Bibliotheca Classica Selecta - Autres traductions françaises dans la BCS - Plan - vv. 96-130 - vv. 204-213

MOTEUR DE RECHERCHE DANS LA BCS


EURIPIDE

MÉDÉE

Traduction nouvelle commentée et annotée
Danielle De Clercq, Bruxelles, 2005

TEXTE


131- 204 (
Scène IV)
(Choeur, nourrice, (Médée))

CHOEUR (131-137) (Parodos)

J'entendais la voix, j'entendais le cri

De la pitoyable

Colchidienne toujours inapaisée. Mais toi, vieille, parle.

Depuis le coeur de la maison à porte double, sa plainte

Je l'entendais. Je ne me réjouis pas, femme, des souffrances de cette demeure

Puisque pour moi l'amitié s'y trouve mêlée.

NOURRICE (138-143)

Il n'y a plus de foyer! Tout cela s'en est allé!

Car lui, une couche royale le retient.

Elle, dans la chambre conjugale, elle consume sa vie,

Ma maîtresse, et d'aucun être cher

N'accepte le réconfort d'aucune parole.

MÉDÉE (144-147)

Aiaî!

Qu'à travers la tête une flamme du ciel

Me passe. Que me vaut de vivre encore?

Pheû! Pheû!

Si je pouvais dénouer ma vie odieuse,

à la mort l'abandonner...

CHOEUR (148-159) (Strophe)

As-tu entendu, ô Zeus et toi la Terre et toi la Lumière,

Quels cris dans son malheur

Fait retentir l'épouse.

(Se tournant vers la maison de Médée)

Quel désir te prend de l'horrifiante

Couche létale? Es-tu démente?

Il se hâtera le terme de la mort.

N'en fais pas la prière. Si ton propre époux

Vénère un nouveau lit,

Ne t'emporte pas pour cela contre lui.

Zeus prendra fait et cause pour toi!

Ne te ronge pas trop en pleurant celui qui partageait ta couche.

MÉDÉE (160-167)

Ô grand Zeus et toi, auguste Thémis,

Voyez-vous ce que je subis, moi qui par de grands serments

Me suis attaché mon exécrable

Époux? Si je pouvais les voir, lui et sa jouvencelle

Mis en pièce sous les ruines même de leur maison!

Quelle injure osent-ils sous mes yeux m'infliger!

Ô mon père, ô ma cité, dont j'ai été éloignée

Dans la honte. Moi qui ai tué mon propre frère...

NOURRICE (168-172)

Entendez-vous ce qu'elle dit? Elle invoque à cor et cri

Thémis la bienveillante et Zeus, lui que comme garant

Des serments les humains reconnaissent.

Il ne s'en faut pas de peu pour que

Ma maîtresse mette fin à son courroux!

CHOEUR (173-183) (Antistrophe)

Comment pourrait-elle venir près de nous

Et, des paroles que nous proférons

Percevoir le son,

À moins de relâcher son coeur lourd de colère,

Et son âme opiniâtre?

Que, bien sûr, mon empressement

Envers mes amis ne manque pas. Mais entre

Dans la maison! Fais-la venir ici!

Au-dehors! Insiste aussi sur nos gages d'amitié (181).

Dépêche-toi avant qu'elle ne mette à mal ceux qui sont

À l'intérieur, car son deuil ne se déchaîne que pour cela.

NOURRICE (184-204)

Je ferai ainsi, mais j'ai bien peur de ne pas venir à bout

De ma maîtresse.

Je ne me donnerai cette peine que pour vous obliger.

Car d'une lionne qui a mis bas elle lance le regard farouche

Sur ses serviteurs quand l'un d'eux

Accourt et l'approche de trop près pour lui parler.

(Soliloque sur un ton sentencieux)

(190-203) En traitant de mal dégrossis et sans sagesse

Les gens d'autrefois, tu ne te tromperais pas.

Dans les chansons qu'on entend au cours de banquets,

De festins et de dîners

Ne trouvaient-ils pas la joie de vivre?

Mais aux chagrins lugubres, personne

N'a trouvé comment par l'inspiration musicale et des chants soutenus par force lyres

Mettre fin, quand décès et

Infortunes redoutables font chanceler les foyers.

Pourtant, cela serait tout profit pour les gens

D'y remédier par des chants. Mais dans les banquets

Bien servis, pourquoi donnent-ils de la voix, poussent-ils des cris? Pour rien!

Car ils ne ressentent alors rien d'autre les mortels

Que le bien-être de se sentir repus.

(La nourrice entre dans la maison)

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