris ici.
trône d'érable (8, 177). Énée est installé à la place d'honneur, mais tout reste très simple.
jeunes gens choisis (8, 179). Le service est assuré par des jeunes gens triés sur le volet, et non par des esclaves.
chairs grillées de taureau (8, 180). Dans le sacrifice romain, on distingue les exta, ou fressure (coeur, foie, poumons, vésicule biliaire, bref les organes réputés siège de la vie), des uiscera, ou chairs (au sens technique du terme, ce qui se trouve entre la peau et les os). Les exta ainsi que le sang forment la part consacrée, réservée aux dieux ; l'officiant et les assistants ont droit à la consommation des chairs ; c'est la part profane. En fait, avec le culte d'Hercule à l'ara maxima, nous sommes dans la liturgie grecque qui, sur ce point, diffère fondamentalement du sacrifice romain, en ce qu'elle prévoit une répartition indifférenciée entre le dieu et les fidèles de toutes les parties de la victime. Le sacrifice grec ne fait donc pas de distinction entre les exta, réservés au dieu, et les uiscera profana, la chair profane abandonnée à la consommation des assistants.
farine de Cérès (8, 181). Il s'agit probablement de galettes de blé, finement travaillées.
la liqueur de Bacchus (8, 181). Il s'agit du vin.
le dos entier d'un taureau (8, 183). Dans l'épopée homérique, le dos entier, non découpé, d'un animal semble avoir été un mets de choix que l'on offrait à un hôte pour l'honorer. C'est ainsi en tout cas que cela se passe pour Agamemnon (Iliade, 7, 321) qui offre à Ajax le dos entier d'un taureau, et pour Eumée (Odyssée, 14, 437) qui présente à Ulysse le dos entier d'un porc.
les entrailles lustrales (8, 183). Comme on vient de le dire (8, 180n), il s'agit du rite grec. Les participants mangent donc aussi une partie des exta, les entrailles. On ne sait pas trop pourquoi Virgile les qualifie de « lustrales ». Peut-être parce que le sacrifice avait une valeur purificatrice.
Ces cérémonies annuelles (8, 185). Virgile va présenter en détail l'étiologie du culte d'Hercule à l'ara maxima, considéré comme très ancien, antérieur même à la fondation de Rome (cfr 8, 102n). Ce culte commémore la victoire d'Hercule sur Cacus.