Bibliotheca Classica Selecta - Autres traductions françaises dans la BCS
Suétone (généralités)
Vie de César (généralités) - (latin 85 K) - (traduction 200 K)
LV. Son mérite comme orateur et comme écrivain
(1) Pour
l'éloquence et les talents militaires, il
égala, il
surpassa
même
la gloire des plus grands maîtres. (2) Son accusation
contre Dolabella
le fit ranger, sans contestation, parmi les
premiers talents
du barreau. En tout cas,
Cicéron, dans son traité à
Brutus,
où il énumère les orateurs,
dit "qu'il n'en voit point à qui
César doive le céder," et il ajoute
"qu'il y a dans sa manière de
l'élégance et de l'éclat, de
la magnificence et de la grandeur." Cicéron
écrivait aussi à Cornélius
Nepos: "Quel
orateur oseriez-vous lui préférer
parmi ceux qui n'ont jamais cultivé que cet
art? qui pourrait l'emporter sur lui pour
l'abondance ou la vigueur des pensées? qui,
pour l'élégance ou la beauté
des expressions?" (3) Fort jeune
encore, il avait, à ce qu'il semble,
adopté le genre d'éloquence de
César
Strabon, et
il inséra même textuellement dans sa
Divination
plusieurs passages du discours de cet orateur
Pour
les Sardes. (4) Il avait, dit-on,
la voix pénétrante,
et il savait unir, dans ses mouvements et ses
gestes, la grâce et la chaleur. (5) Il a
laissé plusieurs discours, mais il en est
qu'on lui a faussement attribués. (6) Auguste regardait
avec raison le plaidoyer Pour
Q.
Metellus
plutôt comme la copie infidèle de
sténographes qui n'avaient pu suivre la
rapidité de son débit, que comme un
ouvrage publié par lui-même.
De
fait, je trouve
que plusieurs exemplaires ne sont pas
intitulés Discours pour Metellus,
mais Discours écrit pour le compte de
Metellus. Toutefois, c'est César qui y
parle, pour se justifier, en même temps que
Métellus, des accusations de
leurs
détracteurs
communs. (7) Auguste
hésite même à lui attribuer les
harangues Aux soldats en Espagne; on en
possède néanmoins deux sous ce
même titre: l'une, qu'il aurait
prononcée avant le premier
combat, et l'autre avant
le second;
mais Asinius
Pollion dit
qu'à la dernière bataille, la brusque
attaque des ennemis ne lui laissa pas le temps de
haranguer ses troupes. (1)
Eloquentia militarique re aut aequauit
praestantissimorum gloriam aut excessit. (2)
Post accusationem Dolabellae haud dubie principibus
patronis adnumeratus est. Certe Cicero ad Brutum
oratores enumerans negat se uidere, cui debeat
Caesar cedere, aitque eum elegantem, splendidam
quoque atque etiam magnificam et generosam quodam
modo rationem dicendi tenere; et ad Cornelium
Nepotem de eodem ita scripsit: "Quid? oratorem quem
huic antepones eorum, qui nihil aliud egerunt? quis
sententiis aut acutior aut crebrior? quis uerbis
aut ornatior aut elegantior?" (3)
Genus eloquentiae dum taxat adulescens adhuc
Strabonis Caesaris secutus uidetur, cuius etiam ex
oratione, quae inscribitur "pro Sardis," ad uerbum
nonnulla transtulit in diuinationem
suam. (4)
Pronuntiasse autem dicitur uoce acuta, ardenti motu
gestuque, non sine uenustate. (5)
Orationes aliquas reliquit, inter quas temere
quaedam feruntur. (6)
"Pro Quinto Metello" non immerito Augustus
existimat magis ab actuaris exceptam male
subsequentibus uerba dicentis, quam ab ipso editam;
nam in quibusdam exemplaribus inuenio ne inscriptam
quidem "Pro Metello," sed "quam scripsit Metello,"
cum ex persona Caesaris sermo sit Metellum seque
aduersus communium obtrectatorum criminationes
purgantis. (7)
"Apud milites" quoque "in Hispania" idem Augustus
uix ipsius putat, quae tamen duplex fertur: una
quasi priore habita proelio, altera posteriore, quo
Asinius Pollio ne tempus quidem contionandi
habuisse eum dicit subita hostium
incursione.
CommentaireIl surpassa : les auteurs anciens s'accordent pour reconnaître en César un orateur d'une qualité exceptionnelle. Voir, par exemple, le témoignage d'Atticus, chez Cicéron, Brutus, § 252 : « voici ce que moi je pense de César et que j'ai très souvent entendu dire à notre ami, ici présent [Cicéron], si habile juge en ces matières : César est peut-être de tous nos orateurs celui qui parle le latin avec le plus d'élégance » ; ou encore Tacite : « le dictateur César était l'émule des plus grands orateurs » (Annales, XIII, 3, 2). Les talents militaires de César se passent de commentaire.
Cornelius Nepos : c.99-24 a. Homme de lettres qui n'a fait aucune carrière politique ; ami de Cicéron, d'Atticus, de Catulle (qui lui dédie ses poèmes). De son uvre, on n'a conservé qu'une partie du De viris illustribus. Les lettres de Cicéron à Cornelius Nepos ne nous sont pas parvenues.
C. Iulius Caesar Strabo Vopiscus : édile curule en 90 qui, sans passer par la préture, brigue, sans succès, le consulat pour l'année 88 ou 87 (cf. B.R. Katz, Caesar's Strabo Struggle for the Consulship - and More, dans Rheinisches Museum, 120, 1977, p.45-63). Caesar Strabo est tué en 87, dans les troubles qui suivent le retour à Rome de Marius et de Cinna. Sur ses talents littéraires, voir Cicéron, Brutus, § 177 : « l'enjouement et la finesse des plaisanteries, voilà quelle fut sur ses devanciers la supériorité de Caius Julius, fils de Lucius. Comme orateur, il n'eut pas la moindre force, mais personne n'eut un langage plus assaisonné d'urbanité, de grâce et de charme. Il existe de lui quelques discours, qui peuvent, aussi bien que ses tragédies, donner une idée de sa douceur dépourvue de nerf » (trad. J. Martha).
Divination : à ne pas confondre avec la divination au sens habituel du terme. Il s'agit ici d'une phase préliminaire de la procédure judiciaire destinée à désigner la personne qui soutiendra l'accusation lorsque plusieurs candidats revendiquent cette mission. César a donc prononcé un discours pour réclamer le rôle d'accusateur dans le procès contre Dolabella.
Pour les Sardes : discours de César Strabon contre le gouverneur de Sardaigne, T. Albucius (104 a.C. ?).
Premier second combat : ces combats doivent se situer pendant la deuxième campagne d'Espagne (début 45), contre Cnaeus et Sextus Pompée, mais il est difficile de préciser où se sont livrées les deux batailles auxquelles Suétone fait allusion.