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MOTEUR DE RECHERCHE DANS LA BCS


 

TACITE

Origine et territoire des Germains, dit La Germanie

(I-IV)

 

 

Traduction nouvelle avec notes de Danielle De Clercq, Bruxelles, 2003

 


 [I] [II] [III] [IV] [V] [VI] [VII] [VIII] [IX] [X] [XI] [XII] [XIII] [XIV] [XV] [XVI] [XVII] [XVIII]

[XIX] [XX] [XXI] [XXII] [XXIII] [XXIV] [XXV] [XXVI] [XXVII] [XXVIII] [XXIX] [XXX]

[XXXI] [XXXII] [XXXIII] [XXXIV] [XXXV] [XXXVI] [XXXVII]

[XXXVIII] [XXXIX] [XL] [XLI] [XLII] [XLIII] [XLIV] [XLV] [XLVI]

 

Plan

 

Introduction

Traduction et notes

Première partie:

Comment peut-on être Germain? (I-IV)

Vivre en Germanie (V-VIII) (IX-XV) (XVI-XIX) (XX-XXIV) (XXV-XXVII)

Deuxième partie:

Particularismes de peuples germaniques (XXVIII-XXXIII) (XXXIV-XXXVII) (XXXVIII-XLII) (XLIII-XLVI)

Cartes

Benario (1999)

Goelzer (1917)

Grane (2003)

Perret (1949)

Rives (1999)

 


Origine et territoire des Germains

 

Comment peut-on être Germain?

UN SPLENDIDE ISOLEMENT

(I 1). La Germanie "dans son ensemble" a pour frontières le Rhin avec la Gaule, le Danube avec la Rétie et la Pannonie. Une peur réciproque, des montagnes aussi la tiennent à l'écart des Sarmates et des Daces. Ailleurs, l'Océan la borde et enserre ses vastes péninsules et ses îles immenses où la guerre a fait découvrir - ce que nous en savons est donc récent - certains peuples et leurs rois.

(I 2). Le Rhin prend sa source dans les Alpes Rétiques au sommet d'un pic inaccessible en pente raide. Il infléchit insensiblement son cours vers l'ouest et finit par se fondre dans la Mer du Nord. Le Danube, lui, s'écoule de la crête érodée et des douces déclivités de l'Abnoba, et baigne de nombreuses contrées habitées. Six bras de son delta affluent dans la Mer Noire. Le septième se perd en marécages.

 

"MADE IN GERMANY ": ARGUMENTS EN FAVEUR DE L'AUTOCHTONIE

 

Difficultés d'accès et des conditions de vie

(II 1). Les Germains seraient, à mon sens, une population autochtone, nullement métissée par d'autres peuples qu'ils auraient accueillis venant d'ailleurs. Pourquoi? Ceux qui jadis voulaient émigrer ne se déplaçaient pas par voie terrestre mais maritime. Or nos navires n'abordent que rarement l'Océan qui, au-delà de notre monde, ouvre son immensité qu'on peut dire pleine de menaces. Et puis, sans même tenir compte des dangers d'une mer effrayante et inconnue, qui donc quitterait l'Asie, l'Afrique, l'Italie pour la nature ingrate de la Germanie, son ciel implacable, ses conditions et son cadre de vie affligeants, à moins de vouloir regagner sa patrie?

      Un peuple guerrier issu des dieux de sa terre

       Origine et nom

(II 2). Des hymnes anciens tiennent lieu en Germanie de tradition orale et écrite. Ils révèlent qu'un dieu est né de la Terre. C'est Tuisto, père de Mannus,  lui-même ancêtre fondateur du peuple germain. Mannus aurait eu trois fils et c'est de leurs noms que les Ingévons, tout proches de l'Océan, les Herminons au centre, et autres Istévons, tireraient les leurs.

Mais un passé reculé prête à l'affabulation . Selon certaines sources, le dieu aurait eu plus d'enfants. Ainsi, affirme-t-on, d'autres peuples tels les Marses, les Gambriviens, les Suèves, les Vandiliens porteraient aussi de véritables noms antiques. (II 3). Par contre, l'usage du terme de Germanie serait récent. En effet, les premiers à avoir traversé le Rhin pour en chasser les Gaulois sont dénommés Tongres de nos jours, mais jadis ils se seraient appelés Germains. Ce vocable qui ne désignait que cette tribu et non la race, se serait peu à peu généralisé. Dans un premier temps, c'est par ces vainqueurs désireux de se faire craindre que tous les Germains auraient été désignés sous ce nom. Par la suite, ils auraient eux-mêmes adopté cette dénomination qui leur était dévolue.

(III 1). On mentionne qu' Hercule aussi séjourna chez les Germains. C'est lui qu'ils chantent en partant au combat comme le brave parmi les braves.

Le"bardit" ou chanter pour faire peur

Ils entonnent aussi des hymnes, dont l'exécution, qu'ils appellent "bardit", enflamme les coeurs et présage l'issue du combat à livrer. En effet, selon l'intensité des sons, ils font ou prennent peur avant l'affrontement. Ces chants ressemblent moins à un ensemble vocal qu'à une expression collective du courage. Ils cherchent surtout à émettre des sons rauques dans un grondement syncopé en plaçant les boucliers devant la bouche. La résonance amplifie les voix en les rendant plus pleines et plus graves.

Quid d'une présence grecque ?

(III 2). D'autre part, certains croient qu'au cours de son errance, interminable et purement légendaire, Ulysse aurait dérivé dans cette partie de l'Océan et débarqué en Germanie. Il aurait fondé sur la rive du Rhin Asciburgium, qui est encore habité de nos jours, et l'aurait appelé Askipyrgion. Un autel consacré à Ulysse et mentionnant aussi Laërte, son père, aurait été découvert au même endroit, tandis que des monuments et certains tumuli portant des caractères grecs existeraient encore aux confins de la Germanie et de la Rétie.

(III 3). Tout cela, je n'ai l'intention ni de l'étayer par des preuves ni de le réfuter. Libre à chacun, comme il s'y sent porté, d'en douter ou de le croire.

Type physique et comportement

(IV). Personnellement, je suis de ceux qui pensent que les peuples de Germanie n'ont jamais été altérés par aucun croisement avec d'autres nations et sont demeurés une race à part, qui est pure et ne ressemble qu'à elle même.

Ainsi cette population tout entière et pourtant si nombreuse présente le même type physique: yeux d'azur aux regards farouches, chevelures cuivrées, hautes statures. Pleins de force quand ils se lancent à l'assaut, ils sont par contre incapables de s'astreindre à des travaux. Sans être rompus à endurer la soif et la chaleur, ils ont appris de leur ciel et leur sol à résister à la faim et au froid.


 

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