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OVIDE, MÉTAMORPHOSES, LIVRE XIV
[Trad. et notes de A.-M. Boxus et J. Poucet, Bruxelles, 2009]
Légendes proprement romaines (14, 622-851)
Vertumnus et Pomone (1) : premières approches (14, 622-697)
Sous le règne de Proca vivait une nymphe appelée Pomone, dont la passion exclusive était l'horticulture et les soins de son jardin ; fuyant toutes les avances masculines, elle interdisait à tous les dieux champêtres l'accès de son domaine, et elle fuyait aussi Vertumnus, le plus épris de ses nombreux prétendants. (14, 622-642)
Doté de l'art de se déguiser, Vertumnus cherchait à contempler de près sa bien-aimée, en se présentant sous une infinité d'aspects. Un jour, s'étant déguisé en vieille femme, il put s'introduire dans le jardin, s'approcher de Pomone, et gagner sa confiance. La vieille reprocha à la nymphe de fuir toute union amoureuse, et lui conseilla de choisir Vertumnus parmi tous ses prétendants, en lui vantant toutes ses qualités (constance, sérieux, beauté, fidélité, goût pour les jardins, etc...). Ainsi il plaidait habilement sa propre cause sous une fausse apparence et tentait de convaincre Pomone en proposant de lui raconter une histoire, qui devrait la mettre en garde contre le risque de mécontenter des divinités comme Aphrodite et Némésis. (14, 643-697)
| Iamque 
   Palatinae summam Proca gentis habebat. Rege sub hoc Pomona fuit, qua nulla Latinas inter hamadryadas coluit sollertius hortos | Désormais
   Proca régnait sur  la 
   nation du Palatin. Sous ce roi, vivait Pomone : des Hamadryades du Latium, nulle plus habilement qu'elle ne soigne les jardins ; | |
| 14, 625 | 
   
   nec fuit 
   arborei studiosior altera fetus, | 
   nulle 
   autre ne montre plus d'intérêt pour les fruits 
   des arbres, | 
| 14, 630 | 
   
   bracchia 
   conpescit, fisso modo cortice lignum | 
   qui 
   s'avancent en tous sens, tantôt insérant dans 
   une écorce fendue | 
| 14, 635 | 
   
   Vim tamen 
   agrestum metuens pomaria claudit | 
   Mais 
   craignant les attaques des dieux champêtres, elle 
   ferme son verger | 
| 14, 640 | 
   
   quique 
   deus fures uel falce uel inguine terret, | 
   et ce
   dieu qui effraie les voleurs avec sa faulx 
   ou son membre, | 
| 14, 645 | 
   
   Tempora 
   saepe gerens faeno religata recenti | 
   Comme 
   souvent ses tempes étaient ceintes de foin 
   frais coupé, | 
| 14, 650 | 
   
   induerat 
   scalas, lecturum poma putares ; | 
   était-il 
   chargé d'une échelle, on aurait pensé qu'il 
   allait cueillir des fruits ; | 
| 14, 655 | innitens 
   baculo, positis per tempora canis, adsimulauit anum cultosque intrauit in hortos pomaque mirata est : « tanto » que « potentior !» inquit paucaque laudatae dedit oscula, qualia numquam uera dedisset anus ; glaebaque incurua resedit, | 
   appuyé 
   sur un bâton, les tempes couvertes de cheveux 
   blancs, | 
| 14, 660 | 
   
   
   suspiciens pandos autumni pondere ramos. | 
   tout courbé, regardant les branches ployant sous le 
   poids de l'automne. | 
| 14, 665 | 
   
   haec 
   quoque, quae iuncta est, uitis requiescit in 
   ulmo, | 
   La vigne 
   aussi, qui lui est unie, se repose sur l'orme ; | 
| 14, 670 | 
   
   
   sollicitata procis nec quae Lapitheia mouit | 
   pour la 
   courtiser, ni non plus celle qui fit se battre les
   Lapithes, | 
| 14, 675 | 
   
   Sed tu si 
   sapies, si te bene iungere anumque | 
   Mais si 
   tu es sage, si tu veux faire un bon mariage | 
| 14, 680 | 
   
   quam 
   mihi ; nec passim toto uagus errat in orbe ; | que je ne 
   le connais ; il n'erre pas à l'aventure à 
   travers le monde ; il réside en ces seuls lieux ; et, comme la plupart des amants, il ne s'éprend pas de celle qu'il vient de voir ; c'est toi qui seras son premier et son ultime amour, et il te vouera sa vie, à toi seule. Ajoute à cela qu'il est jeune, doté d'une beauté naturelle, | 
| 14, 685 | 
   
   munus 
   habet formasque apte fingetur in omnes | 
   et apte à 
   simuler parfaitement toutes les formes ; il deviendra | 
| 14, 690 | 
   
   nec, quas 
   hortus alit, cum sucis mitibus herbas, | ni les 
   plantes aux jus suaves qui poussent dans ton 
   jardin, ni quoi que ce soit, rien sinon toi. Aie pitié de son ardeur et crois qu'il est présent en personne, te suppliant par ma bouche. Redoute les dieux vengeurs, et la déesse d'Idalie qui prend en haine les coeurs insensibles, et la colère tenace de la déesse de Rhamnonte ! | 
| 14, 695 | 
   
   Quoque 
   magis timeas, (etenim mihi multa uetustas  | 
   Et pour t'effrayer davantage – car ma vieillesse 
   m'a donné de savoir | 
Vertumus et Pomone (2) : histoire d'Iphis et d'Anaxarété et conquête de Pomone (14, 698-771)
Iphis, d'origine modeste, est violemment épris de la jeune Anaxarété, de naissance noble. Il fait tout pour l'approcher mais elle dédaigne et repousse cruellement ses avances. Ne pouvant supporter son dédain, il lui annonce qu'il va se suicider sous ses yeux, pour accomplir au moins un acte qu'elle pourra apprécier. En outre il attend aussi de son geste spectaculaire une célébrité posthume. (14, 698-732)
Il se pend alors à la porte de la jeune fille. Le cadavre d'Iphis est ramené à sa mère éplorée, et quand le convoi funèbre passe devant la demeure d'Anaxarété, la jeune fille qui le regarde du haut de sa maison est soudain pétrifiée, à l'image de son coeur de pierre. (14, 733-758)
Par ce conte, Vertumnus toujours déguisé en vieille femme, a tenté de pousser Pomone à changer d'avis, mais sans succès. Toutefois, quand il reprend sa forme première, il n'a nul besoin de recourir à la violence, car Pomone séduite lui tombe dans les bras. (14, 759-771)
| 14, 698 | 
   
   Viderat a 
   ueteris generosam sanguine Teucri | 
   Iphis, 
   né dans une famille d'origine modeste, avait 
   aperçu  | 
| 14, 700 | 
   
   uiderat 
   et totis perceperat ossibus aestum. | il l'avait aperçue 
   et avait senti un feu envahir tous ses os. | 
| 14, 705 | 
   
   et modo 
   de multis blanditus cuique ministris | tantôt il cherchait 
   à flatter chacune des nombreuses servantes | 
| 14, 710 | 
   
   molle 
   latus tristisque serae conuicia fecit. | plein de tristesse, 
   il accablait la serrure de ses 
   invectives. | 
| 14, 715 | 
   
   uerba 
   superba ferox et spe quoque fraudat amantem. | ajoute des paroles 
   hautaines et interdit même tout espoir à son 
   amant. | 
| 
   
   et Paeana 
   uoca nitidaque incingere lauru. | appelle
   Péan 
   et ceins ton front de brillant laurier. | |
| 14, 725 | 
   
   quam 
   uitam geminaque simul mihi luce carendum.  | et que un même 
   instant doit me priver d'une double lumière. | 
| 14, 730 | 
   
   este mei 
   memores (nihil ultra lingua precari | souvenez-vous de 
   moi – ma 
   langue ne peut prier davantage 
   – , | 
| 14, 735 | 
   
   cum 
   foribus laquei religaret uincula summis, | il fixa en haut des 
   battants des lacets formant un noeud 
   coulant, | 
| 14, 740 | 
   
   uisa 
   dedisse sonum est adapertaque ianua factum | 
   un son 
   tremblant et de longues plaintes, avant de 
   s'ouvrir sur le drame. | 
| 14, 745 | 
   
   edidit et 
   matrum miserarum facta peregit, | des parents endeuillés et fait
   les 
   gestes des mères malheureuses. | 
| 14, 750 | 
   
   uenit 
   Anaxaretes, quam iam deus ultor agebat. | de la fille insensible,  déjà 
   agitée par le dieu de la vengeance. Touchée pourtant, elle dit : “ Voyons ce malheureux cortège ”, et gagna le sommet de la maison, percé de larges baies. Elle avait à peine vu de loin le cadavre d'Iphis étendu sur le lit funèbre, que ses regards se figèrent et que le sang qui lui donnait sa chaleur | 
| 14, 755 | 
   
   inducto 
   pallore fugit ; conataque retro | abandonna son 
   corps, provoquant sa pâleur. Elle tenta de 
   reculer, | 
| 
   
   seruat 
   adhuc Salamis ; Veneris quoque nomine templum | existe encore à 
   Salamine, qui possède aussi un temple de 
   Vénus, | |
| 14, 765 | 
   
   Haec ubi 
   nequiquam forma 
   deus aptus anili | Lorsque le dieu, 
   travesti en vieille femme, eut raconté cette histoire | 
| 14, 770 | Vimque 
   parat ; sed ui non est opus, inque figura capta dei nymphe est et mutua uulnera sensit. | Il se prépare à la violence ; mais la violence 
   n'est pas nécessaire : la figure du dieu séduit la nymphe, qui ressent les mêmes blessures. | 
Fondation de Rome et guerre romano-sabine – Métamorphose d'une source (14, 772-804)
Au temps d'Amulius et de Numitor à Albe, Romulus fonda les murs de la ville de Rome, qui subit bientôt les assauts des Sabins de Titus Tatius. Ceux-ci faillirent conquérir la citadelle romaine suite à la trahison de Tarpéia et à l'intervention de Junon. Pour secourir les Romains, Vénus obtient le concours des Naïades d'une source proche du temple de Janus. Les Nymphes commencent par faire couler abondamment leur source, qui se répand en différents bras qui se transforment ensuite en coulées de feu. Ainsi Rome fut sauvée de l'invasion sabine par la métamorphose des eaux d'une source en coulées de feu. (14, 772-795)
Enfin, après leur échec, les Sabins sont affrontés à Romulus dans une guerre très éprouvante qui aboutit à un accord de paix instaurant un partage de la royauté entre Romulus et Tatius. (796-804)
| 
   
   Proximus 
   Ausonias iniusti miles Amuli | Bientôt après, l'injuste
   Amulius régna par 
   les armes | |
| 
   
   moenia 
   conduntur ; Tatiusque patresque Sabini | sont fondées les murailles de la 
   ville. Tatius et les 
   sénateurs Sabins | |
| 14, 780 | 
   
   inuadunt 
   portasque petunt, quas obice firmo | et gagnent les 
   portes qu'avait fermées à l'aide d'une barre 
   solide | 
| 14, 785 | 
   
   dis licet 
   acta deum. Iano loca iuncta tenebant | d'annuler jamais les actes 
   d'autres dieux. Près du temple de 
   Janus, les Naïades d'Ausonie habitaient un lieu près d'une source fraîche ; Vénus les prie de l'aider ; à cette juste demande de la déesse, les nymphes acquiescent et font jaillir de leur source des bras aux flots abondants ; cependant, le temple de Janus étant ouvert, | 
| 14, 790 | 
   
   ora 
   patentis erant, neque iter praecluserat unda ; | le passage était 
   encore possible, car les eaux ne l'avaient pas 
   fermé ; | 
| 14, 795 | 
   
   
   audebatis, aquae, non ceditis ignibus ipsis. | avec le froid des Alpes, vous ne 
   le cédez en rien au feu lui-même. Le double portail du temple est enfumé sous ce ruissellement de feu ; et la porte de la cité, vainement promise aux inflexibles Sabins, c'est une source nouvelle qui la défend, laissant aux troupes de Mars le temps de revêtir leurs armes ; plus tard, Romulus prit l'initiative | 
| 14, 800 | 
   
   obtulit 
   et strata est tellus Romana Sabinis | de les lancer dans 
   la bataille ; et le sol de Rome fut couvert 
   alors | 
Métamorphoses de Romulus en Quirinus et de Hersilie en Hora (14, 805-851)
Tatius mort, Romulus régnait sur les Romains et les Sabins quand Mars rappela à Jupiter sa promesse de porter Romulus au rang des dieux. Avec l'accord de Jupiter, Mars vint enlever pour l'emmener au ciel le roi de Rome, au moment où il rendait la justice sur le Palatin. Et au corps du roi disparu, on substitua une statue digne d'un dieu, en l'occurrence celle de Quirinus revêtu de la trabée. (14, 805-828)
Hersilie, l'épouse éplorée de Romulus, reçoit par l'intermédiaire d'Iris un message de Junon, lui disant de cesser de pleurer et de se rendre dans le temple de Quirinus, où elle demande à Iris la faveur d'apercevoir son époux. Parvenue sur le Palatin, elle est emportée dans les airs par un astre éclatant tombé du ciel. Cet astre n'est autre que Romulus-Quirinus, qui a changé Hersilie en déesse, désormais nommée Hora. (14, 829-851)
| 
   
   Occiderat 
   Tatius, populisque aequata duobus, | Tatius était mort, 
   et toi, Romulus tu octroyais aux deux peuples | |
| 14, 810 | 
   
   praemia 
   (sunt promissa mihi dignoque nepoti) | c'est le temps de 
   la récompense promise, à moi et à ton 
   petit-fils : | 
| 14, 815 | 
   
   dixisti ; 
   rata sit uerborum summa tuorum ! » | puisse l'ensemble de tes paroles 
   s'accomplir ! » Le tout-puissant approuva de la tête. Alors de sombres nuages obscurcirent les airs, le tonnerre et la foudre terrorisèrent l'univers. À ces signes, Gradivus comprit qu'était acquis l'enlèvement promis. Appuyé sur sa lance, il monte sur son char au timon ensanglanté, | 
| 
   
   inpauidus
   conscendit equos Gradiuus et ictu | et intrépide, stimule son attelage d'un 
   claquement
   de fouet.  | |
| 
   
   dilapsum est tenues, ut lata plumbea 
   funda | à travers l'air 
   léger, comme se dissout en plein ciel | |
| 14, 830 | 
   
   Irin ad Hersiliam 
   descendere limite curuo | ordonne à
   Iris de 
   descendre par son sentier en arc auprès d'Hersilie | 
| 14, 835 | 
   
   siste 
   tuos fletus, et, si tibi cura uidendi | cesse de pleurer, 
   et si ton désir est de voir ton époux, | 
| 14, 840 | Illa 
   uerecundo uix tollens lumina uultu : «O dea,namque mihi nec quae sis dicere promptum est, et liquet esse deam duc, o duc » inquit « et offer coniugis ora mihi. Quem si modo posse uidere fata semel dederint, caelum accepisse fatebor ! » | Celle-ci, très 
   respectueuse, osant à peine lever les yeux, 
   dit : | 
| 14, 845 | 
   
   Nec mora, 
   Romuleos cum uirgine Thaumantea | Et sans tarder, 
   elle monte, avec la fille de Thaumas | 
| 
   
   excipit 
   et priscum pariter cum corpore nomen | et il change son nom d'antan en 
   même temps qu'il change son corps,  | 
NOTES
Proca... Palatin (14, 622). Proca fait partie des derniers rois albains légendaires dont Ovide a présenté la liste en Mét., 14, 609-621. Proca est le fils d'Aventinus, et le père d'Amulius et de Numitor. Rome n'a pas encore été fondée par Romulus, mais la zone est déjà habitée : Ovide a parlé un peu plus haut d'Évandre et de ses remparts (Mét., 14, 456), qui, comme on le sait notamment par Virgile (Én., 8, 97-368), occupaient le Palatin. L'expression « Proca régnait sur la nation du Palatin » est donc un peu particulière. Ovide veut simplement parler de Rome.
Pomone (14, 623). Pomone était une très ancienne divinité romaine qui veillait sur les fruits. On ne sait pas grand chose sur elle, sinon qu'elle disposait d'un flamine et d'un bois sacré, le Pomonal, sur la route de Rome à Ostie. La légende de cette divinité champêtre est surtout connue par ce passage d'Ovide, qui la lie à Vertumnus.
Hamadryades (14, 623). Les Hamadryades (mot emprunté au grec) sont les nymphes des arbres, parmi lesquelles Ovide range Pomone.
dieux champêtres (14, 635). Ovide va les énumérer aux vers 637-639, d'une manière qui rappelle les Mét., 1, 192-193, où on lit : « J'ai pour moi les demi-dieux, les divinités rustiques, / Nymphes, Faunes, Satyres, et Silvains, habitants des montagnes ». Ces divinités rustiques secondaires habitent la terre, n'ayant pas été jugées dignes de l'honneur du ciel. Les Hamadryades sont féminines ; celles qui vont être citées sont masculines, et l'accent sera mis sur leur intérêt pour le sexe.
Satyres (14, 637). Personnages de la mythologie grecque, les Satyres sont des divinités champêtres mi-humaines, mi-animales, qu'on rencontre dans les endroits sauvages et qui symbolisent « la fécondité, l'énergie vitale de la nature » (J.-Cl. Belfiore).
Pans (14, 638). Il a déjà été question plus haut (Mét., 14, 515) du Pan grec, identifié au Faunus latin. Le pluriel, Panes, résultat de la « multiplication » du dieu, est utilisé en latin pour désigner les divinités champêtres qui font partie du cortège de Pan. On trouve aussi dans ce sens le terme latin Fauni (les Faunes), issu lui de la « multiplication » du dieu Faunus, le correspondant de Pan.
Silène (14, 639). Il a déjà été question de Silène plus haut (Mét., 11, 90 avec la note). Comme nom propre, Silène, fils d'Hermès (ou de Pan) et d'une nymphe, est une figure burlesque de vieillard, toujours amoureux, faisant partie du cortège de Dionysos-Bacchus-Liber. En tant que nom commun, le mot silène désigne un satyre devenu vieux. Le personnage était représenté sous les traits d'un vieillard, « mais il avait toute la pétulance d'un jeune homme vigoureux » (G. Lafaye).
ce dieu qui effraie (14, 640). C'est le Priape ithyphallique, qui servait d'épouvantail dans les jardins. Voir Mét., 9, 347, et Fastes (1, 415-416)
Vertumnus (14, 642). Vertumnus (ou Vortumnus) est considéré parfois comme d'origine étrusque. Lié au verbe uertere (« tourner, changer », il patronnerait les cycles des saisons. Voir Fastes, 6, 409-410, avec note détaillée. Il était doué de l'art de se métamorphoser, ce qui a manifestement excité l'imagination d'Ovide dans le présent récit.
tronc solitaire (14, 663). « C'est encore l'usage en Italie de faire courir la vigne d'arbre en arbre » (J. Chamonard).
Hélène (14, 669). C'est la belle Hélène de Troie, séductrice réputée.
Lapithes (14, 670). On sait que les fameux combats qui opposèrent les Lapithes et les Centaures ont eu pour cause l'enlèvement d'Hippodamie, l'épouse de Pirithoüs, par le Centaure Eurytos (voir Mét., 12, 210-234).
l'épouse... d'Ulysse (14, 671). Pénélope, dont la résistance aux prétendants, est bien connue.
monts Albains (14, 674). Les collines voisines de Rome, du côté d'Albe-la-Longue, dont Proca est le roi (cfr v. 622).
flambeaux (14, 677). Les torches nuptiales, synonyme ici de mariage.
déesse d'Idalie (14, 693). Idalium est une ville de Chypre, célèbre pour son culte de Aphrodite/Vénus, la déesse de l'amour.
Rhamnonte (14, 694). Rhamnonte, petite ville proche de Marathon, en Attique, était connue pour son sanctuaire à Némésis, déesse grecque personnifiant la vengeance divine, puissance chargée d'abattre toute démesure.
Iphis... Anaxarété (14, 698-9). Deux protagonistes d'une légende chypriote. Iphis, jeune chypriote d'origine modeste, est vivement épris d'Anaxarété, jeune fille noble, descendant de Teucer, le fondateur de Salamis de Chypre (où se dresse une statue d'Anaxérété ; cfr 14, 759-761). Ovide semble être le seul à nous avoir transmis cette histoire avec les noms d'Iphis et Anaxarété. Mais on trouve chez Antoninus Liberalis, 39, un récit un peu parallèle, avec des protagonistes nommés Arcéophon et Arsinoé, et chez Plutarque, Amator., 20, 12 (Moralia, 766cf) où les protagonistes sont appelés Euxynthétos et Leucomantis.
la serrure (14, 710). Les invectives d'un amant devant la porte fermée d'une femme aimée sont un « topos » courant de la poésie élégiaque.
coucher des Chevreaux (14, 711). Étoiles de la constellation du Cocher, dont le coucher annonçait des orages.
Norique (14, 712). Région montagneuse d'Europe centrale, sur la rive droite du Danube, réputée pour ses mines de fer. (J. Chamonard)
Péan (14, 720). Ici, le péan est synonyme de chant d'allégresse, comme chez Homère, Il., 22, 391-2, le chant des Achéens après la mort d'Hector. Par ailleurs, Péan était le médecin des dieux, et désignait généralement Apollon, dieu-médecin (Mét., 1, 566).
les gestes des mères malheureuses (14, 745). « Elle s'arrache les cheveux et se meurtrit le sein, selon l'usage » (J. Chamonard).
destiné au bûcher (14, 747). « Le brancard, sur lequel avait été porté le corps à découvert, était brûlé avec lui, à la fin de la cérémonie » (J. Chamonard).
Ne crois pas... (14, 759). C'est Vertumnus, sous les traits de la vieille, qui s'adresse à Pomone.
la maîtresse d'Iphis (14, 759). Vénus.
Vénus « aux aguets » (14, 761). Ou Vénus « Spectatrice ». Ovide rend par le terme latin Prospiciens le terme grec Parakuptousa employé par Plutarque (Amator., 20, 12) « et qui signifie 'la tête penchée en avant' (pour regarder ou entendre). Il y avait sans doute, dans un temple de Salamine, une statue d'Aphrodite ayant cette attitude [...] à laquelle on avait rattaché la légende d'Anaxarété » (J. Chamonard).
Amulius... Numitor (14, 772-773). Ovide revient, par des allusions très brèves, à la légende des origines de Rome (« La Rome avant Rome »), dont la version la plus connue nous a été transmise par Tite-Live, 1, 5-6. Numitor, successeur de Proca sur le trône d'Albe, est évincé par son frère Amulius. Mais l'usurpateur est finalement assassiné par les petits-fils de Numitor, Romulus et Rémus, devenus adultes, qui rétablissent Numitor sur le trône d'Albe, et fondent la ville de Rome.
Palès (14, 774). Les Palilia ou Parilia, fêtes en l'honneur de Palès, une divinité champêtre protectrice des troupeaux, étaient célébrées le 21 avril, date conventionnelle considérée comme celle de la fondation de Rome (voir Fastes, 4, 806-862)
Tatius... Cures (14, 775-778). Tatius est le roi des Sabins de la région de Cures, qui, pour venger le rapt des Sabines, déclarèrent la guerre aux Romains de Romulus (Tite-Live, 1, 9, 8-16).
Tarpeia (14, 776). Jeune romaine, fille du commandant de la Citadelle de Rome, avait, par amour de l'or ou par amour pour Tatius, trahi sa patrie et introduit les ennemis dans la place. Ces derniers, quand elle demanda pour prix de sa trahison « ce qu'ils portaient au bras gauche », c'est-à-dire des bijoux, la châtièrent en l'écrasant sous leurs boucliers. (Tite-Live, 1, 11, 5-9).
fils d'Ilia (14, 781). Romulus est le fils de Mars et d'Ilia (ou Rhéa Silvia), fille de Numitor. Cfr infra la n. au v. 806.
fille de Saturne (14, 781). C'est Junon qu'Ovide, à l'exemple de Virgile dans l'Énéide, montre pleine d'hostilité envers les Romains, descendants des Troyens. Elle s'oppose à Vénus (v. 783), toujours prête à défendre les descendants de son fils Énée.
Près du temple... (14, 785). La légende abordée ici, celle du sauvetage de la ville par les Nymphes d'une source, ne semble rapportée que par Ovide, à deux reprises, mais la version des Métamorphoses est légèrement différente de celle des Fastes (1, 265-275). Elle sera reprise plus tard par Macrobe (Saturnales, 1, 17-18) et s'inscrit bien ici dans le thème des Métamorphoses. Il est difficile de déterminer l'origine exacte de cette légende. Si l'on en croit Varron (De la langue latine, 5, 156), une source d'eau chaude (les Lautulae) aurait existé jadis dans les environs immédiats du sanctuaire ; ce détail aurait pu fournir un support matériel à la légende, à moins qu'il n'existe un lien plus essentiel entre Janus et les eaux.
Janus (14, 789). Sur Janus en général, voir Fastes, 1, 63-294, et plus spécialement les vers 255-288 avec les notes, concernant l'épisode de la source sulfureuse évoqué ici.
traité de paix (14, 804). C'est le fameux traité conclu entre le Romain Romulus et le Sabin Titus Tatius après la réconciliation obtenue par l'intervention des Sabines. Il instaurait notamment la fusion des deux peuples et la royauté double (Tite-Live, 1, 13, 4-8).
Mavors (14, 806). Nom parfois donné à Mars, dieu de la guerre. La légende fait du dieu Mars le père des jumeaux Romulus et Rémus. En effet, Ilia /Rhéa Silvia, la fille de Numitor, devenue Vestale et donc contrainte à la virginité par décision de son oncle Amulius qui voulait empêcher son frère Numitor d'avoir une descendance, avait été engrossée par le dieu Mars, et avait mis au monde les jumeaux. (Tite-Live, 1, 4, 1-3). Les vers 805-828 racontent l'apothéose de Romulus, dont on trouvera une version un peu différente chez Tite-Live (1, 16).
timon ensanglanté (14, 819). Le char du dieu est couvert du sang des batailles.
Gradivus (14, 820). Épithète appliquée à Mars chez les Romains. Voir Mét., 6, 427 et la note avec d'autres liens.
Quirites (14, 824). « À l'origine, les Quirites, venus de Cures (v. 778) représentaient dans la population de Rome l'élément proprement sabin. Depuis la mort de Tatius (v. 805), ils n'ont plus d'autre chef que Romulus et ne font plus qu'un avec les Romains, à qui ils donnent leur nom » (J. Chamonard). Le nom désigne les citoyens romains. En d'autres termes, Romulus rendait la justice au peuple romain.
coussins (14, 827). Le mot latin puluinar désigne un coussin de lit sur lequel on plaçait les statues des dieux auxquels on offrait un festin rituel, appelé lectisternium.
Quirinus en trabée (14, 828). Quirinus est une vieille divinité romaine à laquelle fut assimilé Romulus divinisé. La trabée était un « manteau blanc orné de bandes de pourpre, servant aux rois » (F. Gaffiot - P. Flobert). Romulus, devenu le dieu Quirinus, conserve donc son manteau de roi.
Iris (14, 830). Iris, associée à l'arc en ciel, est la messagère des dieux, et particulièrement de Junon. On l'a vue plus haut dans ce rôle (Mét., 14, 85). Cfr aussi Mét. 1, 271 ; 4, 480 et 11, 616.
Hersilie (14, 830). Hersilie est une des Sabines enlevées par les Romains. Selon la version de la légende retenue ici, elle épousa Romulus, et après l'apothéose de celui-ci, elle fut elle aussi enlevée au ciel et associée à son culte sous le nom d'Hora (v. 851).
colline de Quirinus (14, 836). Quirinus avait son temple sur la colline du Quirinal.
fille de Thaumas (14, 845). Iris est la fille du Titan Thaumas et de l'Océanide Électre. Sur Iris, voir note au vers 14, 830.
la colline de Romulus (14, 846). La colline de Romulus divinisé, c'est-à-dire le Quirinal (cfr n. au vers. 836).
Hora (14, 851). La religion romaine rattachait à certaines divinités des entités féminines, qui en exprimaient un aspect ou un mode d'action essentiel : on rencontrait ainsi des ensembles du type Salacia Neptuni, Maia Volcani, Hora Quirini, Virites Quirini (G. Dumézil, Religion romaine archaïque, 1974, p. 399). On ne sait pas ce que les Romains entendaient exactement par Hora Quirini, mais une partie de la tradition y a vu l'épouse de Quirinus-Romulus, c'est-à-dire Hersilie. Inutile de préciser qu'avec ces constructions, on n'est pas dans le domaine de la religion romaine, mais dans celui des jeux littéraires.
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