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Métamorphoses d'Ovide : Avant-Propos - Notices - Livre VII (Plan) - Hypertexte louvaniste - Iconographie ovidienne - Page précédente - Page suivante


OVIDE, MÉTAMORPHOSES, LIVRE VII

[Trad. et notes de A.-M. Boxus et J. Poucet, Bruxelles, 2006]

 

 Céphale et Procris (7, 661-865)

 

Introduction au récit de Céphale : son extraordinaire javelot (7, 661-689)

Le récit d'Éaque est suivi d'un banquet et d'une nuit de repos, avant que Céphale ne reparte, mission accomplie, pour Athènes. Le lendemain, retenus à Égine faute de vent favorable, Céphale et les fils de Pallas, ses compagnons, bavardent longuement avec Phocus, un des fils d'Éaque. (7, 661-671)

Phocus, passionné de chasse, interroge Céphale à propos de son admirable javelot qui l'intrigue beaucoup. Cette demande émeut Céphale, qui propose de raconter une histoire douloureuse, dans laquelle on pressent le rôle funeste du fameux javelot. (7, 672-689)

7, 661 Talibus atque aliis longum sermonibus illi

inpleuere diem ; lucis pars ultima mensae

est data, nox somnis. Iubar aureus extulerat Sol,

flabat adhuc Eurus redituraque uela tenebat.
 
Tous deux avaient échangé, une longue journée durant,

ces propos et d'autres encore ; ils consacrèrent la fin du jour à la table

et la nuit au sommeil. Le Soleil avait déployé ses rayons d'or,

l'
Eurus soufflait encore, retenant les voiles prêtes au retour.
 
7, 665

Ad Cephalum Pallante sati, cui grandior aetas,

ad regem Cephalus simul et Pallante creati

conueniunt ; sed adhuc regem sopor altus habebat.

Excipit Aeacides illos in limine Phocus ;

nam Telamon fraterque uiros ad bella legebant.
 

Les fils de Pallas se rendent auprès de Céphale, leur aîné ;

puis Céphale et les fils de Pallas se rendent tous trois chez le roi ;

mais celui-ci était encore profondément endormi.

Phocus, un des fils d'Éaque, les accueille sur le seuil,

car
Télamon et son frère levaient des troupes pour la guerre.
 
7, 670 Phocus in interius spatium pulchrosque recessus

Cecropidas ducit, cum quis simul ipse resedit.


Adspicit Aeoliden ignota ex arbore factum

ferre manu iaculum, cuius fuit aurea cuspis.

Pauca prius mediis sermonibus ille locutus :
 
Phocus conduit les Cécropides à l'intérieur du palais,

dans des salles magnifiques et il s'assied avec eux.


Il remarque que le
descendant d'Éole tenait en main,

fait d'un bois inconnu, un javelot muni d'une pointe d'or.  

Après quelques paroles, en pleine conversation, il dit :
 
7, 675 « Sum nemorum studiosus » ait « caedisque ferinae ;

qua tamen e silua teneas hastile recisum,

iamdudum dubito ; certe si fraxinus esset,

fulua colore foret ; si cornus, nodus inesset.

Vnde sit, ignoro, sed non formosius isto
 
« Je suis un passionné de forêts et de chasse aux fauves ;

et depuis un moment je me demande dans quel bois

a été taillé ce javelot que tu as en main ; si c'était du frêne,

il serait de couleur fauve ; si c'était du cornouiller, il aurait des noeuds.

J'ignore d'où elle vient, mais plus belle arme de jet
 
7, 680 uiderunt oculi telum iaculabile nostri. »

Excipit Actaeis e fratribus alter et : « usum

maiorem specie mirabere » dixit « in isto.

Consequitur, quodcumque petit, fortunaque missum

non regit, et reuolat nullo referente cruentum. »
 
que la tienne, jamais mes yeux n'en ont vue. »

L'un des frères arrivés d'
Acté l'interrompt : « Son efficacité,

tu seras surpris, est encore supérieure à sa beauté.

Ce trait atteint tout ce qu'il vise ; une fois lancé, il ne se dirige pas

au hasard et revient trempé de sang, sans que personne le rapporte. »
 
7, 685 Tum uero iuuenis Nereius omnia quaerit,

cur sit et unde datum, quis tanti muneris auctor.

Quae patitur pudor ille refert, et cetera narrat ;

qua tulerit mercede, silet tactusque dolore

coniugis amissae lacrimis ita fatur obortis :
 

Alors le petit-fils de Nérée veut vraiment tout savoir :

pourquoi ce don, d'où vient-il, et quel est l'auteur d'un tel présent ?

Céphale répond, racontant tout ce qu'il peut rapporter sans rougir,

mais il tait le prix qu'il a payé pour cette arme. Frappé de douleur

à la pensée de l'épouse qu'il a perdue, les yeux pleins de larmes, il dit :
 

Début du récit de Céphale : Céphale perd Procris à cause d'Aurore (7, 690-746)

Céphale commence son récit : époux heureux de Procris, il fut, peu de temps après son mariage, enlevé par la déesse Aurore, à l'occasion d'une chasse ; mais fidèle à Procris, il résista à la déesse qui, furieuse, le renvoya à son épouse, lui prédisant qu'il le regretterait. (7, 690-713)

La déesse, par ces paroles, éveille les soupçons de Céphale, dont elle transforme les traits. Ainsi métamorphosé, il décide d'éprouver la fidélité de Procris et il la trouve irréprochable dans sa demeure, en train de déplorer la disparition de son époux. En dépit de ce constat rassurant, l'époux méfiant persiste et, toujours incognito, cherche à vaincre la résistance de Procris, dont il finit par triompher, en lui offrant des présents de plus en plus somptueux. Furieux, il lui révèle alors son identité, et Procris, humiliée et ulcérée, s'enfuit dans les bois, où elle mène la vie errante des chasseresses consacrées à Diane. (7, 714-746)

7, 690 « Hoc me, nate dea, (quis possit credere ?) telum

flere facit facietque diu, si uiuere nobis

fata diu dederint ; hoc me cum coniuge cara

perdidit : hoc utinam caruissem munere semper !

Procris erat, si forte magis peruenit ad aures
 

« C'est ce javelot, fils de déesse,  – qui pourrait le croire ?  – 

qui provoque mes pleurs et le fera longtemps, si le destin

m'accorde une longue vie ; c'est lui qui m'a perdu, quand j'ai perdu

mon épouse adorée. Ah ! que n'ai-je toujours vécu sans ce présent !

Elle s'appelait
Procris – peut-être tes oreilles ont-elles entendu parler

7, 695 Orithyia tuas, raptae soror Orithyiae,

si faciem moresque uelis conferre duarum,

dignior ipsa rapi ! Pater hanc mihi iunxit Erechtheus,

hanc mihi iunxit amor ; felix dicebar eramque ;

non ita dis uisum est, aut nunc quoque forsitan essem.
 
plutôt d'Orithyie – , elle était la soeur d'Orithyie, celle qui fut enlevée.

Si on compare la beauté et le caractère des deux soeurs, c'est Procris

qui méritait le plus d'être enlevée ! Son père Érechthée l'unit à moi ;

l'amour aussi l'unit à moi ; on me disait heureux, et je l'étais ;

mais les dieux jugèrent autrement, sinon peut-être le serais-je encore.
 
7, 700 Alter agebatur post sacra iugalia mensis,

cum me cornigeris tendentem retia ceruis

uertice de summo semper florentis Hymetti

lutea mane uidet pulsis Aurora tenebris

inuitumque rapit. Liceat mihi uera referre
 
Durant le second mois après la célébration de notre union,

tandis que je tendais mes filets pour capturer des cerfs encornés,

un beau matin, du haut de l'
Hymette toujours en fleurs,

l'
Aurore vermeille, après avoir chassé les ténèbres, m'aperçut

et m'enleva, malgré moi. Laissez-moi dire la vérité
 
7, 705 pace deae, quod sit roseo spectabilis ore,

quod teneat lucis, teneat confinia noctis,

nectareis quod alatur aquis, ego Procrin amabam ;

pectore Procris erat, Procris mihi semper in ore.

Sacra tori coitusque nouos thalamosque recentes
 
sans offenser la déesse : qu'elle mérite d'attirer les regards,

avec son visage de rose, qu'elle règne sur les confins du jour et de la nuit,

qu'elle s'abreuve du nectar de la rosée, soit. Mais moi, j'aimais Procris,

Procris occupait mon coeur, toujours son nom était sur mes lèvres.

J'invoquai les lois du mariage, nos jeunes étreintes, notre union récente
 
7, 710

primaque deserti referebam foedera lecti.

Mota dea est et : “ Siste tuas, ingrate, querellas ;

Procrin habe !  ” dixit, “ quodsi mea prouida mens est,

non habuisse uoles.  ”  Meque illi irata remisit.


Dum redeo mecumque deae memorata retracto,
 

et nos premiers accords dans la couche que je venais de quitter.

La déesse s'irrita et dit : “ Ingrat, cesse tes jérémiades ;

Garde ta Procris ! Mais si mon esprit est clairvoyant,

tu souhaiteras ne pas l'avoir épousée. ” Et, furieuse, elle me renvoya.


Sur le chemin du retour, repensant aux paroles de la déesse,
 
7, 715 esse metus coepit, ne iura iugalia coniunx

non bene seruasset ; facies aetasque iubebat

credere adulterium, prohibebant credere mores.

Sed tamen afueram, sed et haec erat, unde redibam,

criminis exemplum, sed cuncta timemus amantes.
 

je commençai à craindre que mon épouse n'ait pas bien respecté

ses engagements conjugaux ; sa beauté et sa jeunesse me poussaient

à croire à un adultère, sa manière d'être m'empêchait d'y croire.

Mais cependant j'avais été absent, et celle que je quittais

était un exemple d'inconduite ; mais nous, amants, tout nous effraye.
 

7, 720 Quaerere, quod doleam, statuo donisque pudicam

sollicitare fidem ; fauet huic Aurora timori

inmutatque meam (uideor sensisse) figuram.


Palladias ineo non cognoscendus Athenas

ingrediorque domum ; culpa domus ipsa carebat
 
Je décide, chose que j'allais regretter, d'enquêter et d'éprouver

par des présents la fidélité de la vertueuse Procris ; l'Aurore

seconde ma crainte et  – je crois l'avoir senti –
change mon apparence.


Méconnaissable, j'entre dans Athènes, la cité de Pallas

et pénètre dans ma demeure ; la maison même était irréprochable,
 
7, 725 castaque signa dabat dominoque erat anxia rapto ;

uix aditus per mille dolos ad Erechthida factus.

Vt uidi, obstipui meditataque paene reliqui

temptamenta fide ; male me, quin uera faterer,

continui, male quin,
ut oportuit, oscula ferrem.
 
tout y attestait la vertu et l'angoisse après le rapt du maître.À grand peine,

au prix de mille ruses, je pus m'approcher de l'Érechthéide.

Dès que je la vis, je restai figé et je faillis renoncer à mon projet

d'éprouver sa fidélité ; je contins mal mon désir d'avouer la vérité,

mal aussi celui de lui donner des baisers, comme j'aurais dû le faire.
 
7, 730 Tristis erat (sed nulla tamen formosior illa

esse potest tristi) desiderioque dolebat

coniugis abrepti ; tu collige, qualis in illa,

Phoce, decor fuerit, quam sic dolor ipse decebat !

Quid referam, quotiens temptamina nostra pudici
 
Elle était triste, mais pourtant nulle femme ne pourrait être plus belle,

malgré sa tristesse ; elle se lamentait et regrettait l'enlèvement

de son mari. Imagine, Phocus, quelle était sa beauté,

elle à qui même la douleur donnait tant de charme !

Te rapporterai-je combien de fois, pudiquement, elle a repoussé
 
7, 735 reppulerint mores ? Quotiens “ ego ” dixerit “ uni

seruor ; ubicumque est, uni mea gaudia seruo ? ” 

Cui non ista fide satis experientia sano

magna foret ? Non sum contentus et in mea pugno

uulnera, dum census dare me pro nocte loquendo
 
 mes avances ? Que de fois elle a dit : “ Moi, je me garde pour un seul ;

où qu'il soit, c'est à lui seul que je réserve les joies que je puis donner” !

Qui, sain d'esprit, ne se satisferait pas de cette preuve de fidélité ?

Je ne m'en contente pas et lutte pour me blesser moi-même.

En promettant de lui donner une forte somme pour une nuit
 
7, 740

muneraque augendo tandem dubitare coegi.

Exclamo
 : “ Male fictus adest, male fictus adulter ;

uerus eram coniunx ; me, perfida, teste teneris.  ”

Illa nihil ; tacito tantummodo uicta pudore

insidiosa malo cum coniuge limina fugit.
 

et en augmentant mes présents, je finis par la forcer à hésiter.

Je m'écrie : “Malheur ! c'est un faux, hélas! un faux amant est devant toi ;

en réalité, j'étais ton mari ; sous mes yeux, perfide, tu es prise en défaut.”

Elle ne dit rien ; en silence, écrasée par la honte, elle se borne

à fuir son méchant époux et cette demeure emplie de pièges.
 

7, 745 Offensaque mei genus omne perosa uirorum

montibus errabat, studiis operata Dianae.
Pleine de rancoeur envers moi, elle avait pris tous les hommes en haine,

et errait dans les montagnes, s'adonnant aux
travaux chers à Diane.

 

Suite du récit : Réconciliation des époux - Métamorphoses du chien Lélaps et du renard de Teumesse (7, 747-793)

Céphale, reconnaissant ses torts, obtient le pardon et le retour de Procris : ainsi reprend pour eux une vie harmonieuse. Procris, outre son pardon, offre à son époux deux présents : le fameux javelot et un chien de chasse qu'elle tenait de Diane. (7, 747-757)

C'est l'occasion d'une histoire liée à Thèbes : un animal malfaisant (un renard) dévastait la région, épouvantant les paysans et leurs troupeaux. De jeunes Athéniens, dont Céphale, viennent porter secours à leurs voisins Thébains. Mais la bête est si subtile qu'elle échappe aux filets tendus et aux chiens qui la poursuivent. Céphale lance alors sur les traces du renard le chien Lélaps, présent de Procris, et du haut d'une colline, assiste à la vaine poursuite du renard par le chien. Au moment où Céphale s'apprête à se servir de son javelot infaillible, autre présent de Procris, les deux animaux sont métamorphosés en statues de marbre, figés dans l'attitude de la poursuite. (7, 757-793)

  Tum mihi deserto uiolentior ignis ad ossa

peruenit ; orabam ueniam et peccasse fatebar

et potuisse datis simili succumbere culpae
 
Alors, abandonné comme j'étais, je sentis un feu très violent

me pénétrer jusqu'aux os ; je demandais pardon et j'avouais avoir fauté

disant que moi aussi, pour des présents, j'aurais pu succomber
 
7, 750 me quoque muneribus, si munera tanta darentur.

Hoc mihi confesso, laesum prius ulta pudorem,

redditur et dulces concorditer exigit annos.

Dat mihi praeterea, tamquam se parua dedisset

dona, canem munus, quem cum sua traderet illi
 
de la même manière, si on m'avait offert des cadeaux aussi somptueux.

Suite à mon aveu, se sentant vengée de sa blessure d'amour-propre,

Procris me revient et nous passons dans l'harmonie de douces années.

De plus, comme si sa présence n'avait été qu'un modeste présent,

elle m'offre en cadeau
un chien, dont, en le lui donnant,
 
7, 755 Cynthia : “ Currendo superabit ” dixerat “omnes ”.

Dat simul et iaculum manibus quod, cernis, habemus.

Muneris alterius quae sit fortuna requiris ?

Accipe mirandum ; nouitate mouebere facti.


Carmina Laiades non intellecta priorum
 
sa chère Cynthia avait dit : “ À la course, il les vaincra tous  ”.

Elle me donne en même temps ce
javelot que tu vois dans mes mains.

Tu veux savoir ce que devint l'autre présent ?

Écoute cette
histoire étonnante ; son étrangeté te frappera.


Le fils de Laïos avait résolu les vers que n'avaient pas compris
 
7, 760

soluerat ingeniis, et praecipitata iacebat

inmemor ambagum uates obscura suarum.

[Scilicet alma Themis nec talia linquit inulta !]

Protinus Aoniis inmittitur altera Thebis

pestis, et exitio multi pecorumque suoque
 

les esprits de ses prédécesseurs et, oublieuse de ses énigmes,

la
devineresse gisait dans le gouffre obscur où elle s'était précipitée.

[À l'évidence, la bienveillante
Thémis ne laisse pas de tels actes impunis ! ]

Aussitôt, un second fléau est envoyé sur Thèbes en
Aonie.

De nombreux paysans, épouvantés par
une bête sauvage,
 
7, 765 rurigenae pauere feram ; uicina iuuentus

uenimus et latos indagine cinximus agros.

Illa leui uelox superabat retia saltu

summaque transibat
positarum lina plagarum.

Copula detrahitur canibus,
quos illa sequentes
 
sentaient leur vie menacée, comme celle de leurs troupeaux. En jeunes voisins,

nous y sommes allés et nous avons entouré de filets les champs étendus.

La bête subtile sautait d'un léger bond par dessus les rets,

franchissant la plus haute corde des filets que nous avions posés.

On enlève leur laisse aux chiens qui poursuivent la bête :
 
7, 770

effugit et coetum non segnior alite ludit.

Poscor et ipse meum consensu Laelapa magno ;

muneris hoc nomen ; iamdudum uincula pugnat

exuere ipse sibi colloque morantia tendit.

Vix bene missus erat, nec iam poteramus, ubi esset,
 

elle leur échappe et, rapide comme l'oiseau, déjoue leur meute.

On me demande à grands cris  mon
Lélaps ; c'est le nom

du chien qui m'avait été offert. Déjà, il cherche à se défaire

lui-même de ses liens et son cou tire sur la chaîne qui le retient.

Nous l'avions à peine lâché qu'il était impossible de savoir où il était ;
 
7, 775 scire ; pedum calidus uestigia puluis habebat,

ipse oculis ereptus erat ; non ocior illo

hasta nec
exutae contorto uerbere glandes

nec Gortyniaco calamus leuis exit ab arcu.

Collis apex medii subiectis inminet aruis :
 
la poussière brûlante conservait bien la trace de ses pattes,

mais lui avait disparu de notre vue : un javelot n'est pas plus rapide,

ni la balle dégagée par une fronde qu'on a fait tourner,

ni la flèche légère lorsqu'elle quitte un
arc de Gortyne.

Une colline se dresse au milieu des champs qui l'entourent.
 
7, 780 tollor eo capioque noui spectacula cursus,

quo modo deprendi, modo se subducere ab ipso

uulnere uisa fera est ; nec limite callida recto

in spatiumque fugit, sed decipit ora sequentis

et redit in gyrum, ne sit suus inpetus hosti.
 
Je me hisse à son sommet et observe le spectacle d'une course singulière,

dans laquelle la bête semble tantôt prise, tantôt se dérober

au moment d'être blessée ; rusée, elle ne fuit pas en ligne droite

à travers l'espace, mais trompe la gueule qui est à ses trousses ;

elle revient, décrivant un cercle, pour casser l'élan de son ennemi.
 
7, 785 Inminet hic sequiturque parem similisque tenenti

non tenet et uanos exercet in aera morsus.

Ad iaculi uertebar opem ; quod dextera librat

dum mea, dum digitos amentis addere tempto,

lumina deflexi reuocataque rursus eodem
 
la talonne et la suit, mais elle l'égale en vitesse ; il semble la tenir,

mais il  ne la tient pas et ses vaines morsures ne happent que l'air.

Je voulais m'aider de mon javelot.  Tout en l'équilibrant de la main droite,

et en essayant d'ajuster mes doigts à la
courroie du trait,

je détournai les yeux, puis les ramenai pour les reporter à nouveau
 
7, 790 rettuleram ; et medio, mirum ! duo marmora campo

adspicio ; fugere hoc, illud
latrare putares.

Scilicet inuictos ambo certamine cursus

esse deus uoluit, si quis deus adfuit illis ».
au même endroit. Et, au milieu de la plaine, miracle ! Je vois

deux statues de marbre ; l'une semblait fuir, et l'autre aboyer.

De toute évidence, dans cette course de vitesse, un dieu a voulu

que tous deux soient invaincus,
si du moins un dieu les a assistés ».

 

Fin du récit de Céphale : la mort de Procris - Conclusion (7, 794-865)

Céphale, sur l'insistance de Phocus, revient au fameux javelot, et évoque les temps heureux de son union avec Procris, quand son occupation favorite était la chasse ; il avait coutume, après une journée fatigante, de se reposer, seul, dans un endroit frais et, en se détendant, il s'adressait à la brise en termes caressants, comme s'il parlait à une femme aimée. (7, 794-820)

Quelqu'un, se méprenant sur ces paroles ambiguës, s'empressa d'aller rapporter à Procris que Céphale était l'amant d'une nymphe. Procris, tendant à ajouter foi à cette nouvelle, décide pourtant, avant de condamner son époux, de le prendre sur le fait. Le lendemain, Céphale, qui seul à son habitude conversait avec la brise, entendit du bruit dans les feuillages voisins. Croyant qu'il s'agissait d'une bête sauvage, il lança son javelot, et atteignit Procris qui l'épiait, dissimulée. (7, 821-841)

Reconnaissant Procris à la plainte qu'elle pousse, il se précipite à son secours, et tente vainement de la sauver. Cependant, avant de rendre l'âme, elle a le temps de supplier Céphale de lui rester fidèle, sans la remplacer par ‘ Aura ’ (= Brise). Comprenant seulement alors la méprise, Céphale s'explique avec Procris, qui semble mourir rassurée. (7, 842-862)

Après ce récit attendrissant, qui arrache d'abondantes larmes au narrateur et à ses interlocuteurs, le roi Éaque amène à Céphale les troupes armées qu'il avait promises et qu'ont levées pour lui ses deux autres fils. (7, 863-865)

7, 794 Hactenus, et tacuit. «Iaculo quod crimen in ipso est ?»
 

Il s'arrêta là et se tut. «Que reprocher au javelot lui-même ?»
 

7, 795 Phocus ait ; iaculi sic crimina reddidit ille :

« Gaudia principium nostri sunt, Phoce, doloris :

illa prius referam. Iuuat o meminisse beati

temporis,
Aeacida, quo primos rite per annos

coniuge eram felix, felix erat illa marito.
 
dit Phocus ? Voici les griefs que Céphale retint contre le javelot :

« Mon bonheur, Phocus, est à la source de ma douleur :

Je parlerai d'abord du bonheur. Qu'il me plaît de me rappeler

ce temps béni, ô
Éacide, ces premières années, où nous étions heureux,

moi, en compagnie de mon épouse, et elle avec son mari.
 

7, 800

Mutua cura duos et amor socialis habebat,

nec Iouis illa meo thalamos praeferret amori

nec, me quae caperet, non si Venus ipsa ueniret,

ulla erat ; aequales urebant pectora flammae.


Sole fere radiis feriente cacumina primis
 
Une sollicitude réciproque et l'amour nous unissaient tous deux,

jamais elle n'aurait préféré la couche de Jupiter à mon amour

et aucune femme, fût-elle Vénus en personne, n'existait

qui aurait pu me séduire :  la même flamme brûlait en nos coeurs.


Dès que les premiers rayons du soleil frappaient les cimes des monts,
 
7, 805

uenatum in siluas iuuenaliter ire solebam ;

nec mecum famuli nec equi nec naribus acres

ire canes nec lina sequi nodosa solebant ;

tutus eram iaculo ; sed cum satiata ferinae

dextera caedis erat, repetebam frigus et umbras
 

avec la fougue de la jeunesse, j'allais souvent dans les bois pour chasser.

D'habitude, je n'avais avec moi, pour me suivre, ni serviteurs

ni chevaux, ni chiens au flair aiguisé, ni filets noueux ;

je me fiais à mon javelot. Quand ma main était lasse de massacrer

des bêtes sauvages, je recherchais la fraîcheur et l'ombre,
 
7, 810 et, quae de gelidis exibat uallibus, auram.

Aura petebatur medio mihi lenis in aestu,

auram exspectabam, requies erat illa labori.

“ Aura ”, (recordor enim), “ uenias ” cantare solebam,

“ meque iuues intresque sinus, gratissima, nostros,
 
ainsi que la brise, qui montait du fond des vallées glacées.

La brise, je la cherchais : elle était douce pour moi, en pleine chaleur ;

la brise, je l'attendais : elle était mon repos après l'effort.

“ 
Brise, viens ”, chantais-je souvent, – je m'en souviens, en effet –,

“ comble-moi , pénètre dans ma poitrine, ô bienfaisante,
 
7, 815 utque facis, releuare uelis, quibus urimur, aestus. ”

Forsitan addiderim (sic me mea fata trahebant),

blanditias plures et “ tu mihi magna uoluptas ”

dicere sim solitus “ tu me reficisque fouesque,

tu facis ut siluas, ut amem loca sola meoque
 
et comme tu sais le faire, soulage-moi de la chaleur qui me brûle. ”

Peut-être ai-je pu ajouter – ainsi m'y poussait mon destin –

beaucoup de compliments : “ Toi, ma volupté suprême ” ,

et peut-être ai-je répété : “ Toi, tu me ranimes et m'encourages,

c'est toi qui me fais aimer les forêts et les lieux solitaires
 
7, 820 spiritus iste tuus semper captatur ab ore. ”


Vocibus ambiguis deceptam praebuit aurem

nescio quis nomenque aurae tam saepe uocatum

esse putat nymphae, nympham mihi credit amari.

Criminis extemplo ficti temerarius index
 
et sans cesse ma bouche cherche à saisir ton souffle. ”


Quelque inconnu, trompé par ces paroles ambiguës, tend l'oreille

et pense que le nom de la brise si souvent évoqué
désigne

une nymphe : il croit que je suis l'amant d'une nymphe.

Aussitôt, téméraire dénonciateur d'une faute imaginaire,
 

7, 825 Procrin adit linguaque refert audita susurra.

Credula res amor est ; subito conlapsa dolore,

ut mihi narratur, cecidit ; longoque refecta

tempore se miseram, se fati dixit iniqui

deque fide questa est ; et crimine concita uano
 
il va rapporter à mots couverts à Procris ce qu'il a entendu.

L'amour est chose crédule. Sur le champ, elle s'écroula de douleur,

m'a-t-on raconté, et tomba évanouie. Après un long moment,

elle revint à elle, se disant la malheureuse victime d'un sort injuste

et se plaignant de ma fidélité. Sous l'effet d'un grief inconsistant,
 
7, 830 quod nihil est metuit, metuit sine corpore nomen

et dolet infelix ueluti de paelice uera.

Saepe tamen dubitat speratque miserrima falli

indicioque fidem negat et, nisi uiderit ipsa,

damnatura sui non est delicta mariti.

 
elle craint ce qui n'est pas, craint un nom qui n'a pas de corps,

et la malheureuse souffre comme si elle avait une vraie rivale.

Pourtant elle doute souvent et la malheureuse espère qu'on lui ment,

refuse de croire le délateur et, à moins de les voir de ses propres yeux,

n'est pas disposée à condamner les fautes de son mari.

 
7, 835 Postera depulerant aurorae lumina noctem ;

egredior siluamque peto uictorque per herbas :

“ Aura, ueni ” dixi “ nostroque medere labori ! ”

Et subito gemitus inter mea uerba uidebar

nescio quos audisse. “ Veni ” tamen “ optima ! ” dicens,
 

Les lumières de l'aurore suivante avaient repoussé la nuit.

Je sors et gagne la forêt, puis, content de ma chasse, j'ai dit,

couché dans l'herbe : “ Brise, viens remédier à ma fatigue ! ”

Et tout à coup, il me sembla avoir entendu une sorte de gémissement

se mêlant à mes paroles.  “ Viens, excellente amie ”, dis-je pourtant.
 

7, 840 fronde leuem rursus strepitum faciente caduca,

sum ratus esse feram telumque uolatile misi.

Procris erat medioque tenens in pectore uulnus :

“ Ei mihi  ” conclamat ! Vox est ubi cognita fidae

coniugis, ad uocem praeceps amensque cucurri.
 
Des feuilles en tombant firent à nouveau un léger bruit

et, pensant que c'était une bête sauvage, je lançai mon javelot rapide.

C'était Procris, atteinte d'une blessure en pleine poitrine :

“ Hélas, à moi ! ” cria-t-elle. Je reconnus la voix de ma fidèle épouse,

et me précipitai aussitôt vers cette voix , courant comme un fou.
 
7, 845 Semianimem et sparsas foedantem sanguine uestes

et sua (me miserum !) de uulnere dona trahentem

inuenio corpusque meo mihi carius ulnis

mollibus attollo scissaque a pectore ueste

uulnera saeua ligo conorque inhibere cruorem ;
 

Je la trouve à demi morte, ses vêtements épars souillés de son sang,

retirant de sa blessure – ah ! malheur ! – le trait qu'elle m'avait offert.

Je soulève tendrement ce corps que j'aime plus que le mien,

puis, avec un morceau déchiré du vêtement qui couvrait ma poitrine,

je panse sa cruelle blessure et tente d'arrêter l'hémorragie.
 

7, 850 neu me morte sua sceleratum deserat, oro.

Viribus illa carens et iam moribunda coegit

haec se pauca loqui : “ Per nostri foedera lecti

perque deos supplex oro superosque meosque,

per si quid merui de te bene perque manentem
 
Je la supplie de ne pas m'abandonner, souillé du crime de sa mort.

À  bout de forces, mourante déjà,e lle tenta de dire ces quelques mots :

“ Par nos serments conjugaux, par les dieux d'en haut,

par les miens, et, si j'ai un peu mérité ta tendresse,

par cet amour, qui cause ma mort et reste encore vivant maintenant ,
7, 855 nunc quoque, cum pereo, causam mihi mortis amorem,

ne thalamis Auram patiare innubere nostris !  ”

Dixit et errorem tum denique nominis esse

et sensi et docui. Sed quid docuisse iuuabat ?

Labitur et paruae fugiunt cum sanguine uires
 
au moment où je meurs, je t'en prie, je t'en supplie,

ne laisse pas ‘Aura’ prendre dans notre couche la place d'épouse ! ”

Elle acheva de parler, et alors seulement je compris la méprise

due à un nom, et je la lui expliquai. Mais à quoi bon expliquer ?

Elle défaille et avec son sang s'échappent les rares forces qui lui restent.
 
7, 860 dumque aliquid spectare potest, me spectat et in me

infelicem animam nostroque exhalat in ore ;

sed uultu meliore mori secura uidetur. »


Flentibus haec lacrimans heros memorabat ; et ecce

Aeacus ingreditur duplici cum prole nouoque
 
Tant qu'elle peut regarder quelque chose, elle regarde vers moi,

et c'est sur mes lèvres que la malheureuse rend l'âme ;

mais elle semble mourir rassurée, montrant un visage plus serein. »


Le héros en pleurs rappelait ses souvenirs à ses auditeurs en larmes.

Éaque entre alors avec ses deux autres fils et des troupes
 
7, 865 milite, quem Cephalus cum fortibus accipit armis.  nouvellement levées, que Céphale reçoit, avec leurs armes puissantes.

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NOTES

Céphale et Procris (7, 661-865). La légende de Céphale et Procris était très connue et diverses versions nous ont été conservées (notamment  Hygin, Fabulae, 189 ; Apollodore, Bibliotheca, 3, 197-198 ; Antoninus Liberalis, Les Métamorphoses, 4). Ovide, outre ce long passage des Métamorphoses, traite en aussi dans son Art d'aimer, 3, 685-746. Ces versions assez complexes ne se rattachent pas toujours facilement l'une à l'autre.

Voici, d'après le dictionnaire de Pierre Grimal,  les grandes lignes de cette légende de Céphale et Procris :

- Céphale, lié à Athènes ou à l'Attique, grand chasseur réputé, est selon les versions, fils de Déioné (descendante d'Éole) et de Pandion (ou de Hermè). Il est l'époux de Procris, la fille d'Érechthée, un roi d'Athènes.
- Il fut enlevé par la déesse Éos-Aurora éprise de sa beauté.
- Il avait reçu de Procris un chien rapide et un javelot infaillible.
- Ses amours avec Procris ne furent pas sans nuages. Doutant de la fidélité de Procris, il voulut l'éprouver en se présentant à elle incognito, et finit par vaincre sa résistance en lui proposant des présents somptueux. L'épouse, honteuse, s'enfuit. Après une réconciliation, c'est Procris, jalouse à son tour, qui veut éprouver son époux, et qui, déguisée en garçon, obtient que Céphale consente à céder à ses sollicitations pour obtenir le chien et le javelot, qui la rendent supérieure à la chasse.
- Nouvelle réconciliation.
- Finalement, Céphale, la confondant avec une bête, la tue accidentellement, avec le javelot miraculeux.

Selon certaines sources, Procris s'était donnée à Ptéléon pour une couronne d'or, et avait évité la colère de Céphale en fuyant chez Minos, qui s'éprit d'elle. Mais Minos, victime d'un sort que lui avait jeté son épouse Pasiphaé, causait la mort de toutes les femmes à qui il s'unissait. Procris, un peu sorcière, avant de lui céder, le délivra de cet enchantement, en échange de deux cadeaux, un chien rapide comme le vent, et un javelot qui ne manquait jamais son but. Enfin elle retourna à Athènes où elle se réconcilia et vécut un certain temps heureuse avec Céphale.

Il est intéressant de confronter à toutes ces données la version d'Ovide. On voit qu'il n'invente pas des détails de toutes pièces, mais qu'il arrange les choses très librement. Son récit des amours de Céphale et Procris, deux héros qu'il idéalise, est une belle histoire d'amour, qui ne retient que certains éléments de la tradition. (Pour plus de détails, voir B. Otis, Ovid as an Epic Poet, p. 410-413 et 176-182.

Tous deux (7, 661). Éaque et Céphale, dont l'entretien s'étend de 7, 490 à 660.

Eurus (7, 664). Le vent qui devait ramener le bateau à Athènes. Voir n. à 7, 659-660.

Fils de Pallas (7, 665). Clyton et Butès  qui accompagnaient Céphale. Voir n. à 7, 500.

Phocus... Télamon et son frère (7, 668-669). Les trois fils d'Éaque sont Phocus, Télamon et Pélée. Cfr 7, 476-477.

Cécropides (7, 670). C'est-à-dire les Athéniens (en l'occurrence, Céphale et les fils de Pallas), dont Cécrops est un roi légendaire. Cfr 7, 486.

descendant d'Éole (7, 672). Céphale, fils de Déioné et donc petit-fils d'Éole. Cfr 6, 681.

Acté (7, 681). Acté est un autre nom de l'Attique. Elle s'explique par le nom du roi Actaios, le premier roi mythique de l'Attique, dont la fille Aglauros épousa Cécrops, qui, à la mort d'Actaios, lui succèda sur le trône (cfr 2, 554 et n.). Un des frères venus d'Attique est soit Clytos soit Butès (cfr 7, 500).

petit-fils de Nérée (7, 685). Phocus est le petit-fils de Nérée, par sa mère, la Néréide Psamathé. Voir n. à 7, 477.

sans rougir (7, 687). Ce passage fait difficulté et la tradition manuscrite est hésitante. Peut-être Ovide veut-il suggérer que Céphale ne tient pas à rapporter des détails un peu « scabreux » de la légende. Ainsi, par exemple, Hygin, 189 nous apprend que Procris, déguisée en jeune homme, aurait rejoint Céphale, et qu'il aurait consenti à une relation homosexuelle pour obtenir d'elle le chien et le javelot. On peut penser en tout cas qu'Ovide connaissait toutes les versions qui circulaient sur ses personnages.

Procris... Orithye (6, 694-695). Ce sont deux des filles d'Érechthée. Ovide (Mét., 6, 679-713) avait mentionné l'union heureuse de Procris et de Céphale, mais raconté beaucoup plus longuement le rapt d'Orithye par Borée.

Hymette (6, 702). Montagne de l'Attique (1026 mètres), au sud-est d'Athènes. Son miel était réputé, d'où peut-être le terme « fleuri » retenu par Ovide pour le qualifier.

Aurore (7, 703). Le mot est souvent utilisé pour désigner le lever du jour, mais c'est aussi une déesse. Aurore (Éos en grec) appartient à la première génération divine : elle est la fille du Titan Hypérion et de la Titanide Théia ; la soeur d'Hélios/Soleil et de Séléné/Lune ; la mère de Zéphyr, de Borée, de Notos (l'étoile du matin), de Éosphoros/Lucifer (l'étoile du soir), d'Hespérus et des astres. Elle est représentée comme une déesse aux doigts de rose, ouvrant les portes du ciel au char du Soleil. La légende lui prête de nombreuses amours, Vénus  (Aphrodite), ayant fait d'elle une éternelle amoureuse pour la punir de s'être unie à Arès/Mars. Elle s'éprenait des beaux jeunes gens qu'elle rencontrait et les enlevait (Orion, Céphale, Clitos, Tithon, etc.). La plus connue de ses aventures est peut-être celle qu'elle vécut avec Tithon, un prince troyen qu'elle épousa, et rendit immortel, tant elle en était éprise. Mais n'ayant pas demandé pour lui l'éternelle jeunesse, Tithon devenu vieux aspira à la mort (cfr Fastes, 1, 461, 3, 403 ; Énéide, 3, 521 ; 3, 589 ; 4, 585). L'enlèvement de Céphale par Éos/Aurore, évoqué ici, est également célèbre. Selon certaines versions, Aurore aurait emmené Céphale en Syrie et lui aurait donné un fils, Phaéton (qui passe aussi pour être le fils du Soleil et de Clymène, voir 1, 750ss). On signalera toutefois que l'épisode rapporté par Ovide est assez différent des versions courantes.

change mon apparence (7, 722). On avait presque oublié qu'Ovide traitait de métamorphoses. En effet, depuis 7, 350 (à part l'histoire des fourmis transformées en Myrmidons, en 7, 614-660), le récit était surtout centré sur une présentation psychologique des personnages. Nous apprenons ici que l'Aurore, après avoir insinué le doute dans l'esprit de Céphale, avait modifié son aspect physique, pour l'aider à espionner Procris.

Érechthéide (7, 726). Procris était la fille d'Érecththée (cfr 7, 694-695).

travaux chers à Diane (7, 746). Procris vit dans la forêt, en adepte de Diane/Artémis (la Cynthia du vers 755), c'est-à-dire vouée à la chasse.

un chien... un javelot (7, 754-756). Dans la version d'Ovide, le chien de chasse et le javelot infaillible sont offerts par Procris, comme présents de réconciliation, et lui viennent de Cynthia (= Diane/Artémis). Le javelot est connu depuis le début de l'épisode ; le chien, dont on apprendra en 7, 771 qu'il s'appelle « Lélaps » (« ouragan » en grec), fera l'objet des vers 7, 759-793.

Cynthie (7, 755). Le Cynthe est une montagne de l'île de Délos, où sont nés Artémis et Apollon, d'où leur désignation respective de « déesse du Cynthe » et de « dieu du Cynthe ».

histoire étonnante (7, 758). C'est le récit de la métamorphose en statues du chien, dont le nom « Lélaps » apparaît au vers 771, et d'un animal qui terrorise les campagnards thébains et dont Ovide ne précise nulle part qu'il s'agit du renard de Teumesse. Le thème de la métamorphose réapparaît avec ce récit que rapporte aussi Antonius Liberalis (41), lequel le lie également à la légende de Céphale et Procris.

Le fils de Laïos (7, 759). Le fils de Laïos est Oedipe.

la devineresse (7, 761). Oedipe avait, sur le chemin de Delphes, rencontré un monstre (masculin ou féminin selon les sources) envoyé par Junon pour punir les Thébains qui l'avaient offensée. Le Sphynx (la Sphynge, d'après Ovide) posait des énigmes aux passants, et les dévorait s'ils ne savaient pas les résoudre. Comme Oedipe avait pu répondre, le monstre se précipita ou fut précipité du haut d'un rocher dans un abîme.

Thémis (7, 762). Thémis est une personnification de la Justice. Ce vers, absent de certains manuscrits, est difficile à concilier avec le contexte.

Aonie (7, 764). Autre nom de la Béotie (cfr 1, 313).

bête sauvage (7, 764). Il s'agit du renard de Teumesse, un village de Béotie, à l'est de Thèbes. Ce renard ravageait le pays.

en jeunes voisins (7, 765). Céphale l'Athénien vient prêter main-forte aux paysans de Thèbes, l'Attique et la Béotie étant des régions voisines.

Lélaps (7, 771). Voir note à 7, 754-756.

arc de Gortyne (7, 778). Gortyne est une ville de Crète, île connue pour ses archers réputés. Voir par exemple Virg., Én., 11, 773.

courroie du trait (7, 788). On attachait une courroie au bois d'une lance ou d'une javeline, vers son centre de gravité, pour donner plus de force au moment où on la jette. On passait dans cette courroie l'index et le médius. A. Rich, Dictionnaire des Antiquités, s/v° amentum (avec un dessin).

si un dieu les a assistés (7, 793). Clin d'oeil malicieux d'Ovide.

Éacide (7, 798). Désigne ici Phocus, un des trois fils d'Éaque.

Brise (7, 813). L'épisode tourne autour d'une confusion entre le nom commun  aura « brise », que Céphale personnalisait, en quelque sorte, et que le dénonciateur et Procris ont confondue avec Aura (fille d'un Titan et de Périboéa, une Phrygienne) qui faisait partie de l'escorte d'Artémis/Diane. Dionysos, à qui Aura se déroba longtemps, avait obtenu de Vénus qu'elle la frappât de folie, et le dieu ainsi parvint à ses fins. Aura mit au monde des jumeaux, dont le fleuve Inachos, et fut métamorphosée en source par Zeus.

par les miens (7, 853). Les dieux d'en bas, le monde auquel appartient désormais Procris.

deux autres fils (7, 864). Pélée et Télamon.


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