Jean d'Outremeuse, Myreur des histors, II, p. 138b-160aN Édition : A. Borgnet (1869) ‒ Présentation nouvelle, traduction et notes de A.-M. Boxus et de J. Poucet (2021) [BCS] [FEC] [Accueil JOM] [Fichiers JOM] [Pages JOM] [Table des Matières JOM]
CLOVIS ET L'EXTENSION TERRITORIALE DES FRANCS
NOTES DE LECTURE - II, p. 138b-160a - ans 438-461 de l'Incarnation
* Bibliographie sur Clovis et son mariage * Généralités sur les Bourgogne et les Burgondes * II, p. 138 : Fête de Saint-Pierre-aux-Liens * II, p. 138 : Le diable sous les traits de Moïse * II, p. 139 : Léon Ier et Totila * II, p. 141 : Le concile d’Éphèse * II, p. 143 : Retour en arrière sur les rois Francs (résumé et ajouts) * II, p. 143 : Législation de Pharamond et Loi Salique * II, p. 143: Longs cheveux et barbes * II, p. 144 : Saint Jean Chrysostome * II, p. 145 : La Grande-Bretagne * II, p. 145-146 : Les Angles et leurs queues * II, p. 150ss : Marcien, empereur d'Orient (450-457) * II, p. 151 et II, p. 160-161 : Le concile de Chalcédoine
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Bibliographie sur Clovis et son mariage
Parmi les très nombreuses publications sur le personnage (mariage, baptême, famille, conquêtes, etc.), on pourrait citer :
* M. Rouche, Clovis, Paris, 1996, 611 p. (Le grand livre du mois) * O. Guyotjeannin [Éd.], Clovis chez les historiens, Genève, 1996, 271 p. (Bibliothèque de l'École des Chartes, tome 154, livraison 1) : nombreuses études intéressantes, notamment : * P. Bourgain, Clovis et Clotilde chez les historiens médiévaux, des temps mérovingiens au premier siècle capétien, p. 53-85 : accessible via Persée <https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1996_num_154_1_450811> * L. Theis, Clovis, de l'histoire au mythe, Paris, 1996, 224 p. * M. Rouche [Dir.], Clovis : histoire et mémoire. 1. Le baptême de Clovis, l'événement ; 2. Le baptême de Clovis, son écho à travers l'histoire, 2 vol., Paris, 1998, 929 et 915 p. (Actes du Congrès international d'histoire de Reims) * B. Dumézil, 24 décembre 505 ? / Le Baptême de Clovis, 2019, 320 p. (Les journées qui ont fait la France)
En ce qui concerne le mariage de Clovis, l'article de P. Bourgain est intéressant en ce qu'il présente les différentes versions de l'histoire ; la comparaison montre que le récit de Jean d'Outremeuse est plus détaillé et imaginatif que ce qu'il pouvait lire chez les chroniqueurs. Une note de Bo (p. 139) évoque « les ornements qu'a ajoutés la fantaisie de Jean d'Outremeuse ». La mise en scène de la rencontre d'Aurélien et de Clotilde notamment semble lui appartenir en propre. Nous terminerons par une observation chronologique qui ne manque pas d'intérêt. Clotilde, princesse burgonde, est la fille de Chilpéric II. Elle est née vers 475 et morte en 545 de notre ère. Elle est la nièce de Gondebaud, le seul des quatre fils de Gondioc vivant encore lorsqu'elle se marie avec Clovis. Selon Jean d'Outremeuse (II, p. 139-140), elle est demandée en mariage par Clovis en l'an 441 de l'Incarnation. Il est piquant de constater que, dans l'Histoire, en 441, Clotilde n'était pas encore née et Clovis non plus (il est né en 466 de notre ère).
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Sur les Burgondes
On trouvera un long développement sur « La Bourgogne et les premiers rois burgondes historiques» dans les notes de lecture du fichier II, 104-138N.
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II, p. 138 : Fête de Saint-Pierre-aux-Liens (S. Pietro in Vincoli) an 439 Inc C'est au Ve siècle que Sixte III (pape de 432-440 de notre ère) consacre l'église Saint-Pierre-aux-Liens, probablement érigée sur une construction plus ancienne. Son état actuel date de la restauration du futur Jules II. Elle a été construite au Ve siècle pour abriter les chaînes avec lesquelles Saint-Pierre a été emprisonné à Jérusalem. Elles y sont aujourd'hui exposées en contrebas du choeur. « À l'origine, il y eut deux chaînes, Au XIIIe siècle naquit la légende de la soudure miraculeuse qui réunit les deux reliques » (Rome. Guide vert Michelin, 2004). La version de Jean d'Outremeuse est différente de celle du Guide vert. « La légende raconte que l’impératrice Eudoxia (épouse de Théodose II, 408-450) a offert à Léon Ier (pape de 440 à 461 de notre ère), l ». (Basilique Saint-Pierre-aux-Liens - Horaires, tarifs & plan à Rome (visitonsrome.com) De nos jours, l'église Saint-Pierre-aux-Liens de Rome, située entre le forum Romain et Sainte-Marie-Majeure, est surtout connue pour abriter la statue de Moïse réalisée par Michel-Ange. En fait, elle doit son nom au fait qu'elle fut construite dans les années 430 de notre ère sur demande de l'Impératrice Eudoxie, épouse de Théodose II, pour accueillir les « chaînes de saint Pierre », qui, selon la tradition, avait connu la prison d'abord à Jérusalem, puis à Rome. Il y a aujourd'hui deux chaînes, exposées dans une belle chasse située sous l'autel, sur lesquelles circulent les légendes. On raconte qu'elles étaient deux à l'origine, qui avaient lié l'apôtre, l'une à Jérusalem, l'autre à Rome ; mais on raconte aussi que les chaînes concernaient toutes les deux l'emprisonnement de Pierre à Jérusalem, mais qu'elles étaient arrivées en deux fois, à des époques différentes. Mais de toute façon, toujours selon la légende, les deux chaînes, séparées au départ, se seraient à un certain moment miraculeusement soudées l'une à l'autre. Pour la date du 1er août, cfr I, p. 79 le texte des Indulgentiae ecclesiarum urbis Romae consacré à l'église Saint-Pierre-aux-Liens. Cfr Martin, Chronique, s.v° Theodosius II, p. 454, éd. L. Weiland : Tempore istius (= Théodose II) vincula sancti Petri instituta sunt celebrari ab uxore eius. Pas de mention chez Jean, comme chez chez Martin, d'un rôle quelconque joué par l'épouse de l'empereur . [Plan]
II, p. 138 : Le diable sous les traits de Moïse (an 440 Inc) Cfr Martin, Chronique, s.v° Theodosius II, p. 453-454, éd. L. Weiland : Hoc tempore diabolus in Creta in specie Moysi apparens, dum Iudeos in terra repromissionis per mare pede sicco promitteret perducere, plurimos necavit, sed qui evaserunt, ad Christi gratiam conversi sunt. Les deux notices se suivent chez Martin et chez Jean, mais en ordre inverse. Autre différence : chez Jean, c'est sur des bateaux que les Juifs veulent retrouver la Terre Promise ; chez Martin, c'est pede sicco, comme dans le récit biblique. [Plan]
II, p. 139 : Léon Ier et Totila Intéressant de noter que Martin, Chronique, p. 418, l. 40-46 fait intervenir Léon Ier arrêtant Totila, roi des Vandales, dans son avancée en Italie, dans une anecdote qui semblerait porter à l'origine ou plus généralement sur Attila, roi des Huns. Qu'on en juge par le texte suivant :
Hic Leo Totilam regem Wandalorumn postquam de Pannonia in Ytalia regressus fuisset, per triennium Aquileiam obsidens cepisset ferro ignique omnino consumptam, Veronam, Vicenciam, Brixiam, Pergamum, Mediolanum, Tycinum diripuisset, Leo papa sanctissimus, ne Romam veniens idem faceret, personaliter adit ipsum, ubi circa Padum morabatur, et non solum Romanam, sed etiam tocius Ytalie salutem reportavit. Et mirantibus omnibus barbaris, cur sic honorifice Totila contra consuetudinem papam recepisset et in omnibus exaudivisset, respondit, quemdam vultu terribilem pape astitisse et mortem sibi minantem, nisi papam exaudivisset. Unde statim de Ytalia exiens in Pannoniam rediit.
Totila semble inconnu du Myreur. [Plan]
II, p. 141 : Le concile d’ Éphèse
[II, p. 141] « [Le concile d’Éphèse qui réunit deux cents évêques] En l’an 442, saint Patrice, archevêque d’Irlande et d’Écosse [cfr II, p. 134], rassembla dans la ville d’Éphèse un concile de deux cents évêques. C’est là que fut condamné le prêtre Nestorius, qui disait que le corps de Jésus-Christ consistait en deux personnes. Le concile confirma que Jésus-Christ était un seul corps, une seule personne constituée de deux natures et portant trois noms ».
jean fait manifestement allusion ici au troisième concile œcuménique de l'histoire du christianisme, convoqué à Éphèse en 430 « par l'empereur romain de Constantinople Théodose II. Le 22 juin 431, ce concile condamna le nestorianisme comme hérésie, anathématisa et déposa Nestorius comme "hérésiarque". À l'inverse des conciles de Nicée (325) et de Constantinople (381) dont les questions théologiques portaient principalement sur l'unicité de Dieu, le concile d'Éphèse marque un tournant dans le dogme en définissant l'union hypostatique des deux natures, humaine et divine, du Christ. Le concile d’Éphèse marque donc pour l’Église l'explicitation et la proclamation du Christ homme et Dieu. Il fixe également le dogme de la Vierge Marie Théotokos ("Mère de Dieu") ». (Wikipédia) On notera que ce concile ne fut pas convoqué par saint Patrick, mais par l'empereur Théodose II. On notera aussi la différence de chronologie, Jean datant de l'an 442 de l'Incarnation un événement qui eut lieu en 431 de notre ère. Quant à la mention de 200 évêques, elle provient probablement de la notice de Martin (Chronique, p. 418, l. 14-17 ) qui mentionne, comme organisateurs, non seulement l'empereur Théodose mais aussi le pape Célestin. Il y eut dans l'Histoire en 449 un deuxième concile d'Éphèse non reconnu par les catholiques et les orthodoxes. Jean ne l'évoque pas. [Plan]
II, p. 143 : Retour en arrière sur les rois Francs
Sur les premiers rois Francs, sorte de retour en arrière, qu'on pourrait prendre, à première vue, pour un résumé, mais qui en fait présente des données importantes, absentes de ce qu'on pourrait appeler le récit principal. Plus qu'un résumé, on peut parler d'ajouts. Cet artifice fait songer à « un retour en arrière » précédent, II, p. 100-101 : intitulé [Résumé de l'histoire des origines des Francs d'après les Chroniques de Saint-Denis] où il est question des Chroniques de Saint-Denis. Ne serait-ce pas la source de ces pages II, p. 143-133 ? Cfr les notes de lecture ad locum. [Plan]
II, p. 143 : L égislation de Pharamond et Loi salique
Dans la présentation des rois Francs de Pharamond à
Clovis, un accent est mis sur la législation de Pharamond. Elle peut amener
à un commentaire intéressant sur la loi salique. On trouvera ci-dessus un
extrait de l'article qui lui est consacré dans
Wikipédia : a. Composition de la loi salique
b. L'expression loi salique désigne deux réalités distinctes.
Dans le haut Moyen Âge, il s'agit d'un code de loi élaboré, selon les historiens, entre le début du IVe et le VIe siècle pour le peuple des Francs dits « saliens », dont Clovis fut l'un des premiers rois. Ce code, rédigé en latin, et comportant de forts emprunts au droit romain, portait surtout sur le droit pénal et les compositions [compensations] pécuniaires car l'objectif de la loi salique était de mettre fin à la faide (vengeance privée) en imposant le versement d'une somme d'argent et établissait entre autres les règles à suivre en matière d'héritage à l'intérieur de ce peuple. Plusieurs siècles après Clovis, dans le courant du XIVe siècle, un article de ce code salique fut exhumé, isolé de son contexte, employé par les juristes de la dynastie royale des Capétiens pour justifier l'interdiction faite aux femmes de succéder au trône de France. À la fin de l'époque médiévale et à l'époque moderne, l'expression loi salique désigne donc les règles de succession au trône de France. Ces règles ont par ailleurs été imitées dans d'autres monarchies européennes.
c. On distingue trois grandes strates dans sa rédaction :
* sous les Mérovingiens : d'abord mémorisée et transmise oralement, elle fut mise par écrit en latin à la demande du premier roi des Francs non nommé dans la loi. La première version écrite de la loi portait le nom de pactus legis salicæ, « pacte de la loi salique », composé de soixante-cinq titres. Le début du texte précise que quatre grands du royaume des Francs, Visogast, Arogast, Salegast, Windogast, ont fixé par écrit la teneur de cette loi après trois assemblées, tenues dans les villages de Ratheim, Saleheim et Widoheim, situés outre-Rhin. La loi salique fut complétée sous Childebert Ier et Childebert II. Cette première version comprend des mots isolés et même une phrase entière en vieux bas francique ; les termes utilisés dans la version écrite et les principes appliqués témoignent autant de larges emprunts au droit romain qu'à la tradition germanique ; * sous Pépin le Bref : le « pacte de la loi salique » fut complété et refondu en 763 et 764, appelée Lex salica à proprement parler ; *sous Charlemagne : peu après 800, la version ultime de la loi fut promulguée, appelée Lex salica carolina ; cette version fut réordonnée de façon plus cohérente par l'abbé Loup de Ferrières à la demande d'Évrard de Frioul, gendre de Louis le Pieux et une traduction en germanique fut réalisée au même moment dans le monastère de Fulda. D'autres versions de la loi furent en effet élaborées jusqu'au milieu du IXe siècle : à chaque fois, la loi fut augmentée, modifiée et adaptée aux circonstances du moment. Il est donc difficile de dater précisément certains articles. Une de ces révisions consista à ajouter un long prologue, « Vivat Christus, qui Francos diligit ». Une autre datant de Charlemagne fit passer de soixante-cinq à cent le nombre des articles de la loi. [Plan]
II, p. 143: longs cheveux et barbe [Chevals et barbas : souvenir, note Bo ad loc. de la Gallia comata et des reges criniti] Ces dispositions étaient-elles réellement présentes dans une version de la "loi salique" ?
Sur la question des cheveux longs et des tresses, cfr Jean HOYOUX, Reges criniti. Chevelures, tonsures et scalps chez les Mérovingiens, dans RBPh, t. 26,3, 1948, p. 479-508. (accessible via Persée : <https://www.persee.fr/doc/rbph_0035-0818_1948_num_26_3_1787>). Il est très détaillé et montre la complexité de la question.
Pierre le Lombard (XIIe siècle) - théologien - évêque de Paris - Quatre livres de sentences (1150-1152, édition définitive 1155-1158), base de l'enseignement théologique jusqu'à la fin du Moyen Âge - difficile de croire que pareille interdiction ait figuré parmi ses sentences - À contrôler dans la trad. française en 4 volumes de Marc Ozilou, Paris, Cerf (Sagesses chrétiennes), 2012-2015. [Plan]
II, p. 144 : Saint Jean Chrysostome
Pour le détail et l'exactitude des événements en rapport avec cette notice, notamment le caractère peu souple du prélat, ses rapports tumultueux avec l'impératrice Eudoxie, son exil, sa mort et plus tard le rapatriement de ses reliques à Constantinople en 438 de notre ère par l'empereur Théodose, on verra l'article Wikipédia Jean Chrysostome. Le Myreur en parle aussi en I, p. 347 ; I, p. 497 ; II, p. 105 et II, p. 119. Certaines imprécisions chronologiques de Jean d'Outremeuse peuvent être relevées mais elle ne surprennent guère le lecteur, compte tenu des habitudes du chroniqueur. Il s'agira des différences de datation en ce qui concerne la mort du prélat (il est canonisé en 394 de l'Incarnation chez Jean alors qu'il est mort en 407 de notre ère), le rapatriement de ses restes (444 de l'Incarnation chez Jean et 438 de notre ère) ainsi que la mort d'Eudoxie, épouse d'Arcadius (411 de l'Incarnation chez Jean et 404 de notre ère). On notera que sous le pontificat de Jean Paul II, ses reliques, rapatriées à Constantinople en 438 par Théodose avaient été triomphalement déposées dans l'église des Saints-Apôtres. "Emportées d'abord à Venise par les croisés de la 4e croisade (1204), puis transférées à Rome, où elles ont été vénérées durant près de 800 ans sous l'autel d'une chapelle dans la basilique Saint-Pierre de Rome à la Cité du Vatican, elles ont finalement été restituées le 27 novembre 2004 par le pape Jean-Paul II au patriarche œcuménique Bartholomée Ier, en signe de réconciliation entre catholiques romains et orthodoxes, et sont depuis lors conservées et vénérées à l'église Saint-Georges du Phanar à Constantinople." (Wikipédia) [Plan]
II, p. 145 : La Grande-Bretagne
À propos de la notice de Jean « En l’an 447, le pape Léon envoya en Grande-Bretagne saint Germain, évêque d’Auxerre, et saint Loup [saint Leu], évêque de Troyes, pour mettre fin aux hérésies qui y étaient répandues et ramener le peuple à la vraie foi », on pourra voir Monmouth, Rois de Bretagne, ch. 100, p. 147, éd. L. Mathey-Maille : « En ce temps-là [du roi Vortegirn], saint Germain, évêque d'Auxerre, et saint Loup, évêque de Troyes, vinrent en Bretagne pour prêcher la parole de Dieu. Le christianisme des Bretons avait, en effet, été corrompu à la fois par les païens et à la fois par l'hérésie pélagienne dont le poison les avait pour longtemps affaiblis (n. 53 : « Historiquement, c'est en 429 que le pape Célestin Ier envoya les deux saints en G.B. pour combattre le pélagianisme »). La vraie foi religieuse fut rétablie parmi eux grâce à la prédication de ces saints hommes qui accomplisssaient chaque jour de nombreux miracles. Ces miracles, que Dieu multipliait par leur intermédiaire, Gildas les a brillamment racontés dans son ouvrage (n. 54: Encore un faux renvoi à Gildas, qui ne parle pas des deux saints dans son ouvrage. Geoffroy pense en réalité aux récits de l'Historia Brittonum ou de l'Histoire ecclesiastique de Bède [cfr I, ch. 17 et 18). » [Plan]
II, p. 145-146 : les Angles et leurs queues
La légende d'origine des Angles est racontée aussi en Myreur, II, p. 195-196, dans la présentation des rois de Bretagne, à propos du 75e roi, Constantin. À cette époque, les Romains avaient décidé de se retirer et d'abandonner la Grande-Bretagne à son sort. La fin de la domination romaine ouvre la voie à diverses invasions, en particulier aux Anglo-Saxons, un peuple d'origine germanique qui s'installe en Grande-Bretagne à partir du Ve siècle. On peut trouver sur <https://fr.wikipedia.org/wiki/Anglo-Saxons> une image assez détaillée des invasions de 400-500. La période anglo-saxonne de l'histoire de l'Angleterre s'étend traditionnellement jusqu'à la conquête normande, en 1066. Pour ce qui est des queues qu'ils sont censés porter, on trouvera quelques explications dans M. Aurell, La légende du roi Arthur, Paris, 2018, p. 122-123, dont nous ne transcrivons ici qu'une partie. « À l'époque, les combattants germaniques, ennemis en Grande-Bretagne des Celtes, se couvrent de peaux de fauves, apparaissant comme des berserkir ("guerriers à enveloppe d'ours") dans l'Ynglingsaga (v. 1225) de l'Islandais Snorri Sturluson, voire comme des lycanthropes ou loups garous dans l'Histoire des Lombards de Paul Diacre (v. 720-799). Dans l'île, leurs détracteurs les appellent des "Angles à la queue", en raison des déguisements qu'ils portaient pour effrayer saint Augustin de Cantorbéry (mort 604/605), leur premier évangélisateur, qui les aurait miraculeusement punis en faisant croître une vraie queue sur leurs dos. Mais le rapport des guerriers païens aux animaux sauvages est plus profond qu'un simple accoutrement (etc.) » [Plan]
II, p. 150ss : Marcien, empereur d'Orient (450-457)
M arcien, empereur d’Orient (450-457), époux de Pulchérie, sœur de Théodose II (empereur 408-450). « Celui-ci mourut accidentellement en 450 de notre ère d’une chute de cheval. Pulchérie profite de sa qualité d’Augusta pour éliminer l’eunuque Chrysaphios, avec lequel elle avait dû, à contrecoeur, partager son emprise sur son frère. Puis, se rendant compte que les temps n’étaient pas encore mûrs pour accepter qu’une femme régnât seule sur l’empire, elle conclut un mariage blanc avec Marcien, un sénateur de soixante ans, auquel elle donne la pourpre impériale. Elle le fait couronner par le patriarche de Constantinople Anatole, pour que personne ne conteste sa légitimité. C'est la première fois qu'un empereur reçoit sa couronne des mains d'un chef de l'église. Valentinien III, blessé dans son amour-propre, ne le reconnaîtra qu'en 452 » (Zosso, p. 373-374).
« Lorsque Théodose II meurt, le 28 juillet 450, Valentinien III [empereur d'Occident de 423 à 455] pouvait prétendre régner aussi sur l'Empire d'Orient. Si cette perspective ne l'enchantait pas, il lui revenait de droit, de nommer un nouvel empereur. Ignorant superbement les droits dynastiques de son demi-cousin, Pulcheria, qui gouverne seule l'empire d'Orient depuis la mort de son frère, vient tirer [le général] Marcien de sa retraite. Elle connaît la valeur de cet homme. Elle sait qu'il acceptera de bonne grâce à jouer les seconds rôles [...]. Elle sait que l'heure n'est pas encore venue pour une femme de régner seule. Durant de longues années, elle l'a fait par l'intermédiaire de son frère. Il lui faut maintenant régner par l'intermédiaire d'un mari. Avec l'accord du général des armées, Aspar, et prétendant respecter les dernières volontés de son frère, elle le fait proclamer empereur le 25 août 450, après avoir conclu avec lui un mariage blanc, à l'âge de 51 ans. Et pour que personne ne conteste la légitimité du nouvel empereur, elle le fait couronner par le patriarche de Constantinople Anatole. C'est la première fois q'un empereur reçoit sa couronne des mains d'un chef de l'Eglise, marquant ainsi le caractère divin du pouvoir impérial. Valentinien III, blessé dans son amour-propre, ne le reconnaît qu'en 452. Pulchérie meurt en 453. Marcien meurt, 4 ans après son épouse, le 26 janvier 457, après sept ans de règne, à la suite d'une gangrène aux pieds » (Zozzo, p. 373-374).
Zozzo cite aussi un texte de l'Histoire romaine de Zonaras (Marcien, 841) : « Pulchéria tint la mort de son frère la plus secrète qu'il fut possible, envoya quérir Marcien, homme d'un âge avancé et d'une prudence consommée, et lui dit : Je vous ai choisi sur tous pour vous mettre entre les mains la souveraine puissance, à condition que vous consentiez que je garde à Dieu la virginité que je lui ai vouée. Il lui promit ce qu'elle souhaitait, et à l'heure même il reçut de sa main le diadème en présence du patriarche et du Sénat ».
Comme on le voit, on est très loin de la présentation de Marcien faite par Jean dans le Myreur : « [Après Théodose], le duc d’Athènes, nommé Marcien, fut choisi comme cinquantième empereur de Rome. Il fut élu par les chevaliers et son couronnement fut imposé par la force ; il régna six ans et vingt jours ». Signalons encore que l'église d'Orient les a inscrits tous les deux (Pulchérie et Marcien) à son calendrier des saints, le 18 février, et qu'au concile de Chalcédoine, les évêques acclamèrent Marcien comme « un nouveau Constantin, un nouveau Paul, un nouveau David, le flambeau de la foi orthodoxe ». [Plan]
II, p. 151 et II, p. 160-161 : Le concile de Chalcédoine
Jean a distribué sur deux notices (II, p. 151 et II, p. 160-161) le Concile de Chalcédoine, réuni en l'an 451 de notre ère. C'est le quatrième concile œcuménique, les trois précédents étant le premier concile de Nicée (325 de notre ère), le premier concile de Constantinople (381 de notre ère) et le concile d'Éphèse (431 de notre ère). « I l a eu lieu du 8 octobre au 1er novembre 451 dans l'église Sainte-Euphémie de la ville homonyme, située aujourd'hui à Istanbul.-- Convoqué par l'empereur byzantin Marcien et son épouse l'impératrice Pulchérie, le concile réunit 343 évêques, ce qui est exceptionnel. Seuls quatre d'entre eux viennent d'Occident. Dans la continuité des conciles précédents, il récuse en particulier le monophysisme ». « Il s'agit d'une hérésie apparue au Vᵉ siècle dans l'Empire romain d'Orient en réaction au nestorianisme, qui supposait deux natures en Jésus-Christ], et ardemment défendue par Eutychès (abbé de Constantinople - 378-454) et Dioscore (évêque d'Alexandrie). Elle affirme que le Fils n'a qu'une seule nature et qu'elle est divine, cette dernière ayant absorbé sa nature humaine. -- Les principales conclusions de ce concile, résumées dans le symbole de Chalcédoine, définissent le dyophysisme, c'est-à-dire les deux natures du Christ, vrai Dieu et vrai homme, parfait dans sa divinité comme dans son humanité. Elles marquent une étape essentielle dans le domaine de la christologie et sont acceptées, encore aujourd'hui, par les trois principales confessions chrétiennes : les orthodoxes, les catholiques et les protestants. -- Le concile a aussi légiféré sur des questions d'organisation de l'Église. Ainsi le canon 2 considère que les ordinations de prêtres obtenues contre de l'argent sont nulles et prévoit que l'évêque qui en est responsable soit déposé. -- Léon le Grand refuse d'accepter le vingt-huitième canon du concile qui, en attribuant à la ville de Constantinople le titre de "Nouvelle Rome", lui accordait de ce fait la primauté sur les autres patriarcats ». (Wikipédia, passim)Cfr ce qu'écrit Zozzo, p. 374: « Pour apaiser les violentes trensions religieuses [toujours existantes], Marcien et Pulchérie convoquent un nouveau concile oecuménique qui consacre la doctrine défendue par la papauté de Rome : dans le Christ, il n'existe qu'une seule personne et deux natures, l'une humaine, l'autre divine, condamnant ainsi le monophysisme qui affirme que J.-C. n'a qu'une nature, la nature divine, et le nestorianisme qui affirme qu'en Jésus-Christ deux personnes coexistent, l'une divine, l'autre humaine. Les Eglises copte, syrienne et arménienne, qui défendent et enseignent l'unicité de la nature divinine dans le Christ, se séparent alors de l'Eglise de Constantinople ». « Ce concile consacre aussi la prépondérance du pouvoir impérial sur le pouvoir ecclésiastique en le soumettant à deux de ses exigences : (a) le patriarche de Constantinople l'emporte sur le patriarche d'Alexandrie en ce qui concerne la conduite de l'Eglise d'Orient. Cette décision provoque de graves troubles en Egypte ; (b) le patriarche de Constantinople est traité sur le même pied d'égalité que le pape de Rome. [...] Le pape saint Léon n'accepte pas ce point de vue [...] Alors qu'en Occident, l'Eglise, de moins en moins protégée par un État de plus en plus faible, parvient à se débarrasser de ce poids trop pesant et à affirmer son indépendance sous le pontificat de Léon le Grand (440-461), en Orient, au contraire, l'Eglise cède et se laisse gouverner par un empereur tout puissant ». [Plan]
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[Texte précédent II, p. 121-138] [Plan des notes de lecture II, p. 138-160] [Texte suivant II, p. 160-181]