Jean d'Outremeuse, Myreur des histors, I, p. 503b-514a
Édition : A. Borgnet (1864) ‒ Présentation nouvelle, traduction et introductions de A.-M. Boxus et de J. Poucet (2017)
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événements divers sous Trajan [Myreur, p. 503b-514a]
Ans 103-115
Ce fichier comporte trois parties :
* Myreur, p. 503b-508a (A. Guerres de Trajan - Conflits en Flandre - Église sous Évariste : ans 103-107 :)
[sommaire] [texte]* Myreur, p. 508b-512a (B. Alliances locales - Cités diverses - Saint Materne et Tongres - Trajan et Pline : ans 108-110) [sommaire] [texte]
* Myreur, p. 512b-514a (C. Suite des guerres de Trajan - La papauté - Partage du royaume de Tongres : ans 111-114) [sommaire] [texte]
Introduction générale aux trois parties
L'église primitive et les papes (Évariste et Alexandre)
Pour les généralités sur l'histoire de l'église primitive et des papes, on renverra à ce qui a été dit précédemment, notamment dans l'introduction des p. 479-489. Selon Ly Myreur, le pape Anaclet, dont il a été question plus haut (p. 500), meurt en 104 de l'incarnation, pour céder la place à Évariste, sixième pape (p. 505), lequel meurt martyr en 111 de l'incarnation (p. 512). En réalité, Évariste fut pape de 97 à 105 de notre ère. Mais la discordance chronologique entre les dates du chroniqueur et les nôtres étonnera probablement moins le lecteur que la présence sur le trône pontifical de Rome d'un personnage d'origine juive, dont le père, Judas, venait de Bethléem. L'information pourtant se trouve bien chez Martin et dans les éditions du Liber Pontificalis (éd. Duchesne ; éd. Mommsen, p. 9). Peut-être y a-t-il une explication à trouver sur ce pape dans S. Mimouni, Les chrétiens d'origine juive dans l'Antiquité, Paris, 2004, 261 p. (Présences du judaïsme, 29) ?
La notice de Wikipédia, utilisant apparemment le Dictionnaire de Philippe Levillain, écrit simplement : « on ne sait pas grand-chose de sa vie (= d'Évariste) car les sources historiques les plus anciennes ne contiennent sur lui rien d'authentique : selon la tradition catholique, il serait originaire d'Antioche et aurait eu un père juif ». A. Borgnet, ad locum, note que cette tradition est jugée fausse par Lenain de Tillemont.
La question des prescriptions matrimoniales attribuées à ce pape Évariste sont abordées par le chroniqueur à deux reprises, à quelque sept pages de distance, une première fois (p. 505) à l'occasion de son élection, une seconde fois (p. 512) à l'occasion de sa mort. Les contenus des deux notices ne sont pas identiques, ce qui donne peut-être certaines informations sur la technique de travail de Jean. Le Liber Pontificalis (p. 126, éd. Duchesne ; p. 9, éd. Mommsen) ne signale aucun décret de ce pape en matière conjugale. Martin aborde très brièvement la question : constituit etiam, ut a parentibus coniugium publice sponsetur, et demum a sacerdote benedicatur sollempniter (p. 410, éd. Weiland) « Il décida que le mariage serait conclu par les parents en public, et que seulement après il serait béni solennellement par le prêtre ». La seconde mention du Myreur (p. 512) reflète le texte de Martin, mais dans une traduction qui n'est pas entièrement fidèle. La première mention par contre (p. 505) n'a aucun rapport avec le texte de Martin : le long développement qu'elle présente doit être propre à Jean et les précisions qu'elle contient sont probablement celles en usage à son époque. La notice de Martin, qui représente, on l'a dit, une addition par rapport au Liber pontificalis, doit provenir d'une innovation du chroniqueur d'Opava ou avoir été puisée par lui dans l'ouvrage d'un de ses précédesseurs. Qu'elle représente une réalité historique ou non est un autre problème, que nous n'aborderons pas.
Dans Ly Myreur, la question des diacres chargés de veiller sur les prêches de l'évêque est difficilement compréhensible, si on ne se réfère pas aux textes antérieurs, soit Martin (p. 410, éd. Weiland), soit le Liber Pontificalis (p. 9, éd. Mommsen), soit - plus précis encore - le texte du canon 13 des pseudo-constitutions du pape Silvestre I (314-335), émanant du synode de Rome des 275 évêques (Concilium Silvestrianum). Il s'agit du canon XIII, libellé comme suit : Vt septem diacones sint custodes episcopo consecranti propter stilum ueritatis et catholicam rationem et senectutis oraculum, ne in praedicationem aut patrem pro filio aut spiritum sanctum pro patre praedicemus ; et dixerunt omnes iustum esse (C. Poisnel, Un concile apocryphe du pape Saint Silvestre, dans Mélanges d'Archéologie et d'Histoire, t. 6, 1886, p. 6). Il s'agit, en bref, de veiller à ce que tout, dans les prêches, soit conforme à la doctrine.
En ce qui concerne son successeur, Alexandre, pape de 111 à 120 de l'incarnation (107 à 116 de notre ère), la manière dont Jean le présente est assez amusante. Le texte de Martin est le suivant : Alexander I, nacione Romanus ex patre Alexandro de regione Capri Tauri. C'est la présentation classique : dans l'ordre, le nom du pape, sa ville d'origine (ici Rome), le nom de son père et le nom de son quartier (regio) à Rome. Le problème, c'est qu'il n'existe pas à Rome de regio Capri Tauri, mais une regio Capitis Tauri (« Tête de Taureau »). Le Liber Pontificalis présente correctement la région d'origine, mais Martin (ou sa source) n'a pas compris ou a mal transcrit. Cette première erreur est bénigne. Celle de Jean (p. 513) est plus lourde. Non seulement il n'a pas compris, mais il a triplement interprété, d'abord en faisant du quartier un « royaume », ensuite en lui donnant un nom fantaisiste (Chivretaine), tiré du Capri Tauri de son modèle, enfin en faisant du père du pape, un prinche de ce royaume inventé.
Dans Ly Myreur, les ordonnances d'Alexandre apparaissent à deux endroits différents de la notice (comme chez Martin d'ailleurs). On trouve à la p. 514, une disposition portant sur l'eau bénite. Martin écrivait simplement : Hic constituit aquam aspersionis cum sale benedici, et in habitaculis hominum aspergi « Il décida que l'eau de l'aspersion serait bénite avec du sel, et qu'on en lancerait dans les maisons des gens ». Sans modifier en profondeur la notice de sa source, Jean l'a cependant sérieusement complétée en ajoutant qu'on devait faire de l'eau bénite tous les dimanches à la messe. Peut-être ici encore, comme dans le cas des cérémonies de mariage (cfr supra), a-t-il livré dans sa Chronique les usages de son temps.
Dans la notice du Myreur, d'autres éléments frappent l'attention. Ainsi, l'information selon laquelle le pape Alexandre « avait converti à Dieu la plupart des sénateurs » (p. 514), ne se trouve ni chez Martin, ni dans le Liber Pontificalis. Mais d'autres données intéressantes apparaissent beaucoup plus loin, à la page 524.
Les guerres de Trajan et celles des peuples de nos régions
Il a déjà été question dans la section précédente de Trajan et de ses guerres (p. 500). À propos de sa parenté, précisons que, dans l'Histoire, Trajan n'a aucun lien ni avec Nerva, ni avec Domitien. Selon Jean, qui a un goût certain pour les généalogies, Trajan aurait été le frère de Nerva, et comme lui, un fils de Domitien. Ce n'est donc pas exact.
Selon notre chroniqueur (p. 500), Trajan avait beaucoup guerroyé : « En l’an 100 de l'incarnation, l’empereur Trajan rassembla ses armées et traversa la mer. Il pénétra en terre d'Égypte, assiégea Babylone et la cité du Caire, et les remit en sa sujétion, comme auparavant, leur imposant le payement d'un tribut. Ensuite il entra en Asie et fit la conquête d'une grande partie du territoire : la Syrie, l'Arménie et la Mésopotamie, jusqu'à la mer Rouge. Cela fait, il rentra à Rome ». On peut estimer que cette notice correspond grosso modo à une certaine réalité historique. Trajan fut effectivement un très grand conquérant : il est même « considéré depuis l'Antiquité comme le dernier conquérant de l'histoire de Rome » (P. Petit, Empire, 1974, p. 203 ; cfr p. 203-208, pour sa politique extérieure).
Cela dit, tout un volet des opérations de Trajan détaillées dans le Myreur n'appartient pas à l'Histoire. C'est le récit, dispersé à différents endroits de la présente section, de ses guerres en Espagne, en Afrique, au Danemark, où sont mis en scène des Carthaginois, des Espagnols, des Égyptiens, des Danois et même des Hongrois. Ces épisodes appartiennent à la légende épique médiévale, tout comme naturellement les détails qui y figurent (chefs militaires, villes, accords, épisodes, etc.). On voit même les noms des chefs varier d'une notice à l'autre, comme c'est le cas du roi de Carthage, nommé par Trajan, et appelé tantôt Salomadis (p. 506), tantôt Salomados (p. 513), tantôt Soladas (p. 514). Tout cela évidemment n'a rien à voir avec le Trajan de l'Histoire. Sont tout aussi légendaires les autres conflits armés qui se déroulent cette fois dans nos régions et où interviennent Anvers, Louvain, Lille, Bruges, Gand et Tongres, quels que soient les « princes » qui les gouvernent (qu'ils soient comtes, ducs ou rois) et quels que soient leurs noms (Jécoras, Arnoul ou Pierre).
Trajan, Pline et les chrétiens
Deux notices sur Pline se trouvent aux p. 511-512. La correspondance entre Pline le Jeune et Trajan (X, 97 et 98) est une pièce importante à verser au dossier de l'attitude des autorités romaines envers les Chrétiens. La version de Jean toutefois est tendancieuse : Trajan a bien envoyé Pline comme gouverneur en Bithynie, mais il ne lui a pas « donné l'ordre de mettre à mort tous les chrétiens qu'il trouverait dans cette province ». Trajan ne fut pas le persécuteur des Chrétiens qu'imagine le chroniqueur liégeois. Il n'est même pas sûr du tout (cfr l'introduction des p. 489ss) que le soi-disant martyre du pape Clément censé avoir été ordonné par Trajan soit une réalité historique.
La notice de la p. 508 signale, au nombre des événements de l'an 109 de l'incarnation, le martyre de saint Ignace, évêque d'Antioche, jeté aux lions dans l'arène. Saint Ignace est un personnage important de la tradition catholique. Ses nombreux écrits (dont tous ne sont pas authentiques) lui ont valu d'être rangé parmi les Pères apostoliques, première génération de Pères de l'Église. Le récit intitulé Martyre de saint Ignace, sur les données desquelles on se base pour rédiger sa « biographie », est malheureusement tardif. « Les divers anachronismes qu'il comporte ne permettent absolument pas d'y voir un document historiquement fiable : c'est un de ces innombrables " actes de martyrs " où l'imagination du rédacteur supplée au manque d'information » (Wikipédia). On trouvera une traduction de ce texte dans le récent Premiers écrits chrétiens (PEC, 2016, p. 249-258 + 1234-1237). On ne peut approfondir ici cette question.
Quoi qu'il en soit, on verra que ce même Trajan, décrit ici comme un persécuteur des Chrétiens, est présenté plus loin (p. 523) sous un jour beaucoup plus positif. Jean écrit même à cet endroit que saint Grégoire, à force de prières, avait obtenu de Dieu que l'âme de Trajan soit délivrée des peines de l'enfer. L'empereur n'était donc pas « si mauvais que cela ».
La seconde notice sur Pline (p. 511) concerne la fontaine merveilleuse de Tongres, dont il a déjà été question plus haut (p. 2, p. 189, p. 306) et qui provient de l'Histoire naturelle de Pline l'Ancien (XXXI, 8, 12). Notons d'abord que Jean confond les deux Pline. À la p. 189, il avait fait de Pline un chroniqueur, sans donner trop de détails. Il récidive ici en le présentant, non seulement comme l'auteur d'une histoire de la nature, mais aussi comme l'auteur d'une « histoire de Tongres, depuis Tongris, le premier roi, jusqu'à la quatrième année où arriva saint Materne » (même idée, p. 2, où Pline est vu comme l'auteur de chroniques sur Tongres).
Il est amusant de comparer les deux descriptions que donne Ly Myreur de cette fontaine : d'un côté : « entièrement décorée d’or et d’argent, et toute cerclée de pierres précieuses, elle passait pour miraculeuse et guérissait tous ceux qui en buvaient, de toutes les maladies du monde, si elles n'étaient pas mortelles ; et s'il s'agissait de blessures ou de plaies, un malade lavé avec son eau était aussitôt guéri » (p. 189) ; de l'autre : « elle bouillonne de plusieurs jets et répand un goût de fer ; son eau a pour vertu, quand on la boit, de purger le corps des fièvres tierces et de guérir la gravelle ainsi que beaucoup d'autres maladies. Cette eau, si on la chauffe au feu et qu'on la retire, devient trouble et ensuite toute rouge » (p. 511). Cette dernière description est la plus conforme au texte latin que voici : Tungri ciuitas Galliae fontem habet insignem plurimis bullis stillantem, ferruginei saporis, quod ipsum non nisi in fine potus intellegitur. Purgat hic corpora, tertianas febres discutit, calculorum uitia. Eadem aqua igne admoto turbida fit ac postremo rubescit.
Dernière remarque, l'Histoire Naturelle n'a pas été écrite pour Vespasien (escript à Wespasianus). Elle a été publiée vers 77 de notre ère, du vivant de l'empereur Vespasien qui était un ami de Pline. Mais, comme le montre clairement la Préface, elle était dédiée à Titus, le « camarade de camp » (in castrensi contubernio) de Pline, qui avait servi comme officier de cavalerie avec Titus.
L'histoire de saint Materne
L'histoire de saint Materne continue. Elle est légendaire elle aussi, et dans le prolongement de ce que Jean raconte, morceau par morceau, depuis la p. 452. Elle se terminera avec le récit de la mort et du transport miraculeux du corps du saint sur le Rhin (p. 534-535).
Sur ce personnage de Materne et sur son évolution dans l'hagiographie médiévale, on verra l'étude détaillée, intitulée Autour du Materne de Jean d'Outremeuse, que nous avons publiée dans le fascicule 37 (janvier-juin 2019) des Folia Electronica Classica (FEC).
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A. Guerres de Trajan - Conflits locaux (Flandre, ANVERS, LOUVAIN, Lille, Bruges, Gand) - Église sous Évariste [Myreur, p. 503b-508a]
Ans 103-107
* Trajan vainqueur puis défait en Espagne (103)
* Trajan remporte la victoire sur Jonas, roi de Carthage, et assiège la ville (104)
* Mort du pape Anaclet - Élection du pape Évariste - Ses prescriptions sur le mariage (104)
* Trajan soumet Carthage, puis s'embarque pour le Danemark (105)
* Les Gantois vont à Lille attaquer avec succès le comte de Bruges, qui se replie sur Bruges (105)
* La paix est conclue entre Trajan et les Danois sur base d'un ancien accord avec Domitien (107)
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Trajan vainqueur puis défait en Espagne (103)
[p. 503] [CIII - Trajanus desconfit Algidoras, le roy d’Espangne] Item, l'an C et III, en mois de marche le XXIIe jour, entrat Trajanus l'emperere de Romme en la terre d'Espangne ; mains ly roy Agildoras vient contre ly, et orent batalhe ensemble. Si fut ly roy Agildoras desconfis, si s'enfuit en la citeit de Castelloppe, qui mult astoit grant et forte, si assemblat là si gran gens, que ilh oit plus grans oust que ly emperere n'avoit, puis vint contre l'emperere qui son paiis ly voloit mettre en tregut. |
[p. 503] [An 103 - Trajan défait Algidoras, le roi d’Espagne] En l'an 103, le 22 mars, Trajan, l'empereur de Rome, pénétra en terre d'Espagne. Le roi Algidoras vint à sa rencontre et une bataille les opposa. Le roi Algidoras, battu, s'enfuit dans la cité de Castellote, très grande place-forte. Il y rassembla tellement de troupes qu'il se trouva à la tête d'une armée plus importante que celle de l'empereur. Alors il marcha contre l'empereur qui voulait soumettre son pays au tribut. |
[De roy d’Espangne qui desconfit Romans] Si orent encor batalhe sor l'an deseurdit en mois de julle, laqueile batalhe fut mult pesante et orrible des dois parties ; mains ly pieur en chaiit sour les Romans, car ilh furent desconfis et perdirent XIm hommes, et ly remanant s'enfuit vers Romme. Et ly roy d'Espangne demorat enssi en paix ; mains ilh y perdit IIIIm hommes, et al promier batalhe, quant ilh fut desconfis, XIIm hommes. |
[Le roi d’Espagne est vainqueur des Romains] En l'année susdite, au mois de juillet, les opposa une nouvelle bataille, qui fut très lourde et horrible pour les deux parties ; mais le pire échut aux Romains, qui furent défaits et perdirent onze mille hommes, tandis que les rescapés s'enfuirent vers Rome. Ainsi le roi d'Espagne vécut en paix, mais il avait perdu quatre mille hommes et, lors de la première bataille, où il fut vaincu, il en avait perdu douze mille. |
Le comte de Flandre Jonadas assiège le prince d'Anvers Jécoras, réfugié à Louvain - Une ruse permet aux Louvanistes de l'emporter sur les Flamands, qui s'enfuient à Lille - Jécoras fait longuement le siège de Bruges (103-104)
[p. 503] [Guerre entre le prinche d’Antwerpe et le conte de Flandre] En cel an oit grant batalhe ly prinche de Anwerpe, qui astoit nomeis Jecoras, contre le conte de Flandre Jonadas. Si fut la guerre portant que li conte voloit que le prinche relevast sa terre de luy et l'en rendist tregut ; mains ly prinche, qui astoit issus de sanc de Sycambiens de Galle, le refusat et dest qu'ilh n'estoit mie serf ne issus de servaige, et n'avoient ses anticesseurs riens tenut des contes de Flandre, et ja n'en tenroit. En celle batalhe fut lidit prinche desconfis, si s'enfuy à Lovay et le fermat ; et ly conte l'assegat dedens Lovay, et y seit trois mois. |
[p. 503] [Guerre entre le prince d’Anvers et le comte de Flandre] Cette année-là, une grande bataille opposa le prince d'Anvers, nommé Jécoras, et le comte de Flandre Jonadas. La cause de la guerre était la volonté du comte d'astreindre le prince à tenir de lui son territoire et à lui payer un tribut ; mais le prince, issu du sang des Sicambres de Gaule, refusa cette condition et déclara qu'il n'était ni serf ni issu de l'esclavage, que ses ancêtres n'avaient jamais rien tenu des comtes de Flandre et que lui n'en tiendrait jamais rien. Dans cette bataille, le prince fut vaincu ; il s'enfuit et s'enferma à Louvain. Le comte l'y assiégea et y resta trois mois. |
Sy avient que en mois de septembre les Flamens astoient si fort endormis por une fieste de sains Johans que ons faisoit adont, car les sarasiens ont tousjours ameit sains Johans-Baptiste et le festioient, et encor font ; et cheli jour avoient les Flammens fait la grant fieste sains Johans et esteit en grant [p. 504] joie, si astoient si anoiés que ilh dormoient fortement. Adont li prinche s'avisat et issit fours de Lovay enssi com à la meynuit, à XIIm hommes. |
Il se fit qu'au mois de septembre, les Flamands étaient profondément endormis, à cause d'une fête de saint Jean qu'on célébrait alors, car les Sarrasins ont toujours aimé saint Jean-Baptiste, ce qu'ils font encore. Ainsi donc, ce jour-là, les Flamands avaient fait une grande fête en l'honneur de saint Jean dans une ambiance [p. 504] très joyeuse, et ils étaient si fatigués qu'ils dormaient profondément. Alors le prince décida de sortir de Louvain vers minuit, avec douze mille hommes. |
[Subtils fais d’armes] Si assalhit les Flamens à leurs treifs qui dormoient, et entrarent en l'oust si pasieblement que oncques les gaites, qui chest nuit gaitoient, ne les veirent, car ilhs astoient trestous enyvreis ; si astoient aleis joweir lonc fours di l'oust por eaux solachier, car ilh ne quidoient mie que cheaux de Lovay deussent fours issir. Et quant les Flamens oyrent le bruit des espées, si furent tous enbahis ; ilhs sont sus salhis et se sont armeis, puis vinrent vers l'estour ; mains enssi com ilh venoient chi XX, chi XXX, les ochient cheaux qui astoient bien armeis et rengiés. Et quant les Flamens veirent chu, si ont crieit : Trahi, trahi, à une vois, puis s'en sont enfuis. |
[Astucieux faits d’armes] Il attaqua les Flamands endormis dans leurs tentes, et pénétra dans le camp si silencieusement que les gardes, qui faisaient le guet cette nuit-là, ne les virent pas, car ils étaient tous ivres. Ils étaient allés se divertir loin de l'armée pour prendre du bon temps, car ils ne croyaient pas que les gens de Louvain allaient faire une sortie. Quand les Flamands entendirent le bruit des épées, ils furent très surpris ; ils se levèrent en sursaut, s'armèrent, puis partirent se battre ; mais, tandis qu'ils arrivaient, par groupe de vingt ou de trente, ceux qui étaient bien armés et en ordre de bataille les tuaient. Voyant cela les Flamands crièrent d'une seule voix Trahison, trahison, puis s'enfuirent. |
[Le prinche de Lovay at desconfis Flamens] Mains quant les gaites entendirent les vois se vinrent là corant tous desroteis ; si en astoit Vc, mains ilhs furent tous mors et mis al espée. En cel batalhe perdit bien ly conte de Flandre VIm hommes ; de quoy ilh fut mult dolans et corochiés. Et ly prinche Jecoras fist trosseir tous les trefs et les pavilhons des Flammens, et leurs vitalhes oussi ; si s'en alat vers Flandre, et at jureit que ilh les guerrirat de leurs vitalhes meismes. Adont en alat li prinche vers Bruge et l'asseghat ; mains li conte n'y astoit mie, ains astoit fuys à Lisle. |
[Le prince de Louvain défait les Flamands] Mais quand les gardes entendirent les voix, ils accoururent sur place en ordre dispersé ; ils étaient cinq cents, qui moururent tous, passés au fil de l'épée. Dans cette bataille le comte de Flandre perdit au moins six mille hommes, ce qui l'affligea et l'irrita beaucoup. Le prince Jécoras fit saisir toutes les tentes et les installations des Flamands avec leurs réserves de vivres. Il partit pour la Flandre et jura qu'il les combattrait avec leurs propres ressources. Alors le prince partit à l'assaut de Bruges. Mais le comte n'y était pas : il avait fui à Lille. |
Et ly prinche Jecoras fist pluseurs fois assalhir Bruge, mains ilh y avoit si fors fosseis que ilh n'y forfaisoit riens. Et cheaux de la vilhe fisent grans engiens, et jettoient pres jusques al oust des Lovengnis, si en ochirent pluseurs ; por quoy ly prinche se desloghat, et fichat ses trefs plus arrier II bonniers, puis fist traire III grans engiens et fist jetteir parmy la vilhe ; si ochirent pluseurs personnes, et tant que nuls n'oisoit aleir par les rues. Et chu fut en mois d'avrilh l'an cent et IIII, car ilh seit bien là XI mois, tant devant com apres. |
Le prince Jécoras fit maintes fois lancer l'assaut sur Bruges, mais les fossés y étaient si profonds que les assiégés ne subissaient aucun tort. Ceux-ci fabriquèrent de grandes machines et lancèrent (des pierres) sur l'armée des Louvanistes, tuant plusieurs d'entre eux. Alors le prince se déplaça et planta ses tentes, les reculant de deux bonniers. Puis fit amener trois grandes catapultes pour lancer des projectiles sur la ville ; beaucoup d'habitants furent tués, et personne n'osait plus sortir dans les rues. Cela fut en avril de l'an 104, car ce siège dura au moins onze mois en tout. |
Trajan remporte la victoire sur Jonas, roi de Carthage et assiège la ville (104)
[p. 504] [L’an C et IIII (correction de III)] - Trajanus l’emperere at desconfis Jonas, le roy de Carthage] En cel an meismes, en mois de may assemblat ly emperere de Romme Trajanus ses oust, si montat sour mere et arivat en Cartaige. Si commenchat la terre à ardre et exilhyer ; mains quant ly roy Jonas le soit, si vint contre luy à grant gens et le corut sus ; mains ly emperere oit la victoire, et ly roy Jonas fut mors et ses gens desconfis. Sy s'enfuirent dedens Cartaige, mains l'emperere l'asseghat. |
[p. 504] [L’an 104 - L’empereur Trajan défait Jonas, le roi de Carthage] En cette même année, au mois de mai, Trajan, l'empereur de Rome rassembla ses armées, prit la mer et arriva à Carthage. Il commença alors à incendier et à dévaster le territoire. Mais quand le roi Jonas apprit cela, il marcha contre Trajan avec de nombreuses troupes et fonça sur lui ; mais l'empereur remporta la victoire, le roi Jonas mourut et ses hommes furent vaincus. Ils s'enfuirent dans Carthage, que l'empereur assiégea. |
Mort du pape Anaclet - Élection du pape Évariste - Ses prescriptions sur le mariage (104)
[p. 505] En cel an, le VIe jour de junne, morut Anacletus li pape de Romme ; si fut ensevelis deleis la sepulture sains Pire. |
[p. 505] En cette année-là [104], le 6 juin, mourut Anaclet, le pape de Rome. Il fut enseveli près de la sépulture de saint Pierre. |
[Evaristus, ly VIe pape fut eslus] Sour cel an meismes, le XIIe jour de junne, enlisit li college de Romme unc pape qui fut nomeis Evaristus, qui fut de la nation de Greche, le fis d'on juys qui fut nomeis Juda, qui fut del citeit de Bethleem. Chis tienet le siege par l'espause de X ans VII mois et II jours, solonc Martinian, et solonc le pape Damasse IX ans VI mois et II jours, et solonc Jheromme IX ans et solonc sains Grigore VII ans VIII mois et XII jours ; et se vacat le siege XIX jours. |
[Élection d'Évariste comme sixième pape] Cette même année, le 12 juin, le collège de Rome élut un pape, nommé Évariste, un Grec, fils d'un Juif nommé Judas, originaire de la ville de Bethléem. Il occupa le siège pontifical pendant dix ans, sept mois et deux jours selon Martin [p. 410, éd. Weiland], neuf ans, six mois et deux jours selon le pape Damase, neuf ans selon Jérôme, sept ans, huit mois et douze jours, selon saint Grégoire. Le siège resta vacant dix-neuf jours. |
[Ilh fut ordineis qu’ons devoit proclameir sor l’engliese cheaux qui soy voloient marier - Et comment ons doit esposeir par le preistre] En cel an meismes ordinat lidit pape que quant II personnes se voloient adjondre ensemble par mariage, que ilhs soy fesissent proclameir sour l'engliese par le cureis, trois fois par trois jours de fiestes ou dymengnes ; se nuls savoit entre eaux chouse por quoy ly mariage dewist eistre astargiet, que ilh le denunchast ; et apres esposeir par le preistre et à celle mariage assembleir pluseurs gens et maiement les prochains des II personnes, qui enssi venoient ensemble. Et ordinat toutes les sollempniteit à chu afferantes. Et chu fist ilh portant que ilh voloit que mariage fust fais plus publement, et que cascon en sawist parleir, car devant chu toutes gens, tant cristiens com aultres, ne faisoient a chu nulle sollempniteit, ains soy traihoient ensemble quant ilhs soy plaisoient. Et chu creantoient par leur foid que ilhs ne soy faroient, mains apres tenoient unc mangnier de leur amis ; mains portant que nostre loy est de Sainte-Engliese ordinat-ilh chu qu'ilh soy fesist par Sainte-Engliese. |
[Il est prescrit d'annoncer à l’église les noms de ceux qui veulent se marier - Le mariage doit avoir lieu devant le prêtre] Cette même année, ce pape Évariste ordonna que deux personnes voulant s'unir par le mariage devaient le faire annoncer à l'église par le curé, trois fois, durant trois jours fériés ou trois dimanches. Si quelqu'un connaissait l'existence entre eux d'une cause d'empêchement au mariage, il devait la faire connaître. Après (ce délai), les fiancés devaient être unis par le prêtre, en présence de nombreux assistants, en particulier les proches des deux conjoints. Le pape prescrivit aussi toutes les solennités afférentes à la cérémonie. Il agit ainsi parce qu'il voulait que le mariage soit davantage public et que chacun puisse en parler. Précédemment en effet, les couples, tant les chrétiens que les autres, ne faisaient aucune célébration solennelle : ils vivaient ensemble quand ils se plaisaient. Désormais, ils s'engageaient, par leur foi, à ne pas faillir à leurs promesses. Pour finir, ils prenaient un repas avec leurs amis. Le pape ordonna que le mariage soit célébré par la Sainte-Église, parce que que notre loi est celle de la Sainte-Église. |
Le prince de Louvain l'emporte sur le comte de Flandre, malade et réfugié à Lille, et devient comte de Bruges - Ensuite, il va faire le siège de Lille (104)
[p. 505] [De prinche de Lovay qui gangnat Bruge ; de là en avant s’appelat-y conte de Lovay] En cel an meisme, en mois d'octembre, prist ly prinche de Lovay la vilhe de Bruge par assault, pardevant laqueile vilhe ilh avoit siet XI mois. Et quant les Lovengnis furent en Bruge, si corurent sus les Flamens ; mains ilh soy rendirent à eaux. Adont s'apellat ly prinche de Lovay conte de Bruge, se prist homage de tous cheaux de la vilhe. |
[p. 505] [Le prince de Louvain conquiert Bruges ; dorénavant il s’appelle comte de Louvain] En cette même année, au mois d'octobre, le prince de Louvain lança l'assaut sur la ville de Bruges et s'en empara, après un siège de onze mois. Quand les Louvanistes se trouvèrent dans Bruges, ils foncèrent sur les Flamands, qui se rendirent. Alors, le prince de Louvain s'appela le comte de Bruges et reçut l'hommage de tous les habitants de la ville. |
En cel an meismes, en mois de fevrier, s'en alat ly conte de Bruge vers Lyle en Flandre, où ly conte de Flandre gisoit malaide de duelhe, de chu qu'ilh astoit si gran sire envers le prinche de Lovay, et avoit IIII tant de gens que ly prinche n'avoit et avoit ly prinche fortune por ly, si que ilh conqueroit son paiis, ly conte avoit bien [p. 506] gheut unc an en chest maladie. Et ses gens qui n'avoient pointe de chief se tenoient tous choies en leurs vilhes, car ilh ne les voloit pointe livreir de capitaine. Atant vint là ly conte de Bruge et assalhit Lyle et le fist fortement assalhir. |
En cette même année, en février, le comte de Bruges se rendit à Lille en Flandre, où le comte de Flandre, gravement malade, était alité. C'était un grand seigneur par rapport au prince de Louvain ; il avait quatre fois plus de sujets que le prince mais ce dernier avait la chance de son côté : il avait le pouvoir de conquérir un pays dont le comte était [p. 506] au lit pour cause de maladie durant au moins un an. Les sujets du comte de Flandre, privés de chef, restaient sans rien faire dans leurs cités, car leur seigneur ne voulait pas leur donner un capitaine. Alors le comte de Bruges attaqua Lille et l'assiégea avec force. |
Trajan soumet Carthage, puis s'embarque pour le Danemark (105)
Les Gantois vont à Lille attaquer avec succès le comte de Bruges, qui se replie sur Bruges (105)
[p. 506] [De ches de Gant] En chest an s'avisarent cheaux de Gant en mois d'awoust qu'ilh faisoient mal de enssi laissier le prinche de Lovay prendre leur paiis et avoir saingnorie en leur terre. Si assemblarent leurs gens, et se vinrent à Lyle en mois de septembre le VIIe jour, si se corurent sus. Mains cheaux de Gant en eurent de peiour. Et fussent desconfis quant cheaux de Lyle issirent fours et corurent sus les Lovengnis par-derier, si en ochirent une grant quantiteit. Et quant les Lovengnis se veirent enssi sorpris et enclous, si furent enbahis et se misent al fuyr com desconfis : enssi orent les Flamens victoir. Si fut racompteit à conte, qui en fut mult liies. Adont s'enfuit ly prinche en la ville de Bruge qui avoit perdut IIm hommes ; mains la plus grant partie en astoit de cheaux de Bruge. |
[p. 506] [Les habitants de Gand] Cette même année, au mois d'août, les Gantois s'avisèrent qu'ils avaient tort de laisser ainsi le prince de Louvain s'emparer de leur pays et en être le seigneur. Ils assemblèrent leurs troupes, et le 7 septembre, se rendirent à Lille. Les armées s'affrontèrent, mais les Gantois eurent le dessous. Ils furent défaits quand les habitants de Lille sortirent, affrontèrent les Louvanistes par derrière et en massacrèrent un grand nombre. Quand les Louvanistes se virent ainsi surpris et encerclés, ils furent terrifiés et prirent la fuite comme des vaincus : la victoire revint aux Flamands. On raconta tout cela au comte, qui en fut très réjoui. Alors le prince s'enfuit dans la ville de Bruges : il avait perdu deux mille hommes, dont la plupart était des Brugeois. |
Trajan poursuit ses conquêtes sur les Danois - Le comte de Flandre, rétabli, veut assiéger le prince de Louvain à Bruges (ans 105-106)
[p. 506] [De l’emperere Trajanus] Item, en cel an, en mois de decembre, asseghat l'emperere Trajanus la citeit de Baladas en Dannemarche ; mains quant ly roy des Dannois le soit, si assemblat ses hommes et vint vers l'emperere ; si soy sont sus corus : si oit ly emperere victoire, et furent Danois desconfis. Adont s'enfuit ly roy des Dannois et ses hommes en une citeit que ons appelloit Gadabas. Cest batalhe fut grant ; car ilh y oit mors IIIIm Danois et XLIX Romans, et fut le IIIe jour de mois de jenvier l'an deseurdit. En chi mois meismes, le XXVIIe jour, prist l'emperere la citeit de Badalas que ilh avoit assegiet, et le mist en sa subjection del tout par tregut. |
[p. 506] [L’empereur Trajan] En cette année encore, en décembre, l'empereur Trajan assiégea la cité de Paladas (cfr I, p. 488) au Danemark mais quand le roi des Danois l'apprit, il assembla ses hommes et marcha contre l'empereur ; ils s'affrontèrent : l'empereur remporta la victoire et les Danois furent défaits. Le roi des Danois et ses hommes s'enfuirent alors dans une cité appelée Gadabas. Cette bataille fut importante : quatre mille Danois et quarante-neuf Romains y perdirent la vie. Cela se passa le troisième jour du mois de janvier de l'an susdit. Et le vingt-septième jour de ce même mois, l'empereur s'empara de la cité de Paladas qu'il avait assiégée, et la soumit totalement au tribut. |
En cesti an meismes fut bien regaris ly [p. 507] conte de Flandre. Si assemblat ses gens, se assegat Bruge en marche, dedens laqueile ly prinche de Lovay astoit ; si furent les Flamens qui astoient en Bruge en grant esmay, car ilhs voient bien que ly prinche ne les porat defendre contre le conte qui trop grant gens avoit ameneit. Adont orent conselh ensemble que ilhs renderoient Bruge à conte de Flandre ; mains ly prinche les priat que ilh se vosissent tenir à luy, ilh les seroit bon sires et isseroit fours awec eaux, si courroit sus les Flammens. Tant fist li prinche, que les gens de Bruge ly orent enconvent de luy à aidier contre leur saingnour. |
Cette même année vit le rétablissement du comte de Flandre [p. 507]. Il rassembla ses hommes et, en mars, assiégea Bruges où se trouvait le prince de Louvain. Les Flamands qui étaient à Bruges furent en très grand émoi, voyant bien que le prince ne pourrait les défendre contre le comte de Flandre qui avait amené beaucoup trop de forces. Alors ensemble, les Brugeois décidèrent de rendre Bruges au comte de Flandre ; mais le prince de Louvain leur demanda d'accepter de rester avec lui, qu'il serait pour eux un bon seigneur, qu'il sortirait hors (de la ville) avec eux et qu'il attaquerait les Flamands. Le prince réussit ainsi à obtenir l'accord des Brugeois pour l'aider contre leur seigneur. |
[L’an CVI - Trajanus l’emperere conqueste en Danemarche] En l'an cent et VI, en mois de june, assegat ly emperere Trajanus une altre citeit en Dannemarche, qui astoit nommée Ligaine, et le prist en mois d'awoust ; puis asseghat une altre, qui oit nom Galastre, où ilh avoit unc fort casteal tout enmy la citeit. Là tient ly emperere VIII mois le siege. |
[An 106 - L’empereur Trajan fait des conquêtes au Danemark] En l'an 106, en juin, l'empereur Trajan assiégea au Danemark une autre cité, nommée Ligaine, dont il s'empara au mois d'août. Puis il en assiégea une autre, nommée Galastre, où se trouvait un château très fortifié, à l'intérieur de la ville. L'empereur en fit le siège pendant huit mois. |
Victoire du comte de Flandre sur les Brugeois et mort de Jécoras, prince de Louvain - Retour des rescapés à Louvain, où Arnoul se fait appeler comte de Louvain (106)
[p. 507] [Arnuls, prinche de Lovay - Chis soy fist promir apelleir conte de Lovay] En cel an meisme, en mois d'octembre le XVIIIe jour, issit le conte Jecoras de Bruge, et oit batalhe orrible aux Flamens ; car ly conte y perdit VIIm hommes, et ly princbe y perdit IIIm. Et fut li prinche ochis, et ses gens desconfites, et s'enfuyrent vers Lovay. Si firent leur saingnour de fis Jecoras qui fut nomeis Arnuls, qui dest puisque son peire avoit esteit nomeis conte de Brughe ilh ne voloit mie reculleir, et d'or en avant feroit de son paiis une conteit, et seroit appelleis conte de Lovay. Et le fist, sy en fut le promier conte, et regnat IX ans. |
[p. 507] [Arnoul, prince de Louvain - Il se fait appeler le premier comte de Louvain] En cette même année, le 18 octobre, le comte Jécoras sortit de Bruges et livra une bataille terrible aux Flamands ; le comte y perdit sept mille hommes, et le prince trois mille. Le prince fut tué et ses troupes, défaites, s'enfuirent vers Louvain. Les Louvanistes désignèrent pour seigneur le fils de Jécoras, nommé Arnoul ; ce dernier déclara que, son père ayant été nommé comte de Bruges, il ne voulait pas descendre en dignité, et dorénavant il ferait de son pays un comté et serait appelé comte de Louvain. Ce qu'il fit. Il en fut le premier comte et régna neuf ans. |
La paix est conclue entre Trajan et les Danois sur base d'un ancien accord avec Domitien (107)
[p. 507] En cel an meismes, en mois de marche le XXe jour, prit l'emperere Trajanus la citeit de Galastre par faute de vitalhe ; car s'ilh awissent vitalhes asseis, ilh ewissent sis XX ans devant ains qu'ilh l'ewissent eut. |
[p. 507] En cette même année, le 20 mars, l'empereur Trajan prit la ville de Galastre, qui manquait de vivres. Si la ville avait eu des ressources en suffisance, les Romains auraient mis vingt ans avant de s'en emparer. |
[L’an C et VII - De Trajanus l’emperere et de roy dannois] Apres asseghat la citeit de Gadabas, là ly roy astoit fuis, sour l'an C et VII en mois d'avrilh. Si fut ly roy dannois mult dolans, car ilh n'avoit mie gens por issir fours encontre l'emperere ; se le tient là ens enclous jusqu'al XIIIIe jour de june, qu'ilh envoiat par le conselhe de ses hommes à Trajanus l'emperere dire s'ilh ly voloit rendre sa terre ilh le tenroit de luy sens payer tregut, fours le servir en batalhe où ilh en auroit mestier ; car li emperere Domitiain li avoit donneit lettre sailée del seial l'emperere Domitiain. Et quant l'emperere oiit teiles novelles, se ly remandat qu'ilh apportast ses lettres, et solonc chu ilh feroit. |
[An 107 - L'empereur Trajan et le roi danois] Après quoi, Trajan assiégea la cité de Gadabas, où le roi s'était enfui en l'an 107, au mois d'avril. Le roi danois fut très malheureux, car il ne disposait pas d'hommes assez nombreux pour faire une sortie contre l'empereur ; il se tint enfermé jusqu'au 14 juin, jour où, sur le conseil de ses hommes, il envoya dire à l'empereur Trajan que s'il voulait lui rendre sa terre, il la tiendrait de lui, sans payer de tribut mais en le servant à la guerre, là où l'empereur aurait besoin de lui. Il expliqua que l'empereur Domitien lui avait donné une lettre scellée du sceau impérial. Quand Trajan apprit cela, il lui fit savoir d'apporter les lettres et qu'il agirait en fonction de cela. |
Adont aportat ly roy dannois lettre sailée del seal Domitiain l'emperere ; mains quant Trajanus les veit, se dest qu'ilh [p. 508] voloit tenir tout chu que Domitiain avoit saileez, mains ilh relevast sa terre et demorast en pais ; car ilh avoit esteit bien jovene qu'ilh n'avoit monstreit ses lettres tout al promier quant ilh entrat en sa terre. Enssi fut fait la pais ontre l'emperere Trajanus et le roy Nabudas, par teile convent que ly roy Nabudas fist homaige à l'emperere, et ly oit enconvent del servir en batalhe où mestier ly seroit. Et adont en ralat ly emperere awec ses gens vers Romme, si rentrat le IIIe jour de decembre l'an deseurdit. |
Le roi danois apporta alors la lettre scellée du sceau de l'empereur Domitien et, quand Trajan la vit, il déclara qu'il [p. 508] voulait maintenir tout ce que Domitien avait signé. Que le roi reprenne sa terre et reste dans son pays ; il avait été bien écervelé de n'avoir pas montré ces lettres tout au début lorsque Trajan était entré dans son pays. La paix fut ainsi conclue entre l'empereur Trajan et le roi Nabudas, à la condition que Nabudas fasse hommage à l'empereur et s'engage à le servir dans les batailles en cas de besoin. L'empereur retourna alors à Rome avec ses troupes, où il arriva le troisième jour de décembre de l'an susdit. |
B. Alliances locales (Tongres, Louvain, Flandre) - cités diverses (Cologne, Mayence, Metz, Toul) - saint materne et Tongres - Trajan et Pline [Myreur, p. 508b-512a]
Ans 108-110
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* Alliances entre le roi de Tongres, le comte de Louvain et le comte de Flandre (108)
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Alliances entre le roi de Tongres, le comte de Louvain et le comte de Flandre (108)
[p. 508] [Allianches entre Arnos, le promier conte de Lovay, et Trecanus, le roy de Tongre] Item, l'an C et VIII, le XXVIIIe jour de marche, assemblat ly conte de Flandre ses oust, et entrat en la terre le conte de Lovay ; mains quant ly conte Arnos le soit, si montat sus unc cursier, et vient vers Tongre al roy Trecanus, et ly priat merchi qu'ilh ly vosist aidier contre le conte de Flandre, qui son paiis ly voloit mettre en tregut sens cause. Tant fist ly conte que ilh sont bien assembleis ensemble et acordeis, car ly conte de Lovay prist à femme Trena, la filhe al roy de Tongre. |
[p. 508] [Alliances entre Arnoul, le premier comte de Louvain, et Trécanus, le roi de Tongres] En l'an 108, le 28 mars, le comte de Flandre assembla ses armées et pénétra dans la terre du comte de Louvain. Dès qu'il apprit la chose, le comte Arnoul monta sur un coursier et arriva à Tongres auprès du roi Trécanus. Il le pria instamment de l'aider contre le comte de Flandre, qui voulait imposer sans raison un tribut à son pays. Le comte réussit à les faire se réunir et s'allier, car le comte de Louvain prit pour épouse Tréna, la fille du roi de Tongres. |
Et ly roy de Tongre mandast son oust, si s'en allat vers Lovay à grant gens ; mains oussitoist que ly conte de Flandre soit le fais, sy en est alleis contre le roy, et soy plaindit à ly de conte de Lovay, qui avoit oyut unc peire qui ly avait laidement son paiis destruit. Atant prist ly roy de Tongre le debat en sa main, et les accordat si bien qu'ilhs furent bons amis ensemble. |
Le roi de Tongres convoqua son armée et partit vers Louvain avec beaucoup d'hommes ; mais dès que le comte de Flandre apprit la chose, il alla rencontrer le roi pour se plaindre à lui du comte de Louvain, dont le père avait gravement saccagé son pays. Alors le roi de Tongres se chargea du débat, et les mit si bien d'accord qu'ils finirent tous ensemble bons amis. |
Succession au Danemark - Tremblement de terre en Grèce et en Asie - Martyre de saint Ignace d'Antioche (108-109)
Saint Materne est aussi évêque de Cologne - Digression : précisions pseudo-étymologiques sur l'origine de Cologne (ex-Agrippine), de Mayence, de Metz (Mettius Fufétius) et de Toul (Tullus Hostilius) (109)
[p. 508] [De sains Materne, evesque de Trive et Colongne] A cel temps regnoit saint Materne en la citeit de Trieve, dont ilh estoit evesque, et à Collongne, dont ilh astoit oussi evesque ; car ilh l'avoit convertit une an chi devant. Si [p. 509] astoient retourneis de la foid ; se revint adont sains Materne à Collongne, que ons nommoit adont Aggrippine. |
[p. 508] [Saint Materne, évêque de Trèves et de Cologne] À cette époque, saint Materne régnait sur la cité de Trèves, dont il était évêque, et aussi sur Cologne, dont il était également l'évêque. En effet, il avait converti cette cité un an plus tôt, mais [p. 509] elle s'était détournée de la foi. Saint Materne revint alors à Cologne, qu'on appelait à ce moment-là Agrippine. |
[Porquoy Collongne oit nom Aggrippine] Si vos diray porquoy ilh avoit à nom Aggrippine. Quant ly roy Colongus de Tongre le reedifiat, se le nomat apres luy Colongne, sicom nos avons dit desus. Mains al temps que Trieve fut fondée, et longtemps apres, fut uns roy de Trive qui avoit nom Aggrippinus ; et devant y avoit oyut unc qui oit à nom Magontinus. Ches dois roys à leurs temps edifiarent, ly uns la citeit de Magunche, que ons apelle Maienche, et li altre roy fist la citeit d'Agrippine, que nos nomons Collongne. |
[Pourquoi Cologne porta le nom Agrippine] Voici pourquoi. Quand le roi Colongus de Tongres la reconstruisit, il l'appela Cologne, d'après son nom, comme je l'ai dit (cfr p. 450). Mais longtemps après la fondation de Trèves, il y eut un roi de Trèves, nommé Agrippinus ; et avant lui, un autre appelé Magontinus. Ces deux rois édifièrent, en leur temps, l'un la cité de Magonche qu'on appelle Mayence, et l'autre la cité d'Agrippine que nous nommons Cologne. |
[De la citeit de Mes et Tou] Et enssi vint à cel temps meisme unc roy de Albaine, qui astoit nomeis Metius Suffitius, qui edifiat la citeit de Mes en Lhoraine. En apres Tullius, ly roy des Romans, edifiat là une citeit à XV liewe de Messe qu'ilh appellat Tou la citeit. |
[Les cités de Metz et Toul] Arriva aussi à cette époque-là un roi d'Albe, nommé Metius Suffitius [Mettius Fufétius], qui fonda la cité de Metz en Lorraine. Et par la suite, Tullius [Tullus Hostilius], le roi des Romains, fonda une cité à quinze lieues de Metz, qu'il appela Toul. |
Saint Materne convertit non seulement Cologne mais aussi toute la région jusque et y compris Tongres - Le roi de Tongres est alors Trécanus qui s'oppose d'abord à Materne et veut lui couper la langue - Par miracle, le couteau s'échappe des mains du roi et lui crève un oeil, qu'il récupérera grâce à l'intervention d'un corbeau qui le rendra au roi - Celui-ci se fait baptiser avec l'ensemble de la population - Son nom de baptême est Pierre - Il donne à Materne et à ses successeurs le pouvoir temporel et spirituel sur la ville de Tongres, en réservant toutefois une part pour ses enfants - Materne devient ainsi évêque de Trèves, de Cologne et de Tongres (110)
[p. 509] [De sains Materne, qui convertit Collongne par myracles, et Tongre après] Sains Materne vint à Collongne, sicom nos avons dit desus, et prechat à peuple mult saintes et bonnes parolles ; et fist Dieu tant de myracles par ly, si com de mors resusciteir, les avoigles renlumyneir, et kotrais et bostois drois ralleir, et mondoit les lepreux. Quant ly conte Hiraire de Collongne et la contesse et tout ly peuple veirent chu, ilhs creirent et demandont baptesme. Adont sains Materne les baptizat tous, et adont ly conte le fist evesque de Collongne, et demorat conte temporeis. Apres commenchat sains Materne à prechier le paiis entour Collongne, et convertit tous les casteals et vilhes jusqu'à Tongre, la noble citeit. |
[p. 509] [Les miracles de saint Materne convertissent Cologne, puis Tongres] Saint Materne se rendit donc à Cologne, comme nous l'avons dit plus haut (p. 508), et fit devant le peuple beaucoup de belles prédications. Par son intermédiaire, Dieu accomplit de nombreux miracles, comme ressusciter des morts, rendre la vue à des aveugles, redresser les boîteux et les bossus, guérir les lépreux. Quand le comte Hiraire de Cologne, la comtesse et tout le peuple virent cela, ils devinrent croyants et demandèrent le baptême. Alors saint Materne les baptisa tous. Le comte le fit évêque de Cologne, dont il resta comte temporel. Ensuite, saint Materne commença à prêcher dans le pays autour de Cologne ; il convertit tous les châteaux et les villes, jusqu'à Tongres, la noble cité. |
[Tongre fut convertie] Adont s'avisat sains Materne par le inspiration de Dieu, et commenchat à prechier parmy Tongre. Si avint que mult de gens le siwoient, por les beaux exemples et myracles que ilh monstroit. Adont une fois y oit mult de gens qui ne voloient mie croire ; et oussi y oit des cheaux qui bien le creioient. Si avient que adont ilh y oit pluseurs grans saingnours qui desserent a roy Trecanus que ilh fesiste à chis prophete osteir la langue, car [p. 510] par sa langue ilh tournoit toutes ses gens à une novelle loy. Quant ly roy entendit chu, si fut mult yreis ; si vint où sains Materne sermonoit, tenant en ses mains une maiche. Si commenchat ses gens à battre, et en battant ilh en ochist XLIX ; et fist prendre sains Materne et ly dest : « Vilhars, tu as confondus nos dieux et notre loy, tu y moras, et promier toy talheray la laingue qui at mes gens dechuites. » |
[Conversion de Tongres] Alors, inspiré par Dieu, saint Materne décida de commencer à prêcher à Tongres. Un grand nombre de gens le suivaient, à cause des beaux exemples et des miracles qu'il réalisait. Beaucoup ne voulaient pas croire, mais il y avait aussi des gens qui croyaient. Il arriva un jour que certains grands seigneurs dirent au roi Trécanus de faire arracher la langue de ce prophète, car [p. 510] cette langue détournait tous ses sujets vers une nouvelle religion. Quand il entendit cela, le roi fut très fâché. Une massue à la main, il se rendit à l'endroit où Materne prêchait. Il commença à s'en prendre aux amis de Materne et en tua quarante-neuf ; il fit arrêter le saint et lui dit : « Vieillard, tu t'en es pris à nos dieux et à notre religion, tu en mourras, mais d'abord je te couperai la langue, qui a trompé mes sujets. » |
[Grant myracle de sains Materne] Atant prent ly roy I cuteal, et li voult la langue coupeir ; mains Dieu y demonstrat myracle, car ly culteal li lanchat fours des mains et salhit le roy en diestre oelh, se ly crevat l'oelh. Et quant ly roy sentit son oelh creveit, si fut mult enspauwenteit ; et awec le paour que ly roy oit, se l'espirat Dieu qu'ilh escriat à sains Materne en disant : « Sains hons, je toy prie merchi, et veulhe pryer ton Dieu qu'ilh moy rende mon oelh, enssi com je avoy devant, et je croray en ly et moy feray baptizier. » Sains Materne entendit le roy, sy en fut mult llies ; puis fist son orison à Dieu qu'ilh demonstrat myracle al roy. Atant revient à roy son oelh, et ly raportat unc colon, et ly rasit en son chief. |
[Grand miracle de saint Materne] Alors le roi prit un couteau et voulut lui couper la langue ; mais Dieu se manifesta par un miracle : le couteau s'échappa de ses mains, sauta sur l'oeil droit du roi et le lui creva. Quand le roi sentit son oeil crevé, il fut absolument épouvanté ; et comme il avait peur, Dieu lui inspira d'appeler à grands cris saint Materne en disant : « Saint homme, j'implore ta pitié, veuille prier ton Dieu de me rendre mon oeil, tel que je l'avais avant ; alors je croirai en lui et je me ferai baptiser ». En entendant le roi, saint Materne fut très heureux et, dans sa prière, demanda à Dieu de faire un miracle. Le roi retrouva son oeil qui lui fut rapporté et remis en place par un pigeon. |
[Ly roy de Tongre fut baptisiet par sains Materne - LXm baptisiés] Adont soy baptizat ly roy qui fut nomeis Pire, apres sains Pire ; et fut proidhons et loial, et ensachat nostre loy. Item, li roy Pire fist crier une bain qui prenderoit baptesme ilh le quitteroit de tous servaige. Atant prendent tous baptemme : si en fuit bien baptiziés LXm hommes et femmes, et ortant de jovenes enfans. |
[Le roi de Tongres est baptisé par saint Materne - 60.000 baptisés] Alors le roi se fit baptiser et reçut le nom de Pierre, celui de saint Pierre. Le roi fut sage et loyal, il adopta notre foi et fit proclamer dans un ban qu'il libérerait du servage tout qui se ferait baptiser. Alors tous se firent baptiser : il y en eut bien soixante mille hommes et femmes, et autant d'enfants. |
[IIIIc M VIIIc et XLV baptosiés à Tongre] Tant fist sains Materne, qui sont tous baptiziés, de jour en jour, tout le peuple de Tongre, qui en la fin montat bien IIIIc M VIIIc et XLV hommes et femmes. Et fut sour l'an C et X, le XVIIIe jour de mois d'avrilh. De Tongre la conversion fut faite à la manere que j'ay deviseit. |
[400.845 baptisés à Tongres] Saint Materne fit en sorte que toute la population de Tongres soit baptisée, jour après jour ; ils furent finalement quatre cent mille huit cent quarante-cinq hommes et femmes. Cela se passa en l'an 110, le 18 avril. La conversion de Tongres se produisit comme je l'ai racontée. |
Et ly roy Pire appellat unc jour sains Materne, et ly dest : « Sire, por l'amour de Dieu Emanuel, je vos donne cel citeit qui est belle et bonne, et que vos et les aultres evesques apres vos en soient sires entirement et perpetuelment, tant spirituel com temporeile ; car en sereis evesque, et serais sires spiritueis par tout mon rengne, si avans que vos en poreis convertir le peuple, et vos successeures. Sachiés que j'ay unc fis et III filhes qui auront de mon paiis tout la temporaliteit, cascon sa part ; si [p. 511] en auront asseis, car ilh n'at si grant decha mere, fourmys l'empire de Romme. Je demoray awec vos en servant Dieu et la virge Marie, sa benoite mere. » |
Le roi Pierre appela un jour saint Materne et lui dit : « Seigneur, pour l'amour de Dieu Emmanuel, je vous donne cette cité, belle et bonne, afin que vous et les évêques qui vous succéderont en soient totalement et perpétuellement les seigneurs, tant spirituels que temporels. Durant tout mon règne, vous en serez l'évêque et le maître spirituel, et dorénavant vous et vos successeurs pourrez en convertir les habitants. Sachez que j'ai un fils et trois filles, qui auront, sur mon pays, chacun leur part de souveraineté temporelle. [p. 511] Leur part sera importante car, en deçà de la mer, il n'existe aucun pays plus grand que le mien, excepté l'empire de Rome. Je resterai avec vous, en servant Dieu et la Vierge Marie, sa bienheureuse mère. » (cfr p. 514). |
[Sains Materne fut vesque de Trive, Collongne et Tongre - L’église Sains-Pire] Ors fut sains Materne evesque de Trieve, Collongne et de Tongre. Et ly roy Pire, tantoist en mois de junne, commenchat à fondeir une mult belle engliese en l'honeur de sains Pire, son parin ; si fut parfaite l'an C et XIIII. Et sains Materne fondat tantost une en l'honneur de son predicesseur sains Euchars et sains Valeir, deleis le Marchiet, en lieu que on dist en hanche. |
[Saint Materne est évêque de Trèves, Cologne et Tongres - L’église Saint-Pierre] Et le roi Pierre, dès le mois de juin, commença à construire une très belle église en l'honneur de saint Pierre, son parrain ; elle fut achevée en l'an 114. Saint Materne en construisit aussitôt une autre, en l'honneur de ses prédécesseurs, saint Euchaire et saint Valère, près du Marché, au lieu-dit Sur le haut. |
Trajan charge Pline de martyriser les chrétiens puis, mieux renseigné par Pline, interdit de les poursuivre (110)
[p. 511] [L’an C et X - Trajain envoiat Plinius ochire tos les cristiens] En cel an meismes C et X, a ly emperreur Trajan envoiet unc prinche de Romme, qui fut nommeis Plinius, qui fut uns gran clers et hystoriographins, en une provinche à gardeir appartenant al empire de Romme. Se ly commandat ly emperere que ilh ochesist tous les cristiens que ilh troveroit en chest provinche. |
[p. 511] [An 110 - Trajan envoie Pline tuer tous les chrétiens] En cette même année 110, Trajan, l'empereur de Rome, envoya un prince de Rome, nommé Pline, grand lettré et grand historiographe, pour gouverner une province appartenant à l'empire de Rome. L'empereur lui donna l'ordre de mettre à mort tous les chrétiens qu'il trouverait dans cette province. |
Et quant chis Plinius fut venus en chest provinche, si commenchat à ochire les cristiens ; mains de chu oit mult grant mervelhe, car plus ochioit des cristiens, plus en revenoit lendemain. Chu envoiat-ilh dire à l'emperere, et ly mandat qu'ilh les faisoit à petit cause ochire, car ilhs n'astoient à reprendre que de dois chouses : ly une, sy astoit de chu qu'ilh ne voloient mie faire sacrifice aux dieux de Romme, et ly aultre astoit de chu qu'ilh soy relevaient par nuit por aoreir leurs Dieu et rendre grasce à luy, qui est contre les usaiges de Romme. |
Une fois arrivé dans cette province, Pline commença à faire mettre à mort tous les chrétiens ; mais une chose l'étonna beaucoup : plus il en tuait, plus nombreux ils revenaient le lendemain. Il le fit savoir à l'empereur, en l'informant aussi qu'il les faisait mettre à mort pour des raisons fort peu fondées. En effet deux choses seulement pouvaient leur être reprochées : la première était de refuser d'offrir des sacrifices aux dieux de Rome, la seconde, de se lever la nuit pour adorer et rendre grâces à leur Dieu, ce qui était contraire aux usages romains. |
[Trajain l’emperere commandat que nuls ne fache riens aux cristiens, par le conselhe de Plinius] Quant Trajain l'emperere oiit chu, sy radouchist sa fellonie, car ilh en fut tout apasenteis. Et de là en avant commandat-ilh à tous les prinches qui astoient desour luy, que nuls d'eaux ne meffache de riens aux cristiens, ne qui enquisist plus avant de leur loy. Enssi rapasentat Plinius l'emperreur. |
[Sur le conseil de Pline, Trajan ordonne que personne ne fasse aucun tort aux chrétiens] Quand l'empereur Trajan apprit cela, il en fut complètement apaisé et relâcha sa cruauté. Dorénavant il ordonna à tous les princes qui dépendaient de lui de ne faire aucun mal aux chrétiens et de ne pas enquêter davantage sur leur religion. Ainsi Pline apaisa l'empereur. |
Pline écrit sur l'histoire naturelle et sur l'histoire de Tongres, notamment sur sa fontaine miraculeuse
[p. 511] [Plinius qui escript le hystoire de Tongre et le libre de nature] Chis Plinius fut chis qui escript à Wespasianus le libre de natures, une tres-belle hystoire. Chu fut chis qui escript le hystoire de Tongre, de Tongris, le promier roy, jusque al IIIIe année que sains Materne y vint ; et li fins de ses croniques finat l'an del incarnation C et XIIII. |
[p. 511] [Pline écrit l'histoire de Tongres et le livre sur la nature] C'est ce Pline qui écrivit pour Vespasien le livre sur la nature, une très belle histoire (= L'Histoire naturelle). Il écrivit aussi l'histoire de Tongres, depuis Tongris, le premier roi, jusqu'à la quatrième année après l'arrivée de saint Materne. Sa chronique s'arrête à l'an 114 de l'incarnation. |
[De vertut del fontaine de Tongre] Là parolle-ilh de la fontaine qui astoit adont à Tongre en son libre, et de la nature des aighes, et dist en teile manere : « Ilh at à Tongre une citeit, en laqueile ilh at une fontaine mult noble de pluseurs bullons boilans et jettans sawour de fier ; ilh at teile virtut, [p. 512] quant ons le boit, ilh purge le corps des fievres tirchaines, et garist le gravalle et pluseurs altres maladie ; et ledit aighe chaufée à feu et ostée devint toublée, et en apres devient tout roige. » |
[Les vertus de la fontaine de Tongres] Pline parle dans son livre de la fontaine qui se trouvait alors à Tongres et de la nature de ses eaux. Il explique : « Il y a une cité, à Tongres, où se trouve une source très célèbre, qui bouillonne à grands jets en diffusant un goût de fer ; quand on la boit, l'eau de cette fontaine a pour vertu [p. 512] de purger le corps des fièvres tierces et de guérir la gravelle ainsi que beaucoup d'autres maladies. Si on la chauffe sur un feu puis qu'on l'en retire, cette eau devient trouble et toute rouge. » |
C. suite des Guerres de Trajan - Papauté - partage du royaume de Tongres [Myreur, p. 512b-514a]
Ans 111-114
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Trajan conquiert diverses cités en Espagne (111) - Le roi d'Espagne obtient le renfort du roi Sédroc d'Égypte (112)
[p. 512] [Trajain l’emperere conquist mult de citeis en Espangne] En cel an meismes, assemblat l'emperere Trajain ses gens, et s'en allat en Espangne, et asseghat la citeit de Bucaine, et le prist par forche, l'an C et XI, en mois de may, et mist par dedens de ses gens qui le gardont. |
[p. 512] [Trajan l’empereur conquiert de nombreuses cités en Espagne] Cette même année, l'empereur Trajan rassembla ses troupes et partit en Espagne. Il assiégea la ville de Bucaine et s'en empara par la force en l'an 111, au mois de mai. Il y plaça des hommes à lui pour la garder. |
Et puis soy partit l'emperere et allat assegier la citeit de Momatas (qui fut puis nommée Covindre [ms. B]), devant laqueile ilh seit par l'espause de trois mois, tant astoit foirt ; et ilh le prist en mois d'awoust. Et puis asseghat la citeit de Laudaluf, qui astoit mult fort ; mains quant ly roy d'Espangne, qui fut nomeis Bosados, et son fis Agildoras le soirent, ilhs assemblont leurs gens et vinrent devant la citeit où ly emperere seioit, et oit à ly batalhe mult pesante ; mains les Romans orent la victoire. |
Puis l'empereur Trajan s'en alla attaquer la cité de Momatas (qui fut ensuite appelée Covindre [ms. B]), dont il fit le siège durant trois mois, tant elle était bien protégée. Il s'en empara au mois d'août. Puis il assiégea la cité de Laudaluf, qui était très fortifiée. Mais quand le roi d'Espagne, nommé Bosados, et son fils Agildoras apprirent la chose, ils rassemblèrent leurs hommes et vinrent devant la ville assiégée par l'empereur. Une bataille très dure s'y déroula ; mais les Romains remportèrent la victoire. |
[Lucerne la citeit] Si s'enfuit ly roy d'Espangne à chu de gens qu'ilh ly remanit, car ilh avoit perdut XIIm hommes ; si ne s'arestat, se vient en la citeit de Calangus, qui fut depuis nommée Luserne, qui astoit une des fortes citeit de monde, et ne dobtoit nulle siege ; se l'avoit fait edifier à son temps le roy d'Espangne, qui oit nom Luserniain. Devant cest citeit seit jà ly roy Karle de France VII ans. Et portant que cest citeit astoit si forte, entrat dedens li roy d'Espangne. |
[La cité de Luserne] Alors le roi d'Espagne s'enfuit avec ce qui lui restait de ses troupes : il avait perdu douze mille hommes. Sans s'arrêter, il arriva à Calangus, appelée depuis Luserne, qui était dans le monde une des places-fortes qui ne redoutait aucun siège. Elle avait été construite en son temps par le roi d'Espagne, nommé Lusernien. [Plus tard], le roi de France Charlemagne en fit le siège pendant sept ans (Myreur, II, p. 532-533 ; III, p. 334, p. 401, p. 406). Et parce que cette cité était très fortifiée, le roi d'Espagne s'y installa. |
Et puis mandat Sedroc, le roy d'Egypte, que ilh ly venist aidier encontre l'emperere de Romme, qui ly destruoit son paiis ; car ilh ly avoit enconvent qu'ilh ly aideroit et qu'ilh seroit quitte de tregut qu'ilh rendoit aux Romans. Ly messagier fut envoiet ; et ly roy d'Egypte assemblat ses oust et vint en Espangne, l'an C et XII Ie IIIIe jour d'avrilhe. |
Il fit ensuite appel à Sedroc, le roi d'Égypte, lui demandant de l'aider contre l'empereur de Rome, qui détruisait son pays. Il était convenu que Sedroc l'aiderait et serait quitte du tribut qu'il payait aux Romains. Le messager fut envoyé et le roi d'Égypte, après avoir rassemblé ses troupes, se rendit en Espagne en l'an 112, le 4 avril. |
Mort du pape Évariste - Ses ordonnances (mariage, surveillance des évêques) - Son successeur Alexandre (111)
[p. 512] [L’an C et XI - Li pape Evaristus morut] Item, l'an C et XI, en fevrier le XXVe jour, morut ly VIe pape à Rome, Evaristus, et fut martirisiés par les servans de l'emperere, de temps que l'emperere astoit en Espangne ; si fut ensevelis deleis la sepulture sains Pire. |
[p. 512] [An 111 - Mort du pape Évariste] Et en l'an 111, le 25 février, le sixième pape de Rome, Évariste, mourut ; il fut martyrisé par ceux qui étaient au service de l'empereur [Trajan], au temps où celui-ci combattait en Espagne ; Évariste fut enseveli près de la tombe de saint Pierre. |
[Del orde de mariage] Chis pape ordinat que cheaux qui se voloient prendre par mariage, que ons les esposast publement devant les gens et en l'engliese, et fussent sollempnement benys par le preistre. Et oussi ilh ordinat en la citeit de Romme des preistres et des dyaques qui devoient gardeir l'evesque, quant ilh prechoit, qu'ilh ne fuist par ses anemis trahis en anonchant la parolle [p. 513] de Dieu. |
[Décision concernant le mariage] Ce pape ordonna que ceux qui voulaient s'unir par mariage devaient le faire en public, en présence du peuple et dans l'église, et recevoir la bénédiction solennelle d'un prêtre. En outre, dans la ville de Rome, il nomma des prêtres et des diacres chargés de veiller l'évêque durant ses prêches, pour éviter qu'il ne soit enlevé par ses ennemis, quand il annonçait la parole [p. 513] de Dieu. |
[Alixandre, le VIIe pape de Romme] Apres la mort le pape Avaristus, quant ly siege oit vakeit XIII jours, si fut consecreis à pape de Romme Alixandre, qui fut de la nation de Romme, le fis Alixandre qui astoit prinche de la royalme de Chivretaine, lyqueis tienet le siege par l'espause de VIII ans V mois et II jours ; et fut mult proihons. |
[p. 513] [Alexandre, septième pape de Rome] Après la mort du pape Évariste, suivie d'une vacance de treize jours du siège pontifical, Alexandre, un Romain, fils d'Alexandre, prince du royaume de Chivretaine [cfr Introd.], fut consacré pape de Rome. Il occupa le siège pontifical durant huit ans, cinq mois et deux jours. Ce fut un homme très sage. |
Trajan, avec l'aide des Danois, des Romains et des Carthaginois, finit par l'emporter sur les rois d'Espagne et d'Égypte, qui meurent au combat - Trajan impose son tribut aux vaincus et désigne ses alliés de Carthage comme rois d'Espagne et d'Égypte - Après quoi, tous rentrent dans leurs pays (112-114)
[p. 513] [De Trajain l’emperere] En cel an conquestat l'emperere Trajan par forche la citeit de Laudaluf, le XVIIe jour de marche, puis s'en alat vers Galangus ; mains ilh encontrat en sa voie le roy d'Espangne et le roy d'Egypte, si oit batalhe à eaux, et là fut mors ly roy d'Egypte et bien XIIIIm hommes d'Egypte et d'Espangne. Et encordont fut Trajain l'emperere desconfis, et si perdit de ses gens jusqu'à Vllm hommes ; car ilh astoit tant des aultres, que les Romans ne porent endureir leur forche. |
[p. 513] [Trajan l’empereur] Cette année-là, Trajan conquit par la force la cité de Laudaluf, le 17 mars, puis marcha vers Galangus ; il rencontra sur sa route le roi d'Espagne et le roi d'Égypte. Lors de la bataille qui les opposa, le roi d'Égypte mourut ainsi qu'au moins quatorze mille Égyptiens et Espagnols. Et pourtant l'empereur Trajan fut battu et perdit quelque sept mille hommes. Leurs adversaires étaient si nombreux que les Romains ne purent supporter leur attaque violente. |
Adont s'enfuit l'emperere et ses Romans à Laudaluf, et envoiat par mere messagiers à Romme et en Affrique et en Dannemarche quiere soucour. Quant les messagiers vinrent là où ilhs astoient envoiés, si assemblont cascon leurs oust et montarent sour mere, et vinrent nagant vers Espangne. Et adont les Egiptiiens fisent roy de Eydroc, le fis leur roy qui astoit mors, puis vinrent assegier Laudaluf où l'emperere astoit awec ses gens, qui mult astoit fort. Adont fut pluseurs fois assalhie ; mains les Romans le defendirent gentiment bien XI mois. |
L'empereur et ses Romains s'enfuirent alors à Laudaluf. Trajan envoya par mer des messagers à Rome, en Afrique et au Danemark, pour demander des secours. Quand les messagers furent arrivés à destination, les armées furent rassemblées, prirent la mer et arrivèrent en Espagne. Les Égyptiens qui avaient alors désigné comme roi Eydroc, le fils de leur roi mort, vinrent assiéger Laudaluf, cité très fortifiée, où l'empereur s'était retiré avec ses troupes. Maintes fois assaillie, elle fut parfaitement défendue par les Romains pendant onze mois. |
[De roy de Hongrie] En cel an, en mois de octembre, morut Gombas, le XIIIe roy de Hongrie ; si regnat apres son fis Porus XXVI ans. |
[Le roi de Hongrie] En cette année, au mois d'octobre, le treizième roi de Hongrie mourut ; son fils Porus lui succéda et régna vingt-six ans. |
En cel an, le XIIIIe jour de marche, entrat ly roy Ogens de Dannemarche à unc des corons de Espangne ; et Salomados, ly roy de Cartaige, entrat à une aultre costeit, et les Romans apres ; et commencharent le paiis à destruier. Si avient que ly roy d'Espangne le soit, se fut mult enbahis ; si fist faire des fosseis entour son oust mult porfons. |
Le 14 mars de la même année, le roi Ogens de Danemark arriva par un des côtés de l'Espagne et Salomados, le roi de Carthage, entra par un autre côté. Puis arrivèrent les Romains. Quand le roi d'Espagne apprit cela, il fut tout effrayé ; il fit creuser des fossés très profonds autour de son armée. |
[L’an CXIII - Espangne fut desconfist par l’empereir] Adont l'an C et XIII, en mois de junne le IXe jour, oit ly roy d'Espangne et ly roy d'Egypte batalhe à l'emperere Trajain, qui avoit awec ly tout son soccour : et là fut ly estour fort, qui durat de la journée jusques al vesprée. Et là furent les Espangnois mult laidement desconfis ; et y fut ochis ly roy [p. 514] d'Espangne et ly roy d'Egipte et awec de leurs gens XVIm hommes ; et ly emperere awec le roy de Cartaige y perdirent IXm hommes. Et apres les remist l'emperere en son tregut tous com devant. Adont fist-ilh de Soladas, qui astoit roy de Cartaige, roy d'Espangne, et de son frere Ignodas fist-ilh roy d'Egypte. Et quant tout chu fut fait, l'emperere remerchiat mult à roy de Dannemarche de son bon serviche. |
[An 113 - L'Espagne est défaite par l’empereur] Alors, en l'an 113, le 9 juin, une bataille se déroula entre le roi d'Espagne et le roi d'Égypte d'un côté, l'empereur Trajan et tous ses renforts de l'autre. Le combat fut sanglant et dura toute la journée, jusqu'au soir. Les Espagnols furent très vilainement défaits. Le roi d'Espagne [p. 514] et le roi d'Égypte y perdirent la vie, ainsi que seize mille de leurs hommes. L'empereur et le roi de Carthage en perdirent neuf mille. Par la suite l'empereur leur imposa à nouveau un tribut, comme précédemment. Puis il nomma roi d'Espagne Soladas, qui était roi de Carthage, et il nomma son frère Ignodas roi d'Égypte. Quand tout fut terminé, l'empereur remercia vivement le roi de Danemark pour ses bons services. |
[L’an C et XIIII] Atant se sont departis et cascons en est raleis en son paiis ; et rentrat l'emperere en la citeit de Romme, en mois de may, l'an C et XIIII. |
[An 114] Alors ils se séparèrent et chacun retourna dans son pays. L'empereur rentra dans la ville de Rome au mois de mai de l'an 114. |
Divers : Partage du royaume de Tongres, selon le testament de Pierre, son dernier roi - Ordonnance du pape Alexandre sur l'eau bénite - Succession à Louvain - Tremblement de terre à Antioche (114-115)
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