Bibliotheca Classica Selecta - Fastes d'Ovide (Introduction) - Livre III (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page précédente - Page suivante

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OVIDE, FASTES III - MARS


ANNA PERENNA ET LES IDES DE MARS (3,523-710)


Anna Perenna le 15 mars (I). Description de la fête (3,523-542)

 

Ovide décrit cette fête comme s'il y avait assisté personnellement : près du Tibre, la foule se réunit pour une joyeuse détente où les couples s'amusent couchés dans l'herbe, en buvant. La fête se prolonge à ciel ouvert ou dans des tentes ou des cabanes, et l'on se souhaite longue vie ; applaudissements, récitations, danses en choeur se déroulent dans une beuverie générale, qui aboutit en fin de compte à une joyeuse ivresse. (3, 523-542)

 

Le jour des Ides se célèbre la joyeuse fête d'Anna Perenna,

   non loin de tes rives, ô Tibre qui viens de l'étranger.

3, 525

Le peuple arrive et se répand parmi les herbes vertes ;

   et l'on boit, chacun s'étendant avec sa chacune.

La fête se prolonge à ciel ouvert, quelques-uns dressent des tentes ;

   il en est qui font des cabanes de feuillage et de branches ;

d'autres ont monté des roseaux rigides en guise de colonnes,

3, 530

   ils déplient leurs toges et les étendent par dessus.

Cependant, échauffés par le soleil et le vin, ils se souhaitent autant d'années

   que les coupes qu'ils écluseront, et ils les comptent en buvant.

Tu trouveras là celui qui pourrait avaler les années de Nestor,

   celle que les coupes ingurgitées transformeraient en Sibylle.

3, 535

Là aussi, les gens chantent ce qu'ils ont appris dans les théâtres,

   et règlent sur leurs paroles les battements de leurs mains ;

autour d'un cratère posé sur le sol, ils mènent des choeurs grossiers ;

   toute parée, une fille danse, les cheveux dénoués.

Au retour, ils titubent, se donnant en spectacle à la foule,

3, 540

   qui, en les croisant, les appelle "bienheureux".

Récemment (cela vaut d'être mentionné), j'ai rencontré ce cortège :

une vieille femme ivre traînait un vieillard ivre lui aussi.

 


Anna Perenna (II). Arrivée d'Anna, soeur de Didon, en Italie  (3,545-602)

 

Trois années après le suicide de Didon et la mise de Carthage sous la coupe des Numides et de Iarbas, Anna, expulsée du palais, accomplit une dernière offrande rituelle en hommage à sa soeur Didon, la reine défunte, et s'enfuit par la mer avec quelques compagnons. Accueillie par Battus, le roi de l'île de Mélitè, elle est contrainte trois ans plus tard à un nouvel exil, car Battus refuse de combattre contre Pygmalion, le frère d'Anna et de Didon, qui menaçait d'attaquer l'île de Mélitè. (3,545-580)

Après avoir essuyé une violente tempête dans le golfe de Tarente, le navire d'Anna est emporté vers le rivage des Laurentes. Les rescapés, qui ne savent pas où ils sont, débarquent en fait dans le pays où règne Énée, époux de Lavinia. (3,581-602)

 

Comme l'identité de cette déesse est sujette à des divagations,

   je me propose de ne taire aucun de ces récits.

3, 545

La malheureuse Didon pour Énée avait brûlé dans les flammes ;

   elle avait brûlé sur le bûcher construit pour accomplir son destin.

On recueillit ses cendres et, sur le marbre de son tombeau,

   on grava ce bref poème qu'elle-même avait laissé en mourant :

"Énée fut la cause de cette mort et en fournit le glaive."

3, 550

"Didon tomba, frappée de sa propre main".

Aussitôt, les Numides envahissent son royaume sans défense

   et le Maure Iarbas règne en maître dans le palais qu'il a conquis ;

se souvenant du mépris encouru, il dit : "Me voici jouissant enfin

   de la couche d'Élissa, moi qu'elle a tant de fois repoussé".

3, 555

Les Tyriens fuient en désordre, chacun où les mène une course éperdue,

   telles des abeilles hésitantes qui errent, une fois leur roi disparu.

Pour la troisième fois l'aire avait reçu les moissons à battre,

   et trois fois le moût avait rejoint les cuves profondes.

Expulsée du palais, Anna, en pleurs, quitte les remparts élevés par sa soeur ;

3, 560

   auparavant, elle lui rend les honneurs imposés.

Les cendres légères boivent les parfums mêlés de ses larmes

   et reçoivent l'offrande d'une touffe de ses cheveux.

Trois fois elle dit : "Adieu", trois fois elle presse l'urne de cendres

   qu'elle porte à ses lèvres et croit y sentir la présence de sa soeur.

3, 565

Elle trouve un bateau, des compagnons de fuite et s'échappe à pleine voile,

   se retournant pour voir les remparts, oeuvre chère à sa soeur.

Voisine de l'aride Cosyra s'étend la fertile Mélitè,

   une île que viennent battre les flots du détroit de Libye.

Elle s'y rend, confiante dans l'hospitalité ancienne du roi :

3, 570

   Battus, hôte riche et opulent, y régnait.

Informé des malheurs des deux soeurs, il lui dit :

   "Cette terre, si petite qu'elle soit, est la tienne".

Et il était disposé à respecter jusqu'au bout ses devoirs d'hôte

   mais il eut peur des forces puissantes de Pygmalion.

3, 575

Le soleil avait parcouru deux fois le zodiaque, et la troisième année,

   il fallut se ménager une nouvelle terre d'exil.

Le frère d'Anna est là, qui cherche la guerre. Battus abhorre les armes :

   "Nous ne sommes pas faits pour la guerre ; fuis, sauve-toi !", dit-il.

Sur cet ordre elle fuit, confiant son bateau au vent et aux flots :

3, 580

   son frère était plus intraitable que toutes les mers.

 

Il existe, près du caillouteux Crathis aux eaux poissonneuses,

   une petite plaine que les gens du lieu appellent Caméré :

C'est vers elle que se dirigeait le bateau. La distance

   qui l'en séparait ne dépassait pas neuf jets de fronde.

3, 585

D'abord, les voiles tombent et balancent sous le vent hésitant.

   Le pilote crie : "Fendez les ondes à coups de rames !"

Pendant qu'on tente de serrer les voiles à l'aide d'un cordage,

   un violent Notus vient frapper la nef courbe

et l'emporte vers le large, malgré les efforts vains du pilote.

3, 590

   La terre entrevue disparaît à leurs yeux.

Les vagues se soulèvent, et la mer surgie d'un tourbillon

   se retourne, emplissant la coque d'eaux blanches d'écume.

La technique ne résiste pas au vent, le timonier ne maîtrise plus les rênes,

   mais lui aussi, de tous ses voeux, appelle des secours.

3, 595

La Phénicienne en exil est ballottée sur les flots houleux

   et couvre de son vêtement ses yeux baignés de larmes.

Alors pour la première fois, elle jugea "bienheureuses" sa soeur Didon

   et toutes les femmes dont le cadavre a pesé quelque part sur terre.

Un immense coup de vent dirige la nef vers le rivage des Laurentes ;

3, 600

   tous débarquent, mais le bateau est englouti et périt.

Déjà le pieux Énée était devenu maître de ce royaume,

   ayant épousé la fille de Latinus, et il avait fusionné leurs deux peuples.

 


Anna Perenna (III). La nymphe du Numicius  (3,603-656)

 

Se promenant en compagnie de son fidèle Achate, Énée reconnaît Anna errant sur le rivage. Encore très ému au souvenir de Didon, il justifie son départ de Carthage et son involontaire trahison en rappelant la mission dont les dieux l'ont investi ; il affirme aussi sa surprise en apprenant le suicide de Didon, qu'il a rencontrée récemment dans les enfers. (3,603-620)

En mémoire des bontés de Didon et d'Anna, Énée offre une hospitalité généreuse à Anna et recommande à son épouse Lavinia de la traiter en soeur. Mais celle-ci, rongée par la jalousie, médite de perdre Anna et puis de se supprimer elle-même. (3, 621-638)

Dans un songe, le fantôme de Didon conseille la fuite à Anna, qui se sauve aussitôt et est recueillie au sein du fleuve Numicius qui la protège à jamais, malgré les vaines recherches des foules à travers la campagne. C'est ainsi qu'elle devint la Nymphe du fleuve Numicius, honorée par une grande fête campagnarde sous le nom d'Anna Perenna. (3,639-656)

 

Sur ce rivage reçu en dot, accompagné du seul Achate,

   Énée s'engage, pieds nus, sur un chemin écarté ;

3, 605

il aperçoit alors Anna qui errait, et ne peut croire que c'est elle :

   que viendrait-elle faire dans les champs du Latium ?

Tandis qu'il est perdu dans ses pensées, Achate s'écrie :

   "C'est Anna". Entendant son nom, elle leva son visage.

Hélas ! Va-t-elle fuir ? Que faire ? Où chercher un trou où se glisser ?

3, 610

   Sous ses yeux se dressait celui qui avait perdu sa soeur infortunée.

Le héros, né de Cythérée, comprend et dit à Anna toute tremblante,

   - en pleurant cependant, ému à ton souvenir, Élissa - :

"Anna, par cette terre que me destinait un oracle plus favorable,

    comme tu l'as souvent entendu dire autrefois,

3, 615

par les dieux emportés avec moi et installés depuis peu en ce lieu,

    je jure que souvent ils m'ont reproché mes atermoiements.

Pourtant, je n'ai pas cru qu'elle mourrait : cette crainte ne m'a pas effleuré.

   Hélas, elle s'est montrée plus forte que je ne l'en croyais capable !

Ne me raconte rien : j'ai vu les blessures imméritées marquant son corps

3, 620

    lorsque j'ai eu l'audace de visiter les demeures du Tartare.

 

Mais, que tu abordes nos rivages poussée par la raison ou par un dieu,

    accepte les avantages que t'offre mon royaume.

Je te dois beaucoup, je m'en souviens, et il n'est rien que je ne doive à Élissa :

   tu seras bienvenue en ton nom, et bienvenue au nom de ta soeur".

3, 625

Devant de telles paroles, - il ne lui reste d'ailleurs pas d'autre espoir -

   elle prend confiance et lui fait le récit de ses errances.

Dès qu'elle pénétra, en habits tyriens, dans la demeure royale,

   Énée prit la parole, tandis que l'assistance restait silencieuse :

"Lavinia, chère épouse, c'est pour moi un devoir sacré

3, 630

   de te confier cette personne : naufragé, j'ai bénéficié de ses richesses.

Originaire de Tyr, elle possédait un royaume sur la côte de Libye.

   Je te prie de l'aimer tendrement, comme une soeur".

Lavinia promet de tout faire, mais en pensée elle réprime secrètement

   une blessure imaginaire, et la dissimule tout en frémissant.

3, 635

Voyant passer sous ses yeux les nombreux présents offerts à Anna,

   elle se figure que beaucoup d'autres lui sont envoyés en secret.

Elle n'a pas arrêté de plan précis : en proie à une haine folle,

   elle prépare un piège et veut mourir, après s'être vengée.

 

C'était la nuit : devant son lit, Anna crut voir se dresser

3, 640

   sa soeur Didon, couverte de sang, les cheveux défaits,

qui lui disait : "Fuis sans hésiter, fuis cette demeure de malheur !"

   À ces mots, le vent poussa les portes qui gémirent.

Elle sauta, rapide, par une fenêtre basse et courut à travers champs :

   la peur même l'avait rendue audacieuse.

3, 645

Emportée par la crainte, voilée d'une tunique mal ajustée,

   elle court, tel un daim effrayé qui a entendu les loups.

On croit que le Numicius cornu l'aurait saisie

   dans ses ondes gonflées, et cachée au fond de son lit.

Cependant, à grands cris, on chercha la Sidonienne à travers les champs ;

3, 650

   on trouva des indices, des traces de pas ;

on parvint à la rive : on trouva ses marques sur la rive.

   Le fleuve complice contint le bruit de ses eaux ;

on crut l'entendre, elle : "Je suis la nymphe du paisible Numicius ;

   cachée dans le fleuve au cours pérenne, on m'appelle Anna Perenna".

3, 655

Aussitôt, tout joyeux, dans les champs parcourus à l'aventure,

   on festoie et on célèbre ce jour et soi-même dans des flots de vin.

 


Anna Perenna (IV). Autres étiologies, dont celle par Anna de Bovillae (3,657-674)

 

Anna Perenna, assimilée par certains à la Lune, par d'autres à Thémis ou à Io, fille d'Inachus, ou encore à une des nymphes nourricières de Jupiter enfant, passe aussi pour être à l'origine la vieille femme de Bovillae qui apporta des galettes de sa fabrication aux membres de la plèbe retirés sur le mont Sacré et privés de vivres ; ceux-ci manifestèrent leur reconnaissance en dressant une statue à cette Anna Perenna. (3,657-674)

 

Il en est pour qui Anna est la Lune, parce que ses mois couvrent une année ;

   certains pensent qu'elle est Thémis ; d'autres, la génisse fille d'Inachus.

Tu trouveras des gens pour dire que tu es une nymphe azanide,

3, 660

   et que c'est toi, Anna, qui as donné à Jupiter ses premiers aliments.

Une autre tradition, que je vais rapporter, est parvenue à nos oreilles

   et elle n'est pas dépourvue de vraisemblance.

Jadis la plèbe, que des tribuns ne protégeaient pas encore,

   avait pris la fuite et campait au sommet du mont Sacré.

3, 665

Déjà les vivres que les gens avaient emportés avec eux,

   et les fruits de Cérès, indispensables aux humains, venaient à manquer.

Il se trouvait alors une certaine Anna originaire de Bovillae,

   dans les faubourgs de Rome, une vieille femme pauvre, mais très active.

Les cheveux blancs entourés d'un léger bandeau,

3, 670

   elle façonnait de ses mains tremblantes des galettes grossières

et avait l'habitude de les distribuer le matin encore fumantes

   à la population. Les gens apprécièrent cette générosité.

Une fois établie la paix intérieure, ils élevèrent une statue à Perenna,

   parce qu'elle leur avait porté secours dans leur dénuement.


 

Anna Perenna (V). Chants grivois : Mars dupé par Anna (3,675-696)

 

La coutume, propre aux jeunes filles, de chanter des grivoiseries à la fête d'Anna Perenna, s'expliquerait par le rôle que, déesse fraîche émoulue, elle joua auprès de Mars. Celui-ci avait demandé à Anna Perenna de favoriser ses amours avec Minerve, déesse guerrière comme lui ; Anna, malgré ses promesses, tarde à satisfaire le dieu qui se montre de plus en plus impatient, et en fin de compte elle-même se substitue à Minerve, que le dieu s'attendait à découvrir dans la chambre nuptiale. Anna Perenna passe ainsi pour s'être moquée de Mars amoureux, au grand plaisir de Minerve et de Vénus ; c'est cet incident qui serait commémoré par des chants obscènes. (3,675-696)

 

3, 675

Il me reste maintenant à dire pourquoi les jeunes filles chantent des obscénités.

  En effet, elles se rassemblent et chantent traditionnellement des grivoiseries.

 Anna venait de devenir déesse ; Gradivus s'approche d'elle,

   et l'emmenant à l'écart, lui tient ces propos :

"Tu es honorée au cours de mon mois, mes temps et les tiens sont unis ;

3, 680

   pour ma part, j'attache beaucoup d'espoir à tes services.

Dieu guerrier, épris d'amour pour Minerve la guerrière,

   je me consume et nourris cette blessure depuis longtemps.

Fais en sorte que, dieux aux goûts semblables, nous nous unissions.

   Ce rôle te convient, ma vieille commère".

3, 685

Il avait parlé ; elle fit au dieu une promesse vaine et trompeuse,

   et par de vagues délais prolongea sans fin le fol espoir qu'il éprouvait.

Très souvent il insistait ; elle lui dit : "J'ai accompli tes ordres ;

   je l'ai convaincue ; elle vient de se rendre à mes prières".

Amoureux, il la croit et prépare la chambre nuptiale.

3, 690

   On y conduit Anna, visage voilé, comme une jeune épousée.

Mars, prêt à lui donner un baiser, aperçoit soudain Anna :

   la honte et la colère tour à tour gagnent le coeur du dieu abusé.

Tu te joues de l'amoureux ; nouvelle déesse, tu es chère à Minerve,

   et rien ne fut plus apprécié de Vénus que cet incident.

3, 695

De là proviennent les vieilles plaisanteries et les chansons obscènes,

   et on trouve plaisant qu'Anna ait ainsi répliqué à un grand dieu.


 

Ides de Mars : Apothéose de César (3,697-710)

 

Vesta rappelle au poète que les Ides de Mars sont la date du meurtre de Jules César, qui fut Grand Pontife. Suite à l'intervention de la déesse, seul le simulacre de Jules César a été abattu, le vrai César ayant été enlevé au ciel et étant honoré comme un dieu dans son temple au Forum. Il a d'ailleurs été vengé à Philippes par son successeur Auguste et tous ses meurtriers sont morts. (3,697-710)

 

3, 698

J'allais omettre les glaives qui transpercèrent César, notre prince,

   lorsque Vesta, de son chaste foyer, me parla ainsi :

"N'hésite pas à en faire mention ; il fut mon prêtre ;

3, 700

   c'est moi que des mains sacrilèges ont atteinte de leurs traits.

Mais moi, j'ai enlevé le héros, lui substituant un vain simulacre :

   c'est l'ombre de César, qui fut frappée par le fer".

Lui, installé au ciel, il a vu la cour de Jupiter,

   et il possède sur le vaste Forum un temple qui lui est dédié.

3, 705

Par contre, tous ceux qui ont eu l'audace sacrilège d'enfreindre

   la sainte volonté des dieux et ont profané la tête d'un pontife

sont morts d'une mort méritée : vous en témoignerez, Philippes,

    et vous, qui blanchissez la terre de vos ossements épars.

Les premiers principes mis en oeuvre par la piété de César,

3, 710

   ce fut de venger son père avec des armes justes.

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Notes (3,523-710)

 

Anna Perenna (3,523). Déesse que son nom désigne comme une personnification de l'année dans son écoulement et son retour perpétuel (3, 146). Le 15 mars, elle était l'objet, dans un bois sacré près des rives du Tibre, un peu à l'extérieur de Rome, d'une fête populaire qu'Ovide va abondamment décrire. Tout le monde boit et on chante des chansons que le poète qualifiera plus loin (3, 675 et 3, 695) d'obscena et qui ont probablement valeur apotropaïque.

qui vient de l'étranger (3,524). Le Tibre vient d'Étrurie.

Nestor (3,533). Exemple de longévité, le sage vieillard Nestor aurait vécu trois générations (Homère, Iliade, 1, 248-252).

Sibylle (3,534). D'après Ovide, Métamorphoses, 14, 140-146, la Sibylle avait déjà 700 années lorsqu'elle rencontra Énée, et il lui restait encore 300 ans à vivre. Voir aussi Virgile, Énéide, 6, 10-12 et passim.

cratère (3,537). Le cratère était un vase d'une grande capacité dans lequel on mélangeait le vin et l'eau, et où on venait puiser la boisson qu'on servait aux convives.

Didon... (3,545-656). Dans la première des étiologies proposées, Ovide imagine qu'Anna Perenna est en fait Anna, soeur de Didon, reine de Carthage, qui, après de nombreuses aventures, aurait été métamorphosée en une nymphe du fleuve Numicius, et ainsi divinisée. Ce faisant, Ovide invente une suite au chant 4 de l'Énéide, auquel on se reportera si l'on veut mieux saisir l'intérêt de la création ovidienne.

Numides (3,551). Les voisins et rivaux des Carthaginois.

Iarbas (3,552). Roi maure, qui avait été le prétendant malheureux de Didon (Virgile, Énéide, 4, 36).

Élissa (3,554). Nom d'origine phénicienne, porté par Didon, et qu'Énée utilise par exemple en Énéide, 4, 335.

Tyriens (3,555). Le terme désigne les Carthaginois, venus de Phénicie avec leur fondatrice, Didon, soeur du roi de Tyr.

roi (3,556). Les anciens ne pouvaient pas imaginer que les abeilles étaient régies par une reine. Cfr Virgile, Géorgiques, 4, 21 ; 4, 68 ; 4, 201.

cendres légères (3,561). "Larmes et parfums font partie du rituel funèbre. Quant au geste d'Anna qui se coupe une mèche de cheveux pour la mêler aux cendres de sa soeur, il marque une tendresse qui va au-delà des habitudes ordinaires" (R. Schilling).

Trois fois (3,563). "Rituel de la triple adresse (conclamatio) au défunt" (R. Schilling).

Cosyra... Mélitè (3,567). Cosyra (actuelle Pantelleria) et Mélitè (actuelle Malte) sont deux îles situées entre l'Afrique et la Sicile ; d'abord dominées par les Carthaginois, elles furent conquises par Rome respectivement en 217 et 218 a.C.

Battus (3,570). Nom d'un roi mythique de Cyrène. Ovide est le seul à le faire régner à Malte.

Pygmalion (3,574). Roi de Tyr, frère de Didon, dont il avait tué l'époux Sychée. Didon avait pris la fuite avec un groupe de partisans pour aller fonder Carthage. Cfr Virgile, Énéide, 1, 347 ; 1, 364 ; n. à 1, 340-369 ; 4, 325. On ne confondra pas ce frère de Didon avec un autre Pygmalion, célèbre sculpteur de Chypre, tombé amoureux d'une statue de femme qu'il avait sculptée dans l'ivoire et qu'il épousa après qu'elle eut été animée par Vénus.

Crathis (3,581). Crathis (actuellement Crathi) est un petit fleuve du Bruttium qui se jette dans le golfe de Tarente.

Caméré (3,582). Ce lieu est cité seulement par Ovide.

Notus (3,588). Vent du sud.

cadavre a pesé (3,558). Allusion à la malédiction frappant les naufragés dont le cadavre n'est pas honoré d'une sépulture. Cfr dans l'Énéide le cas de Palinure (6,337-381) et de Misène (6, 149-189).

Laurentes (3,599). Les habitants de la région dont Latinus était roi au moment de l'arrivée d'Énée dans le Latium. Cfr 3, 93.

fusionné leurs deux peuples (3,602). C'est la version "canonique" de l'histoire d'Énée, qui épouse Lavinia et succède à Latinus. Les Troyens et les sujets de Latinus ont fusionné pour ne plus former qu'un seul peuple, celui des Latins.

Achate (3,603). Le plus fidèle des compagnons d'Énée chez Virgile (par exemple Énéide, 1, 188). Virgile le qualifie régulièrement de fidus "fidèle".

Cythérée (3,611). Vénus-Aphrodite, mère d'Énée, est appelée ainsi du nom de l'île de Cythère, au sud du Péloponnèse, où, après être née de l'écume de la mer, elle fut déposée par les Zéphyrs. Elle possédait dans cette île qui lui était consacrée un temple très célèbre.

dieux emportés avec moi (3,615). Les Pénates de Troie, auxquels Énée a finalement trouvé une nouvelle patrie.

j'ai vu les blessures... (3,619-620). Lors de la descente d'Énée aux enfers, objet du chant 6 de l'Énéide, et plus précisément lorsque le héros troyen rencontre Didon, en 6, 450-476.

Lauinia (3,629). La fille de Latinus, roi des Latins. Promise à Turnus, roi des Rutules et adversaire d'Énée, elle épouse Énée après la guerre latine et la fusion des Latins et des Troyens. Énée fonde une ville qu'il appellera Lavinium en son honneur.

Numicius cornu (3,647). Petit fleuve du Latium (actuel Rio Torto), sur les bords duquel Énée aurait disparu, avant d'être honoré en tant que Jupiter Indiges. Dans l'iconographie, les fleuves étaient souvent représentés comme des taureaux, d'où le qualificatif "cornu" appliqué ici.

Sidonienne (3,649). Désigne ici Anna, par allusion à ses origines, Sidon et Tyr étant deux villes importantes de Phénicie.

au cours pérenne (3,654). Pseudo-équivalence établie par Ovide entre amne perenne ("dans un fleuve au cours pérenne") et Anna Perenna. Les modernes estiment correcte la correspondance entre Perenna et l'adjectif perennis, mais non fondée celle entre amnis ("le fleuve") et Anna. Quant à l'étymologie des deux éléments qui composent le nom de la déesse, Anna Perenna (on trouve aussi Anna ac Peranna), elle n'est pas absolument sûre.

Thémis (3,658). Fille du Ciel et de la Terre, déesse de la justice, mère des Heures et des Parques.

Lune (3,657). "L'identification d'Anna avec la lune est proche de l'explication qui rattache Anna à l'année" (R. Schilling).

fille d'Inachus (3,658). La fille du roi d'Argos Inachus est Io. Aimée de Zeus-Jupiter, Io fut transformée en génisse à cause de la jalousie d'Héra-Junon ; après bien des mésaventures, elle retrouva la forme humaine en Égypte où elle devint la déesse Isis. Voir 1, 454 ; 4, 717 ; 5, 619.

azanide (3,659). C'est la lecture suivie par R. Schilling. Les Azanes occupant une partie de l'Arcadie, l'expression "nymphe azanide" équivaudrait à "nymphe arcadienne", une des trois nymphes que la légende attribuait comme nourrices à Zeus sur le mont Lykaion en Arcadie. D'autres éditeurs adoptent une variante de la tradition manuscrite correspondant à "fille d'Atlas" : il s'agirait alors d'une "nymphe, fille d'Atlas".

Une autre tradition (3,661). Nouvelle étiologie faisant intervenir un événement tiré de l'histoire romaine, sur lequel Ovide va broder en imaginant un personnage du nom d'Anna. L'anecdote est propre au poète.

plèbe (3,663ss). Allusion à la Sécession de la plèbe sur le Mont Sacré à quelques kilomètres au nord-est de Rome. L'épisode que la tradition date de 493 a.C. aboutit à l'institution du tribunat de la plèbe, une institution chargée de la protection des plébéiens (Tite-Live, 2, 32 et 33).

Bovillae (3,667). Petite cité à 17 kilomètres de Rome, sur la Via Appia. On ne sait pas pourquoi Ovide la fait intervenir ici : peut-être possédait-elle un culte à la déesse, mais on n'en a aucune trace.

obscénités (3,675). Allusion possible à un rite ayant pour but d'éloigner les maléfices, ou de stimuler la fertilité ou la fécondité.

Gradivus (3,677). Un des noms de Mars, dont il a déjà été question (2, 861 et 3, 169).

Minerve la guerrière (3,681). Cfr notamment 3, 5-7.

Vénus (3,604). En tant que déesse de l'amour, parfois un peu sadique, mais surtout en tant que maîtresse attitrée de Mars-Arès, depuis Homère, Odyssée, 8, 266-325.

les glaives qui transpercèrent César (3, 697). Jules César périt assassiné, le 15 mars 44 a.C., par un groupe de conjurés dirigés par les Républicains Brutus et Cassius.

il fut mon prêtre (3,699). Grand Pontife depuis 63 a.C., Jules César présidait donc le culte de Vesta et le collège des Vestales. Cfr 3, 415ss et les notes.

un temple (3,704). L'apothéose de César eut lieu peu de temps après sa mort en 44 a.C. Deux ans plus tard, un temple fut promis au "Divin Jules" par les Triumvirs (Antoine, Octave et Lépide). Il fut inauguré par Auguste en 29 a.C., à la fin des guerres civiles.

Philippes (3,707). Ville de Macédoine, où l'armée des Républicains fut défaite, en 42 a.C., par Antoine et Octave, ce qui provoqua notamment le suicide de Brutus et de Cassius.

César (3,709-710). Rappelons qu'il s'agit ici d'Octave, petit-neveu et fils adoptif de Jules César, qui lui succédera après avoir éliminé son rival Marc-Antoine à Actium, en 31 a.C. Il reçut le titre d'Auguste en 27 a.C., et, comme tous ses successeurs, se para souvent du titre de César.


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