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Suétone (généralités)
Vie d'Auguste (généralités) - (latin 85 K) - (traduction 200 K)
XCIV. Présages de sa grandeur future
(1) Puisque nous
sommes sur ce sujet, il ne sera pas inutile de
rapporter les présages qui
précédèrent sa naissance, et
ceux qui l'accompagnèrent ou la suivirent;
ils suffisaient déjà pour annoncer sa
grandeur future et son bonheur constant. (2) La foudre
étant tombée jadis sur une partie du
rempart de Vélitres, l'oracle avait dit
qu'un citoyen de cette ville parviendrait un jour
au souverain pouvoir. Pleins de confiance dans
cette réponse, les habitants de
Vélitres entreprirent sur-le-champ contre
les Romains une guerre obstinée qu'ils
recommencèrent plusieurs fois, et qui
faillit causer leur perte.
L'événement ne prouva que longtemps
après que cette prédiction regardait
la puissance d'Auguste. (3) Julius Marathus
rapporte que, peu de mois avant la naissance de ce
prince, un prodige annonça publiquement
à Rome que la nature était en travail
d'un maître pour le peuple romain, et que le
sénat effrayé avait défendu
d'élever les enfants qui naîtraient
dans l'année; mais que ceux dont les femmes
étaient enceintes, se trouvant
intéressés à la
prédiction, avaient empêché que
le sénatus-consulte fût porté
aux archives. (4) Je lis dans les
traités d'Asclépias de Mendès,
"sur les choses divines", qu'Atia étant
venue au milieu de la nuit dans le temple d'Apollon
pour y faire un sacrifice solennel, fit poser sa
litière pendant que les autres matrones s'en
retournaient; que tout à coup un serpent se
glissa vers elle, et peu après se retira; et
qu'à son réveil elle se purifia,
comme si elle sortait des bras de son mari; que,
dès ce moment, elle avait eu sur le corps
l'empreinte d'un serpent que jamais elle ne put
effacer, en sorte qu'elle ne parut plus aux bains
publics; qu'enfin Auguste naquit dans le
dixième mois, et passa en conséquence
pour le fils d'Apollon. (5) Atia, avant
d'accoucher, avait rêvé que ses
entrailles s'élevaient vers les astres, et
couvraient toute l'étendue du ciel et de la
terre. Octavius, père d'Auguste, rêva
aussi que le soleil sortait du sein de sa
femme. (6) Il est notoire
que, le jour de la naissance d'Auguste, Octavius,
à cause de l'accouchement de sa femme, se
rendit tard au sénat où l'on
délibérait sur la conjuration de
Catilina, et que P. Nigidius, ayant appris la cause
de ce retard, et s'étant informé de
l'heure où l'enfant avait vu le jour,
déclara qu'il était né un
maître à l'univers. (7) Dans la suite,
Octavius, conduisant son armée dans la
partie la plus retirée de la Thrace,
consulta Bacchus sur son fils, en faisant, dans le
bois sacré de ce dieu, les
cérémonies des barbares. Les
prêtres lui firent le même horoscope.
Dès que le vin fut répandu sur
l'autel, il s'en éleva un si grand jet de
flamme, qu'il dépassa le faîte du
temple, et atteignit jusqu'au ciel. Or ce prodige
n'était arrivé que pour Alexandre le
Grand, qui avait sacrifié sur les
mêmes autels. (8) La nuit suivante,
il crut voir son fils d'une grandeur surhumaine,
armé de la foudre et du sceptre,
revêtu des insignes de Jupiter,
couronné de rayons, sur un char orné
de lauriers, et attelé de douze chevaux
d'une blancheur éclatante. (9) On lit dans les
Mémoires de Caius Drusus, que la nourrice
d'Auguste l'ayant mis le soir dans son berceau au
rez-de-chaussée, le lendemain on ne l'y vit
plus, et qu'après l'avoir longtemps
cherché, on le trouva enfin sur une tour
fort élevée, le visage tourné
vers le soleil levant. (10) Dès qu'il
put parler, il imposa silence à des
grenouilles qui coassaient dans la maison de
campagne de son grand-père, et l'on dit que
depuis ce temps les grenouilles ne s'y font plus
entendre. (11) À quatre
milles de Rome, sur la route de Campanie, tandis
qu'il mangeait dans un bois, un aigle lui arracha
brusquement le pain qu'il tenait à la main,
et, après s'être envolé
à perte de vue, il revint tout doucement le
lui rapporter. (12) Quand il eut
fait la dédicace du Capitole, Q. Catulus eut
des visions pendant deux nuits de suite. Dans la
première, il aperçut une troupe
d'enfants jouer autour de l'autel de Jupiter. Le
dieu en prit un à part, et plaça dans
son sein l'étendard de la république
qu'il portait à la main. Dans la seconde, il
revit ce même enfant sur les genoux de
Jupiter Capitolin; et, comme il voulait l'en
ôter, le dieu s'y opposa, en disant qu'il
l'élevait pour la défense de
l'État. Le lendemain, Catulus ayant
rencontré Auguste qu'il ne connaissait pas,
il contempla avec surprise, et déclara qu'il
avait une parfaite ressemblance avec l'enfant dont
il avait rêvé. (13) Quelques-uns
racontent autrement le premier songe de Catulus.
Suivant eux, plusieurs enfants demandant un tuteur
à Jupiter, il leur en désigna un
parmi eux auquel ils devaient soumettre toutes
leurs demandes: il lui fit baiser sa main, et la
porta ensuite à sa bouche. (14) M.
Cicéron, en accompagnant C. César au
Capitole, racontait à ses amis un songe
qu'il avait eu la nuit précédente. Il
avait vu un jeune garçon d'une figure
distinguée, descendre du ciel au moyen d'une
chaîne d'or, et s'arrêter devant les
portes du Capitole, où Jupiter lui avait
remis un fouet. Puis, apercevant tout à coup
Auguste, qui était inconnu de presque tous
les assistants, et que César avait pris avec
lui pour ce sacrifice, Cicéron affirma que
c'était là l'enfant dont il avait vu
l'image pendant son sommeil. (15) Lorsque Auguste
prit la robe virile, son laticlave, décousu
soudain des deux côtés, tomba à
ses pieds. Quelques personnes en conclurent que
l'ordre dont ce vêtement est la marque
distinctive lui serait soumis. (16) En faisant
abattre une forêt pour asseoir son camp
à Munda, Jules César découvrit
un palmier, et le conserva comme un présage
de victoire. Le rejeton qui naquit de ce palmier
prit un tel accroissement en peu de jours, que non
seulement il égala, mais couvrit de son
ombrage celui dont il tenait le jour, et que des
colombes y établirent leur nid, quoique ces
oiseaux aient la plus grande répugnance pour
un feuillage âpre et dur. Cette espèce
de phénomène fut, dit-on, un des
motifs qui déterminèrent le plus
César à ne vouloir de successeur que
son petit-fils Octave. (17) Dans sa retraite
d'Apollonie, Auguste était monté avec
Agrippa dans l'observatoire du devin
Théogène. Le devin prédit
à Agrippa, qui le consulta le premier, des
prospérités étonnantes et
merveilleuses. Auguste alors refusa
obstinément de faire connaître le jour
de sa naissance, craignant et rougissant à
la fois de se trouver trop au-dessous de lui.
Lorsque enfin, après avoir longtemps
hésité, il eut satisfait à sa
demande, Théogène se leva
précipitamment et se prosterna à ses
pieds. (18) Depuis ce temps
Auguste eut une telle confiance dans ses
destinées, qu'il publia son horoscope, et
fit frapper une médaille d'argent qui
portait l'empreinte du capricorne, sous lequel il
était né. (1)
Et quoniam ad haec uentum est, non ab re fuerit
subtexere, quae ei prius quam nasceretur et ipso
natali die ac deinceps euenerint, quibus futura
magnitudo eius et perpetua felicitas sperari
animaduertique posset. (2)
Velitris antiquitus tacta de caelo parte muri,
responsum est eius oppidi ciuem quandoque rerum
potiturum; qua fiducia Veliterni et tunc statim et
postea saepius paene ad exitium sui cum populo
Romano belligerauerant; sero tandem documentis
apparuit ostentum illud Augusti potentiam
portendisse. (3)
Auctor est Iulius Marathus, ante paucos quam
nasceretur menses prodigium Romae factum publice,
quo denuntiabatur, regem populo Romano naturam
parturire; senatum exterritum censuisse, ne quis
illo anno genitus educaretur; eos qui grauidas
uxores haberent, quod ad se quisque spem traheret,
curasse ne senatus consultum ad aerarium
deferretur. (4)
In Asclepiadis Mendetis Theologumenon libris lego,
Atiam, cum ad sollemne Apollinis sacrum media nocte
uenisset, posita in templo lectica, dum ceterae
matronae domum irent, obdormisse; draconem repente
irrepsisse ad eam pauloque post egressum; illam
expergefactam quasi a concubitu mariti purificasse
se; et statim in corpore eius exstitisse maculam
uelut picti draconis nec potuisse umquam exigi,
adeo ut mox publicis balineis perpetuo abstinuerit;
Augustum natum mense decimo et ob hoc Apollinis
filium existimatum. (5)
Eadem Atia prius quam pareret somniauit, intestina
sua ferri ad sidera explicarique per omnem terrarum
et caeli ambitum. Somniauit et pater Octauius utero
Atiae iubar solis exortum. (6)
Quo natus est die, cum de Catilinae coniuratione
ageretur in curia et Octauius ob uxoris puerperium
serius affuisset, nota ac uulgata res est P.
Nigidium, comperta morae causa, ut horam quoque
partus acceperit, affirmasse dominum terrarum orbi
natum. (7)
Octauio postea, cum per secreta Thraciae exercitum
duceret, in Liberi patris luco barbara caerimonia
de filio consulenti, idem affirmatum est a
sacerdotibus, quod infuso super altaria mero tantum
flammae emicuisset, ut supergressa fastigium templi
ad caelum usque ferretur, unique omnino Magno
Alexandro apud easdem aras sacrificanti simile
prouenisset ostentum. (8)
Atque etiam sequenti statim nocte uidere uisus est
filium mortali specie ampliorem, cum fulmine et
sceptro exuuiisque Iouis Optimi Maximi ac radiata
corona, super laureatum currum, bis senis equis
candore eximio trahentibus. (9)
Infans adhuc, ut scriptum apud C. Drusum exstat,
repositus uespere in cunas a nutricula loco plano,
postera luce non comparuit, diuque quaesitus tandem
in altissima turri repertus est iacens contra solis
exortum. (10)
Cum primum fari coepisset, in auito suburbano
obstrepentis forte ranas silere iussit, atque ex eo
negantur ibi ranae coaxare. (11)
Ad quartum lapidem Campanae uiae in nemore
prandenti ex inprouiso aquila panem ei e manu
rapuit et, cum altissime euolasset, rursus ex
inprouiso leniter delapsa reddidit. (12)
Q. Catulus post dedicatum Capitolium duabus
continuis noctibus somniauit: prima, Iouem Optimum
Maximum e praetextatis compluribus circum aram
ludentibus unum secreuisse atque in eius sinum
signum rei publicae quam manu gestaret reposuisse;
at insequenti, animaduertisse se in gremio
Capitolini Iouis eundem puerum, quem cum detrahi
iussisset, prohibitum monitu dei, tanquam is ad
tutelam rei publicae educaretur; ac die proximo
obuium sibi Augustum, cum incognitum alias haberet,
non sine admiratione contuitus, simillimum dixit
puero, de quo somniasset. (13)
Quidam prius somnium Catuli aliter exponunt, quasi
Iuppiter compluribus praetextatis tutorem a se
poscentibus, unum ex eis demonstrasset, ad quem
omnia desideria sua referrent, eiusque osculum
delibatum digitis ad os suum
rettulisset. (14)
M. Cicero C. Caesarem in Capitolium prosecutus,
somnium pristinae noctis familiaribus forte
narrabat: puerum facie liberali, demissum e caelo
catena aurea, ad fores Capitoli constitisse eique
Iouem flagellum tradidisse; deinde repente Augusto
uiso, quem ignotum plerisque adhuc auunculus Caesar
ad sacrificandum acciuerat, affirmauit ipsum esse,
cuius imago secundum quietem sibi obuersata
sit. (15)
Sumenti uirilem togam tunica lati claui, resuta ex
utraque parte, ad pedes decidit. Fuerunt qui
interpretarentur, non aliud significare, quam ut is
ordo cuius insigne id esset quandoque ei
subiceretur. (16)
Apud Mundam Diuus Iulius, castris locum capiens cum
siluam caederet, arborem palmae repertam conseruari
ut omen uictoriae iussit; ex ea continuo enata
suboles adeo in paucis diebus adoleuit, ut non
aequiperaret modo matricem, uerum et obtegeret
frequentareturque columbarum nidis, quamuis id
auium genus duram et asperam frondem maxime uitet.
Illo et praecipue ostento motum Caesarem ferunt, ne
quem alium sibi succedere quam sororis nepotem
uellet. (17)
In secessu Apolloniae Theogenis mathematici
pergulam comite Agrippa ascenderat; cum Agrippae,
qui prior consulebat, magna et paene incredibilia
praedicerentur, reticere ipse genituram suam nec
uelle edere perseuerabat, metu ac pudore ne minor
inueniretur. Qua tamen post multas adhortationes
uix et cunctanter edita, exiliuit Theogenes
adorauitque eum. (18)Tantam
mox fiduciam fati Augustus habuit, ut thema suum
uulgauerit nummumque argenteum nota sideris
Capricorni, quo natus est, percusserit.
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[28 février 2001]