Jean d'Outremeuse, Myreur des histors, II, p. 438b-443a - ans 722-723

Édition : A. Borgnet (1869) ‒ Présentation nouvelle, traduction et notes de A.-M. Boxus et de J. Poucet (2023)

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LES ENFANCES DE DOON (I) ET QUELQUES ÉLÉMENTS DE CHRONIQUE

INTRODUCTION

 

Comme nous l'avons dit dans l'introduction du fichier précédent (II, p. 434),  Jean d'Outremeuse va désormais utiliser très largement, en les dérimant, les deux poèmes qui composaient la Geste de Doon de Mayence [Doolin de Maience], une  chanson de geste composée probablement dans la seconde moitié du treizième siecle. Elle comprenait deux parties.

Redisons ici, en reprenant les termes utilisés par Marie-Jeanne Pinvidic que la première partie (Les enfances Doolin de Maience) racontait « l’histoire touchante du jeune Doon, qui, spolié de son fief, va vivre une série d’aventures épiques et romanesques avant de reconquérir son héritage », tandis que la seconde, qu'on pourrait intituler La Fleur des Batailles Doolin de Maience retraçait la vie « pleine de bruits et de fureurs, de ce même héros devenu un homme dans la force de l’âge, capable d’obtenir l‘aide de Charlemagne et de se tailler un royaume au nom de la foi chrétienne aux dépens des Saxons ».

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Si le récit principal est la geste de Doon de Mayence, la formule même de la chronique universelle de type annalistique adoptée par Jean l'oblige à la présenter par blocs. Il l'interrompra à plusieurs reprises pour y insérer les événements qui se passent ailleurs au même moment. Dans son système chronologique, le début de l'histoire de Doon débute en 723 de l'Incarnation, à l'époque de Charles Martel. Les événements racontés dans Myreur II, p. 438-443 (DOON I) et p. 443-448 (DOON II) sont censés se dérouler cette année-là. L'histoire de Doon est alors interrompue.  Elle reprend en Myreur,  II, p. 448-453, après la mort de Charles Martel en 725 de l'Incarnation. Après quelques précisions généalogiques portant sur une série de personnages (on est maintenant sous le règne de Pépin le Bref), le récit lui-même reprend avec les événements des années 726, 727, 728 et 729 de l'Incarnation (DOON III, IV et V - Myreur, II, p. 452-464). Les événements suivants seront contemporains de l'époque de Charlemagne, avant et après la mort de Pépin le Bref.

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Rappelons aussi que Jean ne se borne pas à dérimer fidèlement les deux poèmes, comme semblerait le suggérer une note de Bo (II, p. 464). Il transforme profondément son modèle. La confrontation systématique des deux versions apporterait de précieuses conclusions intéressantes sur la manière dont travaille le chroniqueur liégeois. En entreprenant la traduction du Myreur, nous avions ce projet à l'esprit. Nous avons tenté de le réaliser mais pour constater assez vite son ampleur et ses difficultés. Il dépassait de beaucoup nos possibilités. Nous avons pensé que nous pourrions déjà être utiles aux utilisateurs potentiels en fournissant une traduction française, des introductions, des résumés et des divisions, toutes choses qui faisaient défaut à l'édition de Borgnet.

 


Ans 722-723

« LES ENFANCES DE DOON (I) » ENCADRÉES PAR QUELQUES ÉLÉMENTS DE CHRONIQUE

Myreur II, p. 438b-443a

 


 

Pour correspondre étroitement à son contenu, le présent fichier comportera trois parties :

A. Des éléments de chronique se rapportant à des événements des années 722-723 de l'Incarnation

B. La première partie du récit sur « Les enfances de Doon »

C. Des éléments de chronique se rapportant à d'autres événements des années 722-723 de l'Incarnation

 


 

 

A. PREMIERS ÉLÉMENTS DE CHRONIQUE

 

Ans 722-723 de l'Incarnation - Myreur, p. 438b-439a

 

Résumé

* Ans 722-723 : Guerres meurtrières opposant les Sarrasins au roi Gaufroit de Navarre, battu et tué malgré l'aide des Romains de l'empereur Léonce Samson (II, p. 438)

* An 723 : À Rome, mort du pape Grégoire III qui avait excommunié l'empereur Léonce Samson pour hérésie (problème des images - Refus de Charles Martel d'appuyer le pape contre l'empereur) et consécration du pape Zacharie (II, p. 438-439)

 

 

Ans 722-723 : Guerres meurtrières opposant les Sarrasins au roi Gaufroit de Navarre, battu et tué malgré l'aide des Romains de l'empereur Léonce Samson

[II, p. 438b] [Les Sarasins conquisent le rengne de Navaire] En cel an entrarent les Sarasins en la royalme de Navaire à si grant forche, qu'ilh le conquestarent. Et s'enfuit ly roy Gaufrois, peire Guys de Maienche, à Romme à son cusin l'emperere Lyon Sanson, qui li livrat XLm hommes ; si les guioit ly roy Gaufrois meisme, car li emperere avoit esteit navreis en une jostes en son costeit, si qu'ilh n'y pot aleir.

[II, p. 438] [Les Sarrasins conquirent le royaume de Navarre] Cette année-là [722], les Sarrasins pénétrèrent dans le royaume de Navarre avec de si grandes forces qu'ils en firent la conquête. Le roi Gaufroit, le père de Guy de Mayence, s'enfuit à Rome, chez son cousin Léonce Samson, qui lui fournit quarante mille hommes. Le roi Gaufroit en personne les dirigeait, car l'empereur, qui avait été blessé au côté dans une joute, ne pouvait pas le faire.

[L’an VIIc et XXIII - Ly roy de Navaire ochist LXIIIm Sarasins] Et Gaufrois et ses gens s'en alerent en Navaire, si vinrent là en septembre l'an VIIc et XXIII, et fist repoiseir ses gens VIII jours, puis oit batalhe aux Sarasins de Compostel, qui fut dure por luy, car ilh y fut mors et ses gens presque totes, et oussi y furent mors LXIIIm Sarasins, et furent les Sarasins desconfis.

[An 723 - Le roi de Navarre tua quarante-trois mille Sarrasins] Gaufroit et ses gens partirent pour la Navarre, où ils arrivèrent en septembre de l'an 723. Après avoir laissé ses gens se reposer pendant huit jours, Gaufroit engagea la bataille contre les Sarrasins de Compostelle, une bataille dure pour lui, car il y fut tué, ainsi que presque tous ses soldats. Soixante-trois mille Sarrasins moururent aussi. Ils furent vaincus.

An 723 : À Rome, mort du pape Grégoire III qui avait excommunié l'empereur Léonce Samson pour hérésie (problème des images - refus de Charles Martel d'appuyer le pape contre l'empereur) et consécration du pape Zacharie

En cel an meismes le XXIXe jour de jule, anchois que la batalhe soy fesist en Navaire, morut li pape Grigoire : si fut ensevelis en l'engliese [Sains] Pire.

Cette même année [723], le vingt-neuf juillet, avant la fin de la bataille en Navarre, le pape Grégoire mourut : il fut enseveli dans l'église Saint-Pierre.

Il s'agit du pape Grégoire III (731-741 n.è.), auquel succédera le pape Zacharie (741-752 n.è.). Jean d'Outremeuse a envisagé plus haut la question de Grégoire Ier le Grand (590-604 n.è.) et de Grégoire II (715-731n.è.). D'après le présent passage, on constate que, dans la chronologie de Jean d'Outremeuse, l'an 723 de l'Incarnation correspond à l'année 741 de notre ère.

[Li pape excommengnat l’emperere Lyon Sanson - L’emperere fist decrosteir toutes les ymagines de sainte Englise] Chis Grigoire excommengnat l'emperere Lyon Sanson, por une heresie dont ilh estoit atochiet ; se li blamat li pape, si en oit teile despit qu'ilh fiste à toutes les ymagines de Jhesu-Christ et de la Virge Marie et des altres sains el royalme de Zesilhe, là ilh estoit, defaire et decrosteir en despit de pape. De quen li pape l'athematizat, et mandat à roy Char-Martel qu'ilh vosist venir à Romme ilh seroit emperere. Mains Char-Martel respondit que Pipin son fis avoit à femme Bertaine, la filhe l'emperere Lyon, si qu'ilh n'yroit [II, p. 439] mie contre luy, anchois ly aideroit contre cheli qui greveir ly voiroit. Chis pape Grigoire fist de l'evesqueit de Viane une archevesqueit.

[Le pape excommunia l’empereur Léonce Samson - L’empereur fit dépouiller de leur parure toutes les images de la Sainte-Église] Ce Grégoire excommunia l'empereur Léonce Samson, à cause d'une hérésie à laquelle il était attaché. Le pape l'en blâma, ce qui causa à l'empereur un tel dépit qu'il fit enlever et dépouiller de leur parure toutes les images de Jésus-Christ, de la Vierge Marie et des autres saints, dans le royaume de Sicile, où il se trouvait, et cela pour défier le pape. Le pape alors lui jeta un anathème et demanda au roi Charles Martel d'accepter de venir à Rome, où il serait sacré empereur. Mais Charles Martel répondit que son fils Pépin avait pour épouse Berthe, la fille de Léonce Samson et qu'il ne marcherait [II, p. 439] pas contre lui, qu'il aiderait au contraire celui qui voudrait lui nuire. Ce pape Grégoire fit de l'évêché de Viane un archevêché.

1. Le problème des images existait déjà sous Grégoire II, prédécesseur de Grégoire III.

2. Le Dictionnaire historique de la papauté (Paris, 1994, p. 742) évoque les contacts de Grégoire III avec Charles Martel et le refus de celui-ci d'intervenir, mais c'était contre les Lombards du roi Liutprand, dans un contexte différent donc de celui présenté dans la notice de Jean d'Outremeuse.

2. Attention aux empereurs byzantins du nom de Léon. On rencontre ainsi  Léon I le Grand  (457-474n.è.), un Léon II, qui lui succède très brièvement (474 n.è.), puis, beaucoup plus tard, le successeur de Justinien II Rhinotmète qui est Léonce II (695-698 n.è.). Et ensuite un Léon III l'Isaurien (717-741 n.è.). Le Lyon/Léonce Sanson de Jean d'Outremeuse vient tout brouiller. Le chroniqueur semble éprouver le besoin (pour clarifier les choses ?) de consacrer une notice à ces Léon. (Ref Où ?)

[Zacharie, li XCVe pape de Romme] Apres la mort le pape Grigoire, vacat ly siege XII jours, et le Xe jour d'awost fut consacreis uns proidhons qui oit à nom Zacharie, de la nation Grigois, le fis Policroine, et tient le siege XII ans VI mois et X jours. Et Martin dist X ans II mois et XV jours.

[Zacharie, 95e pape de Rome] Après la mort du pape Grégoire, le siège resta vacant douze jours. Le dix août fut consacré pape un homme sage, nommé Zacharie, d'origine grecque, fils de Policroine. Il occupa le siège pendant douze ans, six mois et dix jours. Martin dit dix ans, deux mois et quinze jours (pour la suite, cfr II, p. 464)


 

 

B. LES ENFANCES DE DOON (I) - An 723 de l'Incarnation - p. 439b-442a

 

Résumé

 

Profondément affligé par la mort de son père, Gaufroit, roi de Navarre, son fils, Guy, comte de Mayence, marié et père de trois enfants, se retire dans son château de Mombloy, mais, lors d'une chasse au cerf, il tue accidentellement un ermite qu'il enterre et dont il prend la place en secret, se laissant passer pour mort (II, p. 439b-440a)

Ernebaut, sénéchal de Mayence, profitant de la situation, veut épouser la comtesse qui rejette vigoureusement ses avances (II, p. 440)

Ernebaut l'attaque avec violence devant ses enfants qui interviennent (II, p. 440b-441a)

Ernebaut veut les faire disparaître et charge leur précepteur Salomon de cette sinistre besogne (II, p. 441)

Deux des enfants meurent, tandis que l'aîné (Doon de Mayence), âgé de 8 ans, échappe au massacre et tue Salomon (II, p. 441b-442a)

Seul et perdu dans les bois, Doon finit miraculeusement par être retrouvé par son père l'ermite, à qui il raconte tout ce qui s'était passé (II, p. 442)

Guy décide de retourner à Mayence, mais en route il devient subitement aveugle - Son fils Doon le ramène à l'ermitage où il restera pour s'occuper de lui (II, p. 442)

 

 

Profondément affligé par la mort de son père, Gaufroit, roi de Navarre, son fils, Guy, comte de Mayence, marié et père de trois enfants, se retire dans son château de Mombloy, mais, lors d'une chasse au cerf, il tue accidentellement un ermite qu'il enterre et dont il prend la place en secret, se laissant passer pour mort (II, p. 439b-440a)

[II, p. 439b] [Mervelheuse avenuwe de Guys de Maienche, et lamentable de sa femme et ses enfans - Doyelin en l’eage de VIII ans) A cel temps oiit novelle, par messagiers Guys de Maienche, que les Sarasins avoient ochis son pere et conquesteit le regne de Navaire, de quoy ilh fut mult dolens et ly annoioit de cuer. Si avoit une mult beais castel à demy-liewe de Maienche, qui estoit nommeit Monbloy, qui avoit bois, riviere et praierie, et tout chu qu'ilh afferoit à solas ; si alat là demoreir por li osteir de pessanche, et y sourjournat longtemps, et sy avoit III fis de sa femme : ly anneis si estoit nommeis Doyelin, qui avoit VIII ans d'eage. Si avient unc jour que li conte Guis s'en alat cachier en bois à masnie privée, et tenoit bien li bois VI liewe de long, là est aleis cachier li noble conte ; si at esleveit unc chierf et le suyt tendamment, et les chiens l'abairent fortement, qui en fuiant furent si mateis, qu'ilh fisent silenche et perdirent le chierf.

[II, p. 439b][Événement prodigieux pour Guy de Mayence et lamentable pour  sa femme et ses enfants - Doon âgé de huit ans] À cette époque (723), Guy de Mayence apprit par des messagers que les Sarrasins avaient tué son père (Gaufroit, roi de Navarre) et s'étaient emparés du royaume de Navarre, ce qui l'affligeait beaucoup et tourmentait son coeur. Il possédait à une demi-lieue de Mayence un beau château, nommé Mombloy (cfr II, p. 447-448), où se trouvaient bois, rivière, prairie et tout ce qui apportait de l'agrément. Il alla s'y installer pour guérir sa tristesse et y resta longtemps. De sa femme il avait trois fils, dont l'aîné s'appelait Doon et était âgé de huit ans. Un jour le comte, accompagné de gens de sa maison, alla chasser dans le bois qui s'étendait au moins sur six lieues. Il y leva un cerf qu'il suivit diligemment. Les chiens firent beaucoup d'efforts pour l'attraper mai, épuisés par leur poursuite, ils cessèrent d'aboyer et perdirent sa trace.

[Ly conte Guys devint heremite) Mains li conte le suyt toudis, et tant qu'ilh at perdut toutes ses gens, car ilh sont despars par le bois de chà et de là, si furent mult disconforteis de leur saingnour. En cel bois habitoit uns proidhons qui estoit neis de Cobellenche, viés et anchiens, en unc heremitage qui seioit devant son heremitage. Si vient li chief à ly por eistre à saveteit. Et li conte venoit apres brochant, et voit le chief, si escriat l'hermite en disant : « Vilains, ochis chis cherf. Porquoy l'as-tu tant gardeit ? » Et li hermite respondit : « Sire, ilh est venus à saveteit ; s'ilh vos plaist, se le lassiés vievre, Dieu vos en sarat greit. » Quant li conte l'entendit, si fut corochiet, si lanchat son espiel apres le chief, si fausat de chief et passat l'hermite tout parmy les flans, si l’abatit mors. Et quant li conte veyt chu, si fut esperdus, si est desquendus de son cheval tantost, se le trovat mors. Si at Dieu reclameit et li priat merchis, et vowat, qu'en lieu d'amende et de penitanche de mort de cheli, ilh demoroit là hermite tant qu'ilh viveroit en lieu del hermite, et sens jamais departir. Puis at ensevelis l'hermite en sa capelle. Enssi [II, p. 440] fut li comte hermite, et soy absconsat en l'hermitaige. Ses hommes le quisent partout le bois et passerent devant l'hermitaige ; mains ilh estoit là dedens absconseit, se ne le porent troveir, si sont retourneis en arriere, si ont racompteit la novelle à la damme la contes, qui en demenat grant duelhe.

[Le comte devint ermite] Mais le comte continua sa poursuite tant et si bien qu'il perdit de vue tous ses hommes, dispersés partout à travers le bois et très inquiets concernant le sort de leur seigneur. Dans ce bois habitait un vieux sage, né à Coblence, un ermite, assis alors devant son ermitage. Le cerf arriva près de lui pour se mettre à l'abri. Puis survint le comte éperonnant son cheval. Il vit le cerf et cria à l'ermite : « Vilain, tue ce cerf. Pourquoi l'as-tu si bien protégé ? » Et l'ermite répondit : « Sire, il est venu se mettre à l'abri ; s'il vous plaît, laissez-le vivre, Dieu vous en saura gré. » Quand le comte entendit cela, il se mit très en colère et lança son épieu sur le cerf, mais l'arme rata son but et transperça les flancs de l'ermite, qui tomba à terre, mort. Voyant cela,  le comte, bouleversé, descendit aussitôt de cheval et constata la mort de l'homme. Alors il invoqua Dieu, lui demanda pardon et promit, en guise d'amende et de pénitence pour la mort de cet homme, de rester là sa vie durant, pour y vivre en ermite à la place de sa victime, sans jamais quitter cet endroit. Ensuite il ensevelit l'ermite dans sa chapelle. Ainsi [II, p. 440] le comte devint ermite et vécut caché dans l'ermitage. Ses hommes le cherchèrent partout dans le bois. Ils passèrent bien devant l'ermitage, mais le comte y était caché à l'intérieur. Ne pouvant le trouver, ils s'en retournèrent et racontèrent la chose à leur dame, la comtesse, qui manifesta une grande douleur.

Ernebaut, sénéchal de Mayence, profitant de la situation, veut épouser la comtesse qui rejette vigoureusement ses avances (II, p. 440)

[II, p. 440b] Elle avoit uns senescal en la conteit de Maienche, qui estoit uns trahitre hons, qui s'avisat d'on chouse dont puis morut mult de gens. Et estoit nommeis Ernebaut. Quant ilh soit le faite, ilh ratendit VIII jours et le faisoit querir partout : et quant ilh veit bien qu’ilh ne revenroit nient, si s'en alat vers la damme la contesse. Et li dest entres les altres parolles : « Ma damme, li ploreir ne vos vault riens, vos ne rareis jamais monsaingneur, chu pense-moy ; car je en ay enquis la veriteit : ilh est noyés en la riviere de Leyne, qui est une profonde riviere, où son cheval soy tresbuchat. » La damme est pasmée quand elle oiit chu, mains Ernebaut le redrechat el li dest : « Ma damme, ilh n'y walt le ploreir, car mors est Guys. Lassiés tout aleir et prendeis cuer en vous, si vos remariés et moy prendeis à maris, car je suy li plus beais et li miedre de vostre paiis d'avoir, de linage et d'honour, fours mys seulement vos enfans. » La damme respondit : « Ernebaut, porquoy dis-tu teile chouse ? Se monsaingnour est mors, chu moy displaist ; mains je l'ayme tant que j'ay voweit à Dieu que jamais n'aray altre baron ; car je en ay trois beais fis de li, si les weulhe gardeir le leur. » Quant Ernebaut li oiit chu dire, si respondit : « Damme, le fereis, volhiés ou non ; se vos le faite par forche, les gens vous escuseront. »

[II, p. 440b] La comtesse avait un sénéchal dans le comté de Mayence. C'était un traître, qui envisagea un plan, lequel plus tard causa la mort d'un grand nombre de personnes. Il s'appelait Ernebaut. Quand il apprit ce qui s'était passé, il attendit huit jours, en faisant rechercher le comte partout. Quand il comprit que ce dernier ne reviendrait pas, il se rendit auprès de la comtesse et lui dit entre autres choses : « Madame, pleurer ne vous sert en rien, vous ne retrouverez jamais monseigneur. C'est ce que je pense. Car j'ai cherché à savoir la vérité : il s'est noyé dans la Leyne, une rivière profonde, dans laquelle son cheval est tombé. » Quand elle entendit cela, la dame perdit connaisssance, mais Ernebaut la releva et lui dit : « Madame, pleurer ne sert à rien, car Guy est mort. Oubliez tout, reprenez courage, remariez-vous et prenez-moi pour époux, car je suis, par la fortune, le lignage et l'honneur, le personnage le plus beau et le meilleur de votre pays, mis à part seulement vos enfants. » La dame dit : « Ernebaut, pourquoi dis-tu des choses pareilles ? Si mon seigneur est mort, cela me fait de la peine ; mais je l'aime et j'ai promis à Dieu de n'avoir jamais d'autre mari. Il m'a donné trois beaux garçons et je leur souhaite de garder leur père. » Quand Ernebaut l'entendit, il répondit : « Madame, cela se fera, que vous le veuillez ou non ; si vous vous y opposez avec force, les gens vous le reprocheront. »

Ernebaut attaque la comtesse avec violence devant ses enfants qui interviennent (II, p. 440b-441a)

[II, p. 440b] [La damme ferit Ernebaut) Atant Ernebaut le wot baisier ; mains celle le ferit de son pongne diestre emmy le visaige, si que ly sanc en salhit fours, en disant : « Ribaux, tu es trop hardis. » Et chis fut si orgulheux qu'ilh le prist par les cheveals et le traienat par tout le saul, et le batit et de piés et de pongnes.

[II, p. 440b] [La dame frappa Ernebaut] Alors Ernebaut voulut l'embrasser ; mais la comtesse le frappa de son poing droit au visage qui se mit à saigner. Elle dit : « Scélérat, tu as trop d'audace. » Mais Ernebaut fut si violent qu'il attrapa la dame par les cheveux et la traîna sur le sol, lui donnant des coups de pieds et de poings.

[Doyelin pasmat) Mains la damme commenchat à crier. Et ses trois petits enfans vinrent là : et Doion avoit I arc et de sagettes, dont ilh aprendoit à traire ; et quant ilh veit, si at ferut de son arc le trahitre sus le tieste, si que li sanc en issit. Et li trahitre aherdit l'enfant à dois mains, et le jettat contre terre si roidement qu'ilh pasmat del angosse qu'ilh sentit, car ilh estoit de VIII ans. Mains ilh est veriteit que, oussitost qu'ilh respirat, ilh ferit de son arch le trahitre, et li dest : « Vilains, se je vis longement, tu comparas chu que tu as forfait à ma mere. » Et dest Ernebaut : « Je t'en croy bien, car tu es li plus fors et puissans de ton eage que je veis [II, p. 441] onques. Se je puy, tu ne visqueras mie tant. »

[Doon perdit connaissance] Alors la dame se mit à crier. Ses trois petits enfants arrivèrent sur place : Doon avait un arc et des flèches, dont il apprenait à se servir. Quand il vit le traître, avec son arc il le frappa à la tête, qui se mit à saigner. Alors le traître empoigna l'enfant à deux mains et le jeta à terre si rudement qu'il perdit connaissance à cause de l'angoisse qu'il ressentait, car il n'avait que huit ans. Mais en vérité, dès qu'il reprit ses esprits, il frappa à nouveau le traître avec son arc en lui disant : « Vilain, si je vis longtemps, tu paieras le mal que tu as fait à ma mère. » Et Ernebaut lui répondit : « Je t'en crois bien capable, car tu es l'être de ton âge le plus fort et le plus puissant que j'aie [II, p. 441] jamais vu. Si je le peux, tu ne vivras pas assez longtemps pour me nuire. »

Ernebaut veut faire disparaître les enfants et charge leur précepteur Salomon de cette sinistre besogne (II, p. 441)

[II, p. 441] [Doyelin et ses freres furent pris] Atant vat les trois enfans prendre et loiier sour unc cheval et les emenat. Et la damme reclamoit Dieu et prioit por ses enfans. Et assemblat ses chevaliers et ses escuwirs, et soy deplandit à eaux del trahitre Ernebaut ; mains nullus n'oisat entreprendre le debat contre le senescal.

[II, p. 441] [Doon et ses frères furent capturés] Alors Ernebaut alla prendre les trois enfants, les attacha sur un cheval et les emmena. La dame, qui invoquait Dieu et priait pour ses enfants, rassembla ses chevaliers et ses écuyers, et se plaignit devant eux du traître Ernebaut ; mais nul n'osa s'opposer de front au sénéchal.

[Doyelin et ses II freres furent livreis à Salomon por ochire] Et Ernebaut vint à maistre qui endoctrinoit les trois enfans, et li dest qu'ilh estoit son cusins et l'avoit ameit toudis, et encor ilh l'ameroit plus, s'ilh voloit faire chu qu'ilh ly diroit. Et chil dest oilh. Et li dest Ernebaut : « Donc le jureis. » Et chis le jurat. Atant li delivrat les trois enfans et li dest qu'ilh desist partout qu'ilh les at oisteit des mains chil trahitre senescal ; et moy diras toutes les vilonies de monde, et puis tu les mainras à la riviere judis al matin, et loieras à cascon une pire à coul et les jetteras en l'aighe. Respondit Salomon, li maistre des enfans : « je acomplisseray vostre volenteit, mains gardeis que ma damme ne le sache. » Et dest Ernebaut : « elle serat arse temprement. » Atant soy partit Ernebaut, et Salomon soy commenche à escrier : « Ches trois enfans moy sont donneis à gardeir depart le conte. Dieu vos donne mal ! malvais trahitre. » Enssi demorat la chouse jusques à judi, qu'ilh menat les III enfans al riviere en une nachalle, et s'en vont eslongant le rivaige vers le bois. Et Doyelin dest adont : « Ilh est temps del retourneir. » « Taiseis tou kois, car ilh vos covient tous morir, et vostre meire serat arse, car enssi le wet Ernebaut. » Quant Doyelin l'entendit, et Savaris et Gerardin, si commenchent à ploreir et se disent : « Nos estons trahis. »

[Doon et ses deux frères furent livrés à Salomon pour être tués] Ernebaut vint alors trouver le maître qui instruisait les trois enfants. Il lui dit qu'il était son cousin, qu'il l'avait toujours aimé et qu'il l'aimerait davantage encore s'il acceptait de faire ce qu'il lui dirait. Celui-ci accepta. Et Ernebaut lui dit  « Alors jure-le. » Et il jura. Alors le sénéchal lui remit les trois enfants en lui disant d'aller raconter partout qu'il les avait arrachés aux mains de ce traître sénéchal. Tu diras de moi toutes les horreurs du monde. Puis tu les mèneras à la rivière jeudi matin, tu attacheras une pierre à leur cou et tu les jetteras dans l'eau. Salomon, le maître des enfants, répondit : « Je ferai selon votre volonté, mais veillez à ce que la comtesse ne le sache pas. » Alors Ernebaut dit : « Elle sera très bientôt brûlée. » Alors Ernebaut s'en alla, et Salomon commença à crier : « Ces trois enfants ont été confiés à ma garde par le comte. Que Dieu vous maudisse ! mauvais traître. » Les choses en restèrent là jusqu'au jeudi, quand Salomon amena les trois enfants dans une petite barque sur la rivière. Ils avancèrent vers le bois en longeant le rivage. Doon dit alors : « il est temps de retourner. » - « Taisez-vous, et restez calmes ; vous devez mourir, et votre mère sera brûlée, car c'est ce que veut Ernebaut. » Quand Doon, Savaris et Gérardin entendirent cela, ils se mirent à pleurer en se disant : « Nous sommes trahis. »

Deux des enfants meurent, tandis que l'aîné (Doon de Mayence), âgé de huit ans, échappe au massacre et tue Salomon (II, p. 441b-442a)

[II, p. 441b] [Salomon ochist les II freres Doyelin, Gerardin et Savaris] Et Salomon ferit Gerardin d'on aviron, sique ly cervelle est salhis fours de la plaie, et puis le jettat en la mere. Quant Doyelin veit chu, si oit paour, si blamat son maistre de chu qu'ilh avoit fait. Et Salomon li dest qu'ilh morat et Savaris enssi.

[II, p. 441b] [Salomon tua Gérardin et Savaris, les deux frères de Doon] Salomon frappa Gérardin avec un aviron, faisant sortir sa cervelle de la plaie, et le jeta à l'eau. Quand Doon vit cela, il eut peur, blâma son maître, pour ce qu'il avait fait. Salomon lui dit alors qu'il mourrait, ainsi que Savaris.

[Doyelin ochist Salomon, qui avoit ochis ses freres] Atant aherdit Savaris, et Doyelin at pris son cutel, si le butat en ventre Salomon et puis le jettat en la mere. Ors s'en vat li batel par la mere, et si fault li jour et vient la nuit ; les dois enfans sont en grans tourmens, Jhesu-Crist reclament et la benoite virge Marie, et tant que al matin, quant li soleol soy levat, [Doyelin] voit la terre, si alat sus ; et son frere, qui estoit de paour et de famine defalis, et morut là tantost. Et Doyelin plorat mult et le covrit dedens les fuelhes de bois, puis s'en alat par le bois mangnant des noisetes [II, p. 442] tant que la nuit vient. Adont ilh fut disconforteis, et montat sour une arbre por les leux et les altres biestes, jusques al jour qu'ilh soy levat ; et aloit par le bois en priant Dieu merchis, en apellant la mere Jhesu-Crist qu'ilh ly weulhent aidier.

[Doon tua Salomon, qui avait tué ses frères] Salomon empoigna Savaris. Alors, Doon prit son couteau, l'enfonça dans le ventre de Salomon et jeta celui-ci dans l'eau. Le bateau vogua sur la rivière, le jour s'acheva et la nuit tomba. Les deux enfants souffraient beaucoup. Ils invoquaient Jésus-Christ et la benoîte Vierge Marie, jusqu'à ce que, au matin, au lever du soleil, Doon vit la terre où il aborda. Son frère, qui de peur et de faim avait perdu connaissance, mourut aussitôt. Doon le pleura beaucoup, le recouvrit de feuilles, puis s'en alla à travers le bois en mangeant des noisettes [II, p. 442] jusqu'à la tombée de la nuit. Alors il fut découragé et, à cause des loups et des autres bêtes, grimpa dans un arbre jusqu'au lever du jour. Ensuite il marcha dans le bois, en demandant pitié à Dieu et en appelant à l'aide la mère de Jésus-Christ.

Seul et perdu dans les bois, Doon finit miraculeusement par être retrouvé par son père l'ermite, à qui il raconte tout ce qui s'était passé (II, p. 442)

[II, p. 442] [La Virge Marie conduist la vois Doyelin jusques à son pere Guyon] Et la douche Virge Marie at la vois conduit al orelhe Guys, son pere ; et Guys l'entendit, se li sovint de ses enfans, et s'en vat par le bois où ilh avoit la vois oiit et dest qu'ilh sembloit bien que chu fust la vois Doyelin son fis. Atant vint al rivaige de la mere, si trovat le batel et veit sour terre asseis pres de rivage unc corps mors, et cognut que ch'estoit Savaris, son fis, que li vens avoit descoverte ; si en fut mult corochiet et ne savoit à penseir dont ilh venoit là.

[II, p. 442] [La Vierge Marie fit entendre le voix de Doon à son père Guy] La douce Vierge Marie fit parvenir la voix (de Doon) à l'oreille de Guy, son père. Celui-ci l'entendit et se souvint de ses enfants. Il marcha dans le bois vers l'endroit où il avait entendu la voix, se disant qu'il croyait bien reconnaître celle de Doon, son fils. Quand il arriva au bord de la rivière, il trouva le bateau et vit à terre, très près de la rive, un corps mort, qu'il reconnut être celui de son fils Savaris, que le vent avait découvert. Il fut très en colère, il ne savait que se demander comment il était arrivé là.

[Doyelin at troveit son pere Guyon] Puis fist une fosse de son bordon fereit, où ilh ensevelit le corps de son fis, puis s'en ralat vers son heremitage ; si trovat en la voie son fis Doyelin, cuy ilh recognut tantost. Et Doyelin soy despertat, car ilh estoit endormis d'anoiement, et tantost recognut son pere, se li commenchat à rire. Guyon le baisat, et tant li enquist dont ilh venoit, que ilh li dest tout le fait de luy, et sa mere et ses freres.

[Doon retrouva son père Guy] Puis, avec le fer de son bâton, il creusa une fosse où il enterra le corps de son fils, puis retourna vers son ermitage. En chemin, il rencontra son fils Doon, qu'il reconnut tout de suite. Doon alors se réveilla, car il s'était endormi d'ennui. Lui aussi reconnut immédiatement son père et se mit à sourire. Guy l'embrassa, en lui demandant d'où il venait. Doon lui raconta tout ce qui leur était arrivé, à lui, à sa mère et à ses frères.

Guy décide de retourner à Mayence, mais en route il devient subitement aveugle - Son fils Doon le ramène à l'ermitage où il restera pour s'occuper de lui [II, p. 442]

[II, p. 442b] [Guyon menat son fis Doyelin en son heremitaige demoreir] Fortement fut corochiet Guyon de chu que Doyelin li dest ; si dest que Ernebaut en perderoit la vie. Adont emmenat son fis en son heremitaige, et li donnat à mangnier des rachines et des noisetes et des pommes savaiges.

[II, p. 442b] [Guy emmena son fils Doon dans son ermitage] Guy fut très fâché suite à ce que lui raconta Doon ; il déclara que Ernebaut en perdrait la vie. Alors il emmena son fils dans son ermitage, et lui donna à manger des racines, des noisettes et des pommes sauvages.

[Guyon devient avoigle] Et lendemain se sont tourneis vers la citeit de Maienche, en manechant Ernebaut. Mains enssi qu'ilh s'en aloient, vient une grant clarteit à Guyon devant li si claire, que ses yeux avoiglont ; et, quant ilh ne veit got, si dest à Doyelin, son fis, qu'ilh le reminast vers son heremitage, car ilh avoit perdut sa veyuwe. Enssi fut Guyon longtemps avoigle, et Doyelin demorat deleis luy et le servoit, et aloit par le bois quere leur vivre.

[Guy devient aveugle] Le lendemain, ils se dirigèrent vers la cité de Mayence, en menaçant Ernebaut. Mais tandis qu'ils marchaient, Guy vit devant lui une clarté éblouissante qui l'aveugla. Et comme il ne voyait plus rien, il dit à son fils de le ramener dans son ermitage, car il avait perdu la vue. Ainsi Guy fut longtemps aveugle et Doon resta près de lui pour le servir, allant chercher dans le bois de quoi se nourrir.

 


 

C. SUITE DES ÉLÉMENTS DE CHRONIQUE - An 723 de l'Incarnation - p. 442b-442a

 

Résumé

 

* An 723 : Gérard, duc de Bourgogne, transfère à Vézelay le corps de Marie Madeleine - Histoire des reliques de la sainte

* An 723 : Charles Martel blessé dans une bataille contre Gérard de Roussillon

 

 

An 723 - Gérard, duc de Bourgogne, transfère à Vézelay le corps de Marie Madeleine - Histoire des reliques de la sainte

[II, p. 442b] [L’an VIIc et XXIIII - Garart, duc de Borgongne, translatat le corps la Magdalene] Item, l'an VIIc et XXIIII fut li corps de Marie Magdalene translatait à Verseliach par Gerar, le duc de Borgogne, le corps de laqueile bien amée de Dieu, apres la passion sains Estiene, le prothomartyr, sains Maximiens, li uns des LXXII disciples Nostre-Saingnour en Galle l'amenat awec li ; et quant elle fut trespassée, apres chu qu'elle oit XXX ans geut en terre en sa sepulture, ilh le translatat à Ays en Provenche, dont ilh estoit evesque, lesqueiles reliques furent mise par ledit Gerar en l'engliese de la vilhe de Versiliach qu'il avoit là meisme edifiiet, le translatat sicom dit est. Ilh sont alcunnes [II, p. 443] hystoires qui dient qu'elle repoise à Ephesi ; et les altres dient en Ytaile ens en la fosse sainte Cristiane. Il est bien voirs que tous le corps ne fut mie translateis à Versiliach, mains une partie des reliques, enssi com ons dirat chi apres al temps le pape Nycol, li tirche de chi nom.

[II, p. 442b] [An 723 - Gérard, duc de Bourgogne, transféra le corps de Madeleine] En l'an 723, le corps de Marie Madeleine fut transféré à Vézelay par Gérard, duc de Bourgogne. Saint Maximien, un des septante-deux disciples de Notre-Seigneur, après la passion du protomartyr saint Étienne, avait amené avec lui en Gaule, le corps de cette femme, bien aimée de Notre-Seigneur. Quand elle fut morte, après être restée trente ans en terre dans sa sépulture, saint Maximien la fit transférer à Aix-en-Provence, dont il était évêque. Comme cela a été dit, ces reliques furent transportées par ledit Gérard de Bourgogne dans l'église de Vézelay qu'il avait édifiée. Certaines histoires [II, p. 443] disent que Marie Madeleine repose à Éphèse ; d'autres disent que c'est en Italie, dans la fosse de sainte Christine. Il est certain que le corps entier n'a pas été transféré à Vézelay, mais seulement une partie des reliques, comme on le dira ci-après, au temps du pape Nicolas, le troisième de ce nom (1277-1280 n.è.).

An 723 - Charles Martel blessé dans une bataille contre Gérard de Roussillon

[De Char-Martel] En cel an oit une grant batalhe Char-Martel, roy de Franche, et Gerard de Rosselhon ; mains Gerard fut desconfis, et ly meismes mult navreis.

[Charles Martel] Cette année-là (723) une grande bataille opposa Charles Martel à Gérard de Roussillon ; Gérard fut battu, et Charles Martel blessé.

Sur Gérard de Roussillon ou Gérard del Fraite, l'oncle d'Ogier le Danois, cfr les observations faites dans le fichier précédent (en II, p. 438). On retrouvera le personnage plus loin (en II, p. 521 et surtout dans le Tome III.


[Texte précédent II, p. 434b-438a]   [Texte suivant II, p. 443b-448a]