Jean d'Outremeuse, Myreur des histors, I, p. 264b-275a

Édition : A. Borgnet (1864) ‒ Présentation nouvelle, traduction et introductions de A.-M. Boxus et de J. Poucet (2017)

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au temps d'octave : Occident (La Gaule et tongres) - Orient (La judée avec Hérode) - divers [Myreur, p. 264b-275a]

Ans 561-569 de la transmigration = 28-20 a.C.n.

 

Introduction [sommaire] [texte]

La suite de la biographie de Virgile, toujours à Naples, se résume ici à une brève allusion évoquant son trépas (p. 269) : sa « tête parlante » lui annonce sa mort et ses circonstances, mais il se méprend sur les conseils qu'elle lui donne. Quand il comprend qu'il va mourir, il la détruit.

Une grande partie de ce fichier concerne la Gaule, Tongres et Rome. La Gaule d'abord, avec une description du pays et de ses trois grandes divisions. Une bonne partie de ce texte est une traduction d'Isidore de Séville (Etymologiae, XIV, de Europa, 25-30) [cfr aussi Wikisource], que Jean lui-même, à quatre reprises (p. 266, p. 267a, p. 267b, p. 268), présente comme sa source. À propos de ce passage, A. Borgnet, dans son édition, cite à plusieurs reprises le texte d'Isidore en faisant observer « combien Jean d'Outremeuse, ou peut-être son copiste, dénature souvent ses autorités ». Pareille observation pourrait être étendue à de nombreux textes du chroniqueur liégeois pour lesquels nous possédons l'original latin. Dans chaque cas, la comparaison ferait apparaître non seulement les faiblesses de Jean comme traducteur mais aussi ses « interventions » dans le texte de sa source. Pour en revenir à Isidore, là où l'auteur espagnol parle simplement d'une cité de Gaule, appelée Belgis, qui a donné son nom à la Gaule Belgique, le chroniqueur liégeois identifie cette Belgis à la ville de Trèves, qu'il n'a de cesse d'exalter dans Ly Myreur. Il fait aussi de Belgis le nom d'un roi de... Trèves, information absente, bien sûr, de son modèle. Mais restons-en là : l'ensemble du développement où Jean dit s'inspirer d'Isidore mériterait une étude particulière. Mais c'est tellement souvent le cas que cela devient lassant de le signaler !

Autre remarque générale : les garants évoqués assez régulièrement dans les textes du chroniqueur liégeois sont eux aussi toujours à vérifier soigneusement. En ce qui concerne le renvoi à Tite-Live XXII, à propos de « la Novempopulanie, qui porte en Espagne un autre nom, Annytana » (p. 268), A. Borgnet signale qu'il n'a trouvé aucune information correspondante dans les éditions modernes de Tite-Live, ce que nous ne pouvons que confirmer. Nous ne dirons rien de la référence à la neuvième décrétale (p. 268). Il doit s'agir, pour A. Borgnet (ad locum), « d'une décrétale de la collection fabriquée au IXe siècle par le Pseudo-Isidorus » mais nous n'avons pas fait sur ce point de recherche complémentaire.

Tout ce qui touche Tongres, les rapports de l'empereur romain avec le roi Sédros, les cadeaux d'une « reine Hélène », qui aurait été l'épouse d'Octave, et tous les changements de noms envisagés par le chroniqueur liégeois, n'appartiennent pas, on s'en doute, à l'histoire authentique. On retrouve là l'univers de la Geste de Liege (vers 1532-1679). C'est uniquement dans une épopée légendaire que le quatrième roi de Tongres aurait pu participer à l'expédition qui aboutit à la main-mise romaine sur l'Égypte et tuer Ptolémée (p. 265).

Un nouvel exemple des faiblesses du chroniqueur en matière d'institutions romaines est son explication du terme Augustus (p. 265). Il établit un lien entre ce cognomen impérial et le mois d'août (Augustus en latin), au début duquel l'empereur aurait remporté sa victoire éclatante sur l'Égypte. C'est historiquement l'inverse qui s'est passé. Un mois de l'ancien calendrier romain (Sextilis) a changé de nom et, pour honorer l'empereur décédé, a reçu celui d'Augustus, tout comme, un peu plus tôt dans l'histoire, le mois de Quinctilis avait reçu celui de Iulius (juillet) en l'honneur de Jules César, également après sa mort. Et pour ne pas quitter ce cognomen impérial qu'Octave reçut solennellement du sénat en 27 avant notre ère, on ajoutera que Jean donne du terme augustus une étymologie correcte (par le latin augēre « faire croître, augmenter ; s'accroître, se développer »), dont il ne comprend certainement pas la valeur religieuse profonde : « est augusta la personne ou la chose qui possède plénitude, charge parfaite, d'une force non plus matérielle, mais mystique » (G. Dumézil, La religion romaine archaïque, Paris, 1974, p. 131). L'explication du terme augustus par « en croissant, toujours s'accroissant », surtout avec à l'esprit l'accroissement territorial, ne correspond pas à la mentalité romaine. En outre, les empereurs romains portaient bien un sceptre, mais ne tenaient pas en main un globe symbolisant la terre.

Notre chroniqueur s'abstrait difficilement du monde médiéval. On vient de le voir à propos des insignes du pouvoir impérial. Cela se manifeste également dans les termes désignant les fonctions et les charges antiques. Il qualifie (p. 87) les archontes d'Athènes de « baillis », comme il le fait ici (p. 265) pour le praefectus Aegypti (« préfet d'Égypte », titre officiel de celui qui gouverne l'Égypte au nom de l'empereur. Antoine est présenté comme le « sénéchal » d'Octave (p. 265 et 269). Ponce-Pilate sera présenté plus loin (p. 389) comme le « prévôt » de Judée. Son titre romain était « préfet ». Hérode le Grand pouvait porter le titre de « roi de Judée », qui lui avait été octroyé par Auguste (p. 274). Et ne parlons pas des « barons » qui entourent les rois et qui peuvent accomplir diverses tâches. C'est un terme un peu « passe-partout », comme l'est celui de « princes ». Ainsi Jean emploie ce terme pour désigner (p. 274-275) les deux commandants des troupes romaines qu'Hérode reçoit des autorités romaines pour l'aider à reprendre possession de son trône : ces « princes » étaient en fait un proconsul, P. Ventidius Bassus, et son legatus, Poppaedius Silon. Une étude approfondie sur le sens donné dans Ly Myreur à tous ces termes de fontions dégagerait vraisemblablement beaucoup d'incohérence.

Les différents événements de Judée, exposés en détail, suggèrent un certain nombre de remarques.

Il est d'abord question de la famille du roi Hérode le Grand et notamment de ses épouses. Jean a mentionné précédement Doris (p. 260) ainsi que Mariamne l'Hasmonéenne et son premier enfant, Alexandre, (p. 263), et revient ici (p. 269) sur cette dernière pour signaler la naissance de son second enfant Aristobule, avant d'introduire Malthacé la Samaritaine, qui donne aussi à Hérode un fils, nommé Archélaüs. Quelques notices plus loin (p. 270), Jean parle de Cléopâtre de Jérusalem, mère de « deux jumeaux, dont l’un, Hérode Antipas, fit plus tard décapiter Jean-Baptiste, et l’autre, Philippe Hérode fit décapiter saint Jacques le Majeur ». En réalité, l'histoire de la famille d'Hérode est très compliquée, et les données du Myreur ne correspondent pas toujours à celles qui peuvent se déduire du récit de Flavius Josèphe. On reviendra sur ces questions lorsque Ly Myreur nous mettra en contact avec les différents fils d'Hérode, mais on peut déjà, à ce stade, tenter de clarifier les choses.

Dans les sources historiques, Doris, la première épouse, est la mère d'Antipater, que son père Hérode le Grand fit exécuter cinq jours avant sa mort en 4 avant notre ère. Mariamne l'Hasmonéenne est la mère d'Alexandre et d'Aristobule qu'Hérode fit également tuer en 7 avant notre ère. Malthacé la Samaritaine est la mère d'Archélaüs et d'Hérode Antipas qui survécurent à leur père Hérode, mort en 4 avant notre ère. Archélaüs sera plus tard tétrarque de la Judée, de la Samarie et de l'Iduménée, et Hérode Antipas tétrarque de la Galilée et de la Pérée. Faut-il rappeler ici que le Christ est né sous Hérode le Grand et mort sous Hérode Antipas ?

Mais Jean s'attarde davantage sur les rapports d'Hérode avec la puissance romaine qui contrôle la région. En effet après la défaite définitive des conjurés après la bataille de Philippes en 42 avant notre ère, les vainqueurs (Octave et Antoine) procédèrent à un nouveau partage du monde. Antoine reçut « la gouvernance du Pont, de l’Asie et de l’Orient ». Bien sûr la Judée n'était pas encore une province romaine au sens technique du terme, mais elle dépendait toujours étroitement de Rome, plus précisément d'Antoine, pour les décisions importantes et les arbitrages éventuels.

En d'autres termes, les vieilles disputes entre Juifs vont se donner libre cours. Une fois Antoine installé en Syrie « pour en être le protecteur et le seigneur », des Juifs se plaignirent à lui à plusieurs reprises d'Hérode et de son frère Phasaël, les accusant de retenir pour eux les rentes et les produits de la terre, grugeant ainsi Hyrcan, pourtant seigneur officiel de Judée. Jean mentionne explicitement deux cas : en 25 a.C.n. (p. 269) et en 23 a.C.n. (p. 270-271). Mais « les somptueux présents d'Hérode eurent plus de poids que les récriminations des délégués judéens » (M. Hadas-Lebel, Rome, 2009, p. 38), d'autant plus qu'Antoine avait gardé un bon souvenir de leur père Antipater, qui avait jadis combattu à ses côtés. Les deux frères ne furent pas inquiétés, bien au contraire. Et Jean d'écrire : « Alors Antoine éleva au rang de princes Hérode et son frère, qui jusque là n’étaient que prévôts : Hérode fut prince de Galilée et Phasaël prince de Judée. » Prévôts, prince, le vocabulaire est médiéval, comme souvent chez Jean (cfr supra). En réalité, le titre officiel porté par les deux frères est celui de tétrarque, et la nomination date de 41 avant notre ère et non de 23 a.C.n., comme l'écrit Jean. La chronologie du Myreur, ici comme souvent, ne correspond pas à notre comput.

Et il y surtout l'affaire parthe, dans laquelle la Judée se trouve entraînée, en grande partie à cause de ses querelles dynastiques. Nous tentons ici de présenter aussi clairement que possible cette question plutôt compliquée, en nous aidant du texte de Flavius Josèphe (Antiquités judaïques, XIV, 13, 3-10) et de l'exposé de M. Hadas-Lebel (Rome, 2009, p. 38-39).

Depuis un certain nombre d'années, Rome devait s'opposer en Orient aux prétentions des Parthes qui tentaient de reconstituer l'ancien empire perse en s'étendant vers la Méditerranée. On se souviendra de Crassus (p. 217ss), qui fut une victime de ces Parthes, appelés Turcs par Jean. On se souviendra aussi d'Antigone Mattathias, le dernier fils survivant du roi Aristobule II, qui n'avait de cesse de renverser Hyrcan II, son oncle, et de récupérer sa place. Le hasard voulut que ces Parthes s'intégèrent fort bien dans le plan d'Antigone.

Nous sommes en 40 avant notre ère. Pacoros, fils du roi, et Barzapharnès, satrape des Parthes, ont traversé l'Euphrate. Dans leur marche vers l'ouest, ils se sont ralliés un certain nombre de roitelets locaux qui n'étaient pas de taille à leur résister, dont celui de l'Abilène, un petit royaume ituréen, dont le roi, Lysanias, avait succédé à son père Ptolémée et était, selon Jean (cfr p. 224), un parent lointain d'Antigone. Quoi qu'il en soit, Antigone rencontra les Parthes et « leur promit mille talents et cinq cents femmes s'ils enlevaient le pouvoir à Hyrcan pour le lui donner, à lui Antigone, et s'ils tuaient Hérode ».

Aux hommes levés par Antigone lui-même se joignit alors une importante troupe parthe dirigée par Pacoros. Ces forces entrèrent en Judée. Une partie du pays prit le parti d'Antigone et, autour de Jérusalem même, « chaque jour avaient lieu des escarmouches » (Flavius) entre les partisans d'Antigone et ceux d'Hyrcan, de Phasaël et d'Hérode. Mais une importante fête religieuse vient perturber la défense de la ville et les partisans d'Antigone en profitent pour prendre le contrôle de Jérusalem, tandis que Hyrcan, Hérode et Phasaël se sont solidement retranchés dans des endroits fortifiés. Jusqu'alors, les Parthes étaient restés relativement à l'écart, laissant les Juifs se battre entre eux et attendant l'issue des événements. C'est alors, toujours selon Flavius, que « Pacoros marcha alors sur la ville avec quelques cavaliers à la demande d'Antigone, sous prétexte d'apaiser le soulèvement, en réalité pour aider Antigone à s'emparer du pouvoir. »

Pour débloquer la situation, Pacoros invite Hyrcan, Hérode et Phasaël à se rendre en Galilée auprès de Barzapharnès, chargé d'arbitrer le conflit entre les deux prétendants au trône. Hérode, qui y a pressenti un piège, refuse cette solution, tandis que les gens d'Hyrcan et de Phasaël l'acceptent.

Ces deux derniers se rendent vite compte qu'ils sont en fait prisonniers. Phasaël, se voyant perdu, préfère se donner la mort en se brisant la tête contre une pierre. Quant à Hyrcan, Antigone obtient qu'une de ses oreilles soit coupée, ce qui l'exclut définitivement du sacerdoce suprême, car un homme ne jouissant pas de son intégralité physique était disqualifié pour cette fonction. Les adversaires d'Antigone font courir le bruit qu'il lui aurait lui-même arraché l'oreille avec les dents. Hyrcan est ensuite envoyé chez les Parthes dans la partie nord de la Mésopotamie, où il est bien accueilli par les communautés juives de la région. De son côté Hérode sort de Jérusalem avec neuf mille de ses partisans, emmenant avec lui ses proches et les mettant en sûreté dans la forteresse de Massada. Il s'en sort militairement parlant, mais Jérusalem et la Judée sont désormais passées aux mains d'Antigone. Pour sa part, « Antigone s'apprêtait [...] à reprendre la tradition hasmonéenne de cumul des fonctions, royale et sacerdotale. Il avait entièrement misé sur le soutien parthe, causant les pires inquiétudes à Rome, dont les ennemis avaient réussi à atteindre les bords méditerranéens » (M. Hadas-Lebel, Rome, p. 38).

Antigone n'étant pas en mesure d'offrir aux Parthes le butin promis, « ceux-ci se rabattent sur le pillage de Jérusalem et de ses environs  (M. Hadas-Lebel). Antigone Mattathias occupa le trône de Judée, de 40 à 37 avant notre ère. Hérode dut mettre trois ans pour retrouver des appuis, récupérer sa famille dans la forteresse de Massada et reconquérir le royaume de Judée.

Jean s'intéresse aussi à la remise en selle progressive d'Hérode qui semblait avoir tout perdu. Hérode se rend d'abord en Arabie chez le roi des Nabatéens qui lui était très attaché, mais il n'en obtient rien. Il décide alors d'aller à Rome chercher aide et secours. Il y arrive après un nauffrage qui le retarde et trouve de la compréhension et de l'appui auprès d'Antoine, triumvir depuis 43 avant notre ère avec Octave et Lépide. « Nul mieux qu'Antoine n'était au courant des affaires d'Orient où il avait combattu et séjourné. Il sut sensibiliser le Sénat à la menace que faisait peser sur l'Empire un Antigone allié des Parthes, et n'eut guère de peine à apporter les preuves de la loyauté d'Hérode à la cause romaine. La récompense devait être à la hauteur des services rendus » (M. Hadas-Lebel, Rome, p. 39).

À Rome, Hérode, appuyé par Antoine, est désigné roi de Judée par Auguste, à la fin de l'année 40 avant notre ère, et non en 21 a.C.n. Hérode reçoit même d'Antoine, pour l'aider à reconquérir son royaume, des troupes romaines, qui se révélèrent peu sûres, leurs commandants ayant été corrompus par l'argent d'Antigone. Quoi qu'il en soit, une fois débarqué, Hérode s'empare de Jaffa, va délivrer sa famille toujours à Massada et marche vers Jérusalem. Il se retrouve néanmoins seul pour en faire le siège, car les troupes romaines l'abandonnent pour retourner en Galilée. Incapable d'attaquer Jérusalem tout seul, Hérode nettoie le pays des brigands qui l'avaient envahi et qui dévalisaient la population, puis décide de retourner à Rome pour se plaindre des troupes romaines qui ne l'ont pas aidé. On trouvera la suite à la p. 278.

De tous ces événements de Judée, Jean livre un récit assez détaillé, encore que sa chronologie et sa présentation ne correspondent pas toujours à la réalité des événements. Il a en particulier tendance à sélectionner les événements et à modifier, volontairement ou non, ceux qu'il retient. Pour une analyse approfondie ‒ que nous ne pouvons envisager ici ‒ , on aura intérêt à comparer étroitement le récit du Myreur avec ceux de Flavius Josèphe (Antiquités judaïques et Guerre des Juifs) et à consulter les ouvrages modernes. Celui de M. Hadas-Lebel (Rome, le Judée et les Juifs, Paris, 2009) par exemple fournit une importante bibliographie.

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Sommaire [texte]

Octavien-César soumet l'Égypte - L'insigne du pouvoir impérial et le titre d'Auguste - Tempête dévastatrice en Allemagne et troubles entre Trèves et ses tributaires - Alliance entre Trèves et Reims (28-27a.C.n.)

Digression : Les Gaulois et leur expansion en Grèce et en Italie sous Belgis - Les trois grandes divisions de la Gaule : Gaule Belgique - Gaule Celtique - Aquitaine et Espagne - Fleuves de Gaule

Divers : Succession en Flandre - En Judée, naissance de fils d'Hérode : Aristobule de Mariamne et Archélaüs de Malthacé - Partage du monde entre Octave et Antoine - Antoine arbitre les différends en Judée dans un sens favorable à Hérode - À Naples, Virgile se méprend sur le message lui annonçant sa mort - Hérode a des jumeaux de son épouse Cléopâtre : les futurs Hérode Antipas et Philippe Hérode - Antoine épouse Cléopâtre, reine d'Égypte - Virgile, frappé d'insolation, comprend que sa mort est proche et renonce à la magie (27-24 a.C.n.)

* Malgré les plaintes de notables Juifs, Antoine nomme Hérode prince de Galilée et son frère Phasaël prince de Judée - Prétendant au pouvoir, Antigone, fils d'Aristobule II et donc neveu d'Hyrcan II, s'allie à des Parthes (Turcs), commandés par Pacoros - Les partisans d'Antigone finissent par occuper Jérusalem, sauf certains endroits restés aux mains d'Hyrcan II, d'Hérode et de Phasaël - Les Parthes proposent aux adversaires l'arbitrage de leur roi - Hyrcan II et Phasaël, contrairement à Hérode, acceptent d'accompagner les Parthes - C'était un piège - Ils sont tous les deux prisonniers de Pacoros et livrés à Antigone - Phasaël se suicide et Hyrcan II est mutilé, ce qui l'empêche d'être grand-prêtre - Hérode réussit à échapper à Antigone et aux Parthes et à mettre sa famille à l'abri à Massada - N'obtenant pas l'aide des Nabatéens, il décide de partir pour Rome, mais est retenu à Rhodes par un naufrage - Antigone Mattathias est devenu roi de Judée (23/22 a.C.n.)

Divers : Franco, duc de Gaule - Retour de Sédros à Tongres, accompagné d'Octave et de sa mère Hélène - Les dénominations de Tongres - Mort et succession de Sédros - Retour d'Octave à Rome (22 a.C.n.)

Hérode est accueilli à Rome par Antoine et désigné roi de Judée par le Sénat romain - Il revient en Judée pour prendre possession de son royaume, accompagné de deux « princes » romains (dont Silon) et de troupes - Abandonné par les Romains censés l'aider, Hérode assiège seul Jérusalem - Ne pouvant emporter la ville, il purge le pays de brigands dangereux, puis retourne à Rome se plaindre des soldats mis à sa disposition par Antoine (21 a.C.n.)

* Digression : Lotringe, cinquième roi de Tongres, son duché et son château (20 a.C.n.)

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Octavien-César soumet l'Égypte - L'insigne du pouvoir impérial et le titre d'Auguste - Tempête dévastatrice en Allemagne et troubles entre Trèves et ses tributaires - Alliance entre Trèves et Reims (28-27a.C.n.)

 

[De Octovian et Sedros] Sour l'an Vc et LXI deseurdit, assemblat li emperere Octovian Cesar [p. 265] grans gens et montat sus mere, et ly roy Sedros de Tongre awec ly, et laisat garde en sa terre Anthone son escaniscal par teile convent se ilh le gardoit bien, ilh ly donroit à sa revenue une partie de son empire, mains ilh ne porteroit point de coronne. Puis soy partit Octovian, si arivat en Egypte, et conquist tout la terre ; si ochist Sedros le roy Ptholomes.

[Octavien et Sédros] En l’an 561 [28 a.C.n.] signalé ci-dessus, l’empereur Octavien César [p. 265] rassembla une grande armée et prit la mer, accompagné du roi Sédros de Tongres ; il confia la garde de son pays à Antoine son sénéchal, disant que s’il s’acquittait bien de sa charge, il lui donnerait à son retour une part de son empire, sans toutefois le droit de porter la couronne. Puis Octavien partit pour l'Égypte, qu'il conquit entièrement. Sédros tua le roi Ptolémée.

[Chi defalirent les Ptholomes d’Egypte] Adont defalirent les Ptholomes en Egypte, qui avoient regneit depuis Alixandre le roy ; et fut la terre d'Egypte mise en la subjection des Romans ; et y mist li emperere unc balhier. Et fut cel batalhe le promier jour d'awoust, l’an deseurdit. Adont choisirent les Romans qu'ilhs astoient saingnours de tout le monde, et qu'ilh n'avoit jusqu'en Orient, en Occident, en Medis et en Septentrion, nation qui ne fuist subgis à eaux. Et avoit fait leur emperere cel derain conqueste mult grant, et toudis en acrossant.

[Disparition des Ptolémées en Égypte] Alors les Ptolémées disparurent en Égypte, eux qui y avaient régné depuis le roi Alexandre. La terre d’Égypte tomba sous la domination des Romains et l’empereur y plaça un bailli. La bataille eut lieu le premier jour d’août, de l’an cité ci-dessus. Les Romains réalisèrent alors qu’ils étaient les maîtres du monde entier, et que, de l'Orient à l'Occident, du Sud au Nord, toutes les nations leur étaient soumises. Leur empereur avait fait cette dernière conquête très importante : il s’accroissait toujours.

[p. 265] [Porquoy l’emperere porte le monde] Si ordinarent que li emperere porteroit publement le monarchie, qui est le forme del monde ; si le portat sens crois ; et maintenant y porte sus ly emperere I crois, et que dedont en avant tous les empereres le portassent communement que nient ne faisoient devant.

[p. 265] [Pourquoi l’empereur porte le monde] Il fut décidé que l’empereur porterait publiquement l’insigne de la monarchie, qui est le globe terrestre ; il le portait sans croix. Aujourd'hui l’empereur porte une croix au-dessus de cet insigne. Les empereurs doivent toujours la porter, ce qu'ils ne faisaient pas auparavant.

[Porquoy ons apelle l’emperere Awoust] Et por la grant victoire qu'ilh avoit oyut le promier jour d'awoust, ly et tous les empereres apres luy auroient à nom Awoust, dedont en avant, awec leurs propres noms ; et Awoust vault aultant que en croisant, sique Octaviain s'appellat enssi en ses lettres dedont en avant : « Octoviain, emperere romains toudis en croisant, » et les aultres apres enssi ; mains les cristyens soy escrient : « Karle le promier, ou ly secon, ou li thier, par le debonnaires faveur divine, emperere Romains toudis en croisant. » Et enssi fut-ilh adont ordineis, et encour tient-ons chu à present.

[Pourquoi on appelle l’empereur Auguste] Suite à la grande victoire qu’il avait remportée le premier jour d’août, lui et tous ses successeurs porteraient dorénavant le nom d’Auguste, accolé à leurs propres noms. Août veut dire « en croissant », si bien que dorénavant Octave se désigna dans ses lettres : « Octave, empereur romain, toujours s’accroissant ». Ses successeurs le firent aussi. Les chrétiens eux proclament : « Charles premier ou second ou troisième empereur romain toujours croissant, par la généreuse faveur divine ». C'est ce qui fut alors prescrit, et c'est encore ce qui se pratique aujourd'hui.

[p. 265] [De grant tempeste et oraige - De tregut de Trive] Sour l'an Vc et LXII, en mois de june, chaiit teile noise et teil tempeste de chiel, qu'ilh at tout destruit les vingnes et les bleis en parties d'Allemangnez, car ilh chaiit pieres oussi grosses que tiestes d'hommes et plus. Et chaioient oussi espesses que plove à Basele, Strasborch, Maienche, Warmase et Colongne que ons nomoit adont Agrippina, et furent bien XIIm mansons tempesteez et confondue, dont le peuple des V citeis dient [p. 266] et croient fermement que chu ont fait les dieux de Trive, portant qu'ilhs avoient refuseit de payer par l'espasse de XXX ans le tregut qu'ilh devoient à cheaux de Trive ; si qu'ilh furent à chu conselhiiés qu'ilhs le veulhent payer d'ors en avant, et satisfaire del tregut de XXX ans devant, et enssi le fisent. Cheaux de Trive, quant ilhs furent payet de XXX ans, si ont oyut grant avoir, et de cel avoir ont intablie une ymage de marbre, c'est à entendre une colompne, et sus cel columpne ont esleveit d'or le ymage de leur dieu Jupiter, dois piés de long, qui tenoit en sa main une brievelet, où avoit ches parolles chi en latin : Jovi vindici Treverorum, ex censu quinque urbium per tria decennia denegato, sed celesti igne et terrore extorta, placabile holocaustum ; ch'est-à-dire en franchois : « Jupiter, le dieu de Trive, par les cens de V citeis qu'ilhs astoient demoreis et targiiés de paiier par XXX ans, at vancut les V citeis de feu de chiel, et del terreur del arsure ont fait chesti plaisant sacrifice. » Et puis ont fait entour feu et toute poudre de espesses odorantes, dont la fumée montoit al ymage de Jupiter.

[p. 265] [Grande tempête et orage - Le tribut de Trèves] En l’an 562 [27 a.C.n.], en juin, du ciel s’abattirent un bruit si fort et une tempête si violente que toutes les vignes et une partie des moissons furent détruites en Allemagne. Des grêlons tombaient aussi gros ou plus gros que des têtes humaines. Des pluies très drues tombèrent aussi à Bâle, Strasbourg, Mayence, Worms et Cologne, nommée alors Agrippina. Dix mille maisons au moins furent touchées et détruites par la tempête. Les habitants de ces cinq cités [p. 266] dirent, en le croyant fermement, que ce désastre était dû aux divinités de Trèves parce que pendant trente ans ils avaient refusé de payer le tribut qu’ils devaient aux Trévires. On leur conseilla donc de payer dorénavant et de s’acquitter du tribut des trente années passées, ce qu’ils firent (cfr p. 227). Quand ils eurent perçu ce tribut de trente ans, les Trévires disposèrent de ressources importantes et, avec cette somme, érigèrent une statue de marbre, c'est-à-dire une colonne, surmontée d’une statue de leur dieu Jupiter, haute de deux pieds, tenant en sa main une inscription latine : « À Jupiter vengeur des Trévires, avec le cens de cinq cités qui refusèrent de le payer pendant trois décennies, mais qu'obtint le feu du ciel et la peur, ce sacrifice propitiatoire », ce qui se traduit en français : « Jupiter, le dieu de Trèves, à cause des impôts que les cinq cités avaient omis et tardé à payer pendant trente ans, a vaincu ces dernières par le feu du ciel et la crainte de l'incendie. (À lui) cette bonne offrande. » Et ils brûlèrent des aromates dont la fumée montait vers la statue de Jupiter.

 [Dez alianchez entre Trive et Rains] Item, en cel an meismes, confirmarent cheaux de Trives et cheaux de Rains en Champangne, une mult grant amisteit entre eaux ensemble, par le volenteit de leurs dois roys, que ly uns ne faisoit riens sans l'autre. Et fisent cheaux de Rains une porte à Rains, qu'ilh apellarent par son nom Trive, car cheaux de Trive et de Rains sont les principauls en Galle batelhiiers ou Belgique.

 [Alliances entre Trèves et Reims] En cette même année, les habitants de Trèves et de Reims en Champagne scellèrent ensemble une grande amitié, par la volonté de leurs deux rois, qui ne faisaient rien l’un sans l’autre. Les Rémois construisirent une porte à Reims, à qui ils donnèrent le nom de « Porte de Trèves ». Les Rémois et les Trévires sont les principaux guerriers en Gaule Belgique.

 

Digression : Les Gaulois et leur expansion en Grèce et en Italie sous Belgis - Les trois grandes divisions de la Gaule : Gaule Belgique - Gaule Celtique - Aquitaine et Espagne - Fleuves de Gaule

 

 [p. 266] [La declaration dez pays de Galle] Nos vos vorons declareir de Galle que ch'este, et quant en est, et où ilh siet solonc Ysidorus et les aultres ; et tot promier est Belgique-Galle, qui est enssi appellée apres unc roy de Trive qui astoit nomeis Belgique, – et portant dist-ons Trieve Belgique –, awec lequeile Belgique mult grans gens s'en allat des Galliciiens. Et passat li roy Belgique en Gresse à son temps qu'ilh regnoit ; si conquestat tant de terre, où ilhs habitarent, dont dedens brief temps fut-ilh bien IIIc milhes hommes, desqueiles por querir noveais sieges ilhs de chesti peuple une partie envoiarent en Ytaile, qui encachat [p. 267] les Tuscains fours de Tuscaine, et gangnarent les citeis de Melant, Arimine, Com, Bresse, Verrone, Pergamum, Trente et Vincente, et les pupliat toutes de ses gens.

[p. 266] [Présentation des pays de Gaule] Nous voulons expliquer ce qu’est la Gaule, combien de parties elle comporte et où elle se situe, selon Isidore et les autres. Il y a d'abord la Gaule Belgique, ainsi appelée d’après un roi de Trèves, nommé Belgis (c’est pourquoi on dit Trèves Belgique). Un très grand nombre de Gaulois partirent avec ce Belgis, qui, durant son règne, passa en Grèce, et conquit beaucoup de territoires. Ils s'y installèrent et, en très peu de temps, ils furent bien trois cent mille. Pour trouver de nouveaux lieux de séjour, ils envoyèrent une partie de cette population en Italie. Ils chassèrent [p. 267] les Toscans de Toscane et occupèrent les cités de Milan, Rimini, Côme, Brescia, Vérone, Bergame, Trente et Vicence, toutes villes que Belgis peupla avec ses gens.

[Des trois Galles] Chest Galle est devisée en trois, assçavoir : Comate, Brachate et Togata. Item, chi apres s'ensiet chu que Ysidorus en dist, car Galle en Grigois chu est à dire en franchois, lait ; portant que lait est blans, si est appelleis Galle ; car les montangnes et les riguere de chiel à cel partie excluit l'ardeur de soleal, affin que les blanqueurs des corps ne prendent point de coleur. Et les montangnes de Mongni defende vers orient, et à soleal couchant vers occident ; incluit à medis les desrubanz des roches, à septentrion li flus del Riens et de Germaine enssy.

[Les trois Gaules] La Gaule est divisée en trois parties : la Comata (chevelue), la Bracata (portant des braies), et la Togata (portant la toge). Voici ce qu’en dit Isidore : « Galle » en grec signifie « lait » en français. Comme le lait est blanc, le pays est appelé « Galle » ; car les montagnes et les rigueurs du climat dans cette partie du monde excluent l’ardeur du soleil, et les corps blancs ne prennent point de couleur. Le pays est défendu à l'Est et à l'Ouest par les montagnes de Mongni ; il est limité au Sud par des précipices de rochers et au Nord par les fleuves du Rhin et la Germanie.

[De Belgique] [Belgis] Si en est li commenchement Belgique et li fin Aquitaine, la region est unc wasons de bonne viande et convenable aux corrageux. Si est des fluis et des fontaines grant planteit, et espandues de dois grandes riviers et fluis, ly Riens et le Roine. Belgis est une citeit en Galle, à quoy Belgique est dite, enssi com dit est par deseur ; ch'est Trieve. Et nom-ons chu qu'ilh at dechà les montangnes, Cisalpina ou entour les montangnes ; et outre les montangnes, nom-ons Transalpes. Reatine, qui est deleis le Riens, nom-ons Reatine apres le Rien, et Aquitaine por les crombes aighes et fluis, sicom le Loire, est enssi apellée, enssi que dist Ysidorus en livre XIIIIe, à Ve capitle. Et fait encor distinction des Galles ; ilh dist qu'ilh en est trois par les hystorioghaphiens descriptes, desqueils ly une est Belgique et les aultres Celtique et Aquitaine.

[Belgique - Belgis] Là où commence la Belgique et où finit l’Aquitaine, la région est couverte de pâturages et faite pour des hommes courageux. On y trouve de nombreux cours d’eaux et des sources, s’écoulant dans le Rhin et le Rhône, deux grands fleuves. Belgis est une cité de Gaule, d'où vient le nom de la Belgique, comme dit ci-dessus ; c'est Trèves. La partie en-deçà des montagnes est appelée Cisalpine ou près des montagnes, et la partie au-delà des montagnes est appelée Transalpine. La région voisine du Rhin est nommée Rhénane, d’après le Rhin, et l’Aquitaine doit son nom au caractère sinueux de ses eaux et de ses fleuves, comme la Loire, selon ce que dit Isidore en son livre 14, 5. Cet auteur distingue aussi parmi les Gaules, selon les descriptions des historiographes : la Gaule Belgique, la Gaule Celtique et la Gaule Aquitaine.

[p. 267] [De Galle Belgique] Galle Belgique at vers orient le fluis del Riens et Germaine, et à Europe les montangnes, et à medis le provinche de Nerbonnes, et à soleal cuchant le provinche de Lyon. Tout chu qui est del Rien jusques à le Loire est tout Belgique, en queiles sont toutes ches provinches : promiers les quattres provinches qui sont de Lyon, dont ly promier et ly chief est Lyon ; del seconde provinche est li chief Soyson, del tirche Ruanz en Nomendie, et [p. 268] ly quars est Thours sus Loire. Et sont encors en Belgique-Galle dois provinches que ons apelle Trieve et Rains. Item sont en Germaine dois aultres que Julius Cesaire nommat enssi, transportant le peuple à Germaine le Grant, qui siet oultre le Rien, et les fist là habiteir ; desqueils dois provinches Maienche est ly une, et Agrippine l'aultre. Et ches VIII provinches tient Galle Belgique.

[p. 267] [La Gaule Belgique] La Gaule Belgique est bornée à l’Est par le Rhin et la Germanie ainsi que par les montagnes de l'Europe, au Sud par la province de Narbonne et au couchant par la province de Lyon. Tout le territoire compris entre le Rhin et la Loire constitue la Belgique, où se trouvent les provinces suivantes : d’abord, quatre provinces : la première est celle de Lyon, dont Lyon est la capitale ; la capitale de la seconde est Soissons, celle de la troisième est Rouen, en Normandie, et [p. 268] celle de la quatrième est Tours, sur la Loire. De plus, la Gaule Belgique compte les deux provinces, de Trèves et de Reims. Deux autres provinces en Germanie, désignées par Jules César qui déplaça la population vers la grande Germanie, au-delà du Rhin, pour la peupler ; l'une de ces deux provinces est Mayence, et l’autre Cologne. Ces huit provinces constituent la Gaule Belgique.

[De Galle-Celtique] Et l'autre Galle, qui at nom Celtique, est tout chu qui est à la nascenche del Royne le fluit, jusques à la mere Mediteranie est compris ; en laqueile sont ches provinches : Besenchon, Torenche, Viane sus le Roine, Nerbonne le seconde, et Nerbonne le promier, Ays en Provenche et Ebredunensis ; ches VII provinches sont en Galle Celtique.

[La Gaule Celtique] L’autre Gaule, nommée Gaule Celtique, comprend tout le territoire qui s'étend de la source du Rhône jusqu'à la mer Méditerranée. On trouve dans cette partie les provinces de Besançon, d'Orange, de Vienne sur le Rhône, de Narbonne la Seconde et de Narbonne la Première, d'Aix-en-Provence et d'Embrun. Ces sept provinces constituent la Gaule Celtique.

[De Galle-Aquitaine - De Espangne] En la tirche Galle, qui est nommée Acquitaine, que le Loire une tresgrant partie de septentrion en orient circuit, y at trois provinches ; desqueiles la promier est Bituricensis, la seconde Bordeais, li this Populunne, que ons nom altrement Annytana en Espangne, de quoy Tytus Lyvus en son XXIIe livre parolle. Ancor at Acquitaine Tureman et Tholouse, et chu qui est entre le fluis de Loire et Geronde et le montangne Pireneez que Galle Espangnois est nommée, et jusques à la mere Occeane, est tout de pays d'Acquitaine. Mains ilh est bien veriteit que, entres les parties d'Acquitaine, est une aultre Acquitaine qui à fluis de Loire et Geronde et le mere se circuit, chu dient alcuns ; mains solonc Ysodorum et les anchiens, Narbonnes et Bituricenses astoit subgit à ly, si queilh contient ens decreis IX°. Mains Carle mist la ducheit de Nerbonnes oultre Geronde, jusqu'à le Roine qui est de provinche de Nerbonne.

[La Gaule Aquitaine - L’Espagne] La troisième Gaule, nommée Aquitaine, est bornée en grande partie par la Loire au Nord et à l’Est. Elle compte trois provinces : la première est le Berry, la seconde le Bordelais, la troisième la Novempopulanie, qui porte en Espagne un autre nom, Annytana. C'est ce dont parle Tite-Live dans son livre vingt-deuxième. L'Aquitaine comprend aussi Tourmalet et Toulouse, ainsi que la région entre la Loire et la Gironde et les montagnes des Pyrénées jusqu’à la mer Océane. C'est la Gaule Espagnole qui fait partie de l’Aquitaine. Mais il est vrai que, parmi les divisions de l’Aquitaine, il en est une autre, selon certains, située entre la Loire, la Gironde et la mer ; mais selon Isidore et les Anciens, Narbonne et les Bituriges lui étaient soumis, comme l'atteste la neuvième décrétale. Charle(magne) étendit le duché de Narbonne au-delà de la Gironde, jusqu’au Rhône, qui fait partie de la province de Narbonne.

[Des fluis de Galle] Et les plus grans fluis de Galle sont le Riens et ses termes : la Muselle, Mouse, Sayne, Loire, Geronde et le Roine. Galle [p. 269] de Lyon jusques en Acquitaine est Roine et Loire. A Belgique, Matroille et le Saine entre Meuse et le Rien est Austrie, mains de Mouse à le Loire est Neustrie.

[Les fleuves de Gaule] Les plus grands fleuves de Gaule sont le Rhin et ceux de son bassin : la Moselle, la Meuse, la Seine, la Loire, la Gironde et le Rhône. En Gaule, [p. 269] de Lyon jusqu’en Aquitaine, il y a le Rhône et la Loire ; en Belgique, la Marne et la Seine. L'Austrasie est entre la Meuse et le Rhin, et la Neustrie entre la Meuse et la Loire.

 

Succession en Flandre - En Judée, naissance de fils d'Hérode : Aristobule, de Mariamne et Archélaüs, de Malthacé - Partage du monde entre Octave et Antoine - Antoine arbitre les différends en Judée dans un sens favorable à Hérode - À Naples, Virgile se méprend sur le message lui annonçant sa mort - Hérode a des jumeaux de son épouse Cléopâtre : les futurs Hérode Antipas et Philippe Hérode - Antoine épouse Cléopâtre, reine d'Égypte - Virgile, frappé d'insolation, comprend que sa mort est proche et renonce à la magie - (27/24 a.C.n.)

 

[p. 269] [Del IXe conte de Flandre] En revenant à nostre mateire, puisque nos avons declareit de Galle queile ilh est et quantes, si vos disons que cel an meismes Vc et LXII morut Floveus, le VIIIe conte de Flandre ; si regnat apres son fis Flamens XXII ans.

[p. 269] [Le neuvième comte de Flandre] En revenant à notre sujet, après avoir parlé de la Gaule et ses divisions, nous vous dirons qu'en 562 [27 a.C.n.] mourut Floveus, huitième comte de Flandre. Son fils Flamens régna après lui durant vingt-deux ans.

En cel an meismes oit Herode I fis de Mariane, sa seconde femme, qui fut nommeit Aristoble.

En cette année [27 a.C.n.], Hérode eut, de Mariamne sa seconde épouse, un fils nommé Aristobule.

[Division des regions entre Octoviain et Anthone] En cel an fut fait la division de la promesse que Octoviain avoit fait à Anthone, son senescal, en teile malliere que Octaviain tenroit Ytaile, Galle et Espangne, et Anthone tenroit Ponton, Aisie et Orient.

[Partage des régions entre Octavien et Antoine] Cette année se réalisa le partage promis par Octavien à Antoine, son sénéchal. Il stipulait que Octavien posséderait l’Italie, la Gaule et l’Espagne, et qu’Antoine aurait la gouvernance du Pont, de l’Asie et de l’Orient.

Item, l'an Vc et LXIII, prist Herode la IIIe femme qui fut nomée Machate, qui fut mult grant damme ; si en oit en cel an meismes I fis qui fut nommeis Archelaus.

En 563 [26 a.C.n.], Hérode prit sa troisième femme, qui s’appelait Malthacé [la Samaritaine], une très grande dame. La même année, il eut d'elle un fils nommé Archélaüs.

[p. 269] En cel an meismes fut Cassiens ochis en Judée par alconnes gens qui le haioient ; mains quant Hircain le soit, si envoiat à Romme porteir la novelle, et impetreir à l'emperere Augustus l'amisteit des Romans.

[p. 269] En cette même année [26 a.C.n.], en Judée, Cassius fut tué par certaines personnes qui le haïssaient. Quand Hyrcan le sut, il fit parvenir la nouvelle à Rome et demanda à l’empereur Auguste l’amitié des Romains.

[De Herode et Fassians son frere] Item, l'an Vc et LXIIII, fut envoyet Anthone en Surie por la terre à gardeir, et por avoir la saingnorie. Adont vinrent à Anthone les maistres des Juys ; si accusarent Herode et Fassians son frere, en disant que entre eaux dois rechivoient les rentes et les issues de la terre, et Hircain qui en avoit esteit et astoit sires n'en avoit que le nom, et cheauz en avoient tous les profis. Et quant Herode soit chu, se vient à Anthone, se li donnat mult grant avoir, et ly priat qu'ilh ait merchi de ly por l'amour de Antipater son pere, cuy ilh avoit tant ameit ; chis le fist, et remist Herode et son frere en pais.

[Hérode et son frère Phasaël] En 564 [25 a.C.n.], Antoine fut envoyé en Syrie pour en être le protecteur et le seigneur. Les chefs des Juifs se présentèrent alors chez Antoine, accusant Hérode et son frère Phasaël de percevoir à eux deux les rentes et les produits de la terre, tandis que Hyrcan, qui avait été désigné et était le seigneur de Judée, ne l’était que de nom, et qu'eux en retiraient tous les profits. Quand Hérode apprit cela, il alla trouver Antoine, lui donna une grosse somme d’argent et implora sa pitié pour l'amour de son père Antipater, à qui il avait été si attaché. Antoine accepta et renvoya en paix Hérode et son frère.

[p. 269] [Comment Virgile soit son trespas] [Virgile fut dechus par la response de la tieste]Item, cel an meismes s'avisat Virgile que ilh n'astoit nient vies, et si astoit par l'estude continuel et le travalhe de labure brisiés à mervelhe ; si voult savoir quant ilh morat. Si est venus à sa tieste deseurdit, qui li rendit response de tout chu qu'ilh ly demandoit. Et ilh ly demandat tout erant queile temps ilh poroit encors vivre ; et ilh ly respondit une chouse, de laqueile ilh dechuite Virgile, car ilh n'entendit mie la glouse, de la parolle qu'ilh dest : elle dest que Virgile dedont en avant gardast sa tieste de solea. Quant Virgile l'oiit, si dest que jamais sa tieste ne venroit à soleal, [p. 270] et ilh entendit la tieste qui li donnoit responsion ; car s'ilh entendist sa propre tieste, ilh sawist bien entendre et prenostigier le fait.

[p. 269] [Virgile apprend son trépas] [Virgile se trompe sur la réponse de la tête] Cette même année 564 [25 a.C.n.], Virgile s’avisa que, sans être vieux, il était fortement usé par sa vie d'étude et de travail intense. Voulant savoir quand il mourrait, il s'adressa à la tête, décrite plus haut, qui répondait à tout ce qu’il lui demandait. Sans attendre, il lui demanda combien de temps il pourrait vivre encore. La tête lui fit une réponse sur laquelle il se méprit, car il n'en comprit pas du tout la signification. La tête avait dit que Virgile dorénavant devait se garder d’exposer sa tête au soleil. Quand il entendit cela, Virgile dit que jamais il n'exposerait sa tête au soleil, [p. 270] comprenant qu'il s'agissait de « la tête qui lui répondait ». S’il avait compris qu'il s'agissait de sa propre tête, il aurait bien interprété le texte et prévu ce qui arriva.

[p. 270] [Des femmes Herode] Item, l'an Vc LXV, prist Herode pluseurs femmes awec les siene tant qu'ilh en oit IX, entres lesqueiles ilh oit une qui fut nomée Cleopatra ; de laqueil Cleopatre ilh oit l'année apres, le XIIIIe jour d'avrilh, II fis à une fois, qui furent nomeis, ly I Herode Antipas, qui puis fist Johan-Baptist decoleir, et l'autre Philippe Herode, qui fist sains Jaque le gran decoleir.

[p. 270] [Les femmes d’Hérode] En l’an 565 [24 a.C.n.], Hérode prit plusieurs femmes, en plus des siennes ; il en eut neuf, dont l’une s'appelait Cléopâtre. De cette Cléopâtre, il eut, le 13 avril de l’année suivante, deux jumeaux : l’un, Hérode Antipas, qui fit plus tard décapiter Jean-Baptiste (p. 398), et l’autre, Philippe Hérode qui fit décapiter saint Jacques le Majeur (p. 359).

 Item, en cel an meismes laisat Anthone, qui tenoit Aisie et Orient, la soreur Octoviain l'emperere qu'ilh avoit à femme, et se prist à femme Cleopatre, la royne d'Egypte. De quoy ilh mut I grant guere entre Octoviain et Anthone ; mains ilh s'apassat I pou de temps, car Anthone reprist sa femme.

 Cette même année, Antoine, qui gouvernait l’Asie et l’Orient, quitta sa femme, la sœur de l’empereur Octavien pour épouser Cléopâtre, la reine d’Égypte. Cela fut à l'origine d'une guerre majeure entre Octavien et Antoine ; mais elle ne se prolongea que peu de temps, car Antoine reprit sa femme (?).

p. 270] [Virgile edifiat Ventoise]Item, en cel an meisme, edifiat Virgile I casteal qu'ilh nomat Ventoise, et I borch desous qui fut fais en III ans, et parfais l'an Vc et LXIX, car ilh ne fut mie fais par nigromanche, ains fut fais par ouvriers

[p. 270] [Virgile construit Ventoise] Cette même année [24 a.C.n.], Virgile édifia un château qu’il appela Ventoise et à ses pieds il installa un bourg, construit en trois ans et achevé en l’an 569, car il ne fut pas fait par magie mais par des ouvriers.

[Virgilhe fut malade] Si avient que Virgile, quant ilh fut parfais, en mois de julet que ly soleal est chaux, se ly enchafat son cerveal qui mult li grevat, car ilh en morut dedens II ans apres. Quant ilh sentit la maladie, se vient à sa tieste où li espir astoit ; se li demandat dont ly venoit la maladie, et s'ilh en poroit eistre aidiés.

[Virgile est malade] Quand le château fut terminé, en juillet, alors que le soleil était brûlant, Virgile souffrit d'une insolation au cerveau, qui l’accabla beaucoup, car il en mourut deux ans plus tard. Quand il se sentit malade, il alla à sa tête abritant l'esprit et lui demanda d’où venait sa maladie et si il pourrait en être guéri.

[p. 270] [Ilh fait Virgile morir, qui maul avoit gardeit son cervel - Oncques les espirs ne furent tant travelhit de nuls com de Virgile] Adont li respondit la tieste : « Tu es venus à ton finement : tu as maul gardeit ta tieste de soleal qui l'at si enchauffeit qu'ilh t'en covient morir ; car nature ne puet soffrir que tu nos puisse plus avant travelhier, car oncques ne fummes si travelhiés par homme. »

[p. 270] [Virgile, qui avait mal protégé son cerveau, doit mourir - Jamais les esprits ne furent autant mis au travail que par Virgile] Alors la tête répondit : « Tu es arrivé à la fin de ta vie : tu n’as pas protégé ta tête du soleil, qui l’a tellement échauffée qu’il te faut mourir. La nature refuse que tu puisses dorénavant te servir de nous, car jamais un humain ne nous a autant mis à l'épreuve. »

[Virgile conjurat tos les esperis et conbrisat la tieste] Quant Virgile l'entend, si fut mult corochiet ; si at fait I sort et at appelleit tous les espirs priveis qu’il avoit entreclous, quels qu’ils soient, en leu, en aire, en terre et el aighe, et leur at dit : « Sachiés que je vos loie, sicom larons qui tout aveis dechuit le monde, que jamais ne soiez travelhiet creatures d'ors en avant ; soiés tous loiés en abisme sens partir. » Puis prist le tieste et le conbrisat, et les autres enclosure, et li espirs en alarent.

[Virgile maudit tous les esprits et brisa la tête] Virgile l’entendit et fut très irrité. Par magie, il s'adressa aux esprits particuliers, quels qu'ils soient, qu’il avait enfermés dans le feu, l’air, la terre, l’eau, et leur dit : « Sachez que je vous enchaîne comme des brigands qui avez totalement trompé le monde ; dorénavant vous ne pourrez plus tourmenter des créatures ; soyez tous enchaînés en enfer, sans en sortir. » Puis il prit la tête et la brisa ainsi que ce qu'elle contenait. Les esprits s’en allèrent.

 

 Malgré les plaintes de notables Juifs, Antoine nomme Hérode prince de Galilée et son frère Phasaël prince de Judée - Prétendant au pouvoir en Judée, Antigone, fils d'Aristobule II et donc neveu d'Hyrcan II, s'allie à des Parthes (Turcs), commandés par Pacoros - Les partisans d'Antigone finissent par occuper Jérusalem, à part certains endroits restés aux mains d'Hyrcan II, d'Hérode et de Phasaël - Les Parthes proposent aux adversaires l'arbitrage de leur roi - Hyrcan II et Phasaël, contrairement à Hérode, se laissent abuser et acceptent d'accompagner les Parthes - C'était un piège - Ils sont tous les deux prisonniers de Pacoros et livrés à Antigone - Phasaël se suicide et Hyrcan II est mutilé, ce qui l'empêche d'être grand-prêtre - Hérode réussit à échapper à Antigone et aux Parthes et à mettre sa famille à l'abri à Massada - N'obtenant pas l'aide des Nabatéens, il décide de s'adresser à Rome, mais est retenu à Rhodes par un naufrage - Antigone Mattathias est devenu roi de Judée (23-22 a.C.n.)

 

[Des Juifs soy plaindent de d’Herode et Fassians] Item, l'an Vc et LXVI, en mois d'awost, astoit Anthone en Antyoche, et là astoit Hircain, Fasians et Herode, et grant partie de leurs Juys ; et là vinrent devant Anthone cent des plus grans des Juys de la terre, et soy plandirent à luy de [p. 271] Herode et de son frere Faisians, et les enculparent de faux blames. Et Anthone demandat à roy Hircain la veriteit, et aux aultres enssy ; si trovat que les Juys avoient tort, et les II freres furent troveis en loialteit, por quoy Anthone mult les enamat.

 [Des Juifs se plaignent d’Hérode et Phasaël] Au mois d’août de l’an 566 [23 a.C.n.], Antoine était à Antioche, où se trouvaient Hyrcan II (le roi de Judée), Phasaël et Hérode, ainsi que de nombreux Juifs ; cent Juifs parmi les plus notables se plaignirent à Antoine [p. 271] d’Hérode et de Phasaël son frère, les accusant faussement d’actes blâmables. Antoine s'informa auprès d'Hyrcan et d’autres personnes pour savoir si c'était vrai. Il estima que les Juifs avaient tort et que les deux frères étaient loyaux. Aussi Antoine les apprécia-t-il beaucoup.

[Herode fut prince de Galilée] Adont fist Anthone de Herode et de son frere prinches qui devant n'avoient esteit seulement que prevost : si fut Herode prinche de Galilée, et Faisians fut prinche de Judée. Et puis s'en ralat Anthone à Romme.

[Hérode devient prince de Galilée] Alors Antoine éleva au rang de princes Hérode et son frère, qui jusque là n’étaient que prévôts : Hérode fut prince de Galilée et Phasaël prince de Judée. Antoine retourna alors à Rome.

[p. 271] En cel an meismes avient que Palchorus, ly roy de Turquie, passat à grans gens le flus d'Effrates par forche ; si entrat en Libie, mains Lisasnes, qui puis fut prinche de Babylone, qui astoit li fis Alixandre, le fis Aristoble, frere à roy Hircain, astoit jà grans ; si alat encontre le roy de Turquie, et ly donnat Vc besans d'or, et awec chu li promist Vc pucelles, se ilh volait aidier Antygonus son oncle que ilh reuse la royalme de Judée, qui avoit esteit Aristoble son père.

[p. 271] En cette même année, Pacoros, roi des Parthes, avait traversé de force l’Euphrate avec une grande armée et pénétré en Libye (Afrique?), mais Lysanias, qui devint plus tard prince de Babylone, était le fils d'Alexandre, fils d’Aristobule II, frère du roi Hyrcan II, et déjà adulte à l'époque (cfr p. 224). Il prit contact avec le roi des Parthes, lui donna cinq cents besants d’or et lui promit en outre cinq cents vierges, s’il aidait son oncle Antigone à récupérer le royaume de Judée qui avait appartenu à son père Aristobule.

Adont prist li roy de Turquie l'avoir, et fist les convenanches ; et livrat à Antygonus Xm hommes, lesqueils ilh mynat en Judée. Si y fist mult de mals par la terre, et misent le siege entour Jherusalem ; mains Hircain qui en astoit sires gardoit le temple, et Herode gardoit le gait et les mures, et Faisians gardoit le palais le roy. Et cheaux de defours assailhoient fortement, et les aultres soy defendoient gentilment.

Le roi des Parthes accepta la somme et conclut les accords. Il confia à Antigone dix-mille hommes que celui-ci mena en Judée. Ils causèrent bien des maux à travers le pays et firent le siège de Jérusalem. Hyrcan, qui en était le seigneur, gardait le Temple, Hérode gardait les portes et les murailles, Phasaël gardait le palais royal. La pression des assaillants était très forte, mais les assiégés se défendaient vaillamment.

[p. 271] [Jherusalem fut gangnié de roy de Turquie] Grant planteit y oit des navreis et d'ochis d'unne part et de l'autre ; et durat chis siege jusqu’à I jour que les Juys fasoient une grant fieste, que ilhs ne brisassent pour riens solonc leur loy, et astoit I semedis, le XIe jour de may ; si covient les Juys aleir el temple celebreir. Et enssi qu'ilhs astoient là, se vinrent les annemis et assailhirent les mures qui astoient desgarnis et vuides de gens, tant qu’ilhs entrarent dedens la citeit par forche. Et cheaux de temple, quant ilhs oïrent le cry, si sont corus aux armes, et vinrent droit sour le marchiet. Et là fut la batalhe si grant que nuls ne veit oncques en teile plache plus grant, qui durat jusqu’à la nuit.

[p. 271] [Jérusalem est prise par le roi des Parthes] Des deux côtés on compta un grand nombre de blessés et de tués. Le siège dura jusqu’au jour de la célébration par les Juifs d'une grande fête, qu’ils n’auraient absolument pas pu manquer, d'après leur loi. C’était un samedi, le 11 mai, et ils devaient aller faire les célébrations au Temple. Tandis qu’ils s'y trouvaient, les ennemis arrivèrent, assaillirent les murailles, dégarnies et vides, et entrèrent de force dans la cité. Les gens dans le Temple, quand ils entendirent les cris, coururent prendre leurs armes et se dirigèrent droit sur le marché. Une bataille s'y déroula, personne ne vit jamais de bataille aussi grande en cet endroit : elle dura jusqu’à la nuit.

[De Herode qui soy mist en la tour royal] Quant Herode veit chu, ilh soy trahit arriere, et Fasians et ses chevaliers ; si se misent en la tour royal. Et Hircain et ses gens se misent en temple, qui astoit mult fors. Adont commencharent les barons à parleir de la pais d'unne part et [p. 272] et d’aultre ; mains Antygonus dest qu’ilh soit metteroit de toute en toute sour le roy de Turquie. Et Hircain se mist enssi sour I de ses amis, et al matin se sont mis à la voie Hircain, Fasians et Antygonus por parleir à roy de Turquie.

[Hérode s’installe dans la tour royale] Quand Hérode vit cela, il se retira, avec Phasaël et ses chevaliers, et ils s’installèrent dans la tour royale. Hyrcan et ses gens occupèrent le Temple, très fortifié. Alors les barons, des deux côtés, se mirent à parler de paix [p. 272]. Antigone déclara qu’il s’en remettrait complètement au roi des Parthes. Hyrcan se rangea aussi du côté d'un de ses amis, et dès le matin, Hyrcan, Phasaël et Antigone se mirent en route pour aller parler au roi des Parthes.

[De Mariane la femme Herode] Mains Herode n’y voult mie aleir, car Mariane sa femme li defendit, et ly disoit que jà n’awist en Turch fianche, car ilhs astoient trahitours ; si priat à Hircain et à Fasians, qu’ilhs n’y alassent mie. Mains ilh ne le vorent oncques croire, et ilhs en furent dechus, car ils furent en leurs chemyn assalhis dez Turques qui le gaitoient ; et furent pris et myneis al roy de Turquie par forche.

[Mariamne, la femme d’Hérode] Mais Hérode refusa d’y aller. Sa femme Mariamne le lui défendit, lui disant de ne jamais faire confiance aux Parthes, qui étaient tous des traîtres. Elle pria aussi Hyrcan et Phasaël de ne pas y aller, mais ils ne voulurent pas la croire. Ils eurent tort car sur leur trajet les Parthes qui les guettaient, les assaillirent, les capturèrent et les menèrent de force à leur roi.

[p. 272] [De Herode qui s’enfuit] Quant Herode le soit, si s’enfuit par nuit à promier sompne ly et ses femmes, ses enfans et ses gens awec tous armeis ; mains ilhs furent aparchus des Turques del siege qui les cacharent fortement, et ochirent de ses gens grant planteit en la voie. Mains Herode aloit tousjours par derrière et sourtenoit les fausse ; si n’y perdit mie ne femme ne enfans dans la voie. Quand Herode fut long de Jherusalem, si oit grant duelh et gran honte de chu qu’ilh fuoit ; si commenchat à ploreir mult tenrement.

[p. 272] [Hérode s’enfuit] Quand Hérode apprit cela, il s’enfuit de nuit au moment du premier sommeil, avec ses femmes, ses enfants et ses gens armés. Mais de l'endroit où ils assiégeaient la ville, les Parthes les aperçurent. Ils les poursuivirent avec force et en tuèrent un grand nombre en chemin. Mais Hérode marchait toujours derrière et soutenait les fuyards (?). En route, il ne perdit ni femmes ni enfants. Mais une fois loin de Jérusalem, honteux de sa fuite, il éprouva d'amers regrets, et se mit à pleurer très discrètement.

[p. 272][De la grant victoir Herode] Adont ilh reprist cuer en li ; si dest qu’ilh amoit mies eistre ochis par-devant, que navreis par derière. Adont escriat ses gens et assalhit les Juys, qui le cachoient asseis plus fellement que les Turques ; car il y avoit grant planteit de Juys, et il n’y avoit que Xm Turques : les Juys astoient venus awec Antygonus et Sasnes. Cheaux at assalhit Herode, et là oit fort batalhe, et oit Herode la victoir ; si furent les altres desconfis ; si en fut tant mors que la terre en astoit tout couverte ; si avoit toudis VI Juys encontre I des gens Herode. Et pour cel grant honneur et victoir fist puis Herode fermeir en cel plache I casteal qu’ilh appelat Herodium.

[p. 272] [La grande victoire d’Hérode] Alors il se reprit : il préférait être tué de face que blessé dans le dos. Il appela donc ses gens à grands cris et attaqua les Juifs, qui les poursuivaient beaucoup plus traîtreusement que les Parthes. Ces derniers n'étaient que dix-mille. Les Juifs, venus avec Antigone et Lysanias, étaient beaucoup plus nombreux. Ils attaquèrent Hérode ; une grande bataille se déroula, qui fut remportée par Hérode ; les autres furent défaits. Les morts étaient si nombreux que la terre en était couverte. Il y avait six Juifs pour faire face à un homme d'Hérode. Afin d'honorer cette victoire, Hérode édifia plus tard un château-fort qu'il appela Hérodion (p. 332-333).

 [Trahison] Adont Herode soy partit de là et cevalchat tant qu’ilh vint à un casteal, qui oit nom Massada, que Josippus son frere tenait, où ilh laisat ses femmes et ses enfans en la garde de son frere. Puis s’en alla en Arabe, et vint à castel de La Pire, où ly roys d’Arabe astoit qui mult amoit Herode, car il astoit son cusin germains ; et enssi remanist-ilh en Arabe awec le roy. Item, quant Palchorus, ly roy de Turque, veit comment Hircain et Fasians astoient pris, [p. 273] ilh rendit à Antygonus la terre de Judée, et li delivrat les II prisonniers Hircain son oncle et Fasians. Et Antygonus copat à Hircain son oncle ses dois orelhes tou pres de la tieste, si qu'ilh ne poioit jamais eistre evesque de la loy. Mains quant Fasians veit chu, ilh soy ochiast volentirs, se ilh n'euwist les mains loiiés ; et nonporquant ilh fist tant, que ilh ferit son tieste si fort à une grosse pire qu'ilh soy ochist. Enssi fut mors Fasians, le frere Herode. Apres chu fist semblant Antygonus à Hircain son oncle que ilh astoit dolans de chu que ilh ly avoit copeit ses orelhes ; si prist des cyrurgiens, et les fist fischiner, mains ilh fist les plaies envynemeir, si l'en covient morir.

 [Trahison] Ensuite, Hérode quitta cet endroit et chevaucha jusqu’à la place forte, appelée Massada, occupée par son frère Joseph, à la garde de qui il laissa ses femmes et ses enfants. Il partit alors pour l'Arabie, et arriva au château de Pétra, où se trouvait le roi d’Arabie, très attaché à Hérode, dont il était le cousin germain. Il resta en Arabie avec le roi. Quand le roi des Parthes, Pacorus, vit que Hyrcan et Phasaël avaient été capturés, [p. 273] il rendit à Antigone la terre de Judée, et lui livra les deux prisonniers, son oncle Hyrcan et Phasaël. Antigone trancha près de la tête les deux oreilles de son oncle Hyrcan, de sorte qu’il ne puisse plus jamais être grand-prêtre. Quand Phasaël vit cela, il aurait voulu se suicider, s’il n’avait eu les mains liées. Pourtant il réussit à frapper si fort de la tête contre un bloc de pierre qu’il se tua. Ainsi mourut Phasaël, le frère d’Hérode. Dans la suite, Antigone, en présence de son oncle Hyrcan, feignit d'être très affecté de lui avoir coupé les oreilles. Il demanda à des chirurgiens de faire des bandages, mais le résultat fut que les plaies s'envenimèrent et que Hyrcan en mourut.

[p. 273] [Herode vat à Romme] [Herode fut portent noiet]Quant Herode soit les mors de Hircain et de Fasians, si en fut mult yreis, et si en fist grant duelh ; si s'apensat que ilh yroit à Romme quere sourcure et aide, comment ilh poroit estre vengiet de Antygonus. Adont montat sour mere ; mains ilh n'oit pais aleit lendemain jusqu'à nonne, quant unc gran orage le prist qui tourmentat la mere ; et ilh commencharent à nagier jusqu'à une isle qui est nommée le isle de Felix ; mains quant ilhs vinrent pres, leur nef hurtat à une roche qui astoit deleis celle isle si roidement, que la nef fut tout combrisiet. Si en fut pluseurs des gens noiiés, mains la plus grant partie escappat, et en cel isle demorat tant Herode et ses gens que la nef fut refait. Chu fut sour l'an Vc LXVII en junne.

[p. 273] [Hérode va à Rome] [Hérode faillit se noyer] Quand Hérode apprit la mort d’Hyrcan et de Phasaël, il en fut très irrité et très attristé. Il décida d'aller à Rome chercher aide et secours, se demandant comment il pourrait se venger d’Antigone. Il prit la mer, mais dès le lendemain, à la neuvième heure, il fut surpris par un orage violent qui souleva violemment la mer. Ils se mirent à naviguer en direction d'une île, appelée l’île de Félix (Rhodes ?) ; mais quand ils s’en approchèrent, leur navire heurta fortement un rocher voisin et leur bateau se brisa complètement. Beaucoup furent noyés, mais la plupart en réchappèrent. Hérode et ses gens demeurèrent dans l'île jusqu’à ce que le bateau soit réparé. C’était en juin de l’an 567 [22 a.C.n.].

 

Divers : Franco, duc de Gaule - Retour de Sédros à Tongres, accompagné d'Octave et de sa mère Hélène - Les dénominations de Tongres - Mort et succession de Sédros - Retour d'Octave à Rome - (22 a.C.n.)

 

[p. 273] [De Franco, duc de Galle] En cel an meisme, le VIIIe jour de julet, morut Yborus li dus de Galle, qui longtemps avoit regneit, assavoir XL ans. Apres luy fut Franco, son anneis fis, dus, qui regnat XXVIII ans. Et li altre fis, qui oit nom Sedrich, fut dus de Bourgongne ; car Elisena, filhe al duc Dodo de Burgongne, fut sa femme.

[p. 273] [Franco, duc de Gaule] Le 8 juillet de cette année [22 a.C.n.], mourut Yborus, le duc de Gaule, après un règne long de quarante ans. Le duc Franco, son fils aîné, lui succéda et régna durant vingt-huit ans. Son autre fils, nommé Sedrich, était duc de Bourgogne ; sa femme, Elisena, était la fille du duc Dodo de Bourgogne

 [L’emperere vient awec le roy Sedros à Tongre] En cel an s'avisat Sedros, ly roy de Tongre, qui astoit à Romme, et li prist volenteit del raleir à Tongre ; se le dest à Octoviain l'emperere, qui tantoist jurat qu'ilh n'en riroit mie sens luy, car ilh voloit veioir son rengne. De chu l'en remerchiat Sedros ; si sont apparelhiiés et se soy misent al chemyn, et sont venus à Tongre. Et si tenoit Octoviain court plaine, et astoit awec luy Helaine sa mere, qui avoit chainte une coroie que ly roy Amorandin d'Espangne li [p. 274] avoit jadit donnée, qui valoit bien XXXm besans d’or. Celle coroie donnat la damme al temple Venus à Tongre : Mars si seioit deleis à unc des lei, et Jupiter à l'autre. Celle chainture fut riche, car elle fut tout d'or à charniers, et si astoit ovrée de pires prechieux.

 [L’empereur vient à Tongres avec le roi Sédros] Cette année-là [22 a.C.n.], Sédros, le roi de Tongres, qui se trouvait à Rome, prit la décision de retourner à Tongres ; il en fit part à l’empereur Octave, qui jura aussitôt qu’il n'y retournerait pas sans lui, car il voulait voir son royaume. Sédros lui en fut reconnaissant ; ils s’équipèrent, se mirent en route et arrivèrent à Tongres. Là Octave tenait une cour très nombreuse ; il avait avec lui sa mère Hélène, qui portait la ceinture que lui avait offerte jadis le roi Amorandin d’Espagne [p. 274], valant près de trente mille besants d’or. La dame offrit la ceinture au temple de Vénus à Tongres : aux côtés de Vénus se tenaient Mars et Jupiter. La ceinture en or massif était somptueuse, ornée de fermoirs et de pierres précieuses.

[Coment Tongre oit nom Octoviane] [Tongre perdit son nom]Adont Octoviain donna son nom à la citeit de Tongre, et le nommat Octoviane. Et ne fut oncques depuis nommée Octoviain, mais ilh fut nommeis August Cesar, et la royne Helaine si at cangiet oussi son nom, et fut nommée Octoviane. [p. 274] Or fut le nom de Tongre cangiet, car ons le commenchat à nommeir Octoviane, et oit enssi à nom, tant com li emperere viscat ; mains apres sa mort fut rapelée Tongre, com de promier. Et portant jasoiche qu'ilh fust nommée enssi affin que nos n'aions nuls debat en nostre matere por male entendre, si nommerons Tongre toudis.

[Tongres reçoit le nom d'Octaviane] [Tongres perd son nom] Octavien donna son nom à la ville de Tongres, et l'appela Octaviane. Quant à Octave, il ne fut plus appelé de cette façon, mais porta le nom d'Auguste César. La reine Hélène aussi changea de nom et fut appelée Octaviane. [p. 274] Alors donc le nom de Tongres changea et on commença à appeler la ville Octaviane. Elle porta ce nom durant le temps que vécut l’empereur ; après, elle redevint Tongres. En ce qui nous concerne, pour éviter dans cette matière toute discussion par défaut de compréhension, nous l’appellerons toujours Tongres.

[Sedros mourut de la jaunisse] [Lotringe le Ve roy de Tongres] Enssi com ches chouses avenoient, avient que por trop boire et mangier li roy Sedros oit le foid enchaufeit ; si fut si sourpris qu'il morut de la janisse, dont ly emperere August et tout ly peupIe fut mult perturbeis. Et fisent roy de son fis Lotringe, qui regnat X ans. Adont en ralerent li emperere August Cesaire à Romme, et sa mere et ses gens awec luy.

[Sédros meurt de la jaunisse] [Lotringe, cinquième roi de Tongres] Entre-temps, le roi Sédros, à force d’excès dans le boire et le manger, eut le foie enflammé ; il fut si atteint qu'il mourut de la jaunisse. Cette mort affecta fort l'empereur Auguste ainsi que tout le peuple. Son fils Lotringe fut roi et régna dix ans. Alors l’empereur Auguste César, sa mère Hélène et leurs gens retournèrent à Rome.

 

Hérode est accueilli à Rome par Antoine et désigné roi de Judée par le Sénat romain - Il revient en Judée pour prendre possession de son royaume, accompagné de deux « princes » romains (dont Silon) et de troupes - Abandonné par les Romains censés l'aider, Hérode assiège seul Jérusalem - Ne pouvant emporter la ville, il purge le pays de brigands dangereux, puis retourne à Rome se plaindre des soldats mis à sa disposition par Antoine (21 a.C.n.)

[p. 274] [Herode fut fais roi de Judée] Item, quant la nef Herode fut refaite, si montat sor mere et alat par mere et par terre tant que ilh vient à Romme ; si trovat Anthone qui l'avoit fait prinche de Galilée. Herode comptat à Anthone chu qui ly astoit avenus ; si en oit Anthone grant piteit, et se soy mervelhat mult de la mesaventure qui avenue li astoit. Adont prist Anthone par le main Herode, et le menat devant Auguste Cesar qui astoit en son palais, et ly priat que ilh fesist Herode roy de Judée, car ilh astoit proidhoms et loial ; si seroit à luy bien emploiiet la royalteit. Quant Augustus l'entent, si prist Herode par le main diestre et Anthone par le senestre, et adont le coronat ; et l'emmynarent entre eaux dois à grant compangnie de gens en capitol, et là fut confirmeis à roy par les senateurs. Quant chu fut faite, Anthone chargat à Herode grans gens, et si envoiat awec luy dois prinches de Romme, qui le devoient de son rengne mettre en la possession. Et chu fut sour l'an Vc et LXVIII en mois de may, que Herode arivat en Galilée. Si commenchat tantoist à chevalchier sour ses anemis.

[p. 274] [Hérode nommé roi de Judée] Lorsque son navire fut réparé, Hérode prit la mer et, par mer et par terre, parvint à Rome. Il y trouva Antoine qui l’avait nommé prince de Galilée. Hérode lui raconta ce qui lui était arrivé. Antoine compatit beaucoup et s’étonna de sa mésaventure. Alors il prit Hérode par la main et le mena devant César Auguste, qui se trouvait dans son palais. Il lui demanda de nommer Hérode roi de Judée, car c’était, disait-il, un homme sage et loyal, qui ferait bon usage de la royauté. Quand Auguste l’entendit, il prit la main droite d'Hérode et la main gauche d'Antoine et ensuite il couronna Hérode. Puis, se tenant entre eux deux, et escorté d'une foule nombreuse, il le conduisit jusqu'au Capitole, où les sénateurs confirmèrent le titre de roi octroyé à Hérode. Quand cela fut fait, Antoine confia à Hérode d'importantes troupes, et envoya avec lui deux princes de Rome qui devaient le mettre en possession de son trône. Ce fut au mois de mai de l’an 568 [21 a.C.n.] qu’Hérode arriva en Galilée. Il commença aussitôt à faire des expéditions contre ses ennemis.

[De Herode comment il delivrat sa terre] [Avarice] Mains quant Antygonus soit qu'ilh amynoit les dois prinches de Romme pour delivreir la terre, si fut mult enfraieis et esmaieis ; si s'avisat et alat encontre les dois prinches de Romme, et fist tant que ilh parlat [p. 275] plus hault qui astoit nomeis Frixlons, et li donnat mult grant avoir par convens teile que ilh soy tenist à luy, et chis ly otriat. De avariche] Quant Frixlons oit l'avoir, si commenchat à querir ocquison envers Herode, et ne li voloit aidier à sa besongne que ilh avoit entrepriese.

[Hérode délivre sa terre] [Avidité] Lorsqu’Antigone sut qu'Hérode amenait deux princes de Rome pour délivrer la terre de Judée, il fut fort effrayé et inquiet. Il décida d’aller à la rencontre des deux princes romains et s'arrangea [p. 275] surtout pour parler à celui qui s'appelait Silon. Il lui donna une grosse somme d’argent à la condition de prendre son parti, ce que le Romain accepta. Quand Silon eut l’argent, il commença à chercher l'occasion d'agir contre Hérode : il ne voulait pas aider ce dernier dans la tâche qu’il avait entreprise.

[Herode assegat Jerusalem] Et nonporquant Herode fist tant qu'ilh assegarent Jherusalem, en cel an meismes, le XVIIe jour de mois de septembre ; mains les Romans ne vorent oncques assalhir, et disoient qu'ilh ne poroient ostoier por le froidure del yvert, et oussi avoient pou de vitalhe : por ches chouses dessent les Romans qu'ilhs ne poroient plus aresteir là. Et enssi soy departirent del siege, si alerent sorjourneir en Galilée.

[Hérode assiège Jérusalem] Pourtant Hérode s’arrangea pour assiéger Jérusalem, cette même année [21 a.C.n.], le 17 septembre, mais les Romains ne voulurent jamais participer à l’assaut, disant qu’ils ne pourraient se battre à cause de la rigueur de l’hiver, et aussi parce qu’ils avaient peu de vivres. C'est pourquoi ils dirent qu'ils ne pourraient plus rester là. Alors les Romains quittèrent le siège et allèrent séjourner en Galilée.

[Herode ochioit tous les laurons] [Des V larons] Mains por chu ne fut pas Herode enbahis, ains alat par la terre ochiant les larons, dont li paiis astoit tout plains, et desroboient les gens ; entres lesqueils larons avoit unc vilhart qui avoit V fis, que Herode cachat tant que ilh les fist entreir en une boyme desous la terre, et les ratendit tant al yssue que ilhs orent si fain que ilh ne porent plus dureir ; si issirent fours, et Herode les coupat tous les tiestes, et ochist leur mere. Enssi delivrat Herode des larons le paiis, puis s'apensat qu'ilh riroit à Romme soy deplaindre à Anthone des Romans qui ne li voloient point aidier.

[Hérode tue tous les brigands] [Les cinq brigands] Cela n’étonna pas Hérode, qui parcourut le pays en tuant les brigands qui l'avaient envahi et qui dévalisaient les habitants. Parmi eux se trouvait un vieillard, père de cinq fils ; Hérode les pourchassa tellement qu'il les fit entrer dans une grotte sous la terre. Il bloqua la sortie très longtemps si bien qu’ils eurent faim et ne purent plus tenir. Lorsqu'ils sortirent de leur cachette, Hérode les décapita tous et tua leur mère. C'est ainsi que Hérode délivra le pays des brigands. Il décida alors de retourner à Rome pour se plaindre auprès d'Antoine des Romains qui ne voulaient pas l’aider.

 

Digression : Lotringe, cinquième roi de Tongres, son duché et son château (20 a.C.n.)

 

[p. 275] [Lotringle, Ve roy de Tongre, fist le castel de Lotrenge] Item, l'an Vc et LXIX, fondat Lotringe, le Ve roy de Tongre, I castel qu'ilh apellat solonc son nom Lotrenge, qui puis fut une ducheit ; mains ilh ne parfist mie le casteal à son temps, por chu qu'ilh morut anchois qu'ilh fust parfais.

[p. 275] [Lotringe construit le château de Lotringe] En l’an 569 [20 a.C.n.], Lotringe, cinquième roi de Tongres, fonda un château qu’il appela Lotringe d’après son nom et qui devint par après un duché. Mais il n’acheva pas le château de son vivant, car il mourut avant qu’il ne soit terminé (p. 332).

 

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