Jean d'Outremeuse, Myreur des histors, II, p. 79b-95bN
Édition : A. Borgnet (1869) ‒ Présentation nouvelle, traduction et notes de A.-M. Boxus et de J. Poucet (2021)
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DosSIER DE LECTURE 12
Les successeurs de Julien : de l'accession de jovien (363) à la mort de gratien (383) en passant par Valens et Valentinien
[Myreur, II, p. 79b-95a]
Ans 366-386 de l'Incarnation
AFFAIRES RELIGIEUSES ET VARIA
Plan
1. La position des empereurs en général
a. Jovien
c. Gratien
2. Les papes
a. Le martyre de Félix sous Valens
c. Damase : procès pour adultère
d. Damase : l'épisode du Quicumque vult salvus esse
3. Trois conciles à Constantinople
4. Quelques personnalités importantes
b. Saint Martin
e. Saint Jérôme
5. Varia
a. Une pléiade d'auteurs dont Didyme d'Aveugle
1. La position des empereurs en général
Qu'en est-il de l'authenticité des informations religieuses transmises par Jean ?
Jovien d'abord. Paul Petit (Histoire, p. 625) nous a appris que ce premier successeur de Julien était « un chrétien modéré ». Notre chroniqueur (II, p. 79) en dit beaucoup plus : non seulement il lui adjoint un frère du nom de Valentin ‒ un empereur fantôme, rappelons-le ‒ mais il n'hésite pas à écrire à leur sujet qu'ils étaient tous les deux de très bons chrétiens ».
Que dire ensuite des successeurs immédiats de Jovien : pour Jean, Valentin (avatar de Valentinien I) et Valens, pour nous, Valentinien I et Valens ?
Selon M. Bordet (Précis, p. 278-279), « les deux empereurs avaient résolu d'adopter en matière religieuse une politique tolérante aussi bien pour le paganisme que pour les diverses branches du christianisme. Cependant Valens manifesta de vives sympathies pour l'arianisme homéen et persécuta ses adversaires. Au contraire, Valentinien et son fils Gratien, Auguste depuis 367 (cfr infra), virent d'un bon oeil le triomphe en Occident du christianisme nicéen et laissèrent à l'Église une large indépendance ».
La présentation de Jean (II, p. 79) est assez proche de la réalité historique : un Valens de tendance arienne (pour l'Orient) et un Valentinien Ier de tendance nicéenne (pour l'Occident). Mais certains détails sont manifestement de son cru, notamment lorsqu'il précise qu'ils étaient tous les deux au début, « de très bons chrétiens ». C'était exactement la formule qu'il avait utilisée pour caractériser les positions religieuses du pseudo-couple qui les avait précédés. Il continue en notant : « par la suite Valens fut abusé par les hérésies qui régnaient à cette époque ; il s'en prit aux tenants de la bonne foi, ce qui irrita beaucoup son frère [...], resté toujours bon et ferme chrétien ».
Si l'on passe à l'examen plus détaillé du Myreur, on s'aperçoit que le chroniqueur ne fait pas intervenir souvent les deux frères dans le présent fichier. Ainsi, en II, p. 80, Valens est présenté comme le responsable du martyre de Félix, « le pape intrus », dont on a beaucoup parlé dans le fichier précédent. Mais l'information est historiquement discutable : le Liber pontificalis (p. 80-81, éd. Mommsen) fait bien allusion à un martyre et même à une décapitation de Félix, mais c'est Constance II qui est mis en cause. En II, p. 81, Valentinien, aux prises avec les Alains, va demander conseil au pape Damase et applique la solution que le pape lui suggère. Le détail semble bien inventé, peut-être pour attester de l'entente entre le pape et l'empereur.
En II, p. 85, Jean signale que les deux empereurs romains ordonnèrent « que tous les hommes de religion portent dorénavant les armes, aillent au combat, et que celui qui refuserait soit mis à mort ». Ici les deux empereurs sont associés par Jean dans une mesure hostile aux chrétiens, mais Orose (VII, 33, 1), à l'origine de cette information, ne va pas dans ce sens : ce serait une décision prise par Valens seul qui se sent véritablement « libéré », après la mort de Valentinien : « Aussitôt, comme libre d'une audace sans frein, il publia une loi en vertu de laquelle les moines, c'est-à-dire les chrétiens qui se consacrent à la seule oeuvre de la foi, après avoir abandonné les activités diverses des choses du siècle, étaient contraints au service militaire » (trad. M.-P. Arnaud-Lindet). Dans son commentaire (p. 145, n. 1), la traductrice précise : « On ne connaît pas cette loi autrement que par la notice de Jérôme (2391m): Valens lege data ut monachi militarent, nolentes fustibus iussit interfici (Ayant donné une loi qui obligeait les moines à servir dans l'armée, Valens ordonna que ceux qui refusaient soient bâtonnés à mort. » Grégoire de Tours aussi (Histoire des Francs, I, 41) écrit : « Après la mort de Valentinien, Valens, son successeur dans l'empire entier, fait contraindre les moines au service militaire et ordonne de frapper les réfractaires à coups de bâton (trad. R. Latouche) ». Comment Jean a-t-il pu envisager que Valentinien (« le bon et ferme chrétien ») ait pu avoir lui aussi une responsabilité dans pareille loi ? En tout cas, Martin, Chronique, p. 453, l. 8-9, ne mentionne pas de mises à mort : Nam cum usque ad ipsius tempora Ytalia heresi Arriana langueret, ad veram fidem fecit redire.
Et qu'en est-il de Gratien ?
Cet empereur a les faveurs de Jean d'Outremeuse. Dans l'affaire du tribut gaulois, le chroniqueur (II, p. 87) le présentait comme « un homme généreux ». Le portrait qu'il en livrait quelques lignes plus haut (II, p. 86) était plus précis encore : « Il était sage, très loyal, un vrai chrétien, solide. Il aima Dieu et la Sainte-Église, réalisa beaucoup de bonnes œuvres et fut un chevalier très digne de louanges ». Apparemment Jean met tout particulièrement l'accent sur son catholicisme, sans faire état son hostilité à l'égard de ceux qui s'écartaient des strictes positions nicéennes. Ainsi le 3 août 379, Gratien publia à l'instigation d'Ambroise de Milan un édit supprimant la tolérance accordée l'année précédente à ceux qui n'adoptaient pas les positions nicéennes (Cod. Theod., XVI, 5, 5). En ce qui concerne son attitude vis-à-vis du paganisme, on notera qu'il fut le premier empereur romain à refuser de prendre le titre païen de pontifex maximus. Il heurta également les élites religieuses païennes dans l'affaire de l'ara Victoriae, qu'il fit écarter de la Curie, c'est-à-dire du bâtiment qui abritait le sénat à Rome.
2. Les papes
a. Le martyre de Félix sous Valens (II, p. 80)
Jean affirme (II, p. 80) que Félix, « le pape intrus », dont on a beaucoup parlé dans le fichier précédent, fut martyrisé par Valens, en 367 de l'Incarnation. Le développement que lui consacre le Liber pontificalis (p. 80-81, éd. Mommsen) fait bien allusion à un martyre et même à une décapitation, mais, comme on vient de le dire, la responsabilité de l’acte ne semble pas attribuée explicitement à Valens. C'est plutôt Constance II qui est mis en cause.
b. Damase et Ursin (II, p. 80)
Après l'épisode, sous Constance, du pape Libère et de Félix « l’intrus » (II, p. 74-76), sous Valentinien I, en 366 de notre ère, un nouveau conflit éclate entre deux personnalités pour la possession de la tiare : Damase et Ursin.
« À la mort de Libère, un nouveau schisme se produisit. Damase et Ursin furent élus papes par des partis différents, ce qui donna lieu à de très violents affrontements entre leurs partisans : il y eut 137 ou plus de 170 morts (selon les sources), et il fallut que l’empereur tranche en faveur de Damase et l’impose par la force. Dans ce conflit, le parti d’Ursin, qui comptait peu de clercs, semble avoir voulu s’opposer à l’évolution qui faisait de l’Église de Rome une Église de plus en plus riche, proche des puissants et du pouvoir. Le schisme des partisans d’Ursin dura plusieurs années. Mais Damase devait souffrir d’autres contestations [...]» (P. Maraval, Christianisme de Constantin, 1997, p. 118)
« L’ordre fut rétabli par le préfet de la ville, le païen Prétextat, et Damase resta vainqueur. Il fut jusqu’à sa mort, en 384 de notre ère, un pape brillant et actif » (P. Petit, Empire romain, p. 635).
À propos de Damase, Jean d'Outremeuse (II, 80), comme il le fait parfois, donne des détails sur la durée de son règne, notant même les différences relevées entre les sources. Il précise ainsi que Damase aurait occupé le siège durant « dix-sept ans, trois mois et vingt-sept jours », tandis que Martin d'Opava le fait régner « dix-huit ans, deux mois et un jour ». Il est piquant de confronter ces précisions aux données du Liber pontificalis (p. 82, ed. Mommsen), où il est question de 18 ans, 3 mois et 11 jours, et à celles de l'édition L. Weiland de Martin (p. 416, s.v° Damasus), où on lit 18 ans, 2 mois, 10 jours.
Parmi les problèmes que ce pape rencontra, Jean d'Outremeuse a retenu un procès pour adultère que le chroniqueur date de l'an 381 de l'Incarnation (II, p. 87). Il figure dans le Liber Pontificalis qui semble avoir été une source (directe ou indirecte) de Jean : Invidiose incriminatur de adulterio, et facto synodo purgatur a XLVIIII episcopis, qui etiam damnaverunt Concordium et Callistum diacones accusatores et iactaverunt de ecclesia (p. 84, éd. Mommsen). En tout cas, Martin d'Opava (Chronique, p. 416-417, ed. Wieland) ne le mentionne pas. Sur l'analyse des difficultés judiciaires que la tradition historiographique attribue au pape Damase, on pourra voir : A. Höpffner, Les deux procès du pape Damase, dans Revue des Études Anciennes, t. 50, 1948, p. 288-304 (accessible sur Persée).
d. Damase : l'épisode du quicumque vult salvus esse (II, p. 88)
Dans l'histoire, on l'a vu, saint Athanase a bien été exilé à plusieurs reprises mais ce récit selon lequel il aurait été jeté en prison par le pape Damase puis libéré par celui-ci après lui avoir adressé un texte valant déclaration de foi n'est pas authentique. Cet épisode est absent des notices sur Damase qui figurent dans le Liber Pontificalis et dans la Chronique de Martin d'Opava. On ignore où Jean l'a trouvé.
Le terme Quicumque ‒ ou l'ensemble Quicumque vult salvus esse « Tout qui veut être sauvé », à compléter par « doit croire [ceci] » ‒ « désigne un symbole de foi confessant la Trinité et l’union des deux natures divine et humaine dans le Christ. La tradition occidentale en attribue unanimement la paternité à saint Athanase, patriarche d’Alexandrie, champion de la foi catholique professée au concile de Nicée et par là grand adversaire de l’hérésie arienne ». Mais le nom de Saint Athanase qui lui est donné ne veut pas dire que c’est le célèbre patriarche d’Alexandrie qui en a rédigé le texte. Il signifie simplement que ce résumé de la foi trinitaire exprime la foi de Saint Athanase, champion de l’orthodoxie – c’est-à-dire de la foi droite – à l’époque de l’hérésie arienne». Il vaudrait donc mieux parler du « symbole de foi dit de saint Athanase». Cfr, par exemple, le site Liturgia.
e. Damase : ses ordonnances (II, p. 83)
À l'actif du pape Damase, et « parmi beaucoup de bonnes ordonnnances », qui auraient été prises par ce pape lors du concile de 170 évêques qu'il aurait réuni à Constantinople en 370 (de l'Incarnation), Jean en retient deux : « Damase prescrivit notamment de dire à la messe, immédiatement après l’Évangile, le Credo in unum Deum ; il prescrivit aussi, à la demande de saint Jérôme, que dorénavant les psaumes récités à l'église le soient toujours avec le Gloria Patri et Filio, etc. »
On traitera plus en détail des conciles dans un instant. Disons que plusieurs conciles se réunirent à l'époque du pontificat de Damase. Un des plus importants fut le premier concile de Constantinople, réunissant quelque 150 participants. Il complète celui de Nicée en affirmant la divinité du Saint-Esprit. Mais ce concile se réunit en 381 de notre ère, à l'initiative de Théodose Ier et sans même que le pape de Rome y soit officiellement représenté. La notice de Jean de la réunion d'un grand concile à Constantinople en 370 (de l'Incarnation) est donc très difficile à concilier avec les données historiques.
On est également amené à suspecter l'historicité des deux ordonnances mentionnées par Jean. il n'est pas sûr du tout que la récitation (ou le chant) du credo à chaque messe soit si ancien (cfr le site Credo), et il en est de même de l'obligation de toujours réciter désormais les psaumes à l'église avec le Gloria Patri et Filio, etc. Cela dit, on ne sera pas surpris de voir Jean faire intervenir saint Jérôme : ce dernier était le secrétaire du pape Damase qui l'avait appelé à Rome et il a joué un grand rôle dans l'histoire du psautier (cfr le site Schola saint Cécile).
On ne peut pas approfondir la question ici. On dira simplement que le Liber pontificalis (p. 84, éd. Mommsen) n'attribue à Damase qu'une seule ordonnance, en rapport d'ailleurs avec la récitation des psaumes, mais différente de celle de Jean : Hic constituit, ut psalmos die noctuque canerentur per omnes ecclesias ; qui hoc praecepit presbiteris vel episcopis aut monasteriis. En fait l'authenticité de cette mention est elle-même contestée, car elle « a tous les caractères d'une interpolation » (cfr H. Leclercq, Damase, dans Dictionnaire d'archéologie chrétienne et de liturgie, t. IV, 1, Paris, 1920, col. 153). On notera aussi l'intérêt des informations données dans la Chronique de Martin (p. 416, l. 46 à 417, l. 14, éd. Weiland) sur Damase, saint Jérôme et la question des psaumes. Le chroniqueur liégeois s'est peut-être inspiré de ce matériel, mais ce n'est pas clair.
On ne quittera pas Damase sans signaler que Jean lui attribue abusivement la rédaction du Liber Pontificalis. En I, p. 2, il signale parmi ses sources « les Chroniques du pape Damase ». À de nombreuses reprises dans le Tome I, Damase est cité comme un auteur de référence, notamment pour des précisions sur la durée de règne des papes : par exemple en I, p. 474 ; I, 501 ; I, 579, etc. La référence est parfois très claire : ainsi en I, p. 501, Jean renvoie textuellement à « Damase, le pape de Rome, dans ses chroniques pontificales écrites à saint Jérôme ». S'il n'est pas l'auteur du Liber Pontificalis, on a conservé de lui « deux lettres traitant de problèmes textuels de la Bible [...], quelques poésies chrétiennes et des écrits théologiques » (Wikipédia).
3. Trois conciles à Constantinople (II, p. 83, p. 88 et p. 95) [à revoir et à réorganiser]
Trois notices de Jean d'Outremeuse (deux dans le présent fichier, p. 83 et p. 88, et une troisième dans le suivant, p. 95) font allusion à des conciles censément convoqués à Constantinople, le premier, par le pape Damase en l'an 370 de l'Incarnation, le deuxième par Ambroise de Milan, en 382 de la même ère, et le troisième par l'empereur Théodose en 387. Lors du premier concile, Damase aurait publié « beaucoup de bonnes ordonnnances », dont deux sont explicitement citées par le chroniqueur. Les deux suivants ne mentionnent pas explicitement Damase. Voici la traduction de ces notices :
[II, p. 83] [Le concile de cent soixante-six évêques à Constantinople - À propos du Credo et du Gloria Patris après] Cette année-là [370], le pape Damase organisa un grand concile où il publia beaucoup de bonnes ordonnances. Il prescrivit notamment de dire à la messe, immédiatement après l’Évangile, le Credo in unum Deum ; il prescrivit aussi, à la demande de saint Jérôme, que dorénavant les psaumes récités à l'église le soient toujours avec le Gloria Patri et Filio, etc.
[II, p. 88] [Le concile de Constantinople] Cette année-là [382], saint Ambroise rassembla un concile de 150 pères à Constantinople, qui condamna Macédonius. C’était un hérétique qui niait que le Saint-Esprit soit Dieu.
[II, p. 95]
[Le concile rassemblé par le
pape à Constantinople] L’an
387, l’empereur Théodose,
avec l’accord du pape Sirice, rassembla un concile de 150 évêques à
Constantinople. C’est là que fut condamné Macédonius, qui
refusait de croire que le Saint-Esprit était Dieu. Ce concile ordonna et
confirma que dorénavant l’évêque de Constantinople serait le souverain du
monde chrétien, après le pape de Rome.
L'interprétation de ces trois notices est très difficile. Pour tenter de le faire, il faut se replacer dans l'histoire (les dates sont données en années communes).
L
e Concile dit œcuménique de Nicée en 325, on l'a dit, était loin d'avoir réglé la crise arienne. Les décennies qui l'ont suivi connurent un nombre considérable de conciles qui ne réussirent pas à apaiser les tensions et à élaborer une solution qui soit acceptée par tous. Ils abordèrent les différents aspects ‒ combien complexes ‒ de la « crise arienne » et il serait fastidieux d'en donner ici les noms et les sujets. Relevons simplement que la synthèse de P. Maraval (Christianisme II, 2006, p. 313-348), à laquelle pourra se référer le lecteur, enregistre quatre « rencontres », de nature et d'importance très inégales, qui se sont tenues à Constantinople : en 360, un concile, local mais relativement important (P. Maraval, Christianisme II, p. 332-333) ; en 381, un autre, dit œcuménique, extrêmement important (P. Maraval, Christianisme II, p. 341-345) ; en 382, dans la foulée de celui-ci, un troisième concile, local et de mise au point ; enfin, l'année suivante, en 383, une conférence, également locale et de peu d'importance (P. Maraval, Christianisme II, p. 346).Si on tente d'identifier les rencontres que le chroniqueur avait en tête, quelques éléments peuvent nous mettre sur la voie.
Les deux dernières notices mentionnent, parmi les décisions du concile, la condamnation d'un certain Macédonius, qui refusait de croire que le Saint-Esprit était Dieu ». Ce personnage est connu. Il s'agit de Macédonios Ier, évêque de Constantinople, qui fut déposé sous Constance, au début 360 de notre ère, par le Concile de Constantinople, parce qu'il appartenait à la faction homéousienne (des ariens modérés en quelque sorte), mais l'arianisme s'intéressait essentiellement à la nature du Christ, pas à celle de l'Esprit-Saint. En fait il faut savoir que, dans l'antiquité déjà, ce Macédonios après sa mort avait laissé son nom aux membres d'une secte hérétique, celle des « pneumatomaques» qui refusaient l'idée que le Saint-Esprit soit une personne divine comme le Père et le Fils. Mais si, à ces pneumatomaques, on donnait souvent le nom de « Macédoniens », il n'est pas sûr que Macédonios Ier ait jamais professé cette doctrine. Quoi qu'il en soit, pour Jean d'Outremeuse en tout cas, Macédonios niait que le Saint-Esprit soit Dieu.
Jean, en II, p. 88, a-t-il songé au concile de 360 ? Si c'est le cas, il n'est pas très précis, car ce concile n'a pas condamné Macédonios pour ses positions sur le Saint-Esprit : il l'a déposé pour des raisons liées à la crise arienne, c'est-à-dire à la question des rapports entre le Père et le Fils.
Qu'en est-il par ailleurs des rapports du Concile de 381 avec ce Macédonios, mort à cette époque ? On sait que le Concile de 381, qui a abordé la question du Saint-Esprit, comportait en son sein 36 pneumatomaques. Il a dû traiter avec les « Macédoniens », mais sans parvenir avec eux à un accord, puisqu'ils quittèrent le Concile. Il n'est donc pas tout à fait exact d'écrire que le Concile « condamna Macédonios ». Théodose voulait arriver à une position commune (un seul Dieu en trois personnes), et le premier canon du concile condamna tous deux qui n'étaient pas d'accord : non seulement ceux qui adoptaient peu ou prou des positions ariennes mais aussi tous les autres « hérétiques » (Sabelliens, Marcelliens, Photiniens et Apollinaristes). Les « Macédoniens » (pneumatomaques) n'étaient qu'un des nombreux groupes condamnés. Écrire que le concile de 381 a « condamné Macédonios », c'est réduire ses travaux à bien peu de chose. En effet, le Concile de 381 « poursuivit notamment la réflexion dogmatique du premier concile de Nicée en proclamant la divinité du Saint-Esprit. Il proposa un symbole de foi (un Credo) désigné sous le nom de symbole de Nicée-Constantinople qui complète le symbole de foi proclamé à Nicée. » « Le principal point qui y est acquis est la définition de l’Esprit comme troisième personne de la Trinité. »
Toutefois la troisième notice (II, p. 95) fournit une autre piste, précise et sûre, à savoir la place « protocolaire » de l'évêque de Constantinople par rapport à celle du pape de Rome. La question fut effectivement réglée au Concile de 381. Son troisième canon spécifie en effet que « l'évêque de Constantinople est le second après celui de Rome, qu'il aura la préséance d'honneur après l'évêque de Rome, puisque cette ville est la nouvelle Rome ».
Au crédit de l'historicité (relative, on va le voir) de cette notice de II, p. 95, on ajoutera que ce Concile œcuménique de 381 à Constantinople ‒ deuxième concile œcuménique de l'histoire du christianisme après celui de Nicée ‒ qui se réunit de mai à juillet 381 (de notre ère) fut effectivement convoqué par l'empereur Théodose Ier responsable de l'Orient et qu'il avait rassemblé environ cent cinquante évêques. Ceux-ci, il faut le préciser, étaient tous orientaux,Théodose n'ayant pas convoqué les évêques d'Occident dont les juridictions dépendaient de son collègue Gratien. Que Théodose ait pris contact avec le pape de Rome et ait obtenu son accord pour convoquer le Concile est peu vraisemblable, mais on l'ignore. Ce que l'on sait en tout cas, c'est qu'en 381 de notre ère, à l'époque du Concile, Damase, était encore pape à Rome, puisqu'il mourut en 384 de notre ère. Il ne fut pas invité, mais il avait remis des instructions à certains participants. Sirice, que Jean fait intervenir, fut pape de 384 à 399 de notre ère. Comme Jean place le Concile de Constantinople en 387 de l'Incarnation, à cette date, dans sa chronologie à lui, le pape à Rome était Sirice. D'où peut-être l'introduction de Sirice dans la notice de II, p. 95. [A noter que Martin, p. 417, l. 19-20, met le pape Sirice en rapport avec un synode de Constantinople : Hic synodum Constantinipoli celebravit cum 315 episcopis, ce qui expliquerait peut-être le « avec l'accord du pape Sirice » en Myreur, II, p. 95]
Que penser maintenant de la notice de II, p. 88 ? Elle évoque certainement Macédonios Ier et sur ce point précis, elle pourrait faire penser au Concile de Constantinople de 360 de notre ère. Mais accepter cette conclusion entraîne des difficultés. D'abord, dans l'histoire, le concile a déposé Macédonios pour ses convictions homéousiennes. Ses positions sur la nature du Saint-Esprit sont inconnues. Ensuite, ce concile, placé sous la présidence d'Acace de Césarée, était un concile oriental, regroupant surtout des évêques des environs de Constantinople (Thrace et Bithynie). On ignore d'ailleurs le nombre de participants. Dans de telles conditions, une convocation par Ambroise de Milan n'a aucun sens. On a l'impression que le II, p. 88 et le II, p. 95, à assez grande distance l'un de l'autre, pourraient être des doublons mal intégrés.
Reste la notice de II, p. 83. On peut difficilement, malgré le lemme (avec, une nouvelle fois, Constantinople et un nombre de participants tournant autour de 150), imaginer Damase réunissant dans la partie orientale de l'Empire un concile, dont on n'a aucune trace par ailleurs, et dont ne sortiraient que de simples ordonnances, si « belles » soient-elles, dont une aurait été demandée par saint Jérôme. Leur portée est limitée à des questions secondaires de liturgie. Mais les canons de ce concile ne contiennent rien en ce sens.
Bibliographie sur les conciles
Adolphe Charles Peltier [et alii], Dictionnaire universel des conciles tant généraux que particuliers, etc., Paris, 2 vol., 1846-47 (Encyclopédie théologique de Migne, Tomes XIII et XIV)
Charles-Joseph Héfélé [et continuateurs], Histoire des conciles d'après les documents originaux, 11 tomes en 21 vol., Paris, 1907-1952.
Yves Chiron, Histoire des conciles, Paris, 2011, 287 p. (Pour l'histoire)
Ignacio Ortiz de Urbina, Histoire des conciles oecuméniques. Tome 1. Nicée et Constantinople 324 et 381, Paris, 1963, 321 p.
Pierre Thomas Camelot, Histoire des conciles oecuméniques. Tome 2. Éphèse et Chalcédoine 431 et 451, Paris, 2006, 257 p.
Martin, Chronique, p. 417, l. 10-11 : Damasus papa rogatu Iheronimi instituit, ut diceretur in fine psalmorum in ecclesia Gloria patri, etc. Est-il question de la récitation du Credo à la messe ?
Suit immédiatement, l. 11ss, une mention au concile : Secunda sancta synodus 150 patrum Constantinopoli celebratur, in qua dampnatur Macedonius, qui negebat Spiritum sanctum esse deum, et assertum est, Spiritum esse consubstancialem et coequalem Patri et Filio, dans symboli formam, quam et Latina confessio predicat in ecclesiis.].
Mais il n'est question que de formulation théologique dans le credo, dans symboli formam. Mais attention le concile revient plus loin, p. 88 in fine avec les précisions théologiques adéquates]
Aucune mention (semble-t-il) de Damasus dans l'Historia Romana de Paul Diacre.
* H. Leclercq, Damase, dans DACL, t. IV, Première partie, D-DOMESTICI, Paris, 1920, col. 145-197. La col. 153, contient un développement intéressant sous la rubrique "Psalmodie". Après le texte du Liber Pontificalis depuis Hic constituit jusqu'à monasteriis, H. Leclercq reprend la citation suivante : "Le décret sur le chant des psaumes a tous les caractères d'une interpolation : il manque aux abrégés de la première édition ; il occupe une place insolite, entre les ordinations et la sépulture ; enfin il contredit la notice de Célestin (Ier pape 422-432) qui attribue formellement à ce pape l'introduction de la psalmodie dans l'office liturgique. On discerne aisément la raison de cette retouche c'est le souvenir de la correction du psautier exécutée par saint Jérôme à la demande du pape Damase, et plus précisément, c'est l'influence de deux épîtres apocryphes soi-disant échangées entre Damase et Jérôme à propos de cette correction. Il y a en effet, dans celle de Jérôme, une expression qui se retrouve ici : Precatur ergo cliens tuus ut vox ista psallentium in sede tua romane diu noctuque canatur. Une fois cette lettre acceptée comme authentique on ne pouvait manquer de croire que Damase avait accueilli le voeu de Jérôme et institué la psalmodie dans l'église" (L. Duchesne dans son éd. du Liber pontificalis, t. 1, p. 214)
Cfr aussi, sur ce pape, la synthèse de Jean Guyon, Damase, dans J. Leclant, Dictionnaire de l’Antiquité, Paris, 2005, p. 630-631. Citer les ordonnances
[Saint Apollinaire] [II, p. 84] L’an 375 fut canonisé saint Apollinaire dans la ville d’Antioche. [Martin, Chronique, p. 417, à propos du pape Damase] [également chez Vincent, mais autres références]
[II, p. 83] En l’année 372, saint Hilaire (cfr II, p. 76-77), évêque de Poitiers, mourut.
5. Quelques personnalités importantes
a. Une simple liste (II, p. 87)
En II, p. 87, Jean aligne une série de personnalités importantes vivant au temps de saint Ambroise (Des sains proidhons qui regnoient à chi temps). Certaines d'entre elles bénéficieront d'une notice propre dans le Myreur et nous en dirons quelques mots. Les autres sont réduites à leur simple nom et nous ne les commenterons pas.
En fait, Jean a repris, avec quelques modifications mineures, la liste qui figurait dans la Chronique de Martin (p. 417, l. 4-7, éd. Weiland). Cette liste, chez les deux auteurs, suit immédiatement la mention de l'élévation de saint Ambroise à l'épiscopat (Jean a rendu par preistre l'episcopus de Martin). ‒ Ces deux listes peuvent être rapprochées de celle que Vincent de Beauvais (Speculum historiale, XVII, 17), se référant à Sigebert de Gembloux, donnait des viri illustres au début du règne de Gratien. ‒ Une autre liste de personnalités, surtout religieuses, figure en I, p. 71.
b. Saint Martin (II, p. 85 et p. 87)
Cet évêque de Tours (né vers 316 de notre ère en Pannonie et mort en Touraine en 397 de notre ère également) est cité à de nombreuses reprises dans le Myreur. Le présent fichier contient sur lui une notice assez détaillée (II, p. 85), résumant sa vie, et une simple mention (II, p. 87) dans une liste de personnalités du moment. Son nom apparaît aussi en II, p. 53-54 (sa naissance en 311 de l'Incarnation), p. 62 (autre date de naissance, en 323 de l'Incarnation), p. 77 (disciple de saint Hilaire), p. 110 (sa mort en 402 de l'Incarnation), p. 119 (sa vie écrite par Sulpice Sévère), p. 165 (la plaisanterie de Clovis à son sujet), p. 174 et 176 (la dévotion de Clotilde pour lui), etc. etc.
c. Saint Nicolas (II, p. 79-80)
Saint Nicolas, mort en 366 (Incarnation), est signalé dans cette notice pour ses « innombrables beaux miracles », qu'il ne détaille toutefois pas, renvoyant simplement à ce que ons trouve en sa legente à Sainte-Engliese. Jean ne dit pas non plus qu'il fut évêque de Myre en Lycie et qu'il assista peut-être au concile de Nicée en 325. Par contre, en IV, p. 290, il fait état, en quelques mots très brefs, du transfert de ses reliques à Bari en 1087 (de notre ère). En I, p. 68, dans sa traduction des Mirabilia urbis Romae, il avait aussi mentionné l'existence de son église à Rome en I, p. 68.
d. Saint Ambroise de Milan (II, p. 87, p. 88 et p. 89)
C'est un autre personnage très important dans l'histoire du IVe siècle. Larousse et dates de notre ère : "Père et docteur de l'église latine (Trèves, vers 340 - Milan, 397). Fonctionnaire de l'Empire romain, il fut désigné par l'enthousiasme populaire pour le siège épiscopal de Milan en (374). Adversaire de Symmaque, il s'opposa au maintien dans le Sénat de l'autel de la Victoire (382). À la suite du massacre de Thessalonique (390), il interdit à l'empereur Théodose l'entrée de Milan et ne l'admit à la communion qu'après une longue expiation. Il réforma le chant sacré et aida à la conversion de saint Augustin qu'il baptisa."
Dans le présent fichier, il est cité en II, p. 87 pour son accession à l'épiscopat datée de l'an 381 de l'Incarnation (brève mention reprise à la Chronique de Martin, p. 417). Il est également cité en II, p. 88, pour un concile de 150 participants qu'il aurait réuni à Constantinople en 382 de l'Incarnation et qui condamna pour hérésie Macédonius (cfr II, p. 95) qui niait la divinité du Saint-Esprit. Mais si Macédonius et ses partisans sont bien connus comme hérétiques (cfr supra) et ont eu des ennuis lors de deux conciles, aucun de ceux-ci n'a été convoqué par Ambroise. Une troisième notice (II, p. 89) fait mention de son élection comme évêque de Milan (383 de l'Incarnation). Jean reste sur ce point très sobre. Il aurait pu s'étendre davantage sur cet événement en puisant dans la Vie d'Ambroise, écrite par Paulin son secrétaire.
Dans cette même notice, Jean note aussi que saint Ambroise « fit chanter les hymnes dans la Sainte-Église » et publia beaucoup d'ouvrages « qui éclairèrent l'Église d'une vive lumière ». Il cite en particulier un « livre sur le Saint-Esprit qu'il expédia à l'empereur Gratien et que ce dernier apprécia fort ». Ces informations correspondent bien à la réalité historique. « Ambroise de Milan a effectivement composé des hymnes (8 strophes de 4 vers brefs), introduisant en Occident le chant liturgique et lui donnant une forme 'officielle'. On continue de chanter les hymnes ambrosiennes dans la liturgie des heures, et de composer des hymnes latines suivant son modèle. Il serait aussi à l'origine du chant polychoral aussi dit chant antiphonique » (Wikipédia). Il a aussi produit des écrits doctrinaux, parmi lesquels un traité Du Saint-Esprit (en 381 de notre ère), dédié à Gratien, des Lettres, des Oraisons funèbres et des Sermons. En II, p. 70, Jean fait d'ailleurs allusion à un texte d'Ambroise vantant les mérites de Constantin. En IV, 226, il mentionnera une apparition de saint Ambroise à l'empereur Conrad (à vérifier)
On retrouvera saint Ambroise dans le fichier suivant (II, p. 99), pour une information mineure, II, p. 101-102, pour une information beaucoup plus importante. Jean mentionne bien (II, p. 101-102) le Massacre de Thessalonique
(ordonné par Théodose), mais où fait-il état de l'affrontement entre Théodose et Ambroise à Milan, et de la punition infligée à l'empereur ? Dit-il autre chose que ce qu'on trouve en II, p. 101-102 ?
e. Saint Jérôme (II, p. 83, p. 86 et p. 87)
Saint Jérôme est cité à plusieurs reprises dans le présent fichier. D'abord en II, 87, très rapidement dans la longue liste des grandes personnalités de l'époque (avec saint Martin, cfr supra), mais aussi dans d'autres notices faisant allusion d'une manière plus précise à ses activités : en II, p. 86, pour sa Chronique, et en II, p. 87, pour sa traduction de la Bible. Jean précise à ce dernier endroit qu'en 381 de l'Incarnation, « saint Jérôme traduisit toute la Bible de l’hébreu en latin, à la prière et à la requête du pape Damase ». Était-ce vraiment à la demande de Damase ? Martin, à l'endroit où il parle des oeuvres de Jérôme (Chronique, p. 417, l. 9-10, éd. Weiland), écrit simplement que Ieronimus... transtulit de Hebraica veritate in Latinum de verbo ad verbum, sans faire intervenir le pape Damase. La notice du chroniqueur d'Opava (Chronique, p. 417, l. 7-11, éd. Weiland) est plus détaillée que celle de Jean d'Outremeuse en ce qui concerne les rapports entre saint Jérôme et le pape Damase. Jean ne dit rien sur les rapports professionnels des deux hommes : on sait pourtant que Jérôme était le secrétaire de Damase.
f. Saint Athanase (II, p. 87, et II, p. 88)
De saint Athanase, il a déjà été question dans les fichiers précédents, notamment en II, p. 51-70 et en II, p. 70-79. Sur l'épisode du quicumque, où sa présence n'est pas authentique, on se reportera à ce qui a été écrit plus haut, à propos de Damase.
g. Josaphat l'Ermite (II, p. 84)
Allusion rapide à une légende très populaire au Moyen Âge, celle de Josaphat et de Barlaam, qu'on a pu interpréter comme une version christianisée de la « Vie du Bodhisattva ». On pourra en lire une version plus longue dans la Légende dorée de Voragine, dont le ch. 176 est intitulé saints Barlaam et Josaphat (p. 1003-1028, A. Boureau). (https://fr.wikipedia.org/wiki/Barlaam_et_Josaphat). Martin n'en dit pas grand chose dans sa Chronique, p. 416-417, à propos des événements liés à l'époque du pape Damase : Hiis temporibus floruit in India Iosaphat, filius regis, heremita factus, et Barlaam, qui ipsum convertit. Par contre, Vincent de Beauvais s'étend très longuement sur cette histoire (Speculum historiale, XVI, 1-24, après l'annonce de la fin de XV, 100).
[Plan]
[Le concile de Constantinople] Cette année-là, saint Ambroise rassembla un concile de 150 pères à Constantinople, qui condamna Macédonius. C’était un hérétique qui niait que le Saint-Esprit soit Dieu (cfr II, p. 83).
[Attention : cfr supra II, p. 83, sans les considérations dogmatiques :
"[II, p. 83] [Le concile de cent soixante-six évêques à Constantinople - Sur le Credo et le Gloria Patris après] Cette année-là [370], le pape Damase organisa un grand concile où il publia beaucoup de bonnes ordonnances, notamment, celle de dire le Credo in unum Deum, à la messe, immédiatement après l’Évangile ; il prescrivit aussi, à la demande de saint Jérôme, que dorénavant les psaumes récités dans la Sainte-Église le soient toujours avec le Gloria Patri et Filio, etc."
[Cfr Martin, Chronique, p. 417, l. 10-11 : Damasus papa rogatu Iheronimi instituit, ut diceretur in fine psalmorum in ecclesia Gloria patri, etc.]
Suit immédiatement, l. 11ss, une mention au concile : Secunda sancta synodus 150 patrum Constantinopoli celebratur, in qua dampnatur Macedonius, qui negebat Spiritum sanctum esse deum, et assertum est, Spiritum esse consubstancialem et coequalem Patri et Filio, dans symboli formam, quam et Latina confessio predicat in ecclesiis.].
Mais il n'est question que de formulation théologique dans le credo, dans symboli formam. Mais attention le concile revient plus loin, p. 88 in fine avec les précisions théologiques adéquates]
Macédonios (ou Macédonius) Ier fut évêque de Constantinople, occupant
effectivement le siège de 341 ou 342 à 346, puis de 351 à janvier 360. De
tendance arienne. Il donna son nom à l'hérésie pneumatomaque.
H. Varia
Un fichier précédent : [II, p. 71] [Donat le grammairien] À l’époque [vers 339] vivait Doctrinal ou Donat, instruit dans l’art de la grammaire, écrivain et commandeur (chevalier ?).
1. Une pléiade d'auteurs (ecclésiastiques et autres) dont Didyme l'Aveugle
Outre la longue énumération de personnalités religieuses de II, p. 87, le présent fichier contient une série de notices, plus ou moins détaillées, sur divers personnages connus, essentiellement ou en partie, pour leurs écrits. Certains sont étroitement liés à la vie de l'Église, comme saint Ambroise, saint Athanase, saint Jérôme, voire Damase lui-même. Jean en a aussi présenté d'autres, avec éventuellement quelques détails : ainsi Sigebert de Gembloux (II, p. 86), Prosper d'Aquitaine (II, p. 86), Eutrope (II, p. 87), Paul Diacre (II, p. 87), Bède le Vénérable (II, p. 95), Didyme d'Alexandrie.
Ce dernier semble avoir retenu son attention. Il figure comme « le philosophe d'Alexandrie » dans la longue liste des personnalités de II, p. 87, mais il a aussi les honneurs d'une présentation particulière en II, p. 84 (De l'aveugle qui mult apris), manifestement à cause de la cécité qui lui fut prêtée et qui lui mérita le surnom de Didyme d'Aveugle. Jérôme, dans sa Chronique, à la date de 372, présentait déjà le cas de Didyme parmi les informations à retenir des événements du règne de Valentinien et de Valens (Didymus Alexandrinus multa de nostro dogmate per notarios commentatur, qui post quintum nativitatis suae annum luminibus orbatus elementorum quoque ignarus fuit). Vincent de Beauvais aussi (Speculum historiale, XV, 55) fournissait sur lui une assez longue notice, différente de celle de Jean d'Outremeuse et tirée de l'Histoire ecclésiastique de Rufin d'Aquilée (vers 403). Cfr aussi Wikipédia.
2. Événements extraordinaires
Il n'est pas rare que Jean intègre dans le Myreur des événements spéciaux, comme des phénomènes terrestres ou célestes, ou des catastrophes, ou des épisodes que les gens du Moyen Âge pourraient considérer comme miraculeux et que ceux de l'Antiquité auraient présenté comme des prodiges. Nous avons précisément attiré l'attention sur ce point dans nos notes de lecture de II, p. 70-79. Peut-être serait-il intéressant de rassembler toutes les notices de ce type présentes dans le Myreur et de rechercher dans chaque cas les sources éventuelles du chroniqueur.
Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne les événements particuliers que le chroniqueur liégeois a retenus dans le présent fichier, ils sont au nombre de trois. Deux sont survenus en l'an 371 de l'Incarnation, d'une part une violente tempête de grosses pierres frappe Constantinople ; de l'autre, dans la ville d'Arras, la pluie tombe mêlée à de la laine (II, p. 83). Le troisième concerne l'année 384, de l'Incarnation toujours : l'Asie est frappée par un très violent tremblement de terre, qui dure trois jours et qui renverse « sept cités et quatorze grands châteaux » (II, p. 94).
Il est intéressant par exemple de relever que pour les règnes de Valentinien et de Valens, la Chronique de Jérôme signale :
En 366 : Terrae motu per totum orbem facto mare litus egreditur et Siciliae multarumque insularum urbes innumerabiles populos oppressere
En 367 : Tanta Constantinopoli est orta tempestas ut mirae magnitudinis decidens grando non nullos hominum interfecerit
En 367 : Apud Atrabatas lana caelo pluviae mixta defluxit.
Le tremblement de Terre de 366 chez Jérôme n'apparaît pas dans le récit de Jean. Par contre les deux autres phénomènes signalés pour l'année 367 sont bien présents chez le chroniqueur liégeois, mais ils sont datés de l'an 371 de l'Incarnation et accompagnés, ce qui est plus intéressant, de quelques additions : une sérieuse amplification dans la taille des pierres qui tombent sur Constantinople et une tentative d'explication, faite par des clercs, du phénomène de la laine mêlée à la pluie.
Ce dernier phénomène avait également été enregistré par Orose (VII, 32, 8) dans une version très proche de celle de Jérôme, c'est-à-dire brute, sans interprétation : « La même année, chez les Atrébates, de la véritable laine, mêlée de pluie, tomba des nuages ». La tentative d'explication viendrait-elle de Jean lui-même ? C'est fort possible. Mais il faudrait pour en être sûr, disposer de toutes les mentions existantes. Ce qui n'est pas le cas.
En tout cas, la même intervention des clercs apparaît dans l'interprétation d'un autre phénomène, dont Jean avait fait état dans le fichier précédent (en II, 71). Il s'agissait alors d'un tremblement de terre lié à une pluie de sang, que Jean avait daté de l'an 341 de l'Incarnation et où les clercs, selon lui, avaient vu l'annonce des maux que la chrétienté aurait à souffrir des hérésies d’Arius.
En ce qui concerne par contre la notice sur le tremblement de terre qui, selon Jean (II, p. 94), dévasta l'Asie pendant trois jours en l'an 384 de l'Incarnation, on ne peut rien en dire de particulier, faute d'en avoir retrouvé la source. Les précisions (7 cités et 14 châteaux) pourraient peut-être aider à le faire, mais nous n'avons pas cherché davantage.
[Plan]
CHUTES
Additions ou compléments concernant les empereurs
et les problèlmes militaires? à traiter ?
Quid d'Ammien-Marcellin et
d'Orose ?
OCD, 1996, s.v°
Valentinian I [OCD, 1996,
Valentinian I : He concentrated on frontier defence. The Alamanni who
invaded Gaul were destroyed, and their homeland was devastated [quid ?] ;
fortifications on the Rhine and Danube were reconstructed for the last time. In
Britain and Africa order was brutally restored by the general Theodosius [le
père du futur empereur]. In 375 Valentinian left Gaul because Pannonia had been
invaded, and while berating a delegation of those responsible, he suffered a
stroke and died at Brigetio (17 November].
[NDJP] En tout cas, aucune de nos sources antiques
ne fait état d'une expédition de Valentinien Ier dans le Marais Méotide, ni même
d'un contact de cet empereur avec des populations barbares d'une région aussi
éloignée, totalement en dehors des limites de l'Empire romain d'ailleurs. On
peut ajouter qu'aucune de nos sources antiques ne met cet empereur en
confrontation militaire avec les
Francs. Deux des généraux de Valentinien Ier, Mérobaud et Mallobaud, étaient d'ailleurs d'origine franque.
L'intervention des Alains sous Valentinien Ier chez Jean d'Outremeuse relève de son invention. Elle n'est cautionnée ni par les sources antiques, ni par la tradition médiévale ancienne. D'autant plus, en ce qui concerne les Alains, que la notice comporte un récit sur leurs origines, et que ces origines sont situées du côté des Marais Méotides, un vivier, lointain et mystrérieux, duquel sont sortis bien des peuples qui terminèrent leur route dans l'Empire romain ou qui le traversèrent. D'autant plus encore qu'on retrouve, semble-t-il, ce "réservoir primitif" comme lieu d'origine première (?) des Sicambres [cfr les attestations du terme dans Myreur, I, 28 et 102, et ici, à propos des Alains logés au-delà, II, p. 80, 81 et surtout 100. Ces mentions sont à creuser. Intervention des Troyens, d'Anténor, de Sicambre, des Sicambriens, des Gaulois, des Francs]
Grégoire de Tours parle des Alains, dans le tome I, R. Latouche, I, 7, p. 90 (période des Champs Catalauniques): Rependial, roi des Alains ; I, 9, p. 96-97 (prise de Rome par les Goths, sous Constantin ?)
*
Ce terme de Valentin, il l'a repris pour qualifier les personnages auxquels l'Histoire donne le nom, non pas de Valentin, mais de Valentinien. Et nous en avons rencontré deux jusqu'ici : Valentinien Ier, père de Gratien, co-empereur avec Valens ; Valentinien II, fils de Valentinien Ier et frère de Gratien. Pour lever toute ambiguïté, nous avons conservé les graphies originales dans les textes en moyen français, mais introduit les noms « historiques » dans les traduction, les sommaires, les titres et les sous-titres.
Attention à l'hérésiarque VALENTIN, contemporain de Valentinien (Paul Diacre:
Concernant la confusion entre Valentin-Valentinien
Pour lever toute ambiguïté, nous avons conservé les graphies originales dans les textes en moyen français, mais introduit les noms « historiques » dans les traductions, les sommaires, les titres et les sous-titres.
La moindre chose à noter est que Jean ne s'est pas préoccupé d'assurer (ou de justifier) le « surgissement » ou l'installation de Gratien. Le lecteur devra attendre le fichier suivant, alors que ce Gratien, rappelons-le, fils aîné de Valentinien Ier, avait participé au gouvernement de la pars occidentalis de l'empire de 367 de notre ère à sa mort (383 de notre ère). Orose pourtant, dans son livre VII (32, 8), fait intervenir très tôt Gratien.
En fait, la vision que se fait Jean de la fin du règne de ces empereurs (II, p. 85) est particulière, très difficile d'abord à comprendre ensuite à concilier avec les données historiques.
Et Valentinien II, qui fut empereur en Occident de 375 (il avait 4 ans) à 392, frère cadet de Gratien, pâle figure impériale, co-empereur avec Gratien en Occident de 367 à 383. / En Orient, Théodose règne de 379 à 395.
Attention à ce Valentinien (cfr fichier suivant) !!! S'agirait-il de Valentinien II ? (cfr Petit, Empire romain, p. 630 et 638, pas très clair d'ailleurs) Valentinien I avait deux fils. "L'aîné Gratien, proclamé Auguste dès 367, et qui se trouvait à Trèves lors de [la mort de son père], lui succéda sans difficulté [...]. À la suite d'intrigues obscures, menées peut-être par le préfet d'Illyricum Probus, l'armée de Valentinien alors en campagne contre les Quades près d'Aquincum, [ville de la basse Pannonie], proclama empereur le frère cadet de Gratien, le jeune Valentinien II, âge de quatre ans seulement. Gratien et Valens acceptèrent de mauvais gré le fait accompli. L'enfant resta longtemps sous tutelle de l'impératrice Justine comme tutrice.
Orose, VII, 35, 10 (avec le commentaire): "après la mort de Maxime et de Victor, Valentinien II n'avait retrouvé le pouvoir que sur la préfecture des Gaules; ses actes étaient surveillés par Arbogast, un païen d'origine franque, que Théodose avait nommé magister militum en 388. Valentinien II mourut le 15 mai 392 : assassinat déguisé en suicide, ou suicide déguisé en assassinat ? de toute façon la responsabilité de sa mort pèse sur Arbogast" (n. 6, p. 98 du t. III de Budé - commentaire Arnaud-Lindet). Texte d'Orose : "il fut criminellement étranglé à Vienne par son comte Arbogast, dit-on, et, pour que l'on pense qu'il s'était résolu à une mort volontaire, il fut pendu à un noeud coulant"
Ammien Marcellin (31, 14, 5-7), décrivant Valens
«Il [= Valens] était d’une avidité sans bornes, d’une inapplication extrême aux affaires ; outrait avec parade les rigueurs officielles du pouvoir, mais était cruel par instinct. Son éducation avait été nulle ; il n’avait aucune notion de littérature ou d’art militaire. Son grand plaisir, en voyant grossir son épargne, était qu’il en coulât des gémissements à d’autres ; et il montrait surtout une joie atroce quand une accusation ordinaire prenait entre ses mains les proportions du crime de lèse-majesté : c’est qu’alors il avait pour en répondre la vie et la fortune d’un riche. Mais je lui pardonne encore moins son hypocrisie de respect pour les lois et les décisions judiciaires, tandis que, composés par lui, les tribunaux étaient notoirement les instruments de ses caprices. Violent et peu abordable d’ailleurs, il était toujours accessible à toute accusation vraie ou fausse ; dangereuse tendance chez ceux même qui ne sont pas au pouvoir. Son habitude de corps était lourde et paresseuse. Il était brun de teint. Un de ses yeux avait une taie; mais cette difformité ne s’apercevait pas à distance. Il était de moyenne taille, bien pris dans ses membres, quoiqu’il eût les jambes arquées et le ventre un peu gros. »
Il était d’une avidité sans bornes, d’une inapplication extrême aux affaires ; outrait avec parade les rigueurs officielles du pouvoir, mais était cruel par instinct. Son éducation avait été nulle
Usurpation temporaire de Procope après la désignation de Valens - maîtrisée (cfr Burgeon, Andrinople, p. 10)
Quelles places donner aux documents écrits (lettres, etc. ?)
Le récit fait aussi intervenir des documents qu'on peut appeler diplomatiques : des lettres remises ou envoyées sont examinées avec soin et font foi. Ce ne semble pas très courant chez Jean. Voir index Bormans, s.v° Lettres (pour des documents liégeois beaucoup plus tardifs)
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