Bibliotheca Classica Selecta - Autres traductions françaises dans la BCS
Anthologie Palatine : Présentation générale - Biographies des poètes
Anthologie Palatine - Livre XII : Avant-propos - Plan - Table des matières - Biographie des poètes
Anthologie Palatine
Livre XII
(201-258)
201 202 203 204 205 206 207 208 209 210 211 212 213 214 215 216 217 218 219 220 221 222 223 224 225
226 227 228 229 230 231 232 233 234 235 236 237 238 239 240 241 242 243 244 245 246 247 248 249 250
Straton, Rendez-vous
Si mon aimé n'arrive pas dans un instant,
Il ne remettra plus les pieds dans ma maison,
Je le jure par les... Ne jure pas, Straton !
Si son retard est dû à des rêves trop longs,
Qu'il revienne demain !
Et je n'en mourrai point !
Straton, Rapide comme l'air !
Grâce à l'Amour ailé, dans l'air je me hasarde
Dès l'instant que j'ai su ton arrivée à Sardes.
Un seul bond a suffi de Smyrne à ma cité :
Zétès ou Calaïs1 ne m'auraient pas vaincu
Par leur rapidité !
1. Zétès et Calaïs, fils de Borée, étaient considérés comme des coureurs infatigables.
Straton, Contrariant !
Non, je n'ai pas envie et pourtant ce baiser !
Toi non plus, tu n'as pas envie quand je t'embrasse.
Je fuis, ton amour est aisé,
Je viens, tu veux quitter la place.
Straton, Un échange inégal
Il faut dire aujourd'hui : «De l'airain pour de l'or !
Donne et sers-toi.» Tel est le jeu qui a tant plu
Au beau Sosiadas et Dioclès le velu.
La rose et le chiendent, qui donc les a mêlés ?
Et qui a mélangé vache et agneau de lait ?
Idiot, tu as donné tant pour emporter quoi !
Sais-tu, Diomède a donné la même chose
À Glaucos autrefois !
Straton, Le beau raisin
Le garçon du voisin
(Je crois qu'il a douze ans)
M'excite étrangement.
Pour montrer son «béguin»,
Il rit fort, le coquin !
Certes, il n'est pas mûr,
Ce merveilleux raisin
Et surtout pas gardé.
Quand il sera à point,
Se dresseront les murs !
Straton, L'exercice physique
Quand tu lui dis : «Prends-moi fort, bascule, ceinture,
Pousse et tiens la mesure !»
Mais c'est fou, Diophante ! Impossible exercice !
Entraîner ces jeunots, c'est vraiment autre chose !
Laisse-toi secouer et sois ferme, ô Cyris !
Sois fort, soutiens le choc quand tu veux le soumettre !
Il faut coopérer avant d'être le maître1.
1. Confusion ironique entre exercices de lutte et ébats amoureux.
Straton, Aux bains
Alors qu'il se baignait, notre beau Dioclès
Fit jaillir son lézard1, comme des eaux Cypris.
S'il l'avait, sur l'Ida, montré devant Pâris,
Ce dernier aurait-il choisi les trois déesses ?
1. En fait, sa verge...
Straton, Un livre précieux
Ô livre, tu te grises !
Je ne suis pas jaloux
Qu'un beau garçon te lise,
Te presse sur ses joues,
Et te serre sous son menton
Ou te fasse rouler sur ses cuisses si fraîches.
Quelle sensation !
Tu resteras porté dans un pli de tunique
Ou bien, sur un banc, tu toucheras ses trésors...
Mais quand il sera seul, et c'est là ma supplique,
Parle de moi très fort.
Un aimé peu enthousiaste
Ne sois pas tristounet sur ma couche, Diphile !
Ne sois pas moutonnier, j'ai besoin de tendresse.
En prélude à l'amour, sois donc un peu habile
En jeux voluptueux, en baisers, en caresses...
Straton, Le compte est bon !
Compte ! Trois dans un lit et deux qui le pénètrent.
Et cependant deux se font mettre :
Cela paraît peu ordinaire.
Mais non, je ne mens pas ! Car celui du milieu
En satisfait à la fois deux :
Il jouit par-devant, fait jouir par derrière.
Straton, Le jeune expert1
Si tu ne connaissais la chose,
Tu t'effraierais, je le suppose.
Mais ton maître t'a enseigné
Ce que tu veux me refuser.
Lui dort, une fois satisfait ;
Moi, je te donnerai tendresse,
Douceur, loyauté, et le reste,
Si seulement tu le désires :
Je n'aime pas te voir souffrir.
1. Il s'agit visiblement ici d'une relation maître-esclave.
Straton, Le prostitué
Voyons, mon petit, mais tu pleures !
Pourquoi nous fais-tu triste mine ?
Oui, dis-moi ce qui te chagrine ?
Mais que se passe-t-il ? Tu tends la main ? Je meurs !
Tu veux être payé1 ! Quelles sombres idées
Bouillonnent dans ta tête ?
Je sens qu'il n'est plus temps de t'offrir des galettes,
Encore moins des osselets.
Par l'hydre de l'argent te voilà dominé :
Lui seul te tient à cœur !
Qu'il meure ton instructeur !
Il t'a bien abîmé !
1. L'épigramme montre à quel point les éromènes, à l'époque de Straton, profitaient de ce rite de passage pour se faire payer, bref pour se prostituer..
Straton, Le mur
Pourquoi coller au mur ton charmant postérieur ?
Tu veux tenter ce roc qui n'a point de vigueur.
Straton, L'amour gratuit
Donne-moi ton amour et prends l'argent !
Tu me diras : «J'en ai suffisamment !»
Bon, comme un roi, offre-moi ce présent !
Straton, Attention à l'automne !
Aujourd'hui, ton printemps sonne ;
Après, viendra le bel été.
Ensuite, ce sera ton automne
Et la paille pour te gâter.
Straton, Raideur et mollesse
Tu es raide aujourd'hui, sans raison apparente.
Hier il était là : tu étais décevante !
Straton, Le nouveau Patrocle
Ainsi tu veux devenir un soldat,
Toi qui n'es qu'un enfant si pur, si délicat !
Réfléchis puis change d'idée !
Mais voyons, de t'armer qui t'a persuadé ?
Oui, qui t'a dit de prendre un bouclier
Et de cacher ton front sous ce casque peu subtil.
Allons, je crois que déjà il s'enchante,
Lui, le nouvel Achille,
De trouver un Patrocle1 sous sa tente.
1. Depuis la pièce d'Eschyle, Les Myrmidons, il ne faisait plus aucun doute chez les Grecs que Patrocle et Achille entretenaient des rapports homosexuels.
Straton, Le rieur
Tu ris et ne dis rien !
Combien de temps devrons-nous supporter ?
Mon Pasiphile, explique-toi enfin !
Je demande, tu ris, ne réponds point.
Je pleure et tu ris aux éclats,
Bourreau ! Rire, est-ce vraiment cela ?
Straton, Aux professeurs ingrats
Vous osez demander un salaire, ô maîtres.
Ingrats ! Voir des garçons, cela n'est rien, peut-être ?
Leur adresser un mot, les caresser encor,
Ça ne vaut-il pas mieux que de la monnaie d'or ?
Envoyez-moi ces beaux minois !
Si l'enfant me donne un baiser, qu'il prenne alors
Ce qu'il voudra chez moi.
Straton, La faute à Prométhée
Le vol du feu, ô Prométhée,
Ne fut point la raison de ton enchaînement.
Artisan peu habile,
On te punit d'avoir gâté
Le souverain argile.
En créant les humains, tu les rendis poilus :
D'où cette barbe affreuse et ces mollets velus
Que montrent nos garçons.
Aussi l'aigle de Zeus qui ravit l'échanson
- Le joli Ganymède -
T'abîme-t-il le foie car le grand dieu lui-même
Trouve la barbe laide.
Straton, Le rapt de Ganymède
Aigle, élève-toi jusqu'au sommet des cieux,
Et surtout retiens bien cet enfant précieux,
Ganymède, celui qui doit servir les dieux.
Prends garde qu'entre tes griffes il ne se blesse
Pour que Zeus ne soit pas accablé de tristesse.
Straton, À la palestre
Un jour, à la palestre, un chanceux professeur
Entraînait un éphèbe au corps plein de douceur.
L'ayant mis à genoux, il caressa ses boules...
Mais le maître survint : malheureux coup du sort !
Soudain, il prit l'enfant, l'étreignit violemment
Afin de démontrer qu'il l'exerçait vraiment.
Le maître, point naïf, lui dit ces quelques mots :
«Tu l'étouffes, voyons, notre pauvre marmot.»1
1. Cette épigramme, tout comme XII, 206, révèle que les palestres étaient des lieux où l'on s'adonnait autant aux joies du sexe qu'à l'exercice physique...
Straton, Ode au visage
Chez un éphèbe de passage,
Ma joie n'est absolue
Qu'à la beauté de son visage.
Et qu'importe son cul !
Après tout, ce n'est que de front
Que l'on contemple une statue.
Par derrière, pas de raison !
Straton, L'amour et la beauté
Nous avons emprunté
Le bon sentier ; mais comment, ô Diphile,
Pourrons-nous y rester ?
Car nous avons tous deux quelque chose qui file
Inexorablement :
Moi l'amour, et toi la beauté.
Pour que notre union puisse durer longtemps,
Sachons les saisir au passage.
Demeurent-ils soudain sans gardien vigilant,
Et les voilà partis rejoindre les nuages...
Straton, Le taureau et le chien
Que ne se mêlent point
Taureau et chien1 bouillant,
Lorsque soudain s'élève
Le soleil du matin !
Ne jette pas ta sève
Au fond du récipient
Qui est à Déméter,
La fertile déesse :
Tu mouillerais alors
La massue d'Héraclès2...
1. Équivoque sur les noms des constellations. Le chien est aussi le frein du prépuce, et le taureau, le périnée.
2. La massue est un des noms grecs du sexe mâle.
Straton, Solitude
La nuit entière j'ai pleuré.
Pourtant mon cœur doit s'apaiser.
Mais une terrible souffrance1
Vient d'anéantir le sommeil.
Oui, je souffre de son absence :
Théodore est parti la veille.
Reviens ! Et dans ce lit,
Témoin de nos ébats,
Jamais, je te le dis,
Tu ne me quitteras.
1. Straton utilise ici des termes propres à la tragédie, bien sûr de manière parodique.
Straton, C'est plus fort que moi !
J'ai beau avoir détourné mon regard
D'un joli garçon de passage,
Je me retourne sans retard !
Straton, Le temps de l'amour
Qu'un trop jeune garçon
Se donne est infamant :
Que la punition
Retombe sur l'amant !
À un âge avancé,
C'est une honte encor
Que d'être consentant
Et de livrer son corps1.
Pourtant il est un temps
Où nul n'est indécent :
C'est ce que nous vivons
Tous deux en cet instant.
1. Réaction choquée, mais pour le moins étrange venant de la part d'un auteur qui prétend par ailleurs continuer à aimer des garçons au-delà de l'âge prescrit.
Straton, Maudite Némésis !
Comme elle est bonne la déesse, ô Alexis :
Nous la conjurons tant, la sombre Némésis,
Cette femme au pied lent.
Tu ne devinais pas son effroyable élan
Car tu croyais garder pour toujours la beauté.
Or celle-ci n'est plus.
L'irritable déesse est bien ici venue !
Et nous, tes serviteurs, t'avons, ce jour, quitté.
Callimaque, À Théocrite
Ce Théocrite aux beaux cheveux d'un noir suprême,
Adore-le s'il m'aime ;
Mais s'il me hait, ô dieu,
Alors, déteste-le !
Toi-même, tu aimas un merveilleux garçon :
C'est pourquoi, vois-tu, je n'en dirai pas plus long.
Straton, Euclide le chanceux
Il a perdu son père,
Euclide l'amoureux.
Ma foi, il est chanceux !
Car son père acceptait
Toutes ses volontés.
Et, dans l'éternité,
Son ombre reste belle.
Moi, je joue en cachette :
Je dois m'en contenter,
Sale destin, Père immortel !
Scythinos, À son sexe
Te voilà bien droite, élancée !
Impossible de t'affaisser !
Refuses-tu de te calmer ?
Auparavant, quand mon aimé
Gisait mollement sur le lit,
M'offrant ce qui me plaît,
Tu pendais, épuisée, sans vie !
Allons, gonfle, éclate, gémis !
Quoi donc ! Tu veux rester ainsi !
Par ma main tu seras punie !
Fronton, Destin d'un garçon, épigramme sur des titres de comédies de Ménandre
Tu crois, ô comédien, que ta grande beauté
Est un Trésor alors qu'elle est plus fugitive
Qu'une Ombre ; avec le temps on va te Détester
Tu seras Paysan
Puis chercheras la Tondue en définitive.
Straton, La beauté qui ne dure...
De ta grande beauté tu me parais bien fier.
Mais la rose fleurit, mon aimé, le sais-tu ?
Et dès qu'elle est fanée, on la jette au rebut.
La fleur et la beauté ne durent qu'un moment,
Victimes qu'elles sont de la hargne du temps.
Straton, Avant le déclin
Si ta beauté vieillit,
Dis-le avant qu'elle n'ait fui.
Si elle parvient à se prolonger,
Sache donc nous la faire partager.
Straton, L'eunuque
Cet eunuque a près de lui des garçons :
Non seulement il n'a nulle raison
De les posséder mais il commet là
Un réel sacrilège. Tout cela
Me rappelle l'histoire de ce chien
Qui aboyait pour défendre une rose
Dans sa mangeoire1, privant de ce bien
L'homme et ne jouissant pas de la chose.
1. L'histoire du chien et de son écuelle se retrouve dans Lucien (Timon, 14).
Straton, À l'hypocrite
Salut, le dédaigneux, c'est toi qui prétendais
Pourfendre les méchants ?
Jadis, tu refusais de te donner à moi :
Or où sont tes serments ?
Car je ne suis pas dupe ! Et sur toi, je sais tout,
Le nom de ton amant,
Le lieu, ce que tu fais et combien tu lui prends...
Straton, Les plaisirs partagés
Voyez ces jeunes chiens, tous les deux se font jouir.
Ensuite, à tour de rôle, ils le font par derrière.
Celui qui fait d'abord, après se laisse faire.
Chacun est contenté, sert ou se fait servir.
Ce dicton a raison : pour se faire plaisir,
Un âne frotte un autre, échangeant ses désirs.
Straton, Un garçon trop cupide
Tu en demandes cinq : dix te seront offerts !
Et tu en auras vingt pour le faire à l'envers.
Ce n'est pas suffisant ? Une pièce d'or, tiens !
Pour Danaé, jadis, cela suffisait bien !
Straton, Frustration
Le temps vient griser mes cheveux.
Ma queue est lamentable !
Et mes couilles ont perdu de leur feu.
Je deviens vénérable.
Ah ! savoir enculer mais en être incapable.
Straton, Le hameçon
Tu as conçu un hameçon
Et tu as pêché ce poisson
Qui n'est autre que moi.
Tire-moi n'importe où et agis à ta guise.
Surtout ne laisse pas échapper cette prise.
Straton, La rose
Tu présentais un lézard autrefois,
Un petit doigt de rose 1;
Mais aujourd'hui, cette rose est un bras,
Quelle métamorphose !
1. Le poète veut dire que son «doigt» (l'aurore en grec se dit «doigt de rose» et désigne ici le sexe mâle) n'est plus rose et que l'adolescent a mûri.
Straton, La fourchette
À force d'enculer,
Mes forces se détendent.
Change-moi, s'il te plaît,
En fourchette, grand Zeus,
Que je pique la viande.
Straton, Une histoire de peau
Une peau blanche, je blêmis !
Un teint couleur de miel, je crie !
Un blond, et je m'évanouis !
Straton, Un amour raisonnable
Les bêtes font l'amour à leur manière,
En un mot bêtement !
Nous, dotés de raison,
Je dis que nous les dépassons :
Nous avons découvert
Un amour à l'envers.
Aussi, je le proclame,
Considérons sous un angle animal
Les amoureux des femmes1.
1. Nous avons affaire ici à un véritable éloge de l'homosexualité, un amour, selon Straton, seul digne des hommes civilisés.
Straton, Les deux frères
Deux charmants frères m'aiment.
Lequel choisir pour maître ?
Leur beauté est la même.
Mais quand l'un est sorti,
Et que l'autre vient à paraître,
À coup sûr, le plus beau, c'est lui !
Straton, Les deux fonctions
Comme ce Mérion qu'Idoménée
Mena de Troie vers Crête,
Comme servant et comme aimé,
Toi aussi, ô Théodore, le jour,
Remplis les tâches nécessaires ;
Mais dès la nuit, remplis une autre affaire :
Tel Mérion, fais-moi l'amour !
Straton, L'amour à vie
Ne le quittant jamais,
Peut-on voir se flétrir
L'adolescent aimé.
Celui qu'on a chéri
Devrait-il forcément
Ne pas plaire aujourd'hui ?
Enfin inversement,
S'il plaît en ce moment,
Pourquoi le lendemain
Ne l'aimerais-je point ?
Straton, À l'abeille
Toi qui es née du taureau, toi l'abeille,
Pourquoi viens-tu lorgner du côté de mon miel,
Ce garçon à la fraîcheur cristalline ?
Oui, quand cesseras-tu de bourdonner
Et de poser sur une peau si fine
Tes pattes qui ne font que butiner.
Va fabriquer ton miel dans tes vrais horizons,
Avant que, tôt ou tard,
Je ne vienne piquer ; car j'ai aussi mon dard :
L'amoureux aiguillon.
Straton, Le loup et l'agneau
À une heure nocturne,
Allant de par les rues chercher fortune,
Couché près de la porte,
Moi, loup, je vois l'agneau : le fils de mon voisin.
Aussitôt, je l'emporte !
Je le prends dans mes bras, je le console,
Je l'embrasse et lui fais mille serments.
Ensuite, quels cadeaux ! Manquer à ma parole ?
Il ne mérite pas cette injure, vraiment !
Straton, Chaque chose en son temps
Joue contre joue, toi, moi, nous étions seuls :
Nous avions des baisers et des amuse-gueule.
Tu étais si jeune. C'était avant !
Mais j'implore aujourd'hui ce que tu as derrière1,
Un objet qui ne sera pas toujours offert.
Chaque chose se doit d'arriver en son temps !
1. Citation d'un vers homérique (Iliade, XI, 66) mais complètement détourné de son sens comme on le devine bien !
Straton, Le pyromane
Porte, avec ce flambeau je vais t'incendier.
Je suis bien éméché et je voudrais brûler
Le terrible garçon qui se cache derrière.
Après je m'en irai sur l'onde Adriatique.
Et ses vagues amères ;
Je serais un vagabond, certes :
Mais, néanmoins, je ferais mon trafic
Sur des portes ouvertes.
Straton, État d'ivresse
Un instant, prends ma main !
Mais dansons malgré tout,
Même si ce gamin
Rit de moi comme un fou.
S'il n'était allongé
Juste à côté des siens,
Il aurait vu combien
Je sais être léger.
Straton, Plus heureux qu'un dieu !
De quel temple, mes bons amis,
Ont surgi ces Amours en troupe,
Dont le charme et la beauté vibrent,
Si bien que je suis ébloui ?
Qui est esclave et qui est libre ?
D'un humain sont-ils sous la coupe ?
Il doit y avoir une erreur !
Mais si cela est vrai,
Cet homme-là est supérieur
À Zeus, dont Ganymède est l'unique échanson.
Par contre, lui, est entouré
D'un meute effrénée d'agréables garçons !
Straton, Rien compris !
Tu n'es pas renseigné par ce mot, ô sauvage !
Il est tiré pourtant du plus pur des langages.
Il faut dire ceci : «Aimer les beaux garçons»,
Non pas les «gros» en aucune façon !
Oserais-tu me contredire ?
Moi, je suis juge aux jeux Pythiques ;
Toi, tu l'es aux jeux Olympiques !
Ceux que j'exclus, ils vont chez toi pour concourir !
Méléagre, La couronne des jeunes gens
De tous ces jeunes gens, riche bouquet de fleurs,
Éros a composé, doux piège pour les cœurs,
La présente couronne, ô divine Cypris.
Et voici recueillis, Diodore, ce lis,
Asclépiade aussi, suave giroflée ;
Il a tressé de même une rose privée
D'épines répondant au doux nom d'Héraclite
Et Dion, comparable à quelque clématite ;
Il a tressé Théron, crocus aux cheveux d'or,
Le brin de serpolet, Ouliadès encor,
L'olivier Myiscos tout gonflé de jeunesse
Aux branches désirées qui sont une richesse.
Tyr, île fortunée... Au milieu des parfums,
Les enfants de Cypris naissent dans ce jardin.
Méléagre, Dédicace à Dioclès
Je suis la coronis1, je signale la fin
Des nombreux manuscrits dont je suis le gardien.
L'auteur qui rassembla dans un unique ouvrage
L'ensemble de ces vers se nomme Méléagre.
Voici pour Dioclès le plus durable hommage :
Ces quelques fleurs tressées formant une couronne ;
Et moi toute enroulée, je partage ce trône
Au moment où s'achève un savoir qui fleuronne.
1. La coronis est un signe critique en usage pour marquer la fin d'un chapitre.
XII, 258
Straton, Conclusion
ll se peut que dans le futur,
On prenne pour argent comptant
Ces amoureuses aventures.
Or c'est pour mes aimés que j'ai fait ces poèmes.
Et pour cela, un dieu charmant
M'a confié un art suprême.
Anthologie Palatine : Présentation générale - Biographies des poètes
Anthologie Palatine - Livre XII : Avant-propos - Plan - Table des matières - Biographie des poètes