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Suétone (généralités)
Vie de César (généralités) - (latin 85 K) - (traduction 200 K)
XVIII. Il part pour l'Espagne
(1) À l'issue
de sa préture,
le sort lui départit l'Espagne
ultérieure.
Mais, retenu par ses créanciers, il ne s'en
délivra qu'après avoir donné
des cautions;
et sans attendre que, selon l'usage et les lois, le
sénat eût réglé
tout
ce qui concernait les
provinces, il
partit, soit pour échapper à une
action judiciaire qu'on voulait lui intenter
à l'expiration de sa charge, soit pour
porter plus promptement secours aux
alliés,
qui imploraient la protection de
Rome. Quand
il eut pacifié
sa province,
il revint, avec la même précipitation
et sans attendre son successeur,
pour demander à la fois le triomphe
et le consulat. (2) Mais le jour des
comices
étant déjà indiqué,
l'on ne pouvait tenir compte de sa candidature que
s'il entrait dans la ville en
simple particulier;
et lorsqu'il intrigua
pour être
affranchi
de la loi, il
rencontra une forte opposition. Il fut donc
forcé de renoncer au triomphe, pour
n'être pas exclu du consulat. (1)
Ex praetura ulteriorem sortitus Hispaniam
retinentes creditores interuentu sponsorum remouit
ac neque more neque iure, ante quam prouinciae
ornarentur, profectus est: incertum metune iudicii,
quod priuato parabatur, an quo maturius sociis
inplorantibus subueniret; pacataque prouincia pari
festinatione, non expectato successore ad triumphum
simul consulatumque decessit. (2)
Sed cum edictis iam comitis ratio eius haberi non
posset nisi priuatus introisset urbem, et ambienti
ut legibus solueretur multi contra dicerent,
coactus est triumphum, ne consulatu excluderetur,
dimittere.
CommentaireCautions : Plutarque (César, 11, 1-2) précise que c'est Crassus qui s'est porté garant pour César, pour la somme énorme de huit cent trente talents.
Tout ce qui concernait les provinces : avant leur départ, le Sénat fixe les moyens, en hommes et en argent, dont disposeront les gouverneurs de provinces (ornatio provinciae).
Alliés qui imploraient la protection de Rome: probablement victimes du brigandage fort répandu en Espagne à cette époque selon Dion Cassius (Histoire romaine, 37, 52)
Pacifié sa province : l'uvre de César en Espagne est détaillée par Plutarque (César, 12). Le gouverneur mène des expéditions victorieuses contre des populations insoumises de l'ouest et du nord de la péninsule et rétablit la concorde dans les cités où de vifs affrontements opposaient créanciers et débiteurs.
Successeur : en principe, un gouverneur ne pouvait pas quitter sa province avant l'arrivée de son successeur (cf. Fr. De Martino, Storia della costituzione romana, t. 2, 2e éd., Naples, 1973, p.406) mais il semble que cette règle n'était pas respectée à la lettre ; on se souvient que César avait déjà quitté l'Espagne, où il exerçait la questure, avant la fin de son mandat, ante tempus (cf. ci-dessus, ch.8).
Triomphe : procession solennelle d'un général vainqueur, du Champ de Mars au temple de Jupiter Capitolin. Cette cérémonie d'hommage est une récompense accordée par le Sénat dans des conditions très strictes. « Rome would not have been Rome if it had not developed an elaborate casuistry in this field » (H.S. Versnel, Triumphus. An Inquiry into the Origin, Development and Meaning of the Roman Triumph, Leyde, 1970, p.164).
Comices : il s'agit des comices centuriates, compétentes pour l'élection des magistrats supérieurs (consuls, préteurs, censeurs).
En simple particulier : c'est-à-dire ayant abandonné son imperium. Plutarque (César, 13, 1) explique clairement le problème qui se pose ici. Le candidat au triomphe, détenteur de l'imperium, doit rester en dehors du pomerium jusqu'à ce que le Sénat lui accorde l'honneur qu'il réclame tandis que le candidat aux élections, lui, doit être présent au cur de la cité.
Affranchi de la loi : c'est toujours Plutarque (César, 13, 2) qui précise les choses. César aurait demandé que sa candidature au consulat puisse être déposée par des amis, requête qui aurait probablement été satisfaite sans l'opposition de Caton.
[19 septembre 2004]