Bibliotheca Classica Selecta - Fastes d'Ovide (Introduction) - Livre 5 (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page précédente - Page suivante

MOTEUR DE RECHERCHE DANS LA BCS


OVIDE, FASTES V - MAI


Du 3 au 11 mai (5,379-544)


 

Manifestations astronomiques, dont l'apparition du Centaure (5,379-418)

Le lever de la constellation du Centaure le 3 mai est l'occasion pour Ovide d'évoquer l'histoire du Centaure Chiron, qui fut en Thessalie le maître d'Achille jeune. Un jour, Chiron reçut la visite d'Hercule ; en maniant les armes empoisonnées du héros, le Centaure se blessa et, malgré sa science des remèdes, mourut, entouré d'Hercule et d'Achille qui le pleura comme un père. Il devint la constellation du Centaure. (5,379-414)

5 et 6 mai : Apparition de La Lyre et du Scorpion (5,415-418)

 

 

Trois nuits plus tard, Chiron fera paraître ses étoiles :

 5, 380

   c'est un être hybride, mélange d'homme et de cheval fauve.

Le Pélion est une montagne d'Hémonie, exposée aux Austers :

   ses cimes sont vertes de pins, ses flancs sont le domaine des chênes.

Le fils de Philyra y vivait ; il y reste une vieille caverne de pierres,

   où, selon la tradition, habita ce bon vieillard.

 5, 385

C'est lui qui aurait enseigné les modulations de la lyre

   aux mains qui un jour devaient envoyer Hector à la mort.

L'Alcide était passé (en visiteur), ses travaux en partie achevés ;

   il ne lui restait plus que les derniers à exécuter.

Ainsi le hasard avait réuni là les deux fléaux de Troie :

 5, 390

   ici un enfant, l'Éacide, et là, un fils né de Jupiter.

Le héros issu de Philyra accueille en hôte le jeune homme,

   et s'enquiert de la raison de sa venue ; celui-ci la lui donne.

Cependant, apercevant la massue et la dépouille de lion, il dit :

   "Héros digne de ces armes, et armes dignes de ce héros !"

 5, 395

Les mains d'Achille non plus ne purent se retenir

   de toucher la peau de bête toute hérissée de poils.

Le vieux Chiron, lui, manipule les traits empoisonnés :

   une flèche tombe et se fiche dans son pied gauche.

Il pousse un gémissement et retire l'arme de sa chair :

 5, 400

   l'Alcide et l'enfant d'Hémonie gémissent à l'unisson.

Lui cependant concocte des herbes cueillies sur les collines de Pagase

   et tente divers traitements pour atténuer sa blessure.

Le poison dévorant l'emportait sur le remède ;

   l'infection avait pénétré jusqu'aux os, dans le corps tout entier.

 

5, 405

Le sang de l'hydre de Lerne mêlé au sang du Centaure

   ne laissait pas au remède le temps d'être efficace.

Achille, le visage inondé de larmes, se tenait là, comme devant son père ;

   ainsi aurait-il dû pleurer Pélée, s'il était mort.

Sans cesse il caressait de ses mains affectueuses les mains du malade

 5, 410

   (le maître recueillait la récompense de l'éducation qu'il avait donnée).

Souvent il l'embrassait et lui répétait sur sa couche :

   "Vis, je t'en supplie, et ne m'abandonne pas, père bien-aimé !".

Neuf jours avaient passé, quand toi, très juste Chiron,

   tu eus le corps entouré de deux cercles de sept étoiles.

 5, 415

La Lyre courbe aurait voulu le suivre, mais la voie n'est pas libre :

   trois nuits plus tard, son temps sera venu.

Dans le ciel on pourra voir le Scorpion, seulement en sa partie médiane,

   quand nous dirons que demain se lèveront les Nones.

 


 

Les Lemuria : 9-11-13 mai (5,419-492)

 

Le 9 mai commence la célébration des Lémuries nocturnes en l'honneur des Mânes. Ovide décrit très minutieusement un rituel ancien, auquel se soumet le maître de maison : il accomplit des gestes précis et prononce des formules déterminées, pour écarter de sa demeure les ombres des morts. (5,419-444)

L'étiologie de cette célébration se rattache, selon Ovide, qui prétend tenir l'explication du dieu Mercure, à la légende de Rémus. L'ombre de Rémus apparut à ses parents adoptifs éplorés, évoqua devant eux sa grandeur de naguère, maudit son meurtrier Celer et leur demanda d'intervenir auprès de Romulus pour obtenir l'institution d'une fête en son honneur ; telle est l'origine des Remuria, devenues Lemuria au fil du temps. (5,445-484)

Suivent quelques précisions (fermeture des sanctuaires, et mariages déconseillés) concernant cette période des Lemuria, qui s'étalent sur trois jours non consécutifs. (5,485-492)

 

 

Ensuite, quand trois fois l'étoile du soir aura montré son beau visage,

 5, 420

   quand trois fois les étoiles vaincues auront cédé la place à Phébus,

aura lieu une cérémonie à l'antique rituel, les Lémuries nocturnes :

   on y offrira des sacrifices aux Mânes silencieux.

 L'année était plus courte, et les purifications de février inconnues encore,

   et toi, Janus aux deux visages, tu n'étais pas le chef de file des mois.

 5, 425

Déjà pourtant on portait aux cendres des défunts les offrandes requises,

   et le petit-fils apaisait par des sacrifices les cendres de son aïeul décédé.

C'était en Mai, mois qui tire son nom de celui des ancêtres (maiores),

   et qui aujourd'hui encore garde une partie de cette antique coutume.

Lorsque la nuit à demi passée déjà assure un sommeil silencieux,

 5, 430

   lorsque vous, chiens et oiseaux de toutes races, vous vous êtes tus,

l'homme, fidèle à l'ancien rituel et craignant les dieux, se lève,

   sans porter aucune entrave à ses pieds.

De son pouce placé entre ses doigts joints, il fait un signe,

   pour ne rencontrer, dans sa marche silencieuse, aucune ombre légère.

 5, 435

Lorsqu'il s'est lavé les mains dans l'eau d'une source pure,

   il fait demi-tour, après avoir pris d'abord des fèves noires

et les avoir jetées derrière lui ; en les jetant, il dit :

   "Je vous offre ces fèves ; avec elles, je me rachète moi et les miens."

Il prononce ceci neuf fois, sans regarder en arrière :

 5, 440

   l'ombre est censée ramasser les fèves et suivre ses pas, sans être vue.

À nouveau il touche l'eau et fait retentir le bronze de Témèse

   puis demande à l'ombre de quitter son toit.

Lorsqu'il a dit neuf fois : "Mânes de mes pères, sortez !,"

il regarde derrière lui et considère que les rites sont accomplis selon les règles.

 5, 445

D'où ce jour tient-il sa dénomination, quelle en est l'origine ?

   cela m'échappe : je dois le découvrir auprès de quelque divinité.

"Fils de la Pléiade, dieu vénérable à la baguette puissante, instruis-moi :

   souvent tu as visité le palais de Jupiter Stygien."

Le porteur du caducée que j'ai invoqué arrive.

 5, 450

   Voici la raison du nom : je la tiens du dieu lui-même.

Lorsque Romulus eut confié au tombeau les restes de son frère

   et rendu les honneurs dus au trop impétueux Rémus,

le malheureux Faustulus et Acca, dont les cheveux étaient défaits,

   inondèrent de leurs larmes ses ossements calcinés ;

 5, 455

ensuite, affligés, ils rentrèrent chez eux à la nuit tombante

   et sans plus s'étendirent sur leur couche rudimentaire.

Ils crurent voir se dresser près de leur lit l'ombre sanglante de Rémus

   qui murmurait faiblement les paroles que voici :

"C'est moi l'autre partie, la moitié de vos voeux,

 5, 460

   voyez ce que je suis, moi qui naguère étais celui que vous savez !

Si hier j'avais obtenu les oiseaux qui confèrent la royauté,

   j'aurais pu être le plus grand parmi mon peuple !

Maintenant je suis un fantôme vain, échappé aux flammes du bûcher :

   voilà tout ce qui reste de l'illustre Rémus.

 5, 465

Hélas ! Où est Mars, mon père ? Si du moins vous avez dit la vérité,

   c'est lui qui nous a fait téter, enfants exposés, le lait d'une bête sauvage.

Celui qu'une louve a sauvé, la main d'un citoyen audacieux l'a perdu.

   Ô combien plus tendre a été la louve !

Cruel Céler, je souhaite que des blessures te fassent rendre l'âme

 5, 470

   et que, comme moi tout couvert de sang, tu t'en ailles sous la terre !

Mon frère n'a pas voulu cela ; sa piété fraternelle est égale à la mienne ;

   il a donné à mes Mânes ce qu'il pouvait, ses larmes.

À votre tour, par vos larmes, par des offrandes de nourriture

   priez-le de désigner en mon honneur un jour de fête."

 5, 475

Ils veulent, tendant les bras, embrasser celui qui leur confie cette mission :

   l'ombre glisse et échappe aux mains qui cherchent à la saisir.

Lorsque le simulacre eut fui, emportant avec lui leur sommeil,

   tous deux rapportent au roi les paroles de son frère.

Romulus approuve et appelle Remuria ce jour-là,

 5, 480

   où les aïeux défunts reçoivent les offrandes qui leur sont dues.

La lettre dure qui était l'initiale du mot,

   se transforma au fil du temps en lettre douce ;

bientôt aussi, on appela Lemures les âmes des défunts silencieux :

   tel était le sens du mot, telle la force de l'expression.

 5, 485

Ces jours-là cependant, nos ancêtres fermaient les sanctuaires,

   comme on les voit fermés de nos jours en période funèbre.

Durant cette même période, ni une veuve ni une jeune fille ne devaient songer

   aux torches nuptiales : celle qui s'est mariée alors n'a pas la vie longue.

C'est pour cette raison aussi, si tu tiens compte des proverbes,

 5, 490

   que le peuple dit que les malheureuses se marient en mai.

Cependant ces trois jours de fête ont lieu dans la même période,

   sans qu'aucun d'eux toutefois ne suive immédiatement le précédent.

 


 

11 mai : Orion (5,493-544) 

L'origine d'Orion, constellation censée avoir disparu du ciel le 11 mai (milieu des Lemuria), s'explique par une curieuse légende. Un soir, Hyrieus voyant passer trois inconnus, qui ne sont autres que Jupiter, Neptune et Mercure, leur offre généreusement l'hospitalité dans sa modeste demeure ; les trois dieux ayant finalement révélé leur identité, le vieillard leur réserva l'accueil le plus somptueux possible, allant jusqu'à sacrifier son unique boeuf. (5,493-522)

Invité alors à formuler un voeu, Hyriée, qui est veuf, souhaite avoir un fils, sans le concours d'une épouse. Les dieux l'exaucent en éjaculant dans la peau du boeuf sacrifié en leur honneur, peau que l'on recouvre de terre. Dix mois après naquit Urion, dont le nom se transforma en Orion. (5,523-536)

Devenu plus tard un habile chasseur, Orion fut choisi comme garde du corps par Artémis, mais il mécontenta par sa vantardise la déesse Tellus, qui suscita contre lui un scorpion. Celui-ci s'en prit à Latone ; Orion la défendit, méritant ainsi de devenir une constellation. (5,537-544).

 

 

Si au milieu de ces fêtes tu cherches à voir Orion le Béotien,

   tu le feras en vain ; mon poème dira l'origine de cette constellation.

 5, 495

Jupiter et son frère, qui règne sur l'immense océan,

   ainsi que Mercure suivaient ensemble le même chemin.

C'était l'heure où l'on rentre les charrues retournées sur le joug,

   et où l'agneau se penche pour boire le lait de la brebis repue.

Le vieil Hyrieus, qui cultivait un petit champ, se trouvait justement

 5, 500

   devant son humble chaumière, quand il les aperçut et leur dit ainsi :

"La route est longue, et ce qui reste de jour n'est plus bien long ;

   pour les étrangers, ma porte est ouverte".

Et montrant un visage conforme à ses paroles, il insista.

   Ils acceptèrent son invitation, sans révéler qu'ils étaient des dieux.

 5, 505

Ils pénètrent dans la demeure du vieillard, sale et noircie par la fumée.

   Un peu de feu couvait sous une bûche de la veille :

Le vieux, un genou à terre, ravive les flammes en soufflant,

   apporte des morceaux de bois coupé, qu'il débite plus menus encore.

Il y avait deux marmites : la plus petite contenait des fèves, l'autre du chou,

 5, 510

   toutes deux bouillonnent, sous le couvercle qui les presse.

Dans l'intervalle, le vieillard offre du vin rouge d'une main tremblante :

   le dieu de la mer accepte la première coupe,

et la vidant, il dit : "Donne ; maintenant c'est à Jupiter

   de boire à son tour". Au nom de Jupiter, le vieux devient livide.

 5, 515

Une fois revenu à lui, il tue le boeuf qui lui servait

   à labourer son petit champ et le fait griller sur un grand feu ;

il apporte du vin conservé dans une jarre noircie par la fumée,

   vin transvasé jadis dans les premières années de son enfance.

Sans attendre, les dieux s'étendent sur des couchettes assez basses,

 5, 520

   recouvertes d'une toile bourrée d'herbes de rivière.

Tour à tour les plats servis et la liqueur de Lyaeus donnaient à la table de l'éclat

  le cratère était de terre rouge, les coupes, de bois de hêtre.

 

Jupiter dit : "Si tu éprouves un désir, fais un voeu :

   il se réalisera intégralement". Le placide vieillard répondit :

 5, 525

"J'ai eu une épouse aimée, objet des soins de ma prime jeunesse ;

   maintenant, elle a disparu. Où est-elle, demandez-vous ? Dans une urne.

Je lui ai fait un serment, - vous avez été pris à témoin, - et j'ai dit :

   'pour moi, tu seras seule à jouir du statut d'épouse'.

Je l'ai dit, et je tiens parole. Mais pourtant, j'éprouve un autre désir :

 5, 530

   sans être un époux, je veux être père."

Tous avaient approuvé d'un signe de tête. Tous s'étaient placés

   près de la peau du boeuf... ce serait inconvenant d'en dire davantage.

Ensuite, ils recouvrirent de terre les taches humides.

   Bientôt, dix mois passèrent et un enfant naquit.

 5, 535

Hyrieus l'appela Urion, vu la façon dont il fut conçu ;

   l'initiale du nom a perdu son ancienne prononciation.

 

L'enfant avait énormément grandi : la Délienne le prit pour compagnon ;

   il était le gardien de la déesse, son garde du corps.

Des paroles imprudentes suscitent la colère des dieux.

 5, 540

   Il avait dit : "Il n'est pas de bête sauvage que je ne puisse vaincre".

Terre envoya un scorpion, qui tenta de planter les crochets de ses pinces

   dans la chair de la déesse, mère de jumeaux.

Orion s'interposa ; Latone l'ajouta aux astres brillants

   et dit : "Reçois cette récompense pour tes services."

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 Notes (5,379-544)

 

Trois nuits plus tard (5,379). Il s'agit donc du 3 mai.

Chiron... Pélion... Philyra (5,379-384). Centaure sage et bienfaisant, Chiron était fils de Cronos et de Philyra, une fille d'Océan (d'où le nom de "fils de Philyra" qu'Ovide lui donne en 5,383). Sa double nature est due au fait que son père Cronos avait pris l'apparence d'un cheval lors de son union avec l'Océanide.

Pélion (5,381). La montagne de Thessalie (cfr 3, 441) sur laquelle vivait Chiron. Hémonie était l'ancien nom de la Thessalie (cfr 2, 40 ; 5, 400). L'Auster est le nom du vent du midi.

caverne (5,383). Selon Pindare, Pythiques, 3, 63, Chiron habitait dans une grotte du Pélion. Selon Ovide, Métamorphoses, 2, 630, Apollon lui aurait confié là l'éducation de son fils Esculape.

C'est lui qui aurait enseigné (5,384). La réputation de sage de Chiron lui valut d'éduquer divers héros. On vient d'évoquer Esculape (note précédente) ; Chiron eut également la responsabilité d'Achille (le futur adversaire d'Hector à Troie), à qui il apprit la musique et la médecine.

Alcide... (5,387-388). C'est l'Héraclès grec, l'Hercule romain. Sa légende est bien connue. Fils putatif d'Amphitryon et d'Alcmène (en réalité fils de Zeus qui avait pris l'apparence de son mari pour séduire Alcmène), Hercule est appelé Alcide, du nom de son grand-père Alcée (cfr notamment 1, 575 ; 2, 318). On sait que, victime de la malveillance de la jalouse Héra, Héraclès avait été contraint de se mettre au service d'Eurysthée qui lui avait imposé douze Travaux à exécuter (pour le combat d'Hercule et de Cacus, à Rome, au temps d'Évandre, voir 1, 543-586).

les deux fléaux de Troie (5,389-390). L'un est l'Éacide Achille, fils de Pélée et petit-fils d'Éaque (d'où son nom d'Éacide), qui fit périr Hector, le principal héros troyen. L'autre est Héraclès-Hercule, désigné ici comme fils de Jupiter. Héraclès, qui avait débarrassé d'un monstre le territoire de Laomédon, un des premiers rois de Troie, et avait ainsi délivré sa fille Hésioné, s'était vu refuser les chevaux divins promis en paiement ; pour punir le parjure Laomédon, Héraclès à la tête d'une armée était venu dévaster Troie, avait tué Laomédon et ses fils, à l'exception de Priam.

massue... dépouille de lion (5,393). Attributs traditionnels de Hercule, depuis l'accomplissement du premier de ses douze travaux, la mort du lion de Némée.

enfant d'Hémonie (5,400). L'expression désigne Achille, dont le père, Pélée était roi de Phthie, une partie de la Thessalie (= Hémonie ; cfr 5, 381).

Pagase (5,401). Ville de Thessalie.

hydre de Lerne (5,405). Un des monstres vaincus par Hercule, et dont le sang avait servi à empoisonner les flèches du héros.

deux cercles de sept étoiles (5,414). Le nombre des étoiles constituant la Constellation du Centaure varie selon les auteurs anciens. Pour sa présentation sur la Toile, on pourra voir les Chevaliers du Zodiaque ou Observational Astronomy de David Haworth

Lyre courbe (5,415). Autre constellation, résultat du catastérisme de la Lyre d'Orphée (cfr 1, 316 ; 1, 654 ; 2, 76-77). Son lever est censé se passer pour Ovide le 5 mai, 3 jours après le lever du Centaure, mais la date n'est pas correcte.

Scorpion (5,417). Autre constellation. Cfr 3, 712, et 4, 163. Pour Ovide, cela se passe le 6 mai, la veille des Nones, qui tombaient le 7 mai.

quand trois fois (5,419-420). Deux périphrases pour désigner le 9 mai. Pour l'étoile du soir, Hespérus, cfr 2, 314. Phébus-Apollon signifie ici le soleil.

Lémuries (5,421). Les Lémures sont en quelque sorte les fantômes des morts "qui revenaient visiter la maison où ils avaient vécu ; à ces hôtes peu souhaitables il fallait […] opposer des gestes, des paroles capables de les apaiser et de les éloigner" (G. Dumézil, Religion romaine archaïque, 1974, p. 372). C'est l'objectif poursuivi lors des Lemuria, qui s'étalent en mai sur trois jours non consécutifs (les 9, 11 et 13) et qui se célèbrent pendant la nuit. C'est une fête des morts, d'où l'expression de "Mânes silencieux" du vers suivant. Sur les Mânes, on pourra voir 2, 52 ; 2, 535 ; 2, 570 ; 2, 609 ; 2, 842 ; 5, 443 ; 5, 472.

L'année était plus courte… (5,423-424). Ovide remonte aux origines du calendrier, sous Romulus, lorsque l'année ne comportait encore ni janvier, mois de Janus, ni février, mois spécialement consacré aux purifications (cfr 1, 43-44 et 3, 97s). À cette époque primitive pourtant, précise-t-il aux vers 425-426, on tentait déjà d'apaiser les défunts, en mai. Les Lemuria seraient donc, pour Ovide, plus anciennes que les Parentalia de février, qui s'étendaient du 13 au 21 et qui se clôturaient, le 21, par les Feralia (cfr 2, 533-556 et les notes).

ancêtres (5,427). Sur le mois de Mai qui devrait son nom à celui des aînés, des ancêtres (maiores), cf notamment 5, 73-74.

l'homme (5,431). C'est le père de famille qui représentait son groupe dans les rites funéraires et fonctionnait en quelque sorte comme un prêtre.

entrave (5,432). L'absence de liens est une prescription rituelle fréquente (Voir 4, 658 et Virgile, Énéide, 4, 518, qui présente Didon "un pied dégagé de liens, la robe dénouée" ; cfr aussi le commentaire de Servius, ad Aen., 4, 518).

pouce placé entre ses doigts joints (5,433). C'est "faire la figue", c'est-à-dire "insérer le pouce entre l'index et le médius de la main droite (R. Schilling). Ce geste obscène, que représentent des amulettes antiques, avait une valeur apotropaïque : il servait à conjurer le mauvais oeil.

source pure (5,435). On utilisait de l'eau de source, censée particulièrement pure, dans les cérémonies religieuses. Cfr 4, 655.

fèves noires (5,437). "La fève constituait une nourriture substantielle (avec le lard) aux temps archaïques. […] La couleur noire des fèves convient aux ombres des morts. L'opération magico-religieuse consiste donc à rassasier les revenants d'un mets qui faisait partie jadis de l'alimentation de base, pour acheter à ce prix la paix des vivants à l'intérieur de la maison." (R. Schilling). De son côté, H. Le Bonniec précise : "Sacrifice de substitution : Ovide marque nettement que le revenant se contente des fèves, au lieu d'entraîner avec lui […] les membres encore vivants de la famille".

neuf fois (5,439). Chiffre sacré : on connaît l'importance du nombre trois et de ses multiples dans les cérémonies religieuses ou magiques.

sans regarder en arrière (5,439). Important dans les cérémonies magiques. Cfr l'ordre que donne à sa servante Amaryllis la magicienne de Virgile (Bucoliques, 8, 101-102) : "Porte ces cendres hors de la maison  ; jette-les par-dessus ta tête dans le ruisseau, et ne regarde pas derrière toi." Cfr aussi l'interdiction faite de se retourner dans le rituel des Carnaria du 1er juin, tel que le présente Ovide (6, 164).

bronze de Témèse (5,441). On ne sait pas exactement à quelle ville Ovide fait ici allusion. Plusieurs cités de ce nom sont connues ; Homère notamment (Odyssée, 1, 184) en signale une réputée pour ses mines de cuivre sur l'île de Chypre, mais Ovide mentionne une Témèse à plusieurs reprises (Mét., 7, 207, et aussi 15, 707, où il est explicitement question de mines). De toute façon, on est dans le registre de l'ornementation littéraire, et il est plus important de relever que le bruit fait avec le bronze est lui aussi un moyen apotropaïque.

Fils de la Pléiade... (5,447-449). Hermès-Mercure est fils de la Pléiade Maia (cfr 5, 85). Outre les talonnières (liées à sa fonction de messager), il avait comme attribut le Caducée, baguette de bois d'olivier, entourée de serpents (cfr 4, 605). Il avait notamment dans ses attributions (Hermès Psychopompe) la charge de conduire les âmes au séjour des morts, évoqué ici par le palais de Jupiter Stygien, c'est-à-dire Hadès-Pluton.

Lorsque Romulus... (5,451ss). L'exposé contenu dans les vers 451 à 480 reprend et continue le récit de 4, 806-862, relatant, à l'occasion de l'anniversaire de la fondation de Rome le 21 avril, la légende des origines. Le lecteur se rapportera à ce texte (notamment pour les oiseaux la n. à 4, 814-818 ; pour Céler la n. à 4, 837). On trouvera d'autres détails sur la légende des origines en 2, 381-420 et en 3, 9-70.

Faustulus et Acca (5,453). Les parents adoptifs de Romulus et de Rémus. Cfr 3, 55-56.

oiseaux (5,461). Cfr 4, 814-818.

c'est lui (5,466). Ovide a l'originalité de donner un rôle tout particulier à Mars, dans le sauvetage des jumeaux. C'est le dieu qui aurait discrètement envoyé la louve nourrir les enfants.

citoyen audacieux (5,467). Son nom apparaîtra en toutes lettres au vers 469. Il s'agit de Celer (4, 837).

Mon frère n'a pas voulu cela (5,471). "À l'encontre de 2, 143, Ovide tend ici à disculper la personne de Romulus du meurtre de son frère" (R. Schilling).

Remuria (5,479). L'étymologie qui fait dériver les Lemuria d'un Remuria original, avec transformation du r- initial ("une lettre dure") en un l- ("une lettre douce") est de la pure fantaisie, peut-être une invention d'Ovide.

Lemures (5,483). Sur les Lemures "fantômes des morts" ; "revenants"), cf 5, 421. Le rapport réel est l'inverse de celui suggéré par Ovide. C'est le mot Lemuria qui dérive de Lemures et non l'inverse.

Ces jours-là... (5,485). Durant les Lemuria, comme durant les dies Parentales de février, les temples sont fermés et les mariages ne sont pas recommandés (2, 557-563 et notes.)

les malheureuses (5,490). Un proverbe d'interprétation délicate qui n'est cité que par Ovide (ici) et par Plutarque (Questions Romaines, 86) d'une manière différente. Le mot latin est malae, que R. Schilling traduit par "malheureuses" et H. Le Bonniec par "méchantes".

ces trois jours de fête... (5,491-492). Respectivement les 9, 11 et 13 mai, les fêtes de l'ancien calendrier romain ayant lieu les jours impairs.

Orion le Béotien... (5,493-494). La constellation d'Orion n'est plus visible à la date du 11 mai, au milieu des Lemuria. Sur cette constellation, cfr 4, 388. Orion est ici qualifié de Béotien, parce qu'il est le fils d'Hyrieus (5, 499) et que ce dernier "passe en général pour l'éponyme d'Hyria, une cité située à l'est de la Béotie" (R. Schilling). La légende de sa conception et celle de sa mort présentent de nombreuses variantes, dans le détail desquelles on n'entrera pas ici (cfr J.-Cl. Belfiore, Dictionnaire de mythologie, Paris, 2003, s.v., et surtout l'imposante monographie de J.-M. Renaud, Le mythe d'Orion, Liège, C.I.P.L., 2004, 454 p.). Pour le récit de la conception (qui va suivre), il semble qu'Ovide suive la même source qu'Hygin dans Astronomia, 2, 34, 1, Fabulae, 195, et que Servius, Énéide, 1, 535.

son frère (5,495). Poseidon (Neptune) est présenté dès l'époque d'Homère comme le maître des mers et des océans, tandis que ses frères Zeus (Jupiter) et Hadès (Pluton) détenaient respectivement l'empire du ciel et l'empire des enfers.

Mercure (5,496). Voir 5, 447 et 5, 85.

Hyrieus (5,499). Hyrieus, qui passe généralement pour le fondateur (et le roi) de la ville de Hyria en Béotie, est présenté ici par Ovide comme un modeste cultivateur.

liqueur de Lyaeus (5,521). Lyaeus ("libérateur de soucis") est une épithète de Bacchus (cfr 1, 395).

inconvenant (5,532). Les dieux ont éjaculé dans la peau du boeuf.

dix mois (5,534). Considéré comme le délai normal de la gestation (cfr 1, 33-34).

Urion (5,535). Le verbe grec ourein signifie "répandre un liquide" et, par euphémisme, "uriner". C'est le sens de "liquide séminal" qui prévaut évidemment ici. La terre (5, 533) a joué le rôle de mère (c'est le motif de la Terre-Mère).

ancienne prononciation (5,536). Urion est devenu Orion.

Délienne (5,537). Artémis (Diane), soeur jumelle d'Apollon et fille de Latone, née à Délos.

paroles imprudentes (5,539). Orion va se rendre coupable d'hybris, d'où sa punition.

Terre (5,541). Ou Tellus ou Gaia.

Latone (5,543). C'est la mère d'Apollon et d'Artémis, appelée Latone chez les Romains, Lèto chez les Grecs. D'après Ovide, c'est donc elle qui aurait transformé Orion en constellation, pour le récompenser de l'avoir sauvée, mais il existe beaucoup de récits différents sur la mort d'Orion.


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