FEC - Folia Electronica Classica (Louvain-la-Neuve) - Numéro 19 - janvier-juin 2010


Carmen contra paganos : texte et traduction

par

Anne-Marie Boxus et Jacques Poucet


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    Le présent fichier contient une édition du Carmen, organisée selon une structuration du texte qui est fonction à la fois du style et du sens. Chaque bloc propose à gauche le texte latin et à droite la traduction française.

    Pour le texte latin, nous avons suivi celui de l'édition d'Aldo Bartalucci, <Contro I Pagani> Carmen cod. Paris. lat. 8084. Introduzione, testo critico, traduzione e commento, Pisa, 1998, une des plus récentes, très précieuse notamment pour son apparat critique détaillé et ses abondantes notes de commentaire. Un astérisque dans le texte signale les rares passages où nous nous en écartons. On notera toutefois que les différences de ponctuation et de graphies par rapport à cette édition ne sont pas notées. Nous avons privilégié au maximum la leçon du manuscrit (P).

    Le texte latin est accompagné d'une traduction française, que nous soumettons à la critique de l'utilisateur. C'est une version expérimentale. Comme le texte latin n'est pas toujours clair et que nous ne voulions pas d'une traduction qui serait en fait une interprétation, nous sommes restés le plus près possible de l'original, sans chercher à en lever toutes les ambiguïtés et en nous réservant de traiter ailleurs, plus en détail, ce qui relève de l'explication, de la discussion et du commentaire. Nous avons toutefois tenu à proposer déjà un premier essai de commentaire, qui vise simplement à faciliter la compréhension générale du poème. Le lecteur de la traduction pourra  s'y référer pour en éclairer les différents  passages.


[1-24] [25-33] [34-56] [57-77] [78-86] [87-109] [110-122]


 

Première partie  (1-24) [Comm]

Adresse d'un pamphlétaire chrétien anonyme à un collectif de proceres romains restés attachés au paganisme

Évocation d'une série de divinités de la religion romaine traditionnelle, immorales et indignes de foi, dont ces proceres sont de fidèles adeptes  (1-8).
Jupiter, illustre entre autres par ses frasques amoureuses, fournit un exemple flagrant de cette immoralité. C'est aussi le cas des amours scandaleuses de Vénus (9-22).
Une conclusion s'impose : ces divinités sont indignes de confiance, et leurs prêtres (sacratis ?) incapables de régler vos litiges à vous, proceres (23-24).

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Dicite, qui colitis lucos antrumque Sibyllae

Idaeumque nemus, Capitolia celsa Tonantis,

Palladium Priamique Lares Vestaeque sacellum

incestosque deos, nuptam cum fratre sororem,
 

Dites-moi, vous qui honorez les bois sacrés et l'antre de la Sibylle,

le bois de l'Ida, les sommets Capitolins du Tonnant,

le Palladium et les Lares de Priam et le sanctuaire de Vesta,

des dieux sans morale, une soeur épouse de son frère,

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inmitem puerum, Veneris monumenta nefandae,

purpurea quos sola facit praetexta sacratos,

quis numquam uerum Phoebi cortina locuta est,

Etruscus ludit semper quos uanus haruspex :


Iuppiter hic uester, Ledae superatus amore,
 

un enfant cruel, tout ce qui rappelle l'impie Vénus,

vous que seule la pourpre de votre toge prétexte rend sacrés,

vous à qui le chaudron de Phébus n'a jamais adressé de parole véridique,

vous de qui se joue sans cesse l'inconsistant haruspice étrusque :


Ce Jupiter que vous vénérez, vaincu par l'amour de Léda,
 

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fingeret ut cycnum, uoluit canescere pluma.

Perditus ad Danain *flueret subito aureus imber,

per freta Parthenopes taurus *mugiret adulter.

Haec si monstra placent, nulla sacrata pudica !

Pellitur arma Iouis fugiens regnator Olympi :
 

a voulu, pour se déguiser en cygne, se couvrir d'un blanc plumage.

Éperdu, il se serait soudain coulé en pluie d'or auprès de Danaé,

en taureau adultère, il aurait mugi sur les ondes de Parthénopé.

Si l'on croit à ces monstruosités, aucune de ses adeptes n'est vertueuse !

Le roi de l'Olympe fuyant les armes de Jupiter est chassé de son royaume :
 

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et quisquam supplex ueneratur templa tyranni,

cum patrem uideat nato cogente fugatum ?

Postremum, regitur fato si Iuppiter ipse,

quid prodest miseris perituras fundere uoces ?

Plangitur in templis iuuenis formonsus Adonis :
 

quelqu'un va-t-il alors, en suppliant, vénérer les temples d'un tyran,

lorsqu'il voit un père contraint par son fils à prendre la fuite ?

En fin de compte, si Jupiter en personne est soumis aux lois du destin,

qu'apportent aux malheureux des flots de prières qui seront sans effet ?

Dans les temples, on pleure le jeune et bel Adonis :
 

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nuda Venus deflet, gaudet Mauortius heros,

Iuppiter in medium nescit finire querellas

iurgantesque deos stimulat Bellona flagello.


Conuenit his ducibus, proceres, sperare salutem ?

Sacratis uestras liceat conponere lites ?

Vénus nue est en larmes, le héros Mavortius se réjouit,

parmi eux Jupiter n'arrive pas à mettre fin à leurs querelles,

et Bellone avec son fouet excite les dieux qui se disputent.


Convient-il, éminents citoyens, d'espérer le salut avec de tels guides ?

Pourrait-on permettre à leurs prêtres de régler vos différends ?


Deuxième partie (25-122)

Attaques violentes contre un préfet récemment décédé

La mort d'un préfet provoque de l'émotion à Rome (25-33) [Comm]

Un préfet, qui fut très peu utile à la ville, vient enfin de mourir et sa mort lente (tracta) n'est pas passée inaperçue à Rome.

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Dicite : praefectus uester quid profuit urbi,

quem Iouis ad solium raptum tractatis abisse,

cum poenas scelerum tracta vix morte rependat ?

Mensibus iste tribus, totam qui concitus urbem

lustrauit, metas tandem peruenit ad aeui !
 

Dites-moi : en quoi votre préfet a-t-il servi la ville,

lui qui, déclarez-vous, s'en est allé vers le trône usurpé par Jupiter,

lui dont une mort lente paie difficilement les crimes ?

Cet homme excité, qui a parcouru la Ville dans tous les sens

durant trois mois, a enfin atteint les bornes de sa vie !
 

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Quae fuit haec rabies animi ? Quae insania mentis ?

*Sed Ioui uestram posset turbare quietem ?

Quis tibi iustitium incussit, pulcherrima Roma ?

Ad saga confugeret populus quae non habet olim ?

Quelle rage s'était emparée de son âme ? Quelle folie avait gagné son esprit ?

Mais, au nom de Jupiter, allait-il  pouvoir troubler votre tranquillité ?

Qui décréta chez toi l'état d'urgence, ô magnifique Rome ?

Le peuple allait-il reprendre des armes, délaissées depuis longtemps ?

                                 

Première salve de critiques visant le préfet (34-56) [Comm]

   Les premiers vers soulignent l'attachement du préfet à la religion païenne, symbolisée par Numa (34-37).
   Sont avancés  ensuite divers reproches concernant la gestion administrative du préfet, sa participation à des cérémonies diverses, et sa volonté de nuire aux chrétiens (38-45).
   Enfin l'auteur du pamphlet reproche au préfet des  pratiques et des croyances blâmables à ses yeux  ainsi que sa volonté sournoise de nuire aux chrétiens et de combattre le vrai dieu, sans agir ouvertement cependant (46-56).

34 Sed fuit in terris nullus sacratior illo,
 
Mais personne sur terre ne fut plus adepte des cultes que cet homme,
 

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quem Numa Pompilius, e multis primus aruspex,

edocuit uano ritu pecudumque cruore

polluere (insanum !) bustis putentibus aras.


Non ipse est uinum patriae qui prodidit olim,

antiquasque domus, turres ac tecta priorum
 

lui que Numa Pompilius, le premier d'une multitude d'haruspices,

instruisit à souiller par de vains rituels et le sang d'animaux

(quelle insanité !) les autels de bûchers malodorants.


N'est-ce pas lui qui jadis détourna le vin de la patrie,

et qui voulut, en mettant sens dessus dessous les antiques demeures,
 

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subuertens urbi uellet cum inferre ruinam,

ornaret lauro postes, convivia daret,

pollutos panes infectans ture vaporo

poneret, in risum quaerens quos dedere morti,

gallaribus subito membra circumdare suetus,
 

les tours et les maisons des ancêtres, provoquer la ruine de la ville ?

N'est-ce pas lui qui ornait les portails de lauriers, offrait des banquets,

servait des pains souillés, imprégnés de fumée d'encens,

cherchant dans les rires ceux qu'il livrerait à la mort,

habitué à soudain couvrir leurs membres de tenues de mirmillons,
 

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fraude noua semper miseros profanare paratus ?


Sacratus vester urbi quid praestitit, oro,

qui hierum docuit sub terra quaerere Solem ?

Cum sibi forte pirum fossor de rure dolasset,

diceret esse deum comitem Bacchique magistrum,
 

toujours prêt, par une ruse nouvelle, à avilir des malheureux ?


Votre saint homme, je vous le demande, qu'a-t-il apporté à la ville,

lui qui montra comment chercher le Soleil sacré sous la terre ?

Si par hasard un paysan rustre s'était façonné un objet en bois de poirier,

il dirait que c'était un dieu, compagnon et maître de Bacchus,
 

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Sarapidis cultor, Etruscis semper amicus.

Fundere qui incautis studuit *contecta uenena,

mille nocendi uias, totidem cum quaereret artes :

perdere quos uoluit, percussit, luridus anguis,

contra deum uerum frustra bellare paratus,
 

lui, l'adorateur de Sarapis, l'ami invétéré des Étrusques.

Sur des gens sans méfiance, il s'appliqua à répandre des poisons cachés,

cherchant mille moyens de nuire, qui étaient autant d'artifices :

ignoble serpent, il a frappé ceux qu'il a voulu perdre,

prêt à lutter, mais en vain, contre le dieu véritable,
 

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qui tacitus semper lugeret tempora pacis

nec proprium interius posset uulgare dolorem.
 

lui qui, secrètement, ne cessait de déplorer nos temps de paix

sans pouvoir manifester au grand jour sa propre douleur intérieure.
 

 

Le préfet, adepte du culte Cybèle, vénère aussi le panthéon traditionnel (57-77) [Comm]

   Non seulement le préfet s'est fait initier (taurobolier) au culte de Cybèle, mais il semble avoir pris part très activement aux processions et cérémonies du culte de la Grande Mère (57-66).
   Son attachement à Cybèle ne le détourne cependant pas des autres cultes traditionnels, d'origine grecque ou romaine (67-77).

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Quis tibi, taurobolus, uestem mutare suasit,

inflatus diues, subito mendicus ut esses,

obsitus et pannis, modica stipe factus epaeta,
 

Quel taurobole t'a persuadé, toi, homme riche gonflé d'orgueil,

de changer de tenue pour devenir soudain un mendiant

revêtu de haillons, quémandeur d'une petite obole,
 

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sub terra missus, pollutus sanguine tauri,

sordidus, infectus, uestes seruare cruentas

uiuere cum speras uiginti mundus in annis ?

*Abieras censor *meliorem caedere uitam,

hinc tua confisus possent quod facta latere,
 

envoyé sous terre, souillé du sang d'un taureau, sale et crasseux ?

Qui t'a persuadé de conserver ces vêtements ensanglantés,

dans l'espoir de vivre purifié durant vingt années ?

Toi, en censeur sévère, tu étais allé abattre une vie meilleure,

dans l'espoir qu'ainsi tes actes pourraient rester cachés,
 

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cum canibus Megales semper circumdatus esses,

quem lasciva cohors (monstrum) comitaret ovantem.


Sexaginta senex annis durauit, ephoebus,

Saturni cultor, Bellonae semper amicus,

qui cunctis Faunosque deos persuaserat esse,
 

toi qui étais toujours entouré des chiens de la Grande Mère,

et triomphais, (monstrueux spectacle!) escorté d'une cohorte lascive.


Vieillard sexagénaire, il a toujours vécu en éphèbe,

adorateur de Saturne, ami fidèle de Bellone,

lui qui avait persuadé tout un chacun que les dieux Faunes

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Egeriae nymphae comites, Saturosque Panasque,

nympharum Bacchique comes Triuiaeque sacerdos,

quem lustrare choros ac molles sumere thyrsos

cymbala quem inbuerat quatere Berecyntia mater ;

*quis Galatea potens iussit Ioue prosata summo,
 

étaient les suivants de la nymphe Égérie, comme les Satyres et les Pans,

lui, compagnon des nymphes et de Bacchus, prêtre de Trivia,

qui savait mener les choeurs, manier les thyrses souples

et agiter les cymbales, lui qu'avait instruit la Mère Bérécyntienne,

lui, lié à ces divinités soumises à la puissante Galatée, née du grand Jupiter,
 

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iudicio Paridis pulchrum sortita decorem.

Sacrato liceat nulli servare pudorem,

frangere cum uocem soleant Megalensibus actis.
 

laquelle, suite au jugement de Pâris, a remporté le prix de beauté.

Aucun des adeptes de ces dieux ne pourrait rester honorable,

habitués qu'ils sont tous à briser leur voix aux Fêtes Mégalésiennes.
 

 

Le préfet pousse des chrétiens à l'apostasie (78-86) [Comm]

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Christicolas multos uoluit sic perdere demens :

qui uellent sine lege mori, donaret honores
 

Dans sa démence, il a voulu perdre de nombreux chrétiens :

ceux qui voulaient mourir en dehors de leur foi, il les chargeait d'honneurs
 

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oblitosque sui caperet quos daemonis arte,

muneribus cupiens quorundam frangere mentes

aut alios facere parua mercede profanos

mittereque inferias miseros sub Tartara secum.

Soluere qui†s† uoluit pia foedera, leges,
 

et ceux qui oubliaient leur salut, il les séduisait par des ruses démoniaques,

cherchant à briser les esprits de certains par des charges,

en poussant d'autres à apostasier, contre un peu d'argent,

entraînant avec lui dans le Tartare ces malheureuses offrandes funèbres.

Lui qui voulut rompre les pactes sacrés et les lois,
 

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Leucadium fecit fundos curaret Afrorum,

perdere Marcianum, sibi proconsul ut esset.
 

il chargea Leucadius d'administrer les domaines d'Afrique,

et poussa Marcianus à se perdre pour qu'il devienne son proconsul.
 

 

Inefficacité des divinités païennes et ridicule des cérémonies « à mystère » (87-109) [Comm]

Malgré la dévotion du préfet à l'égard de toutes ces divinités, romaines ou étrangères, celles-ci ne lui ont été d'aucun secours devant la mort (87-97).
Bien plus, sa participation à des cérémonies, comme celles célébrant Isis et Osiris, ne lui ont apporté que le ridicule (98-102).
Et que dire des fêtes en l'honneur de Cybèle et Attis ? (103-109)

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Quid tibi diua Paphi custos, quid pronuba Iuno

Saturnusque senex potuit praestare sacrato ?

Quid tibi Neptuni promisit fuscina, demens ?
 

Qu'ont pu t'apporter la déesse protectrice de Paphos, et Junon Pronuba,

et le vieillard Saturne, à toi leur pieux zélateur ?

Pauvre fou, quelle promesse as-tu reçue du trident de Neptune ?
 

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Reddere quas potuit sortes Tritonia uirgo ?

Dic mihi, Sarapidis templum cur nocte petebas ?

Quid tibi Mercurius fallax promisit eunti ?

Quid prodest coluisse Lares Ianumque bifrontem ?

Quid tibi Terra parens, Mater formonsa deorum ?
 

Quels oracles a pu te rendre la Vierge Tritonienne ?

Dis-moi, pourquoi courais-tu, de nuit, au temple de Sarapis ?

Que t'a promis le fallacieux Mercure, au moment où tu partais ?

À quoi te sert d'avoir honoré les Lares et Janus Bifrons ?

Qu'a fait pour toi la Terre génitrice, mère des dieux, la toute belle ?
 

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Quid tibi sacrato placuit latrator Anubis ?

Quid, *miserande, Caeres, subter Proserpina *mater,

quid tibi Vulcanus claudus, pede debilis uno ?


Quis te plangentem non risit, caluus ad aras

Sistriferam Fariam supplex cum forte rogares ?
 

En quoi Anubis l'aboyeur t'a-t-il plu, toi son dévot ?

Pauvre malheureux, que sont pour toi Cérès, Proserpine

la mère souterraine et le boiteux Vulcain, au pied infirme ?


Qui n'a pas ri de toi, quand, tête rasée, gémissant près des autels,

suppliant, tu implorais à voix haute Faria la porteuse de sistre ?
 

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Cumque Osirim miserum lugens latrator Anubis

quaereret, inuentum rursum quem perdere posset,

post lacrimas ramum fractum portares oliuae ?


Vidimus argento facto iuga ferre leones,

lignea cum traherent iuncti stridentia plaustra

Et tandis qu'Anubis l'Aboyeur, pleurant le malheureux Osiris,

cherchait celui qu'on pouvait perdre à nouveau, après l'avoir retrouvé,

(qui n'a pas ri) lorsque, en pleurs, tu portais un rameau brisé d'olivier ?


Nous avons vu que des lions portaient des jougs d'argent travaillé,

lorsque, attelés, ils tiraient des chariots de bois grinçants,
 

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dextra laeuaque istum argentea frena tenere,

egregios proceres currum seruare Cybellae,

quem traheret conducta manus Megalensibus actis :

arboris excisae truncum portare per urbem,

Attin castratum subito praedicere solem.

nous avons vu cet homme tenir en ses deux mains des rênes d'argent,

et une élite de notables observer le char de Cybèle,

tiré, lors des Mégalésies, par une troupe louée à cet effet :

nous avons vu transporter à travers la ville un tronc d'arbre coupé,

et le soleil levant annoncer soudain <la résurrection d'> Attis castré.

 

 Mort du protagoniste  Dévotions stériles des deux époux Adresse à son épouse (110-122) [Comm]

     Le personnage cible du pamphlet est mort, réduit à n'être plus qu'un tombeau. Il est devenu consul, et Flora est bien la seule à s'en réjouir (110-114).
     Pendant que le nouveau consul fait ses dévotions dans les temples, son épouse qui s'active à faire des offrandes et des rituels magiques en vue du salut (éternel ?) de son époux, ne fait que le précipiter dans le Tartare (115-120).
     Enfin, l'auteur, s'adressant directement à elle, lui conseille de cesser de pleurer son époux hydropique, qui a tout misé sur Jupiter (121-122).

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Artibus heu magicis procerum dum quaeris honores,

sic, miserande, iaces paruo donatus sepulcro.

Sola tamen gaudet meretrix te consule Flora,

ludorum turpis genetrix uenerisque magistra,

composuit templum nuper cui Symmachus heres.

 

Hélas, toi qui cherchais dans les arts magiques des honneurs de notables,

te voilà gisant ainsi, pitoyable, doté d'un simple tombeau.

Seule, il est vrai, à se réjouir de ton consulat, il y a Flora,

la prostituée, mère infâme et maîtresse des jeux d'amour,

à qui récemment ton successeur Symmaque a construit un temple.

 

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Omnia quae in templis positus tot monstra colebas,

ipsa mola et manibus coniunx altaria supplex

dum cumulat donis uotaque in limine templi

solvere dis deabusque parat superisque minatur,

carminibus magicis cupiens Acheronta mouere 
 

Toi, planté dans les temples, tu vénérais tous ces monstres si nombreux !

Ton épouse elle, suppliante, de ses mains enfarinées, sur les autels

entasse des offrandes et au seuil du temple cherche à s'acquitter

de ses voeux aux dieux et aux déesses, menace les dieux d'en haut,

voulant ébranler l'Achéron par ses incantations magiques :
 

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praecipitem inferias miserum sub Tartara misit.


Desine post hydropem talem deflere maritum,

de Ioue qui Latio uoluit sperare salutem !
 

elle t'a précipité dans le Tartare, tel une malheureuse offrande funèbre.


Cesse, après son hydropisie, de pleurer un tel mari,

lui qui a voulu espérer le salut de Jupiter Latiaris !
 

Voici les quelques endroits  où notre texte s'écarte de l'édition de Bartalucci :

vers 11 : flueret P | fluere et Bartalucci
vers 12 : mugiret P | mugire et Bartalucci
vers 31 : Sed Ioui multi | Vediouis Bartalucci | seditio multi | sedioui P
vers 51 : contecta Shackleton | concepta Bartalucci | concerta P
vers 63 : abieras P | ambieras Bartalucci
vers 63 : meliorem Adkin | meliorum P
vers 74 : quis Galatea P | quid Cytherea Bartalucci
vers 96 : miserande P - mater P | Quid miseranda Ceres, subter Proserpina matre Bartalucci


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