La Fuite de la Sainte-Famille en Égypte chez Jean d’Outremeuse.
Un épisode
de l’Évangile vu par un chroniqueur liégeois du XIVe siècle
par
Jacques
Poucet
Professeur émérite de
l'Université de Louvain
Membre de l'Académie
royale de Belgique
<jacques.poucet@skynet.be>
PREMIÈRE PARTIE : Le Texte et LA traduction
On trouvera ici la présentation du texte sur deux colonnes : à gauche l’original en moyen français repris à l’édition d’A. Borgnet (Ly Myreur des Histors, Tome I, Bruxelles, 1864, p. 355-378, passim), et à droite une traduction personnelle en français moderne. Pour la clarté de la présentation et la facilité de l’utilisation, nous avons conservé sous forme d’intertitres les notes marginales du manuscrit et divisé l’ensemble en soixante-dix paragraphes (§), regroupés en six blocs, que voici :
A. Injonction de l’ange à Joseph, départ de Bethléem et massacre des enfants (§ 1-12)
B. Sur le chemin de l’Égypte : le miracle du champ de blé et le premier disciple (§ 13-19)
C. Arrivée en Égypte et séjour au Caire (§ 20-24)
D. Rencontre avec le brigand Dismas et nombreux miracles (§ 25-42)
E. Séjour au Castel d’Orient : autres miracles (§ 43-68)
F. Seconde injonction de l’ange à Joseph et retour en terre d’Israël (§ 69-70).
La présentation sera suivie d'une observation portant sur les rapports entre l'Évangile de Matthieu et Jean d'Outremeuse.
A. L’injonction de l’ange à Joseph, le départ de Bethléem et le massacre des enfants (§ 1-12)
L’an IIIIe [p. 355] (1) Le
quarte an del incarnation Jhesu-Crist, mandat ly roy Herode tous les maistres
de la loy, portant qu'ilh oiit dire que ly roy des Juys astoit neeis, et leur
demandat s'ilh savoient où ly enfe devoit naistre de la Virgue. Adont
respondirent les maistres que les prophetes assengnoient que ilh nastroit en
Bethleem. (2) Quant
Herode chu entendit, ilh soy dobtat mult de sa signorie qu'ilh ne li
tollist ; se mandat mult de gens d'armes, et se les fist gaitier tout
nuit. Et chu fut le XXVIIIe jour de decembre, al adjournée. Et leur dest
Herode que ilhs ochissent à matin tous les enfans qui sieroient troveis en la
citeit de Bethleem. Jhesus
escapat (3) Celle
nuit vint I angele à Joseph, et ly dest que tantoist ilh s'en alaist fours de
la citeit, luy et Marie et Jhesus, car Herode feroit demain al matin ochire
tous les enfans de la citeit Bethleem, portant qu'ilh quide ochire Jhesus. «
Et s'en vas droite vers Egipte, et ne toy en depairs jusqu'à tant que je le
toy nuncheray. » (4) Quant
Joseph l'oït, se soy levat tantoist, se mist la Virgue sour unc mule awec son
enfant. Mains quant ilh devoit issir de la citeit, si at troveit les gens
Herode qui gardoient les portes tous armeis ; se alat à I porte que
Dismas gardoit, qui astoit asseis fellons ; mains Dieu l'esperat
teilement que ilh lassat Joseph aleir, car ilh ne savoit cuy ilh astoient. Et
Joseph se prist fortement à chemyneir. (5) Et
quant ilh fut jour, si entrat Herode, et ses gens awec ly, en Bethleem, et
ont ochis tous les enfans desous IIII ans. Adont fut acomplie le prophetie
Jeremie, qui dist : « Une vois fut oiie en Ramme en grant parleur et
cris ; car Rachel, la dierain femme Jacob, ploroit les jovenes mors.» (6) Et
furent à chi jour ochis des innocens VIIxx et IIII milhirs, solonc
l'Escripture. Innocens ne sont mie appelleis martyres, jasoiche que ilh
fuissent martyrisiés, car ilh deservirent le merite de Dieu, en morant et
nient en prechant. De Gonis
la pucelle - Del
enfant de chire (7) En
paiis de Judée avoit une pucelle qui oit nom [p. 356] Gonis, filhe de I noble hons de paiis ; quant elle
veit comment ons decolloit les innocens, si oit grant doleur que elle ne fuit
si tempre mariée qu'elle ewist enfant qui fuist decolleis awec les aultres,
en disant : « Hée Dieu ! qu'à bonne heure fut née celle mere ly cuy
enfe bien awireux qui chi morat por vostre amour ! » (8) Puis est la pucelle avisée ; si at faite I enfant de chire, se le cuchat en unc berchoul, et Ii mist sa mamelle en sa bouche, enssi com ilh fust vief.
(9) Gran myracle
demonstrat là Dieu, car ilh donnat chaire et sanc à celle figure, et vertu de
parleir, si qu'ilh parlat à Gonis et dest : « Pucelle et virgue bien awireux,
à bonne heure fus-tu née, car ajourd'huy tu as fait bonne journée, car por
ton amour m'at Dieu donneit vie ; or ne moy fais pas circonchier, car je
veulhe morir por l'amour de ly ; je suy huy neis, si seray demain ochis,
si moy baptizeray en mon sanc.» (10) Enssi demorat jusques à lendemain, que les gens Herode sont là venus ; sy ochirent par le vilhe tous les enfans, dont gran cris est esleveis. Et là oit pluseurs dammes qui voirent leurs enfans gardeir, se les misent par les forestes ens bussons ; de coy Dieu soy corochat, et devienrent singnes.
(11) Mains
quant la pucelle Gonis veit les gens d'armes Herode, si commenchat à chanteir
et à berchier son enfant ; et les gens Herode qui l'oïrent sont cel part
aleis, et ont pris l'enfant, si l'ont ochis ; mains de chu soy mervelhat
tout le peuple que oncques Ii enfe ne sangnat. (12) Adont
vient I chevalier à Herode, et li dest qu'ilh avoit ochis I enfan si beal que
oncques ne veit teil, et n'avoit gotte sangneit, et Ii avoit buteit l'espée
en ventre ; mains quant ilh l'oit ochis, ilh veit le chiel ovrir deseur
ly, et venir les angeles qui avoient l'arme de cel enfant presenteit à I
saingnour, qui astoit mult beais. Quant ilh oit chu dit, Herode s'en moquat. |
Événements
de l’An IV (1) L’an 4 de l’Incarnation de Jésus-Christ, le roi Hérode convoqua tous les maîtres de la loi, parce qu’il avait entendu dire que le roi des Juifs était né. Il leur demanda s’ils savaient où l’enfant devait naître de la Vierge. Les maîtres lui répondirent que, d’après l’enseignement des prophètes, il naîtrait à Bethléem.
(2) Quand
Hérode entendit cela, il craignit très fort que cet enfant ne lui enlevât son
pouvoir ; il convoqua un grand nombre d’hommes armés, qu’il fit veiller
toute la nuit. Cela se passa le 28 décembre, à l’aube. Hérode leur dit de
tuer au matin tous les enfants qui seraient trouvés dans la cité de Bethléem. Jésus échappa (3) Cette
nuit-là, un ange vint trouver Joseph et lui dit de sortir aussitôt de la
cité, avec Marie et Jésus. Le lendemain matin en effet Hérode ferait tuer
tous les enfants de Bethléem, car il voulait éliminer Jésus. « Va
directement en Égypte, et n’en reviens pas, tant que je ne te le ferai pas
savoir ». (4) Quand
Joseph entendit cela, il se leva aussitôt, mit la Vierge avec son enfant sur
une mule. Mais quand il dut sortir de la ville, il trouva les hommes d’Hérode
en armes qui gardaient les portes ; il alla à une porte gardée par
Dismas, qui était plutôt mauvais ; mais Dieu l’inspira si bien qu’il
laissa passer Joseph, car il ne savait pas qui ils étaient. Et Joseph se mit
résolument en chemin. Le
massacre des saints Innocents (5) Quand
il fit jour, Hérode et ses gens entrèrent dans Bethléem où ils tuèrent tous
les enfants âgés de moins de 4 ans. Alors fut accomplie la prophétie de
Jérémie, disant : « Une voix fut entendue dans Rama, parmi des
paroles et des cris ; car Rachel, la dernière épouse de Jacob, pleurait
les jeunes morts ». (6) Ce
jour-là furent massacrés 4.140 innocents, selon l’Écriture. Ces Innocents ne
sont pas appelés martyrs, bien qu’ils aient été martyrisés : ils
servirent méritoirement Dieu par leur mort, non par leur prédication. Gonis la
pucelle et l’enfant de cire Les
enfants transformés en singes (7) Au
pays de Judée, vivait une jeune fille, appelée Gonis, fille d’un noble du
pays ; quand elle vit comment on décapitait les innocents, elle souffrit
beaucoup de n’avoir pas été mariée à temps pour avoir eu un enfant qui serait
décapité avec les autres, et elle dit : « Hé, Dieu, heureuse
est-elle la mère dont l’enfant a le bonheur de mourir pour l’amour de
vous ! » (8) La
jeune fille prit alors une décision : elle façonna un enfant en cire, le
coucha dans un berceau, et lui mit son sein en bouche, comme si il était
vivant. (9) Et là
Dieu fit un grand miracle, donnant à cette image chair et sang, et le pouvoir
de parler, si bien qu’il s’adressa à Gonis et dit : « Pucelle et
vierge bienheureuse, tu es née au bon moment, car aujourd’hui tu as eu une
bonne journée : par ton amour, Dieu m’a donné vie ; mais ne me fais
pas circoncire, car je veux mourir par amour pour lui ; je suis né
aujourd’hui ; je serai tué demain, et je serai baptisé dans mon
sang. » (10) Ainsi
en fut-il jusqu’au lendemain, quand arrivèrent les gens d’Hérode. Ils tuèrent
les enfants à travers la ville, d’où s’élevèrent de grands cris. Il y eut là
plusieurs dames qui, voulant garder leurs enfants, les placèrent dans des
buissons dans les bois. Dieu s’en courrouça, et ces enfants devinrent des
singes. (11) Mais
quand la jeune Gonis vit les gens d’armes d’Hérode, elle commença à chanter
et à bercer son enfant. Les gens d’Hérode l’entendirent, se rendirent à cet endroit,
prirent l’enfant, et le tuèrent ; mais tout le monde s’étonna de ce que
l’enfant ne saignât jamais. (12) Alors
un chevalier se rendit chez Hérode et lui dit qu’il avait tué un enfant si
beau qu’il n’en avait jamais vu de pareil, que cet enfant n’avait pas versé
une seule goutte de sang, quand il lui avait transpercé le ventre de son
épée ; mais qu’après l’avoir tué, il avait vu le ciel s’ouvrir au-dessus
de lui et venir des anges, qui avaient présenté l’âme de cet enfant à un
seigneur, qui était très beau. Quand il entendit cela, Hérode se moqua. |
B. Sur le chemin de l’Égypte : le miracle du champ de blé et le premier disciple (§ 13-29)
De
proidhons qui semoit des bleis (13) Et Nostre-Damme s'en alloit
tendant vers Egypte mult espawentée, et Joseph le conduisoit. Si ont tant
alleit, que ilh vinrent passant deleis I proidhons qui des bleis semoit ;
Marie le saluat et Ii demandat le chemin vers Egypte, et Ii proidhons li dest
mult douchement : « Vos en yreis toudis le chemin que vos aleis, tant que
vos trovereis une arbrespine ; puis tenreis le chemien à [p. 357]
diestre, en costiant les boscaiges ; apres trovereis une riweseal, qui
est de fluis de paradis terrestre. Quant vos sereis passeis celle aighe, se
sereis à segure, car nuls larons n'y oise habiteir. » Jhesus
parolle à Joseph (14) Atant
sont partis. Mains Jhesus huchat Joseph, et li dest qu'ilh dit à chis
proidhomme que se les gens le roy Herode le demandent s'ilh nos at veyut
passeir, si responde oilh quant ilh semoit les bleis ; ly proidhons
entendit bien Jhesus, si Ii dest : « Enfes, par ma loy, volentirs. ». (15) Atant
s'en vont ; mains ilh ne furent gaire long, quant les gens Herode sont
là venus, et demandent à proidhomme s'il avoit là veyut passeir I homme qui
conduisoit une femme sour unc mule et I enfant, que ons leur avoit racompteit
qu'ilh s'en aloient par là. Quant Ii proidhomme les oiit, se respondit : «
Oilh, chi les vey passeir, quant je semay chesti frument que vos veiés maours
por colhir ; depuis je ne vey chi personne passeir. » (16) Enssi
retournarent les gens Herode, et ly proidhons veit mult bien que chu astoit
Dieu qui là avoit passeit le matin ; se dest que ilh yroit apres luy et
le sierverat, et refuserat femme et ses enfans. De
proidhons, comment ilh alat vers Jhesus (17) Lendemain,
droit al matin, s'en allat ly proidhons apres Nostre-Saingnour ; si
trovat en son chemien les pas que ly mule avoit faite, et li proidhons
s'abassoit à terre et les baisoit, en depriant Dieu que ilh ly laisast
retroveir la mere et l'enfant. Tant alat li proidhomme, qu'ilh at passeit le
pont del aighe qui departoit les terres. (18) Et
là encontrat-ilh sainte Marie qui tenoit son fis Jhesus, se les saluat et
dest : « Damme, laisiés-moy alleir awec vos, se vos serveray ; je suy Ii hons
qui hire matin semoit le frument, qui jà est maours ; portant suy venus apres
vos que je sçay bien que ch'est Dieu que vos teneis, par qui salveis sierat
tout le monde. » Quant Marie entendit le proidhomme, se l'at
retenut awec lée. (19) Chis
proidhons fut puis ly gran amis de Jhesu-Crist, car Dieu l'endoctrinat et
l'ensengnat tant, que ilh fist messe chanteir et son santisme corps sacreir.
Et fut chis hons nommeis Amadus, et ch'est sains Amadus. |
Du brave
homme qui semait du blé (13) Et
Notre-Dame s’en allait, fort effrayée, en direction de l’Égypte, sous la
conduite de Joseph. Ils cheminèrent jusqu’au moment où ils passèrent près
d’un brave homme qui semait du blé. Marie le salua et lui demanda le chemin
vers l’Égypte, et l’homme lui répondit très aimablement : « Vous suivrez
toujours la même route jusqu’à ce que vous trouviez une aubépine ; puis
vous prendrez à droite, en longeant les bois ; après vous rencontrerez
un cours d’eau, qui coule du paradis terrestre. Quand vous l’aurez traversé,
vous serez en sécurité, car aucun brigand n’ose y habiter. » Jésus
parle à Joseph Grand
miracle de Jésus-Christ (14) Alors
ils partirent. Mais Jésus appela Joseph et lui dit de dire à ce paysan :
« Si les gens du roi Hérode vous demandent si vous nous avez vus passer,
répondez-leur : ‘oui, quand je semais le blé’ ». Le paysan
comprit bien Jésus et lui dit : « Enfant, par ma loi,
volontiers ». (15) Ils
s’en vont alors. Mais il ne fallut pas longtemps avant que les hommes
d’Hérode ne soient là et ne demandent au paysan s’il avait vu passer un homme
conduisant sur une mule une femme et un enfant. On leur avait appris qu’ils allaient
de ce côté. L’homme répondit : « Oui, je les ai vus passer quand je
semais ce froment que vous voyez là mûr, bon à cueillir ; depuis je n’ai
vu personne passer ici. » (16) Alors
les gens d’Hérode s’en retournèrent, et le brave homme comprit très bien que
c’était Dieu qui était passé là le matin. Il se dit qu’il allait le
suivre, le servir et abandonner sa femme et ses enfants. Comment
le brave homme alla vers Jésus (17) Le
lendemain, tout au matin, le brave homme partit pour suivre Notre-Seigneur. Il
retrouva en chemin les traces de pas de la mule, et, tombant à terre, il les
baisait, en priant Dieu de lui permettre de retrouver la mère et l’enfant. L’homme
marcha jusqu’à ce qu’il eut traversé le pont de la rivière séparant les pays. (18) Là
il rencontra sainte Marie qui tenait son fils Jésus, les salua et
dit : « Madame, laissez-moi vous accompagner pour vous
servir. C’est moi l’homme qui hier matin semait le froment, qui est déjà bien
mûr. Je vous ai suivis parce que je sais bien que dans vos bras vous tenez
Dieu, par qui tout le monde sera sauvé ». Quand Marie eut entendu ce
brave homme, elle le garda avec elle. (19) Ce
paysan fut dans la suite le grand ami de Jésus, car Dieu l’instruisit et le
forma pour qu’il fasse chanter la messe et consacrer son très saint corps.
Cet homme était appelé Amadus, et c’est saint Amadus. |
C. Arrivée en Égypte et séjour au Caire (§ 20-24)
Les
ydolles de Egipte chaïrent (20) Item
à cel temps n'avoit dammes en Egipte qu'elle n'awist en sa chambre ydolles
faites d'or ou d'argent, de coevre ou d'erain, que elles adoroient tous les
jours à matin et al vesprée ; mains oussitoist que Jhesus [p. 358] entrat en la terre, toutes
les ydols criarent si fort que ly peuple en fut tout enbahis, et puis
chaïrent les ymages à terre et debrisarent en piches. De Juys
qui demeuroit à Cayr (21) Adont
avoit en Egipte I juys qui astoit muIt saige, qui dest à peuple qu'ilh avoit
veyut en la scripture que quant Dieu nasqueroit de virgue, qui debriseroit
les ydolles. « Et portant ons puet clerement veioir que ilh est neeis ;
se priiés à Ii dévoItement qu'ilh soy lasse veioir. » Atant priarent tout la
nuit à Dieu que ilh se vosist à eaux demonstreir. (22) Chu
fut en une citeit qui oit nom Cayr, qui siet en Egipte, et Nostre-damme et
Jhesu-Crist awec Joseph vinrent à la porte de celle citeit, droit à meynuit ;
mains elle astoit fermée, sique ons ne voloit dedens lassier entreir nulle
personne jusqu'al jour, ne oussi issir por I guere qu'ilh avoient à I hault
prinche. Miracle
de mort qui soy relevat (23) Dedens celle citeit avoit-ons novellement ensevelit I mors hons, qui soy relevat de sa sepulture et appellat le peuple, et leur dest : « Saingnours, porquoy ratendeis-vos de ovrir la porte où Dieu atent ? Que ons le laisse dedens entreir, qui m'at fait resusciteir pour chu nunchier. » Quant ilh oit chu dit, ilh meisme alat defermeir la porte et Dies y entrat.
Jhesus
demorat el citeit de Cayr (24) En
celle citeit sourjournat sainte Marie, et Jhesus son fis awec Joseph, unc pau
de temps tant qu'ilh li plaisit ; puis s'en partit, enssi com vos oreis
quant je seray là tourneis. [de p. 358, l. 19
à p. 360, l. 6 : hors sujet] |
Chute des
idoles d’Égypte (20) En
ce temps-là, en Égypte il n’y avait aucune dame qui n’ait dans sa chambre des
idoles faites d’or et d’argent, de cuivre ou de bronze, idoles qu’elles
adoraient tous les jours, le matin et le soir. Mais dès que Jésus entra dans
le pays, ces idoles crièrent si fort que le peuple en fut tout effrayé ;
ensuite elles tombèrent à terre et se brisèrent en morceaux. Du Juif
qui demeurait au Caire (21) En
ce temps-là vivait en Égypte un Juif très sage, qui dit au peuple qu’il avait
lu dans l’Écriture que quand Dieu naîtrait d’une vierge, il briserait les
idoles. « Et c’est pourquoi il est maintenant clair qu’il est né ;
priez-le dévotement pour qu’il se manifeste. » Alors ils prièrent Dieu
toute la nuit, pour qu’il veuille se montrer à eux. (22) Cela se passa dans une cité, appelée Le Caire, qui se trouve en Égypte. Notre-Dame et Jésus-Christ avec Joseph arrivèrent à la porte de cette cité à minuit exactement. Mais elle était fermée. On ne voulait laisser pénétrer personne avant le lever du jour, ni en sortir parce que la cité menait alors une guerre contre un puissant prince.
Miracle
du mort qui se releva (23) Dans
cette ville, on avait récemment enseveli un homme. Le mort se releva de son
tombeau, appela le peuple et lui dit : « Seigneurs, qu’attendez-vous
pour ouvrir la porte où Dieu attend ? Qu’on le laisse entrer ;
c’est lui qui m’a ressuscité pour vous annoncer cela ». Après avoir dit
cela, il alla lui-même ouvrir la porte et Dieu entra dans la ville. Jésus
demeura dans la ville du Caire (24)
Sainte Marie et Jésus son fils habitèrent là avec Joseph quelque temps, tant
que cela lui plut. Puis elle partit, comme vous l’apprendrez quand je
reviendrai sur ce sujet. |
D. Rencontre
avec le larron Dismas et nombreux miracles (§ 25-42)
L’an V Jhesus et
Marie soy departent de Cair la citeit Les XII
larons [p. 360, l. 7]
Joseph fut
suscorus de leire Dismas Jhesus
delivrat Joseph de la mort (26) A
cel jour que Nostre-Damme y passat gaitoit Dismas, ly uns de XII
larons : chu fut chis qui lassat passeir Nostre-Damme à la porte de
Bethleem, et qui puis fut pendus deleis Jhesu-Crist à diestre, et Ii priat
merchi. (27) Enssi
com Joseph passoit par le boscaige, ilh vient à unc ponte deleis unc flos
mult parfont, et l'assalhit li leires de son agait atout unc gran cuteal. Si
vint à Joseph et Ii dest : « Tu es leire, car tu as embleit chist enfant
; se moy diras où tu l'as pris, et moy lairas chu que tu enporte. » « Beais
amis, lais-moy aleir », dest Joseph ; « je ne sçay embleir enfant, et oussi
n'ay-je point d'argent. » (28) Atant
vint Nostre-Damme avant, et voit Dismas, si quidat bien morir, si appellat
son fis en souspirant, et dest : « Beais fis, que ratens-tu ? ne
vois-tu mie que chi leire veult ochire Joseph ? » Et Jhesus
respondit : « S'ilh plaist à Dieu, mon pere, ilh ne Ii ferait jà maul. » (29) Quant
Dismas entent l'enfant, qui astoit si jovene et qui parloit si saigement, se
Ii priat merchi, et Dieu ly pardonnat ; atant emynat Jhesus et sa
compangnie en sa maison, et li fist grant fieste, en laqueile ilh sourjournat
III jours. Del
fontaine où Jhesus fut bangniet Le
promirs myracle Jhesu-Crist (30) Chis
Dismas avoit en son jardin une fontaine ; en celle fontaine bagnat
Nostre-Damme son enfant tout vestit : là fist Jhesus unc de ses promirs myracles,
car Ii aighe qui degottoit de ly et de ses vestimens sus la terre, quant ons
l'oit oisteit fours de la fontaine, devenoient fleurs de diverses manere,
sicom rouses, lis, fleurs de glay, violetes et aultres diverses fleurs.
La mere
Dismas fut garie de mesellerie [p. 361] L’ongement
dont Jhesus fut oindut (32) ltem,
en chis jardin prist et colhit Nostre-Damme les fleurs et les herbes, dont el
fist l'ongement de coy Marie-Magdalaine oindit les piés Nostre-Saingnour Por
l’alaitement Nostre-Damme (33) Item,
chis Dismas avoit I enfant, qui tous jours deispuis que ilh fut neis avoit
esteit esploreis, ne oncques la mere ne le pot faire taire ne mangier. Adont
la benoite virge Marie demandat qu'ilh falloit chist enfant ? (34) La
mere respondit qu'elle ne savoit. Adont prist Nostre-Damme sa mamelle et
alaitat l'enfant, et li enfe endormit entre ses bras mult douchement :
chis enfe, solonc chu que sains Jeromme racompte, chu fut sains Salveurs. Nostre-Damme
soy partit de Dismas Les
arbres soy enclinent encontre Jhesus-Crist et sa mere et florissoient (35) Quant
Nostre-Damme oit demoreit trois jours en la mason Dismas, si soy partit, et
entrat en son chemyn awec sa compangnie, et Dismas les conduisoit tant qu'ilh
furent à salveteit ; (36) mains
al departir elle donnat à la femme Dismas la boiste al ongement, en disant :
« Teneis celle boiste et le gardeis bien, encors en poreis avoir mestier. »
Et elle soy dest voire, car puis ly fallit son avoir, si portat la beuste en
Jherusalem, où Marie-Magdalaine l'achatat. (37) Parmy
le boscaige s'en vont la sainte compangnie, qui astoit si plaine de nief et
de jalée, que ons ne savoit où ly chemyn astoit ; nientmoins ilh n'oit
endit forest arbre qu'ilh ne soy enclinast encontre Jhesu-Crist et sa mere,
et florissoient enssi com chu fuist en mois d'avrilh. Et chu astoit le XIXe
jour d'octembre. Et adont chantoient tous les oyseals de bois encontre la
venuwe Jhesu-Crist, sicom chu fuist en mai. Et toutes les biestes savaiges de
bois sont venues en genos devant le mule, qui portoit Jhesu-Crist et sa mere. (38) Quant
Ii leire Dismas veit que Jhesu-Crist faisoit teiles myracles, se dest à
Nostre-Damme : « Damme, balhiiés-moy chist enfant, et le moy lassiés unc
pou porteir, et ilh moy pardonrat tous mes pechiés. » (39) Atant
delivrat Nostre-Damme à Dismas son enfant jusques al defours del forest, puis
le rendit à la virge Marie, et soy partit d'eaux et retournat vers sa maison. Myracle
de la pucelle (40) Atant
s'en vat Nostre-Damme ; mains elle n'oit mie chemyneit une liewe, que
elle at encontreit une pucelle qui ploroit mult tenrement, seiant desous une
arbre, portant [p. 362] que uns
laron, qui oit nom Ysacars, ly avoit tollut ses vestimens et ly voloit faire
chu que mie ne ly plaisoit ; et ly avoit son frere empuisonneit, si
qu'ilh sembloit mors. (41) Quant
Nostre-Damme veit chu, se escriat à lairon que ilh laisast la pucelle
esteir ; et chis Ii respondit qu'ilh n'en feroit riens por lée, et que
de lée meismes auroit son mantel et son mule. Adont dest Nostre-Damme : « Tu
parolle follement, mains je yray parleir à chevalier qui giist desous chis
arbre, savoir se ilh est mors ou vief. » (42) Atant
desquendit la virge, et benit le chevalier trois fois, puis prist le main de
son enfant, se le touchat al chevalier, et ilh salhit tantoist sus, et où ilh
veit le laron si court vers luy, et le ferit teilement de son espée, si
qu'ilh le fendit jusqu'en la chinture. |
Événements
de l’an V Jésus et
Marie quittent Le Caire Les douze
larrons (25) En
l’an cité ci-dessus, le 12 octobre, Joseph et la Vierge Marie avec son enfant
Jésus-Christ quittèrent la cité du Caire où ils avaient habité. Ils prirent
la route et marchèrent pendant quatre jours. Au quatrième jour, ils entrèrent
dans un bois qui abritait une bande de douze larrons ; tour à tour, ils
faisaient le guet sur la route et dévalisaient les marchands.
Dismas,
le bon larron Joseph fut
attaqué par le larron Dismas Jésus
délivra Joseph de la mort (26) Le
jour où passa Notre-Dame, Dismas, un des douze larrons, était de guet :
c’était lui qui avait laissé Notre-Dame passer la porte de Bethléem, et qui
plus tard fut pendu à la droite du Christ, où il lui demanda grâce. (27) Or
donc, comme Joseph passait par le bois, il arriva à un pont sur une rivière
très profonde, où le brigand aux aguets l’attaqua avec un grand couteau. Il
vint à Joseph et lui dit : « Tu es un brigand car tu as volé cet
enfant ; tu me diras où tu l’as pris, et tu me laisseras ce que tu portes
avec toi ». – « Bel ami, laisse-moi passer, dit Joseph ; je ne
suis pas capable d’enlever un enfant, et je n’ai pas d’argent non plus. » (28) Alors
Notre-Dame s’avance et voit Dismas. Elle croit mourir, appelle son fils en
soupirant et lui dit : « Beau fils, qu’attends-tu ? Ne vois-tu
pas que ce brigand veut tuer Joseph ? » Et Jésus répondit :
« Si cela plaît à Dieu mon père, il ne lui fera pas de mal ». (29) Quand
Dismas entendit l’enfant, si jeune et parlant si sagement, il lui demanda
grâce et Dieu lui pardonna. Alors le brigand emmena Jésus et sa compagnie en
sa maison où il lui fit grande fête. Jésus y séjourna trois jours.
De la
fontaine où Jésus fut baigné Le
premier miracle de Jésus-Christ (30) Dismas
avait dans son jardin une fontaine, où Notre-Dame baigna son enfant tout
habillé. C’est là que Jésus fit un de ses premiers miracles. En effet, quand
on l’eut sorti de l’eau, les gouttes qui tombèrent de ses vêtements sur la
terre devinrent des fleurs de toutes sortes : roses, lis, glaïeuls,
violettes et autres. La mère
de Dismas guérie de la lèpre (31) Ce Dismas avait une mère lépreuse ; elle l’était depuis longtemps, sept ans. Quand elle vint à la fontaine, elle fut aussitôt guérie.
L’onguent
dont fut oint Jésus (32) Dans
ce jardin, Notre-Dame prit et cueillit les fleurs et les herbes dont elle fit
le parfum avec lequel Marie-Madeleine oignit les pieds de Notre-Seigneur.
L’enfant
de Dismas guéri (33) Ce
Dismas avait un enfant, qui, chaque jour depuis sa naissance, n’avait cessé
de pleurer, et que sa mère n’avait jamais pu faire taire ni manger. La bienheureuse
Vierge Marie demanda ce qui lui manquait. (34) La
mère répondit qu’elle ne le savait pas. Alors Notre-Dame prit son sein et
allaita l’enfant, lequel s’endormit très doucement dans ses bras : cet enfant, selon ce
que raconte saint Jérôme, devint saint Sauveur.
Notre-Dame
quitta Dismas. Les
arbres s’inclinent et fleurissent Les bêtes
viennent adorer Jésus-Christ (35) Après
être restée trois jours dans la maison de Dismas, Notre-Dame la quitta et se
mit en route avec son groupe, que Dismas accompagna jusqu’à ce qu’ils soient
en sécurité. (36) En
partant, elle avait donné à la femme de Dismas la boîte avec l’onguent, en lui
disant : « Prenez-la et gardez-la bien ; vous pourrez encore
en avoir besoin. » Et elle disait vrai, car plus tard l’argent vint à
manquer. La femme porta cette boîte à Jérusalem, où Marie-Madeleine l’acheta. (37) La
sainte compagnie marcha à travers le bois, couvert de neige et de gelée au
point qu’on ne savait plus où était le chemin. Dans cette forêt pourtant, il
n’y avait pas un arbre qui ne s’inclinât devant Jésus-Christ et sa mère. Ils
fleurissaient comme si on était au mois d’avril. Or on était le 19 octobre. Tous
les oiseaux chantaient à la venue de Jésus, comme si on était en mai. Et
toutes les bêtes sauvages venaient s’agenouiller devant la mule qui portait
Jésus-Christ et sa mère. (39) Alors
Notre-Dame laissa son enfant à Dismas jusqu’à la sortie de la forêt. Dismas le
rendit ensuite à la vierge Marie, puis il les quitta et s’en retourna chez
lui. Miracle
de la pucelle (40) Ensuite,
Notre-Dame s’en alla. Mais elle n’avait pas cheminé une lieue qu’elle
rencontra une jeune fille qui pleurait doucement, assise sous un arbre, parce
qu’un brigand, nommé Ysacars, lui avait arraché ses vêtements et voulait lui
faire une chose qui ne lui plaisait pas. Il avait aussi empoisonné son frère,
qui semblait mort. (41) Quand
Notre-Dame vit cela, elle cria au larron de laisser la pucelle tranquille, mais il répondit qu’il n’en ferait rien
et qu’il lui prendrait même son manteau et sa mule. Alors Notre-Dame
dit : « Tu parles comme un fou, mais j’irai parler au chevalier couché
sous cet arbre, pour savoir s’il est mort ou vivant ». (42) Alors
la Vierge descendit de sa monture et bénit trois fois le chevalier, puis elle
prit la main de son enfant et lui fit toucher le chevalier. Celui-ci se redressa
aussitôt et, quand il vit le larron, il courut à lui et le frappa si
fortement de son épée qu’il le fendit jusqu’à la ceinture. |
E. Séjour au
castel
d’Orient : autres miracles (§ 43-68)
Mervelhe en casteal d’Orient (43) Atant
se part Nostre-Damme, et at tant alleit que le XXIle jour
d'octembre, droit à none, est-elle venue à casteal d'Orient, où Elizabeth sa
cusine demoroit, qui grant fieste li fist, et à grant joie l'at rechut, car
chu astoit la flour de son linaige. (44) En
jardin de chi casteal n'oit arbre qui ne soit ployés et enclineis vers
Jhesu-Crist ; et les biestes en lassarent toutes le mangnier, et les
petis enfans laissarent tous le laitier, et les poissons de vivier et de la
fontaine de vergier lassarent le noieir et vinrent gesir sour le gravier ;
si en prist qui avoir en vot. Des ymages qui astoient en la mahomerie (45) Item,
saint Jerome nous racompt que en marchiet de chi casteal avoit une mahomerie
que les Juys adoroient, mains toutes les ymages qui astoient là dedens soy
debrisarent toutes ; là avoit I viel juys qui veit chu, se dest : «
Unc Dieu doit naistre d'une virgue pucelle qui ches ymaiges doit debrisier.
Si est neeis, chu moy semble bien ; je ne sçay où ilh est. » Chi demorat Jhesus II ans (46) Quant les Juys oirent chu, si furent esperdus et dient entre eaux que chu astoit contre la venue Marie ; enssi furent-ilh en grant debat. En celle casteal demorat Nostre-Damme dois ans tous acomplis.
L’an V Des
pochons qui furent debrisiés par Jhesus et refais (47) En cel
meisme an, le VIle jour du mois d'octembre, avient en casteal
d'Orient que les jovenes enfans alarent joweir à une fontaine qui astoit en
vergier Joras, unc grant juys ; et en celle compangnie astoit Jhesus et
Johans, li fis Elizabeth, qui fut nommeis Sains-Johans-Baptiste, et avoit
cascon porteit awec ly unc vaseal de voile por boivre. (48) Quant
les enfans furent à la fontaine, si fist tant cascon que sa buret fut
plaine ; et Johan-[p. 363] Baptiste
prist le siene buret, se le reversat en la fontaine. De chu fut engramis
Jacob, li fis Joras, cuy la fontaine astoit, qui astoit asseis
orguilheux ; et vint à Johans, se le butat en la fontaine, et Johans,
qui enfes astoit, en plorat et issit de la fontaine al mies qu'il pot. (49) Quant
Jhesus veit que Jacob avoit enssi fait à son cusin, si en fut corochiés, si
prist tous les pochons ou burettes aux enfans et les debrisat ; et les
enfans commencharent à criier et ferir leurs mains ensemble. (50) Adont
parlat li plus jovene de tous les enfans, qui fut nommeis Judich, et
dest : « Jhesus, par ma foid, chi at malvaise compangnie, et cierte
jamais ne vos suirons. » (51) De
chu oit Jhesus piteit ; si appellat tous les enfans, et leurs
dest : « Se vos voleis remettre les pieches de vos pochons ensemble, ilh
sieront refais. » Et cheaux respondirent oilh ; et en furent mult liies
et joians les enfans. Si ont mise les pieches de pochons toutes en I mont
devant Jhesus, et ilh les sengnat ; si furent tantost tous entiers, et
truvons en l'Escripture qu'ilh en fut par compte XIX. (52) De
teils myracles faisoit Jhesus asseis en sa jovente ; se doit-ons bien
avoir fianche en luy, car en nos puet-ilh faire, defaire et refaire chu
qu'ilh ly plaiste. (53) Apres
chu sont tous les enfans ralleis en leurs maisons, joians et esbaudis de
leurs pochons qui astoient refais. [p.
363, l. 19 à p. 364, l. 5a : hors
sujet]
L’an VI De
tintenirs De pomier
que Jhesus fist croistre Myracle
des draps de tintenier [p.
364, l. 5b] (55) Se
avient que ilh passoient parmy une rue, où ilh demoroit I tintenirs de draps
qui tindoit à chi jour ; et avoit ses cuwes mises et tot apparelhiet por
tindre les draps qui là gisoient, et astoit aleis en son jardin coupeir une
vergelet de quoy ilh avoit mestier entour son ovraige, (56) si
astoit sa maison seule demorée. Et Jhesus vat dedens entreir awec
Johans-Baptiste, si ont pris tous les draps et les ont jetteis en la
choudier ; mains Iy tinteniers y sourvient, qui n'en fist point de
fieste, car ilh ne voloit mie jetteir tous ses draps en une choudier, car ilh
les voloit tindre en diverses coleurs. (57) Et
portant ilh fut si corochiés que ilh prist I cutuel, se le lanchat vers
Jhesum ; mains li cutuel ferit en unc peron de marbre, et oussitost ilh
issit de peron en droit lieu où li cuteal tochat, un beal pomier vers et
floris, si poissans qu'ilh awist XX ans que ons l'awist planteit. (58) Quant
li tinleniers veit chu, si fut mult esbahis, et puis corit vers sa chaidire,
si en oistat ses draps que Jhesus y avoit jetteit, qui astoient tous tiens et
coloreis de diverses coloires, teiles com li tinteniers les demandoit ;
si en oit grant mervelhe, si appellat ses voisiens et leur dest chu que li
astoit avenus, et ilh dessent que chu faisoit Jhesus, ly fis Marie. (59) Por cheli myracle portarent les Juys grant honneur à l'enfant, et disoient ypluseurs que ilh astoit le fis de Dieu omnipotent.
[de p. 364, l. 26
à p. 365, l. 25a : hors sujet]
De Jhesu
comment il chevalchat sur un rée de soleal [p. 365, l. 25b] (61) Quant
Jacob, le fis de [p. 366] prevost,
veit chu, si vot enssi faire et chevalchier le rée de solea. Atant est-ilh
monteit sour I arbre, et voit I rée qui deleis ly aparoit et radissoit ;
si est desus salhis, mains tantoist que ilh perdit l'arbre ilh chayt à terre,
et point le rée de solea ne le sourtient. (62)De chu fut Johans-Baptiste liies, portant que devant chu l'avoit butteit en la fontaine, enssi com dit est. Jacob
chayt et fust garit (63) A
cel cheioir que Jacob fist ilh chayt sour son bras, sique ilh le brisat.
Adont commenchat fortement à crier, et disoit : « Jhesus, Jhesus, por
Dieu merchi ! je sçay bien que tantoist m'areis garit, se ilh vos
plaist. » Atant est Jhesus descendus et prent Jacob par le main, se le lieve
sus sains et haities. (64) Quant
les aultres enfans ont chu veyut, si sont alleis en casteal et ont tout chu
racompteis aux Juys, et por chu l'honoront plus les Juys com devant. L’an VI Jhesus
encontrat le dyable (65) Item,
l'an deseurdit, le quars jour de jule, avient que Jhesus soy partit de sa
mere sainte Marie, et s'en alloit. Si encontrat en sa voie le dyable
Sathanas ; mains oussitoist que Jhesus le veit, se l'at bien recognut.
Et ly dyable vient deleis luy, se le prist et l'emportat sour une hauIt montangne,
et là ly monstrat-ilh le paiis tout altour et li dest : « Se tu volois
croire en moy et aoreir et tenir à sangnour, je toy donroy tout chi paiis que
tu vois. » – « Foux, dist Jhesus, tu es trop orgulheux ; porquoy vues-tu
que je tu aoire, com je suy ton saingnour, et tu es mon sierf ? Tu es
trop felons, quant tu m'as enssi tempteis, mains je croie que tu ne seis cuy
je suy. » (66) Respont
ly dyable : « Je le sçay mult bien, tu es li fis Marie. » Et dest Jhesus : «
Tu cognos bien ma mere, mains bien ne sceis-tu qui est mon pere fours que
Dieu. » Dest Sathanas : « Ton pere est Joseph, li vies enchanteur.» Adont
dest Jhesus : « Tu ne sceis que tu dis, faux glos ; je toy commande
que tu m'enreporte de chesti montangne où tu m'as jà tenus XL jours, car je
ay fain, se veulhe mangier. » (67) Quant
Sathanas entendit Jhesus, se le prist et le portat sour une altre montangne,
où ilh li monstrat les pires et dist : « Se tu es li fis de Dieu, se
fais que ches pires soient pain, se mangnois, si poras ton fain del tout
perdre. » Adont dest Jhesus : « Sathanas, maile aies-tu, car poior n'as-tu
de moy à tempteir ; ains convenrat que tu moy serve et aoire, et je te
commande que tu t'en [p. 367] vois
arire. » (68) Tantost
s'en alat Sathanas, qui plus avant n'oisat demoreir, et laisat Jhesum sour la
montangne ; mains les sains angeles vinrent qui le reportarent en
casteal d'Orient, où sa mere astoit fortement esmaiet, portant qu'elle ne le
poioit retroveir. Et quant elle le veit, si fut grandement joiante et liie,
et ly fut dedont en avant defendut del issir de casteal ; se n'alat plus
joweir awec lez petis enfans. [de
p. 367, l. 6 à p. 378, l. 16 : hors sujet] |
Merveille
au Castel d’Orient (43) Alors
Notre-Dame reprit la route et tant marcha que le 22 octobre, juste à la
neuvième heure, elle arriva au Castel d’Orient où demeurait sa cousine
Élisabeth. Celle-ci lui fit grande fête et la reçut avec grande joie, car la
Vierge Marie était la fleur de son lignage. (44) Dans
le jardin de ce Castel, il n’y eut pas un arbre qui ne se pliât et ne s’inclinât
vers Jésus-Christ ; les bêtes cessèrent toutes de manger, les petits
enfants de s’allaiter, et les poissons du vivier et de la fontaine du verger
de nager, pour venir s’échouer sur le gravier. En prenait qui voulait. Des images
dans le temple païen (45) Saint Jérôme nous raconte que sur le
marché de ce Castel, il y avait un temple païen où les Juifs priaient, et
dont toutes les statues qu’il abritait se brisèrent entièrement. Un vieux
Juif qui était là, dit en voyant cela : « Un Dieu doit naître d’une
vierge pucelle, qui doit briser ces statues. Il me semble bien qu’il est
né ; mais je ne sais pas où il est ». Jésus y resta deux ans (46) Quand
les Juifs entendirent cela, ils furent profondément troublés et se dirent que
l’événement était en rapport avec la venue de Marie ; ainsi eurent-ils
de grands débats. En ce Castel, Notre-Dame demeura deux ans entiers. L’an V Des pots brisés et refaits par Jésus (47) En
cette même année, le 7 octobre, il se fit qu’au Castel d’Orient les enfants
allèrent jouer près d’une fontaine, qui se trouvait dans le verger de Joras,
un Juif important. Dans le groupe se trouvaient Jésus et Jean, le fils
d’Élisabeth, qui fut appelé Saint-Jean-Baptiste. Chacun avait apporté avec
lui un récipient de verre pour boire. (48) Quand
les enfants arrivèrent à la fontaine, chacun y remplit son récipient. Mais Jean-Baptiste
prit le sien et le reversa dans la fontaine. Cela irrita Jacob, qui était le
fils de Joras propriétaire de l’endroit. Il était assez orgueilleux. Il vint à
Jean et le poussa dans la fontaine. Jean, qui était un enfant, se mit à pleurer
et sortit de l’eau du mieux qu’il put. (49) Quand
Jésus vit que Jacob avait ainsi traité son cousin, il en fut courroucé, prit
tous les récipients des enfants et les brisa. Les enfants commencèrent alors à
crier et à en venir aux mains. (50) Alors
le plus jeune, qui s’appelait Judich, prit la parole et dit :
« Jésus, par ma foi, tu es de mauvaise compagnie ; assurément nous
ne te suivrons jamais ». (51) Alors Jésus eut pitié ; il appela tous les enfants et leur dit : « Si vous voulez rassembler toutes les pièces de vos récipients, ils seront refaits ». Ils répondirent oui, très heureux et joyeux. Ils mirent en tas tous les morceaux devant Jésus, qui les bénit ; aussitôt les vases redevinrent entiers, et nous trouvons dans l’Écriture que leur nombre était de dix-neuf.
(52)
Durant son enfance Jésus fit beaucoup de miracles de ce type. On doit avoir
confiance en lui, car il peut faire, défaire et refaire en nous ce qu’il lui
plaît. (53) Après
cela tous les enfants retournèrent dans leurs maisons, joyeux et réjouis que
leurs pots soient réparés.
L’an VI Le
teinturier Le
pommier que Jésus fit pousser Miracle
des draps du teinturier (54) Cette
même année, le 9 mai, qui était un mardi, l’Enfant-Jésus, et avec lui
Jean-Baptiste et plusieurs autres jeunes enfants, étaient partis jouer
ensemble dans les champs. (55) Il
arriva qu’ils passèrent par une rue, où demeurait un teinturier, lequel, ce
jour-là, teignait des draps. Il avait bien disposé ses cuves et tout préparé pour
teindre les draps qui étaient par terre ; puis il était allé dans son
jardin pour couper une baguette dont il avait besoin pour son travail. (56) Sa
maison était restée sans surveillance. Jésus y entra avec
Jean-Baptiste ; ils prirent tous les draps et les jetèrent dans le
chaudron. Quand le teinturier revint, il ne leur fit pas fête : il n’avait
pas l’intention de mettre tous les draps dans un seul chaudron, car il
voulait les teindre en différentes couleurs. (57) Cela
le mit tellement en colère qu’il prit un couteau et le lança sur Jésus, mais
le couteau frappa un bloc de marbre, duquel sortit aussitôt, à l’endroit
exact de l’impact, un beau pommier vert et fleuri, très robuste, comme s’il
avait été planté vingt ans plus tôt. (58) Quand
le teinturier vit cela, il fut tout ébahi. Il courut à son chaudron, en retira
les draps que Jésus y avait jetés et qui étaient tous teints et colorés de couleurs
différentes, exactement comme le voulait le teinturier. Celui-ci, grandement
émerveillé, appela ses voisins et leur expliqua ce qui était arrivé. Ils
racontèrent ce que faisait Jésus le fils de Marie. (59) Suite
à ce miracle, les Juifs manifestèrent beaucoup d’honneur à l’enfant. Plusieurs
disaient qu’il était le fils de Dieu tout puissant.
Comment
Jésus chevaucha un rayon de soleil (60) En
cette même année [an VI], au mois de juin, Jésus était allé jouer dans les
champs avec Jean-Baptiste et au moins cent autres petits enfants. Ils s’assirent
en dehors des murs du Castel d’Orient, parmi les arbres d’un jardin. Le
soleil luisait, beau et chaud, comme d’habitude à cette saison, et il dardait
de grands rayons lumineux. Alors Jésus monta sur un arbre branchu, que
traversaient les rayons du soleil. Il sauta sur un rayon et commença à le
chevaucher, comme s’il s’était agi d’un morceau de bois. (61) Quand
Jacob, le fils du prévôt, vit cela, il voulut faire la même chose. Alors il
monta sur un arbre, et quand il vit près de lui un rayon brillant, sauta
dessus. Mais dès qu’il eut quitté l’arbre, il tomba par terre, car le rayon
de soleil ne le soutenait pas. (62) Jean-Baptiste
se réjouit de cette mésaventure : parce que précédemment, comme on l’a
dit, ce Jacob l’avait poussé dans la fontaine.
Jacob tomba et fut guéri (63) Lors
de sa chute, Jacob tomba sur son bras et le brisa. Alors il se mit à crier
très fort : « Jésus, Jésus, par Dieu, pitié ! Je sais que tu
me guériras immédiatement si cela te plaît. » Alors Jésus descend, prend
Jacob par la main et le relève sain et bien portant. (64) Quand les autres enfants ont vu cela, ils sont allés au Castel et ont tout raconté aux Juifs. Et ces derniers, à cause de cela, l’honorèrent davantage encore.
L’an VI Jésus
rencontra le diable (65) Cette même année, le 4 juillet, Jésus quitta sa mère sainte Marie, et s’en alla. Sur son chemin, il rencontra le diable Satan. Mais aussitôt que Jésus le vit, il le reconnut parfaitement. Le diable s’approcha alors de lui, le prit et l’emporta sur une haute montagne. Puis, lui montrant le pays tout autour, lui dit : « Si tu voulais croire en moi, m’adorer et me considérer comme ton seigneur, je te donnerais tout le pays que tu vois ». – « Fou, dit Jésus, tu es trop orgueilleux, pourquoi veux-tu que je t’adore, puisque je suis ton seigneur et que tu es mon serviteur ? Tu es trop perfide de me tenter ainsi, mais je crois que tu ne sais pas qui je suis ».
(66) Le
diable répondit : « Je sais très bien qui tu es. Tu es le fils de
Marie ». Et Jésus lui dit : « Tu connais bien ma mère, mais tu
ne sais pas que mon père n’est autre que Dieu ». Satan dit : « Ton
père est Joseph, le vieux magicien ». Alors Jésus dit : « Tu
ne sais pas ce que tu dis, misérable fourbe ; je t’ordonne de m’emporter
loin de cette montagne, où tu m’as déjà retenu quarante jours, car j’ai faim
et je veux manger ». (67) Quand
Satan entendit Jésus, il le prit et l’emporta sur une autre montagne, dont il
lui montra les pierres en disant : « Si tu es le fils de Dieu,
fais que ces pierres soient du pain, et mange ; ainsi ta faim pourra
disparaître tout à fait. » Alors Jésus dit : « Malheur à toi,
Satan, car tu n’as pas le pouvoir de me tenter ; il faudra maintenant que
tu me serves et m’adores. Je t’ordonne de reculer et de t’en aller ». (68) Aussitôt
Satan s’en alla ; il n’osait rester davantage et laissa Jésus sur la montagne,
mais des anges vinrent qui le ramenèrent au Castel d’Orient, où sa mère était
très angoissée de ne pouvoir le retrouver. Et quand elle le vit, elle fut
grandement contente et heureuse. Elle lui défendit dorénavant de sortir du
Castel et il n’alla plus jouer avec les petits enfants.
|
F.
Seconde injonction de l’ange et retour en terre d’Israël (§ 69-70)
L’an VII Joseph
ramynat Marie et Jhesus vers la terre Israël Jhesus et
Marie vinrent demoreir en Nazareth [p. 378, l. 17] (70) Et
entendit luy et Marie que Archelaus tenoit la terre de Judée, cuy Joseph
tenoit mult fel ; se ne vot aleir plus avant, car ilh dobtoit mult la
felonie de Archelaus. Adont revint li angle et dest à Joseph qu'ilh s'en
allast en Galilée. Atant s'en alat Joseph awec Jhesus et Marie en Galilée
demoreir, en la citeit de Nazareth, où ilh avoient promiers demoreit. |
L’an VII Joseph
ramena Marie et Jésus en terre d’Israël Jésus et
Marie vinrent habiter à Nazareth (69) La
première année après le couronnement d’Archélaüs, c’est-à-dire l’an VII, en
janvier, Dieu envoya un ange à Joseph, et lui donna l’ordre de retourner à
Bethléem. Ce qu’il fit. (70) Mais
lui et Marie apprirent qu’Archélaüs était le maître de la Judée. Comme Joseph
le tenait pour très fourbe, il ne voulut pas aller plus loin, car il
redoutait beaucoup sa traîtrise. L’ange revint et dit à Joseph de se rendre
en Galilée. Alors Joseph avec Jésus et Marie alla demeurer en Galilée, dans
la cité de Nazareth, où ils avaient d’abord habité. |
Une observation
Avant de passer au commentaire de ce texte, il nous a paru utile de dire un mot des rapports que ce texte entretient avec le passage correspondant de l’évangile de Matthieu.
L’Évangile de Matthieu : source de Jean
d’Outremeuse ?
On sait que Matthieu est le seul des quatre évangélistes à avoir raconté (en II, 13-23) l’épisode égyptien de la vie de Jésus. Voici le texte de son récit emprunté à la traduction d’A. Crampon :
(13) Après leur départ [aux
Mages], voici qu’un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph et lui
dit : « Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, fuis en Égypte, et
restes-y jusqu’à ce que je t’avertisse ; car Hérode va rechercher l’enfant
pour le faire périr ». [Première injonction de l’ange]
(14) Et lui se leva, prit l’enfant et
sa mère de nuit et se retira en Égypte. [Fuite en Égypte]
(15) Et il y resta
jusqu’à la mort d’Hérode, afin que s’accomplit ce qu’avait dit le Seigneur par
le prophète : « J’ai rappelé mon fils d’Égypte ». [Séjour en
Égypte]
(16) Alors Hérode, voyant que les mages s’étaient joués de lui, entra dans une
grande colère, et il envoya tuer tous les enfants qui étaient à Bethléem et dans
tout son territoire, depuis l’âge de deux ans et au-dessous, d’après le temps
qu’il connaissait exactement par les mages. (17) Alors fut accompli l’oracle du
prophète Jérémie disant :
(18)
« Une voix a été entendue en Rama, des plaintes et des
cris lamentables : Rachel pleure ses enfants ; et elle n’a pas voulu
être consolée, parce qu’ils ne sont plus ». [Massacre des enfants]
(19) Hérode étant mort, voici
qu’un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph en Égypte et lui dit :
(20) « Lève-toi, prends l’enfant et sa mère, et va dans la terre d’Israël,
car ceux qui en voulaient à la vie de l’enfant sont morts ». [Seconde
injonction de l’ange à Joseph]
(21)
Et lui, s’étant levé, prit l’enfant et sa mère, et il vint dans la terre
d’Israël. (22) Mais, apprenant qu’Archélaos régnait en Judée à la place
d’Hérode, son père, il eut peur d’y aller, et, ayant été averti en songe, il
gagna la région de la Galilée (23) et vint habiter dans une ville nommée
Nazareth, afin que s’accomplit ce qu’avaient dit les prophètes : « Il
sera appelé Nazaréen ». [Retour en terre d’Israël]
On constate, sur le plan de la structure très générale, que l’épisode égyptien chez Jean d’Outremeuse recoupe le récit de l’évangéliste. Il n’y pas à s’étonner de cette correspondance. Seul évangéliste à avoir traité le sujet, Matthieu a dans un certain sens imposé le cadre chronologique à tous les récits ultérieurs. Les deux auteurs ont d’ailleurs placé aussi l’histoire des Mages immédiatement avant l’épisode égyptien. On reviendra sur les Rois mages dans un article ultérieur.
La correspondance n’exclut pas de légères discordances dans la structure générale : ainsi l’évangéliste traite du massacre des enfants après la brève notice sur le séjour en Égypte, tandis que le chroniqueur l’introduit plus tôt dans le récit.
Cela s’explique par la différence – extrêmement importante – entre les deux versions de l’épisode égyptien : par rapport au chroniqueur liégeois, Matthieu est d’une concision extrême. Cette concision a laissé le champ libre à l’imagination de ceux qui l’ont suivi. Et c’est précisément sur la matière utilisée par les auteurs postérieurs pour « combler ce vide » que notre commentaire pourra faire porter ses analyses. Les « textes parallèles » seront essentiellement fournis par les auteurs apocryphes, dont les versions, nombreuses et variées, fourniront les points de comparaison réellement utiles. Mais de cette littérature apocryphe, il sera question plus loin.
Disons simplement ici que la correspondance générale de structure entre Matthieu et Jean d’Outremeuse, comme telle, ne prouve rien, sinon que le chroniqueur liégeois connaissait le récit de Matthieu. Le contraire eût été étonnant.
*
Passons
maintenant au commentaire du récit de Jean d’Outremeuse sur l'épisode égyptien
de l'enfance de Jésus. Comme on l'a dit plus haut, il comportera six chapitres
et autant de fichiers :
I. Le
massacre des enfants ;
II. Le miracle du champ de blé et le destin du
semeur ;
III. L’arrivée et le séjour au Caire ;
IV. Les larrons et la rencontre avec Dismas ;
V. Le séjour chez Dismas et les
miracles ;
VI. Le Castel d’Orient et les nouveaux miracles.
L’analyse se terminera par une brève
conclusion.
[Suite]
Bruxelles, 5 octobre 2014
FEC
- Folia Electronica Classica (Louvain-la-Neuve) -
Numéro 28 - juillet-décembre 2012
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