Bibliotheca Classica Selecta - Autres traductions françaises dans la BCS - Notice d'introduction

MOTEUR DE RECHERCHE DANS LA BCS


Jean le Lydien

Sur les institutions de l'État romain

(Premier livre)

Traduction

de

Michel Dubuisson

Professeur à l'Université de Liège (Belgique)


Traduction


Notice d'introduction

Des pouvoirs

Chapitres du livre I

[1] [2] [3] [4] [5] [6] [7] [8] [9] [10]

[11] [12] [13] [14] [15] [16] [17] [18] [19] [20]

[21] [22] [23] [24] [25] [26] [27] [28] [29] [30]

[31] [32] [33] [34] [35] [36] [37] [38] [39] [40]

[41] [42] [43] [44] [45] [46] [47] [48] [49] [50] [51]


Du même : DES POUVOIRS

1. Qu’avaient été des prêtres autrefois ceux qui furent plus tard les magistrats de l’État romain, voilà un fait dont absolument personne n’est resté ignorant : Tyrrhenus, qui, à partir de la Lydie, avait émigré à l’Ouest, avait enseigné à ceux qui s’appelaient alors les Étrusques -- c’était un peuple sicule -- les rites mystiques des Lydiens. C’est à leur haruspicine [thuoskopia] que les Étrusques doivent d’avoir pris le nom de Tusci. Voilà des points que nous avons mentionnés en long et en large, nous le savons, dans le premier livre du traité écrit par nos soins Sur les mois. 2. Quant aux insignes des magistrats, c’est aux Tusci que les avait empruntés le roi Numa pour les introduire dans la constitution. Il avait fait de même pour l’invincibilité en matière d’armes vis-à-vis des Gaulois. 3. Témoins Capiton et Fonteius, ainsi que le très savant Varron, tous des Romains et, après eux, le fameux Salluste, l’historien, qui nous offre des renseignements clairs dans le premier livre de son Histoire. 4. Il reste donc à fournir un exposé sur les pouvoirs civils et à montrer que, fondés sur un ordre sacerdotal, ils se sont développés sous la forme d’un corps civil. On ne nous taxera donc pas d’être étranger aux données de l’Antiquité, sauf peut-être à les trouver en discordance avec une assurance rationnelle et à changer l’éloge en jalousie. Un certain Gracchanus avait traité autrefois de ces questions par écrit : nous savons que des juristes le rapportent; mais ses écrits eux-mêmes ne sont sans doute plus en circulation nulle part; de toute façon, pour eux aussi, le temps est celui qui les a engendrés et soustraits aux regards en même temps.


 

 DES MAGISTRATURES CIVILES

CHAPITRES DU LIVRE I

 

1. Combien de temps s’est passé entre l’arrivée d’Énée en Italie et la fondation de Rome; combien de temps a duré la période des rois depuis celle-ci, combien celle des consuls jusqu’à César et depuis, combien s’est passé jusqu’à Constantin et, depuis celui-ci, combien de temps s’est écoulé jusqu’à la mort de l’empereur Anastase.

2. Quelle est la différence entre le rex, le tyran et le roi ; et que signifient la dignité de César et d’empereur ainsi que le mot Quirinus.

3. Que Romulus et ses contemporains parlaient l’éolien; qu’il ne faut point appeler "maîtres" les rois des Romains; sur les insignes du rex; qu’est-ce que la toga et la trabea; pourquoi les Romains nommaient le siège du roi solium.

4. Pourquoi ils appellent les crinières des tufae.

5. Pourquoi les Romains appellent les boucliers scuta, clipea et parmae, et quelle est la différence entre eux; que l’armée romaine a reçu son équipage d’Énée, comme de nos jours encore, ceux que l’on appelle les excubitores. Pourquoi ils appellent accensio le transport du roi par bête de somme.

6. Première institution, le commandant de cavalerie, et que l’on promut à sa place le préfet du prétoire.

7. Deuxième institution, les patriciens, et la raison pour laquelle l’Antiquité les a appelés patres conscripti; quelle sorte de tunique est celle que l’on nomme paragauda; où figurent aussi des notes sur ce que l’on nomme les campagia; ce que signifient ce que l’on nomme les tituli; et que les sénateurs d’autrefois recherchaient les honneurs; d’où vient que les Anciens portaient deux ou trois noms.

8. Troisième institution, les questeurs et qu’autre chose est un quaestor, autre chose un quaesitor; du consulat, et de ses insignes.

9. Quatrième institution, le pouvoir que l’on appelle décemviral.

10. Cinquième institution, celle que l’on appelle dictatura, et ce que signifie ce nom; combien de dictatores il y eut au total et jusqu’à quand.

11. Sixième institution, celle que l’on appelle censura; où figure aussi un exposé sur la comédie et la tragédie, et le moment où elles furent connues des Romains; pourquoi les Romains appellent, dans leur langue, nepotes à la fois les prodigues et les petits-fils, par homonymie.

12. Septième institution, le tribunat; quand furent donnés aux soldats ce que l’on appelle les capita et pourquoi on les appelle capita; des unités sous les armes, de leurs noms et des grades et de ce que l’on appelle les tirones.

13. Huitième institution, les praetores, et que le Préfet de la Ville d’aujourd’hui était un des praetores d’autrefois, en sa qualité de gardien de la cité.

14. Neuvième institution, le préfet des vigiles.


 

Sur les institutions de l’État romain

<Premier livre>

1. 1. Au moment d’entreprendre un exposé détaillé des institutions de l’État romain, il m’a paru intéressant de mettre en exergue de mon ouvrage le nom du personnage le plus ancien et le plus vénérable de tous. 2. Il s’agit d’Énée, dont la beauté et la force morale et physique firent croire qu’il était le fils d’un être plus qu’humain.

2. 1. Ainsi donc, depuis l’arrivée d’Énée en Italie jusqu’à la fondation de Rome, quatre cent trente-neuf ans se sont écoulés, d’après Caton l’Ancien et Varron, auteurs romains ; mais d’après [Jules] l’Africain, Castor et le disciple de Pamphile [Eusèbe], il y aurait eu 417 ans. 2. Et de la fondation jusqu’à l’expulsion des rois, deux cent quarante-trois ans ont passé. 3. Des consuls au premier César, il y a eu 465 ans -- ou, d’après certains, 466. 4. De César à Constantin, il y a un intervalle de trois cent soixante-quinze ans ; de celui-ci à la mort de l’empereur Anastase, 224 ans et sept mois, dont il faudrait retrancher neuf années pendant lesquelles Constantin fut empereur dans la sainte Rome [Constantinople]. 5. Depuis la fondation de cette bienheureuse cité, c’est désormais un total de deux cent quinze ans et sept mois qui s’est écoulé. 6. Donc, en additionnant les années depuis Énée jusqu’à la mort du noble Anastase, on arrive à un chiffre de mille sept cent quarante-six ans et sept mois : c’est l’avis des Grecs, d’après tous les auteurs des deux langues. 7. Après avoir établi ces faits d’une manière conforme à la vérité, le moment est venu, comme nous l’avons dit, d’exposer en détail les institutions de notre système politique.

3. 1. Donc, Romulus, à l’âge de dix-huit ans, bâtit avec son frère Rémus la mère de l’Empire -- Rome. 2. La charge qu’ils exerçaient s’appelle en latin "royale", c’est-à-dire tyrannique. Le nom de "royal" [regius], en effet, ne correspond pas, comme certains l’imaginent, à une royauté [basileia] romaine légitime : c’est pour cela que depuis l’expulsion des rois [reges], les Romains, quoique vivant sous un régime monarchique [basileuomenoi], n’ont plus eu recours à ce terme. 3. C’est une chose que la royauté légitime ; c’en est une autre que la tyrannie, et une autre encore que la dignité impériale. Je vais essayer de montrer brièvement en quoi elles diffèrent. 4. Le roi [basileus] est celui que ses sujets ont élu pour être le premier d’entre eux et mis sur un trône comme sur un piédestal : le sort lui a donné une fortune supérieure aux autres. Ainsi Sophocle dit d’Ajax qu’il a "le trône de Salamine au milieu des flots". 5. Le propre du roi est de ne toucher à aucune des lois de la cité, mais de préserver fermement, grâce à son pouvoir royal, la forme de son régime politique ; de ne rien faire en dehors des lois ni suivant son bon plaisir ; de sanctionner par son propre vote les décisions des meilleurs de la cité. Il témoigne à ses sujets l’affection à la fois d’un père et d’un guide ; il ressemble ainsi à celui dont nous avons été gratifiés par Dieu et par une heureuse fortune. 6. Ce n’est pas ainsi que le tyran réglera le sort de ceux qui sont tombés sous sa coupe. Il usera de sa puissance de manière irréfléchie, afin d’accomplir toutes ses volontés ; sans daigner respecter les lois ni supporter de recourir, pour les rédiger, à l’avis du Conseil, il se laissera guider par ses propres impulsions. 7. Le comportement du roi est régi par la loi ; lui n’a d’autre loi que son propre comportement.

4. 1. Quant au nom des Césars, ou empereurs [autokratores], il ne désigne ni une royauté, ni une tyrannie, mais plutôt un pouvoir absolu, une capacité toute personnelle de tirer parti, afin de l’améliorer, des troubles qui menacent l’État, ainsi que de donner des instructions à l’armée sur la façon dont il faudrait qu’elle affronte ses adversaires. 2. Imperare, en effet, signifie en latin "donner des ordres" ; de là imperator. 3. Que le nom d’empereur ou de César ne désigne pas un pouvoir royal, c’est ce qui ressort clairement du fait que les consuls, et après eux les Césars, ont repris pour titre la dignité de ceux qu’on appelle les imperatores. 4. On voit bien que le pouvoir des Césars ne fait pas usage des emblèmes des tyrans ; c’est revêtus de la seule pourpre qu’ils montent à la tribune du Sénat romain et qu’ils dirigent en maîtres, comme je l’ai dit, les troupes en armes. 5. Voilà pourquoi les Romains les ont appelés principes, c’est-à-dire premiers personnages de l’État. 6. Le nom de "César", lui, est indicatif d’une origine ; il vient du premier César, comme celui des Fabii, des Cornelii, des Flavii et des Anicii (ce dernier étant de provenance barbare). 7. Les Égyptiens ont de même appelé leurs rois "Pharaons" d’après le premier Pharaon, et "Ptolémées" d’après le premier de ce nom. 8. Cette modération des Césars se maintint chez les Romains jusqu’à Dioclétien. Le premier, il se ceignit la tête d’une couronne faite de pierres précieuses et se couvrit de pierreries les vêtements et les pieds ; il fit de son pouvoir quelque chose de royal, ou, pour dire vrai, de tyrannique ; il fit faire un recensement de la terre ferme et l’accabla d’impôts.

5. 1. Si bien que Romulus était tyran : d’abord, il fit disparaître son frère -- qui était l’aîné, qui plus est --, et il traitait sans discernement les affaires qui se présentaient. 2. C’est pourquoi il fut surnommé Quirinus, c’est-à-dire "maître" [kurios] -- même si le lexicographe Diogénianos est d’un autre avis. Il est clair que Romulus ou ses contemporains, à cette époque, n’ignoraient pas le grec (l’éolien, s’entend), comme le disent Caton dans son ouvrage sur les antiquités romaines et le très érudit Varron dans le prologue de son ouvrage adressé à Pompée ; Évandre et les Arcadiens étaient venus en Italie et avaient acclimaté chez les Barbares la langue éolienne. 3. L’autre étymologie que les grammairiens proposent pour ce terme me paraît, sauf leur respect, tirée par les cheveux. 4. Ils soutiennent que Quirinus tire son nom de Cures, une petite ville de Sabine, alors qu’il n’est pas originaire de là, mais bien du mont Palatin, qu’il est né sur les rives du Tibre et qu’il a été élevé là. 5. En fait, les tyrans aiment être appelés "seigneurs" [kurioi] et "maîtres" [despotai], et non "rois" [basileis].

6. 1. La dignité de César est supérieure à la royauté, parce qu’elle avait autrefois parmi ses prérogatives celle de donner des rois aux peuples. 2. Ce fut quelque chose de détestable et d’étranger à la liberté romaine que d’appeler "maîtres" et non "rois" ceux qui ont le pouvoir, dans la mesure où le nom de maître est commun à ceux-ci et à ceux qui ont acheté un fugitif [c’est-à-dire un esclave], tandis que le nom de roi appartient aux rois seuls. 3. Il est bien connu que l’habitude romaine était de réserver le nom de domini à ceux qui exerçaient un pouvoir tyrannique, comme Sylla ou Marius, et de donner à la tyrannie elle-même le nom de dominatio : ainsi les vils flatteurs font bon marché de la grandeur des rois quand, dans leur ignorance, ils accréditent l’idée que ceux-ci sont les premiers parmi des esclaves. 4. La vérité de cette assertion ressort du fait suivant. Un jour, Auguste (ou peut-être s’agissait-il de Tibère, qui lui succéda) fut appelé "maître" par un flatteur. Il se leva aussitôt et congédia l’assemblée, dédaignant, dit-il, de discuter avec des esclaves. Mais puisque cette appellation insultante avait été introduite auparavant, d’une manière en quelque sorte honorifique, notre très bienveillant empereur, dans sa bonté, et bien qu’il surpasse en modération tous ceux qui ont jamais régné, souffre qu’on l’appelle "maître", comme on dirait "notre bon père" ; ce n’est pas qu’il y prenne plaisir, mais il aurait honte de sembler refuser une faveur à ceux qui croient l’honorer.

 


 

Les insignes du rex

7. 1. Avant Romulus, les insignes de la royauté latine étaient un trône de bois et le vêtement appelé chez eux "trabée" ; je dirai un peu plus loin à quoi il ressemble. 2. C’est de là que vient, chez le poète romain [Virgile], au huitième livre de l’Énéide, quand il décrit la royauté de Latinus, la mention du trône et de la trabée. 3. Romulus, lui, avait en outre une couronne, un sceptre avec un aigle au bout et un manteau blanc descendant jusqu’aux pieds, rayé sur le devant, des épaules aux pieds, de bandes de pourpre (ce manteau s’appelle une "toge", c’est-à-dire "couverture", de tegere, par substitution de lettre ; c’est ainsi que l’on dit "couvrir" en latin), ainsi que des sandales pourpres ; on les appelle, d’après Cocceius [Dion Cassius], "cothurnes". 4. Cet aspect extérieur, avec ce que l’on appelle la "toge", était, en temps de paix, commun à celui qu’on appelle rex et à ses sujets ; la trabée, elle, était la paratura (c’est-à-dire le vêtement caractéristique) du rex seul. 5. C’était un chiton, un manteau en forme de demi-cercle, inventé, dit-on, par Agathocle, le tyran de Sicile. Quant au trône, son nom local était solium, qui équivaut, d’après le Romain [Aemilius] Asper, au terme apparenté sellium ; ou bien, d’après d’autres, on disait solium pour solidum, c’est-à-dire massif. 6. C’est en creusant un tronc épais pour lui donner la forme d’une boîte et d’un siège qu’on fabriquait un trône pour le pouvoir royal, afin que la personne du roi fût en sûreté comme à l’intérieur d’une boîte. Par derrière comme sur les deux côtés, aucune pièce ajustée, aucune plaque de bois supplémentaire n’était appliquée à la chaire, qui était, en un mot, d’une seule pièce et massive. 7. C’est pour cela que l’on appelait solium le trône du roi.

8. 1. Outre cela, Romulus était précédé par douze haches, d’après le nombre des vautours qu’il avait vus au moment où il se disposait à fonder la ville. 2. Plus tard, après la victoire du roi Tarquin l’Ancien sur les Étrusques et les Sabins, on ajouta aux signes distinctifs de la royauté de longues lances, également au nombre de douze ; elles n’ont pas de pointes, mais des crinières y sont suspendues ; les Romains les appellent iubae et les Barbares tufae, avec une légère déformation du mot. Il y avait en outre des vexilla, c’est-à-dire de longues lances auxquelles étaient fixées des pièces de tissu -- les Romains les appellent flammulae, à cause de leur couleur flamboyante ; j’ai suffisamment développé ce sujet dans mon livre des Mois.

9. 1. Tels étaient donc, à cette époque, les insignes de la royauté. Quant aux troupes en armes, voici textuellement ce que le Romain Paternus dit à leur sujet dans le premier livre de son Traité de tactique (je traduis) : "Romulus chargea des décurions du soin des choses sacrées ; ce sont les mêmes qu’il appela "centurions des unités d’infanterie". 2. Il y avait trois mille fantassins armés de boucliers ; il donna à chaque centaine d’hommes un chef, que les Grecs appellent hekatontarches et les Romains centurio ; il y avait ainsi trente centurions en tout et autant de "manipules", c’est-à-dire d’unités pourvues d’enseigne [sêmeiophoroi]. Il détacha de l’armée trois cents scutati " -- comme on dit en latin pour "armée de boucliers" -- "destinés à sa garde personnelle" -- je dirai un peu plus loin ce qu’est un soldat scutatus et ce qu’est un clipeatus -- "et il adjoignit à ses troupes trois cents cavaliers, en en confiant la responsabilité à un certain Celer (c’était son nom). 4. C’est ainsi que l’ensemble de l’armée les surnomma alors, par synecdoque, celeres. Comme la cavalerie était répartie en trois centuries, il donna à celles-ci trois dénominations distinctes, les appelant Ramnes, Tities et Luceres. " J’ai déjà expliqué l’origine de ces noms dans mon livre des Mois, dont j’ai parlé.

10. 1. Il est temps de dire en quoi le scutum diffère du clipeus. 2. Les Romains appellent scutus ce qui est à la fois robuste et compact ; c’est ce que les Grecs qualifient de stiptos, c’est-à-dire stibaros, comme Aristophane dans les Acharniens : "des vieillards secs et durs [stiptoi], des Marathonomaques, des hommes de chêne". 3. C’est pour cela que les Romains appellent scutlata les vêtements fins, serrés et légers. 4. Voici comment se présente le bouclier [scutum] : il est léger, puisqu’il est mince, mais il est très solide et ne s’enfonce pas facilement sous les coups. 5. Quant au thureos, les Romains l’appellent clipeus, parce qu’il dissimule [kleptein] et recouvre [kaluptein] celui qui le porte. 6. C’est une particularité des seuls Grecs de se servir à la guerre de boucliers très légers ; les Barbares ont des boucliers longs [thureoi], et au plus fort du combat, ils les ramènent au-dessus d’eux et s’en servent comme d’un abri.

11. 1. Il y a une autre sorte de bouclier plus petit, que les gens d’au-delà du Danube, qui ne sont pas capables de combattre à pied, emportent avec eux à cheval. Les Italiens l’appellent parma et les Scythes peltè. 2. Outre ces anciennes sortes de boucliers, il y a eu -- mais cela n’existe plus actuellement -- l’ancile, une espèce de bouclier minuscule, d’où vient le nom de esclaves prisonnières de guerre ou ancillae. 3. Quand, en effet, un soldat avait trouvé, d’aventure, une femme qui lui plaisait, il la couvrait de son bouclier au cours du combat, afin qu’il ne lui soit fait aucun mal, montrant ainsi qu’elle était réservée à celui qui l’avait sauvée. 4. C’est ainsi que les esclaves s’appellent en latin serui, parce qu’ils ont été sauvés [seruare] de la guerre : le sort les avait faits libres, mais la misère les a rendus esclaves : ceux-là sont appelés famuli, parce que la faim se dit fames. 5. Le nom des ancilia vient du grec, et plus précisément de l’éolien ; il signifie "lisse des deux côtés", comme les boucliers des Amazones.

12. 1. A cette époque, toute l’armée romaine avait un type d’équipement unique : un casque de bronze, une cotte de mailles, une épée large et courte, pendant contre la cuisse gauche, et à droite, deux javelots à pointe large, des jambières noires tissées, et, aux pieds, des sandales que les Grecs appellent arbulai et les Romains garbula ou crepidae. Cette appellation n’est ni naïve ni dépourvue de sens. Dans ses Portraits, Terentius, surnommé Varron (ce surnom, d’après Herennius, signifie "courageux" en celtique ; chez les Phéniciens, il désigne le Juif), rapporte qu’Énée arriva autrefois en famille accoutré de la sorte ; il a vu, dit-il, sa statue en marbre blanc poli sur une fontaine d’Albe. 2. Et cela est tout à fait vrai : le poète romain [Virgile] l’a représenté vêtu de cette manière dans le premier livre de l’Énéide, quand il errait en Libye avec Achate. 3. En temps de paix, ils s’enveloppaient dans des casaques de peau pendant des épaules jusqu’aux mollets ; ils en décoraient ce qu’on appelle les podeônes [l’emplacement des pattes]. Ils appelaient ces casaques globae, c’est-à-dire "dépouilles", car "dépouiller" se dit en latin globare. 4. La coutume était que non seulement les soldats en armes, mais aussi les généraux s’habillent de cette manière. 5. Les soldats d’aujourd’hui imitent les Barbares, qui en retour cherchent eux-mêmes à les imiter ; seuls font exception les gardes du palais - on les appelle en latin excubitores, c’est-à-dire "gardes éveillés" ; Tibère César fut le premier après Romulus à utiliser ce système -- cet équipement s’est maintenu, comme je l’ai dit, depuis Romulus, son origine remontant à Énée. 6. Il n’était pas permis, en effet, aux Romains de revêtir une tenue barbare ; et cela, Tranquillus [Suétone] le mentionne dans sa Vie d’Auguste. 7. Il rapporte qu’Auguste, ayant vu dans le public du cirque des Romains vêtus à la mode barbare, fut saisi d’une telle indignation que, bien que ceux qu’il visait se fussent aussitôt dépouillés de leur vêtement barbare, ils ne se firent reconnaître de l’empereur qu’à grand-peine. Voilà donc ce qu’était l’armée de Romulus.

13. 1. Quant à ceux qu’on appelle les accensiones, j’imagine qu’ils ont été créés pour servir les rois, pour le transport et l’acheminement du ravitaillement, tout comme les nocturni sont chargés des meubles et en général de tout ce qui est nécessaire au sommeil. 2. Cicéron, orateur plein d’abondance, emploie ce mot dans les Verrines : il appelle accensi les serviteurs particuliers des rois, parce qu’ils sont attachés à leur maître et obéissants. Accendere, en latin, signifie en effet "rivaliser d’efforts".

 


 

Première dignité : le maître de cavalerie

14. 1. Donc, comme je l’ai dit, Romulus confia l’infanterie aux centurions et la cavalerie à Celer, qui commandait auparavant l’ensemble de l’armée ; il l’encouragea à se saisir de pouvoirs étendus, des dons de la fortune, de l’administration du pays, si bien que, hormis la couronne, la royauté, un pouvoir qui n’a aucun contrôle par lui-même, ne détenait plus rien des maîtres de cavalerie. 2. Cette charge fut maintenue par les rois, par tous les dictateurs sans exception et ensuite par les rois, par tous les dictateurs sans exception et ensuite par les Césars, qui changèrent le nom du maître de cavalerie [hipparchos] et l’appelèrent "préfet" [eparchos]. Le juriste Aurelius l’atteste, qui dit textuellement (je traduis) : "il est nécessaire d’exposer brièvement d’où le préfet du prétoire tient sa charge. 3. Elle vient très probablement du maître de cavalerie : de fait, tous les anciens rapportent que c’est à sa place que le préfet a été nommé. Il arrivait en effet, chez les anciens, que les pleins pouvoirs fussent confiés, de façon momentanée, à des dictateurs. 4. Chacun de ceux-ci se choisissait un maître de cavalerie, pour partager avec lui sa charge ainsi que l’administration des affaires. 5. Le pouvoir étant ensuite passé aux empereurs, on introduisit le préfet du prétoire, à l’image du maître de cavalerie. Il a une puissance plus grande que son prédécesseur pour l’administration des affaires, pour l’établissement et l’entraînement des armées et pour le redressement en général ; il est parvenu à un tel niveau d’autorité que nul ne peut aller en appel contre lui ni contester son jugement."

15. 1. Voilà ce que dit le jurisconsulte. Quant à moi, même si la préfecture du prétoire se trouve être la plus ancienne et la plus importante de toutes les magistratures, et même s’il serait à la fois nécessaire et convenable d’en développer ici l’organisation et les prérogatives, 2. comme ce n’est pas dès l’origine, mais à partir d’Auguste qu’elle a, comme je l’ai dit, été créée pour remplacer le maître de cavalerie, il suffira pour l’instant de traiter de l’époque la plus ancienne, et de dire quel fut le berceau de la préfecture ; 3. ensuite, après l’exposé relatif aux magistratures plus anciennes, c’est dans les préliminaires au règne d’Auguste (règne où, comme je l’ai dit, cette magistrature connut ses débuts), que j’en exposerai de manière suivie et détaillée tous les éléments, sans oublier ceux qui lui ont été enlevés petit à petit. Puis je parlerai de l’administration qui en dépend, la plus grande de toutes, en vérité, et dont j’ai eu la chance de faire partie (aussi sais-je tout cela non par ouï-dire, mais pour y avoir personnellement participé). 4. C’est un témoignage de reconnaissance, une offrande en quelque sorte, pleine d’affection, que j’adresse ainsi aux fonctionnaires de cette magistrature : ils m’ont entretenu comme il le fallait, et après Dieu, maître de toutes choses, ils m’ont accordé la récompense de mes peines, une vieillesse honorable et un sort meilleur.

 


 

Deuxième dignité : les patriciens

16. 1. Il est bien connu que Romulus choisit cent vieillards dans l’ensemble des "curies" (c’est-à-dire des tribus) pour qu’ils s’occupent des affaires de l’État. Ce fut de lui qu’ils reçurent le nom de "Pères" ; des Italiens celui de patricii, c’est-à-dire nobles [eupatridai]. 2. Après l’enlèvement des Sabines, il les appela conscripti, c’est-à-dire "inscrits avec" ; voilà pourquoi, encore maintenant, les gouvernants romains se font appeler patres conscripti. Il prit également dans le peuple sabin, pour les ajouter à l’armée romaine, trente curies supplémentaires, le même nombre de centurions et trois cents chevaliers ; il y avait donc en tout 6000 fantassins et 600 cavaliers. 3. Ce nombre fut maintenu dans la suite par Marius, quand il créa ce qu’on appelle les "légions" (c’est-à-dire "troupes d’élite") ; et l’empereur Léon, qui fut le premier à préposer ceux qu’on appelle les excubitores à la garde des portes dérobées du palais, n’en enrôla que trois cents, d’après l’antiquité.

17. 1. Les insignes des Pères, ou patriciens [patrikioi], étaient d’une part un manteau double ou chlamyde, descendant des épaules jusqu’aux mollets, retenu par des agrafes d’or et de la couleur d’une feuille de vigne séchée ; il se distinguait par une bande de pourpre en son milieu, qu’on appelait "laticlave" ; ce manteau, on l’appelait atrabattica, d’après sa couleur ("sombre" se dit chez eux ater). 2. Ils ont en outre des "paragaudes" : ce sont des tuniques lancéolées, pourpres aux extrémités, toutes blanches ailleurs, avec des manches ; ils les appellent manicae. Le peuple sait donner à ce genre de tunique son vrai nom de "paragaude" ; et pourtant, la paragaude est une tunique ancienne, caractéristique, comme le dit le lexicographe Diogénianos, des Perses et des Sarmates. 3. Les patriciens ont aussi des jambières blanches, qui couvrent toute la jambe, pied compris, et une chaussure noire, ressemblant à un sandale, complètement découverte mais maintenant le talon à l’aide d’une sorte de petite languette et, au bout, les orteils ; des lanières se tirent, de part et d’autre, de dessous la plante du pied, jusqu’aux phalanges des orteils ; elles se rejoignent sur le dessus et enserrent le pied, si bien que la sandale est très peu visible, et seulement à la partie antérieure des orteils et sur l’arrière, tandis qu’on distingue le pied grâce à la jambière. 4. On l’appelle campagus, parce qu’on l’utilise encore maintenant sur le campus, c’est-à-dire la plaine. Les Romains se tenaient en effet sur la plaine quand ils procédaient à l’élection de leurs magistrats; ils mettaient alors ce type de chaussures. 5. Lepidus, dans son livre sur les prêtres, dit que le campagus est d’origine étrusque.

18. 1. Les patriciens, en public, ne se déplaçaient jamais à pied ni non plus à cheval -- cela semblait commun -- mais dans des voitures armoriées et assis sur un siège surélevé. Quatre mulets tiraient la voiture, faite de bronze corinthien et couverte de ciselures représentant des scènes et des figures de type archaïque. 2. Il n’était pas permis non plus, sauf au roi, d’atteler des chevaux à cette voiture : le déplacement dans une voiture tirée par des chevaux avait en effet un caractère triomphal. On appelait ces chars burichallia, d’après les bœufs ; à défaut de ceux-ci, comme la charge n’était pas lourde, on confiait l’attelage à des mulets.

 


 

Pour quelle raison les Romains qualifient de tituli

les dénominations officielles de leurs dignités

19. 1. Titus Tatius, qui était, comme je viens de le dire, le chef des Sabins, se lia aux Romains et unit si bien les deux peuples qu’on put dire qu’il n’y avait plus deux États, mais un seul : l’État romain. 2. Et comme Titus Tatius portait ce surnom, on prit, pour désigner la noblesse, le diminutif titulus formé sur le nom du premier Titus, et l’on appela Titi les gens qui avaient des ancêtres nobles, comme le dit l’auteur romain Perse.

20. 1. Voilà donc ce qui concerne les dignités. Quand aux honneurs, les aristocrates romains considéraient comme le premier de tous une bonne réputation obtenue à force de bienfaits ; et plus ils avaient de gens devenus leurs familiers, plus grande était, à leur avis, la considération dont ils jouissaient auprès des moins favorisés. 2. Le Romain Juvénal en est témoin, quand il dit que la gloire acquise par les bienfaits passait, pour les anciens, avant celle que procurent les consulats, les triomphes et les exploits militaires. 3. Leurs familiers, ils les appelaient en latin clientes, au lieu de colientes, par substitution de lettre, parce que ces gens les respectaient et les aimaient ; ils leur dispensaient les présents afin de les honorer et tout en faisant preuve eux-mêmes de modération, si bien que l’honneur témoigné aux amis reçut le nom de "recherche des honneurs" [filotimia]. Aucun de ceux qui avaient obtenu l’appui d’un noble n’avait besoin d’un autre homme pour le soutenir dans les diverses circonstances de la vie. Les aristocrates considéraient comme une honte et un échec personnel qu’un de leurs amis soit amené à avoir besoin de quelqu’un d’autre. 5. Une trace peu claire de cet état de choses s’est maintenue chez les Romains jusqu’à une époque récente. 6. Les membres de l’élite romaine expédiaient à Ostie (ville située à l’embouchure du Tibre) leurs hommes de confiance chargés de s’emparer avant les autres, comme d’une bonne prise, des étrangers qui débarquaient et de les leur amener. Les portes extérieures de la maison d’un grand personnage étaient ouvertes à tous, pour lui permettre de distribuer en abondance des largesses de toutes sortes. Il n’y avait pas de gardien ni de portier pour interdire l’entrée des solliciteurs, les aristocrates eux-mêmes, avec leur épouse et leurs enfants, se montraient à leurs hôtes et priaient ceux qu’ils n’avaient encore jamais vus de leur faire confiance. 7. Ce type de générosité a traversé les siècles jusqu’à notre Rome [Constantinople], mais il n’a pas réussi à s’y acclimater : nos grands personnages ne font bénéficier qu’eux-mêmes de la supériorité de leur fortune.

 


 

D’où vient que les Romains aient

deux, trois noms et plus

21. 1. Avant Romulus, il est possible d’établir que les rois de la contrée s’appelaient Silvii, d’après Silvius Énée, descendant du premier Énée. 2. Les Anciens avaient leurs habitations dans les forêts et ils faisaient grand cas de la vie nomade ; dans leur fierté, ils s’appelaient eux-mêmes Silvii ["forestiers"] et leurs rois en personne ne dédaignaient pas de faire paître des troupeaux et d’en tirer de l’argent. De là vient qu’ils appellent l’argent pecunia. 3. C’est pour cela aussi, comme le sait la tradition antique, que des chiens accompagnaient un jour le Tégéate Évandre. 4. Le nom de Silvii n’était pas donné seulement à des hommes, mais aussi à des femmes, comme Rhéa Silvia et Ilia Silvia. 5. Après la naissance de Rome et l’enlèvement des Sabines, le roi Numa fut le premier à avoir deux noms et s’appela Numa Pompilius ; l’un de ces noms était romain et l’autre sabin. 6. On ne trouverait pas, en effet, avant lui de personnage, que ce soit Romulus ou quiconque d’antérieur à la fusion entre Sabins et Romains, qui se soit donné une autre appellation en plus de son nom propre.

22. 1. A l’époque, c’était à la fois leur penchant et la coutume établie que de se glorifier d’un nom correspondant à cette double origine. Avec le temps, d’autres dénominations furent introduites, tirées tantôt de la noblesse troyenne, tantôt de ceux qu’on appelle Aborigènes, c’est-à-dire la population autochtone (on sait que Céthégus prétendait tirer son origine de ces fils de la terre ; il apparaissait sur le forum sans vêtements, avec une simple toge en tissu grossier pendant sur la poitrine, et cela bien qu’il fût surchargé d’insignes sénatoriaux), tantôt enfin du caractère ou des dispositions d’esprit, comme dans le cas de Publius Valerius Publicola, dont les deux premiers noms reflétaient l’origine illustre à la fois, comme je l’ai dit, du côté romain et du côté sabin, et le troisième montrait ses bonnes dispositions envers le peuple. 2. Peut-être serait-il utile de mentionner ici non pas un grand nombre, mais quelques-uns de ces détails curieux ; je n’ai pas le temps de m’étendre sur cette question, qui pourrait à elle seule faire la matière d’un gros livre.

23. 1. Donc, on appelait Proculus celui qui était né pendant un voyage de son père, Postumus le fils posthume, Vopiscus le jumeau ayant survécu à son frère mort-né, César le bébé qu’on avait sauvé en ouvrant le ventre de sa mère défunte, Flaccus l’homme avec une oreille plus grande que l’autre, Naevius le dartreux. Quant à Lucius Licinius Crassus, le premier de ces noms désigne l’enfant né au lever du soleil, le deuxième un homme aux cheveux crépus aux extrémités, le troisième quelqu’un de bien en chair et de robuste. 2. Crassus, en latin ancien, s’applique en effet à quelqu’un de naturellement corpulent. Pinarius, c’est celui qui a faim ; Statius, l’homme de bonne taille ; Faustus et Fabius, l’homme bienveillant ; Gaius, c’est-à-dire Gaudius, l’heureux caractère ; Tiberius, celui qui est né sur une rive du Tibre ; Titus, le descendant du Sabin Tatius ; Appius, celui qui habite sur l’Appienne (il y a une route de ce nom) ; Servius, celui qu’on a sauvé en le retirant du corps de sa mère morte ; Néron veut dire "fort" en sabin ; Nason, c’est l’homme au grand nez ; Tucca, le mangeur de viande (celui qu’aujourd’hui les gens simples appellent Ziccas) ; Varus et Blaesus, le cagneux ; Serranus, l’agriculteur, du verbe qui veut dire "semer" ; Augustus, celui qui bénéficie d’heureux présages ; Vitellius, l’homme au teint jaunâtre, parce que les Romains appellent vitellus le jaune d’œuf ; Varron, le Juif en phénicien et l’homme courageux en celtique. 3. Un oisif qui aurait la chance de mener une vie exempte de tracas pourrait rassembler à loisir un grand nombre d’indications de ce genre, s’il était passionné par ces amusements auxquels, pour ma part, je consacre mes veilles, malgré les très nombreux soucis qui me tourmentent.

 


 

Troisième dignité : les questeurs

24. 1. Le témoignage des anciens ajoute au crédit des auteurs. 2. Junius Gracchanus, dans son traité Des pouvoirs, dit textuellement de celui qu’on appelle à Rome le "questeur" : "ils sont élus par le vote populaire. 3. Après ceux-ci, le roi Tullus jugea que la charge de questeur était nécessaire, si bien que la plupart des historiens lui attribuent, et à lui seul, la création de cette dignité. 4. Junius Trebatius et Fenestella disent qu’elle tire son nom de l’enquête [zètèsis, c’est-à-dire quaestio]. Et un peu plus loin : "Dans la suite, cependant, on désigne des questeurs candidats de l’empereur, qui s’occupaient seulement de donner lecture des lettres impériales ; c’est eux aussi qui lisaient les votes émanant de la majorité du sénat et portant sur l’entrée en charge des magistrats." Voilà ce que dit Junius ; le jurisconsulte Ulpien traite en détail du questeur dans son De officio quaestoris, c’est-à-dire "Les fonctions du questeur".

25. 1. Il me paraît intéressant d’examiner ce qu’est le quaestor, ce qu’est le quaesitor, et d’autre part ce que le mot signifie suivant qu’il a la diphtongue [quae-] ou la voyelle simple [que-]. 2. Le quaestor, c’est l’enquêteur, de quaerere "chercher" ; ceux que les Grecs appelaient "chercheurs" [ereunades] furent dénommés quaestores par les Romains. 3. Le quaesitor, c’est le juge (le premier de ces mots est dissyllabique en latin et le second trisyllabique). 4. Le poète romain, dans le sixième livre de l’Énéide, n’a appliqué ce nom de quaesitor qu’à un seul personnage, le Crétois Minos, qui fut, d’après la légende, juge des défunts dans l’Hadès. 5. C’est pour cela que les Romains ont décidé d’appeler quaestiones les châtiments et quaestionarii les fonctionnaires chargés d’infliger les peines. 6. Le quaestor est un enquêteur chargé des finances ; avec un allongement et une syllabe supplémentaire [c’est-à-dire quaesitor], un enquêteur qui s’occupe des accusations. L’un et l’autre de ces mots prennent la diphtongue, même quand il s’agit du trésorier, parce que les recettes se disent en latin quaestus. 7. Quand le mot a au début non une diphtongue, mais une simple voyelle, il n’a aucun de ces deux sens ; il désigne, de la façon dont il est écrit, celui qui proteste et profère des insultes : queror signifie "se plaindre" (le verbe est commun, à la fois actif et passif) et les plaintes se disent querimoniae et querelae.

26. 1. Afin qu’on n’aille pas penser que nous profitons de ces détails techniques pour prendre des limites avec la vérité, instruisons-nous auprès de ceux qui se sont occupés de ces questions. 2. Le jurisconsulte Gaius, dans l’ouvrage qu’il a intitulé Ad legem XII tabularum, c’est-à-dire "Sur la loi des Douze Tables", déclare textuellement (je traduis) : quand le trésor public en vint à s’accroître, on désigna pour s’en occuper des questeurs, ainsi nommés d’après la conservation et la garde de l’argent. 3. Comme, d’autre part, il n’était pas permis aux magistrats de prendre une décision au sujet d’un citoyen romain dans une affaire entraînant la peine capitale, on créa des quaestores parricidii, c’est-à-dire des arbitres et des juges de ceux qui auraient tué un citoyen." 4. Les Romains appellent de la même façon, parricidae, les meurtriers de leurs parents et les meurtriers de leurs concitoyens ; parents et citoyens sont qualifiés les uns et les autres de parentes. 5. Mais il y a une différence dans l’appellation : quand ils abrègent la première syllabe, la rendent brève, ils veulent parler des "parents" [parentes, de parere, engendrer] ; s’ils l’allongent, il s’agit des "sujets" [parentes, de parere, obéir].

27. 1. Dans la deux cent quarante-troisième année depuis la création des consuls, sous le consulat de Regulus et de Junius, lorsque les Romains eurent décidé d’entrer en guerre contre les alliés de Pyrrhus d’Épire, on équipa une flotte et l’on promut les (officiers) appelés classici, ou commandants de navires, au nombre de deux, et dix questeurs, comme trésoriers et collecteurs de fonds. La différence entre quaestor et quaesitor, nous l’avons déjà indiquée. 2. Cet usage, la collecte des recettes, s’est maintenu pour les consuls et les préteurs hors de Rome.

28. 1. Quant aux questeurs du palais, il est aisé de s’informer à leur sujet auprès du jurisconsulte Ulpien. Voici ce qu’il dit dans son ouvrage en un livre sur la charge de questeur : "on désigne les quaestores candidati Caesaris. Ils s’occupaient uniquement de la lecture des rapports au Sénat et ils aidaient à la rédaction des lettres des empereurs." 2. On appelle candidati, en latin, les gens vêtus de blanc ; au moment de donner lecture en public d’un document quelconque, surtout s’il vient de l’empereur en personne, nul ne songerait à y procéder sans être vêtu de blanc. 3. On appelait également candidati ceux qui s’apprêtaient à briguer des charges dans les provinces, parce qu’eux aussi s’avançaient vêtus de blanc, montrant par là qu’ils étaient candidats. 4. Quiconque a quelque teinture d’histoire romaine peut en témoigner. 5. Le fait que les magistrats ne portaient pas d’autre vêtement que celui qui est en usage lors des fêtes est bien connu de tous. Et cela n’était pas seulement le cas à Rome : personnellement, je me souviens que cet usage fut maintenu dans les provinces aussi longtemps que les conseils administrèrent les cités. À leur disparition, le déclin s’étendit du particulier au général.

29. 1. Tel est le nombre des magistrats qui dirigèrent les affaires romaines sous les rois, pendant les deux cent quarante-trois ans que dura la royauté ; c’est ce que rapportent les historiens dans leur ensemble. Dans la suite, le nom de la liberté se mit à resplendir comme au milieu de l’obscurité.

 


 

Le consulat et ses insignes

30. 1. Les Grecs appellent hupatoi les hauts personnages et les grands, passant ainsi à côté du véritable sens du nom : le mot consul désigne par nature en latin non pas le haut personnage mais le conseiller [litt. prytane]. 2. En effet, Consus était chez les Romains le nom de Poséidon. C’est un dieu caché et souterrain, et, comme disent les poètes, "ébranleur de la terre" et "ébranleur du sol". 3. Ce qui est caché est secret : voilà pourquoi les délibérations et les conseils tenus à huis clos s’appellent chez eux consilia, de condere "cacher". Le consul est un homme secret, qui voit loin et consacre ses veilles à méditer en solitaire sur les affaires de l’État. 4. C’est aussi pour cela que les anciens donnent le nom de Consualia à des courses de chevaux : la mythologie fait de Poséidon un dieu cavalier.

31. 1. Voilà pour le nom latin des consuls. Comme personne n’ignore les noms de ceux qui exercèrent les premiers le consulat, il faut dire quelques mots de Brutus. 2. Son véritable nom était Junius ; on l’appela Brutus, suivant la coutume romaine des surnoms, parce qu’il simulait l’imbécillité. On appelait en effet l’imbécile brutus en latin ancien, à cause de la lourdeur [barutès] de son esprit. 3. Cet homme, ainsi que je l’ai dit, jouait au simple d’esprit et attendait son heure pour chasser du pouvoir Tarquin, le plus cruel des tyrans qui aient jamais existé. 4. S’attardant à Athènes pour y étudier les lois, avec ceux que les Romains y avaient envoyés en sa compagnie dans ce but, il demanda au dieu de lui montrer comment s’y prendre et de l’assister dans son dessein. La divinité lui répondit que si, dès qu’il aurait posé le pied sur le sol de sa patrie, il s’empressait, sans autre cérémonie, d’embrasser sa mère et de l’étreindre avec conviction, il atteindrait son but. 5. Effectivement, à son retour à Rome, après avoir embrassé la terre (car c’est elle qui est la mère de tous les hommes), il délivra les Romains de la tyrannie et créa une magistrature qui n’était connue d’aucun autre peuple, même si, chez les Hébreux, Daniel, le plus divin des prophètes, mentionne des consuls [hupatoi] qui auraient autrefois existé en Assyrie. 6. Ce n’est pas, en effet, ce terme-là que Daniel utilisa en hébreu, ainsi qu’Aristée l’a fait remarquer ; mais ceux qui, auprès du roi Ptolémée, ont traduit ce texte, ont parlé de "consuls" [hupatoi] au lieu de "princes" [dunastai] et de "conseillers" [bouleutai], bien que la puissance romaine ne fût pas encore à son apogée et qu’elle n’attirât pas encore l’admiration de tous par sa grandeur nouvelle. 7. Voilà comment tout cela se présente ; il faut maintenant parler des symboles du consulat.

32. 1. Les consuls ont des manteaux blancs jusqu’aux pieds et des colobi, retroussés modérément par rapport aux manteaux et ornés d’une bande large ; de la pourpre bien en évidence, tombant de chaque épaule, par-devant le manteau et derrière le colobus, ainsi que des sandales blanches. 2. Cette sandale s’appelle en latin aluta, parce qu’elle est faite de cuir traité à l’alun (l’alun se dit alumen). Un autre des insignes des consuls était un mouchoir de lin blanc du côté droit ; on l’appelait en latin mappa ou faciolis, parce que le visage se dit facies. 4. Il y avait aussi, devant eux, des haches dressées et une masse d’hommes portant des faisceaux, où étaient suspendues, en mémoire du dictateur Serranus, des cordes teintes en rouge. Serranus était en train de couper du bois dans la forêt, et il avait, bien entendu, une hache, ainsi qu’une baguette attachée à la bride afin de mener les bœufs qui tiraient son chariot, quand il fut appelé à prendre le pouvoir à Rome : c’est ce que dit le satiriste romain Perse. (Selon d’autres, c’est parce que la hache est symbole du pouvoir.) 5. Il y avait aussi une chaise (en latin sella) d’ivoire, où le consul prenait place ; ses concitoyens fixaient par-dessous de longues poutres de bois et le transportaient dans cet équipage.

33. 1. Pour que la charge de consul ne devienne pas impossible à contrôler à cause du pouvoir d’un seul, on en nomma, comme je l’ai dit, deux et pour une année seulement : Brutus, le vengeur de la liberté, et avec lui Publicola (ce nom signifie "démagogue"). Chargés comme ils l’étaient de la gestion de toutes les affaires, ils avaient le pouvoir de faire des lois et de mener les guerres à leur guise. 2. Quand Brutus cessa de vivre, on rendit honneur au mort par un deuil national et les Romains donnèrent d’après lui à leurs femmes le nom de brutae, à cause de leur chasteté. L’autre consul, qui lui survivait, fut le premier à honorer son collègue d’un chant funèbre. 3. Le chant funèbre se dit en latin nenia. L’étymologie de ce mot est probablement grecque ; les Grecs appellent nètè la dernière des cordes de la cithare.

 


 

Cinquième dignité : les décemvirs

et le préfet de la ville

34. 1. Le législateur Gaius mentionne la charge des décemvirs après celle des questeurs. Il s’exprime en ces termes (je traduis) : "Une grande confusion s’introduisait dans les affaires à cause des lois, qui n’étaient pas notées par écrit, et des dissensions entre les magistrats et le peuple. Par une décision commune du sénat et du peuple, tous les magistrats furent suspendus, et l’on confia le soin des affaires publiques à dix hommes seulement." 2. Ceux-ci envoyèrent à Athènes (ce sont les historiens qui le racontent) Spurius Postumius, Aulus Marcius et Publius Sulpicius. 3. Comme ils s’attardaient là-bas depuis trois ans, le temps de prendre note, pour les Dix Tables, du reste des lois athéniennes, le peuple désigna dix hommes pour se charger des affaires. Le premier d’entre eux fut appelé "gardien de la ville", le poliarque actuel. 4. Les insignes de sa charge étaient douze faisceaux ; les autres n’avaient rien de tel, mais uniquement un seul garde armé pour chacun. 5. Le poliarque, lui, avait à sa disposition une troupe d’hommes en toge, des porteurs de faisceaux, des liens et tout ce que nous connaissons. 6. Leur entretien était assuré par les possesseurs d’un bien qui rapportait ; ils prirent ainsi le nom de la glèbe, parce que gleba, en latin, désigne la terre unie, c’est-à-dire fertile. 7. Les Archives des Travaux n’existaient pas au départ ; c’est Auguste qui les assigna à cette magistrature en faisant bâtir la basilique de Rome, comme le dit l’érudit Tranquillus [Suétone]. 8. Comme les magistrats dont j’ai parlé se mettaient à le prendre de haut et adoptaient un comportement tyrannique, le peuple s’émut ; il abandonna la ville et s’installa sur la colline appelée Aventin. Cet endroit tire son nom de l’un des Héraclides, comme nous l’apprend le poète romain [Virgile]. 9. Le peuple passa là un certain temps, irrité contre beaucoup de gens et en particulier à cause des violences récemment perpétrées contre Virginius et sa fille ; je pense que l’épisode est connu de tous.

35. 1. Ici s’achève donc la liste des magistrats -- à moins qu’on ne veuille compter au nombre des magistrats les pontifices, qui sont des grands prêtres gardiens des temples. C’est en effet d’après leur avis et leur jugement que les anciens édictaient les lois et fixaient les prix des marchandises ; de là vient que les édiles [agoranomoi] soient maintenant encore appelés aediles, du latin aedes qui signifie temple. 2. Après l’expulsion des rois et l’établissement des consuls, il y eut des troubles, comme le disent les auteurs de l’une et l’autre langue, et pendant près de cinquante ans des tribuns militaires dirigèrent les affaires. Ensuite, l’État fut en proie à l’anarchie pendant cinq ans ; puis, à cause des guerres civiles, trois législateurs et juges furent nommés pour peu de temps.

 


 

Sixième dignité : ce qu’on appelle

la "dictature"

36. 1. Les affaires romaines étant ainsi troublées, ils décidèrent de nommer ce qu’on appelle un "dictateur" ; car "il n’est pas bon d’avoir plusieurs chefs" [Homère]. 2. Ils étaient en proie à une double préoccupation : redoutant le nom royal, ils craignaient de tomber sans s’en apercevoir sous la coupe de nouveaux Tarquins ; mais ils craignaient tout autant d’être tiraillés en tous sens par des magistrats trop nombreux et incapables de s’entendre. Ils décidèrent donc, comme je l’ai dit, de nommer celui qu’on appelle "dictateur", c’est-à-dire interroi, en limitant ses pouvoirs à six mois seulement. 3. Le moment me semble favorable pour expliquer aux Grecs ce que signifie le nom du "dictateur". 4. Les Romains appellent ainsi, en latin, un monarque de circonstance ; il n’est pas désigné pour régler les affaires de ses sujets par la promulgation de lois, puisque sa charge prend fin peu de temps après. 5. On appelle "dictature" son pouvoir, qui n’est pas absolu, mais concédé dans l’intérêt de l’État pour une brève période. Une fois les problèmes réglés, grâce à la raison et à elle seule, celui qu’on avait promu retourne à sa condition antérieure. 6. Dès que le dictateur a remédié à ce qui n’allait pas, il met aussitôt fin à sa charge.

37. 1. Les Romains élurent donc comme premier dictateur Titus Marcius ; dès qu’il fut entré en fonction, il désigna deux consuls. 2. Il ne fixa pas, cependant, la date à laquelle seraient élus les consuls ; l’habitude de les faire entrer en charge en janvier est en effet récente. 3. Il ne leur confia le plus haut poste que pour un an, car les Romains sont extrêmement friands de changement. 4. Tous les symboles de la royauté revenaient au dictateur, sauf la couronne ; il avait les douze licteurs, la pourpre, la sella, les lances et en général tous les insignes auxquels on reconnaissait les rois. 5. Il prit comme adjoint le premier maître de cavalerie, Spurius Cassius, de même que Romulus avait nommé Celer tribun des cavaliers. 6. Celui-ci était précédé par de longs faisceaux sans crinière, coutume qui, bien qu’on l’ignore généralement, subsiste encore aujourd’hui. 7. En effet, quand les généraux de cavalerie se déplacent, il n’y a plus, comme autrefois, de porte-faisceaux pour les précéder ; mais derrière eux, un porte-lance tient d’ordinaire de longs faisceaux liés ensemble de manière régulière. Ignorant lui-même l’usage de cet appareil, il reste simplement fidèle à une habitude. 8. Le maître de cavalerie contrôlait toutes les charges de l’État, et nul ne pouvait en appeler de l’un de ses jugements. 9. Aucun dictateur n’exerça son pouvoir monarchique pendant plus de six mois ; certains restèrent en place moins longtemps encore, parfois même un seul jour. 10. Il n’est pas difficile de rappeler ici qui furent ces dictateurs, combien il y en eut, et quelle fut la durée de leur charge.

38. 1. Le premier dictateur fut Titus Marcius. Il rendit leur poste à Titus et Valerius qui étaient consuls avant lui ; mais des troubles éclatèrent et ils durent se retirer. Le dictateur en nomma alors d’autres pour les remplacer ; c’était aux calendes de septembre. 2. Dix-sept ans après les premiers consuls, de graves dissensions étant intervenues entre le sénat et le peuple, la plèbe nomma deux tribuns, chargés de servir d’arbitres aux gens du peuple et de surveiller le marché ; mais ils se laissèrent emporter par un excès d’orgueil et ne craignirent pas de provoquer des votes dirigés contre les patriciens eux-mêmes. 3. Dans la vingt-troisième année du gouvernement consulaire, le pouvoir fut divisé en trois parties : celle des consuls, celle du préfet de la ville et celle du peuple. Les consuls conduisaient les guerres, le peuple servait à l’armée, et le préfet assurait la surveillance de la ville ; on l’appelait custos urbis, c’est-à-dire "gardien de la ville". 4. La vingt-deuxième année des consuls, le peuple et le Sénat étant en désaccord, Aulus Sempronius fut nommé dictateur ; il choisit comme consuls Gaius Iulius dans le Sénat et Quintus Fabius dans le peuple, puis il renonça à la dictature. 5. Un nouveau dictateur, Gaius Mamercus, fut nommé dans la quarante-deuxième année des consuls. 6. Comme le peuple provoquait de nouveaux troubles, on nomma trois tribuns militaires ; mais ceux-ci ne firent qu’embrouiller les affaires. On nomma alors dictateur Titus Quintius, qui mit fin aux désordres en treize jours à peine et quitta alors sa charge. 7. La soixante-quatorzième année des consuls, la situation devint difficile à cause des Étrusques. Vu l’importance de la guerre, on nomma dictateur Marcus Aemilius, et après lui Publius, qui se retira après avoir mis fin à la guerre contre les Étrusques en seize jours seulement. 8. Comme le peuple nommait de nouveau des tribuns militaires et que le peuple s’y opposait, on nomma dictateur Quintus, qui sortit de charge après avoir ramené la paix dans la cité en huit jours ; puis on nomma P. Cornelius Cossus, puis T. Quinctius. 9. A partir de la cent trente-sixième année des consuls, au début de la cent troisième olympiade, la cité fut en proie à l’anarchie pendant cinq ans. 10. Puis on nomma de nouveau des consuls, et on désigna parmi les patriciens quatre édiles, deux questeurs, un préteur (c’est-à-dire un général), des légats (généraux adjoints) et douze tribuns militaires ; on s’attendait en effet à ce qu’Alexandre de Macédoine entreprenne une campagne contre les Romains. 11. Affolés, les Romains votèrent alors la nomination comme général de Papirius Cursor et le chargèrent d’affronter Alexandre ; ils désignèrent aussi des augures et des pontifes. Ils s’attendent manifestement à la défaite, ceux qui, en temps de guerre, cherchent refuge dans les prières. 12. L’an deux cent soixante-trois des consuls, on nomma un second préteur : il y eut désormais celui que l’on appelle peregrinus, ou "chargé des étrangers". Quand le peuple eut été divisé en quatre parties et en trente-cinq tribus, on ajouta trois autres préteurs à ceux qui viennent d’être cités. 13. L’an deux cent quatre-vingt-dix des consuls, alors qu’Hannibal fondait sur l’Italie, la guerre parut si lourde à mener qu’on nomma non seulement un dictateur, mais aussi un prodictateur, ainsi qu’un maître de cavalerie et un pro-maître de cavalerie : le second suivant de près la décision du premier, l’arbitraire d’un seul homme ne risquerait pas de faire tort à l’État. 14. Voilà les seuls dictateurs, ou interrois, dont l’histoire romaine a conservé le souvenir. Après eux vint Gaius Iulius Caesar, qui déclencha contre le Sénat et Pompée une guerre funeste à l’État et se proclama lui-même monarque, avec Lépide comme maître de cavalerie.

 


 

La censure

39. 1. Dès l’origine, le peuple et en fait tout le corps social servait à l’armée ; les prêtres eux-mêmes allaient affronter l’ennemi, et chacun pourvoyait à sa propre subsistance. 2. Il devint nécessaire de désigner ceux que les Romains appellent des "censeurs", qui recensaient les fortunes des citoyens à cause des dépenses du temps de guerre ; en effet, contrairement à ce qui se passe aujourd’hui, l’État ne pourvoyait pas encore aux besoins des soldats, parce qu’à cette époque il ne recevait pas de tributs. 3. De là vient que les Grecs appelèrent, en transposant, les censeurs ‘timètai’ [évaluateurs].

40. 1. C’est alors que Livius [Andronicus], le poète comique romain, introduisit à Rome les pièces de théâtre. 2. Le genre théâtral se divise en deux parties, la tragédie et la comédie. La tragédie elle-même en comporte deux, la crepidata et la praetextata. La crepidata a un sujet grec et la praetextata un sujet romain. 3. La comédie, elle, se divise en sept parties : palliata, togata, atellana, tabernaria, rhintonique, planipedaria et mime. La palliata est la comédie à sujet grec ; la togata a un sujet romain et ancien. L’atellane est la pièce jouée par les exodiarii [bouffons] ; la tabernaria est une comédie de scène ; la rhintonique est venue du dehors ; la planipedaria est une pièce costumée ; le mime enfin est la seule forme qui subsiste aujourd’hui. C’est un genre qui n’a rien de régulier et qui attire la foule par un comique grossier.

41. 1. Je crois qu’il convient de s’étendre quelque peu sur ce sujet, aussi ajouterai-je ceci. 2. On sait que Rhinton, Sciras, Blaesus et les autres auteurs de phluakes [pièces parodiques] ont mis en scène, en Grande Grèce, des pièces d’importance non négligeable, principalement Rhinton, qui écrivit pour la première fois une comédie en hexamètres. C’est en suivant son exemple que le Romain Lucilius écrivit le premier des comédies en vers épiques. 3. Après lui et ses disciples, que les Romains appellent "satiriques", une nouvelle école de poètes, imitant la manière de Cratinos et d’Eupolis et recourant à la fois au mètre de Rhinton et aux railleries des poètes que je viens de citer, affermirent la position de la comédie satirique : Horace, qui ne sortit pas des règles de l’art, et Perse, qui cherchait à imiter le poète Sophron et ne parvint qu’à dépasser Lycophron en obscurité. 4. Quant à Turnus, Juvénal et Pétrone, ils se laissèrent aller aux invectives de manière irréfléchie, enfreignant ainsi les lois du genre satirique.

42. 1. Voilà ce que j’avais à dire sur l’ancienne comédie et l’ancienne tragédie. La fortune portait Rome au pinacle ; cela ne pouvait manquer de l’entraîner à commettre des fautes et surtout d’amener un relâchement des mœurs. Ainsi, après la loi des Douze Tables, les Romains firent une loi, édictée autrefois par les Corinthiens sur la prodigalité. Le titulus de cette loi -- sa dénomination -- est le suivant : de nepotibus, c’est-à-dire "sur les dissipateurs". 2. Le sens de ce mot est double chez les Romains ; ils appellent de la même façon, nepotes, les petits-enfants et les dissipateurs. Il m’a donc paru bon d’expliquer la différence en quelques mots. 3. On appelle le petit-fils nepos à la suite d’une étymologie grecque, de neos pais [jeune enfant], comme l’a bien dit Philoxène ; on appelle aussi nepos le prodigue, de manière également figurée. 4. Si l’on effectuait la recherche, on se rangerait sans doute à l’avis des Grecs, d’après lesquels les Romains, dans leur langue, appellent le scorpion nepa, c’est-à-dire, de manière privative, "sans pieds" (les Romains donnent un sens privatif à la syllabe ne-, tout comme les Grecs dans nèlipos [sans chaussures], nèchutos [abondant], nègretos [impossible à réveiller], nèdumos [agréable]), à cause d’une particularité naturelle de l’animal. 5. A la saison hivernale, naturellement, le scorpion aussi, comme les autres animaux rampants, est presque réduit à l’état de cadavre et il s’étend sur le sol, sans rien manger d’autre que la terre elle-même. 6. Quand il a épuisé à son profit tout ce qu’elle comporte d’éléments comestibles, il s’attaque à ses propres pattes et il les consomme toutes de manière insensible. 7. Quand le printemps le ramène comme les autres vers la lumière, suivant la loi de la nature, il remonte et se dirige vers la plante dite "calaminthe" [calament]. A peine a-t-il touché ce végétal qu’il récupère son aiguillon et s’en sert comme d’une protection, de même que le serpent le fait avec le fenouil : de là vient que les Romains donnent au calament le nom de nepeta. 9. Voilà pourquoi ils appellent nepotes les dissipateurs : ils dévorent en effet leurs propres membres.

43. 1. Voilà ce que j’avais à dire à ce propos, en m’écartant de mon sujet. Les censeurs se montraient sévères, hostiles, inébranlables et durs dans leur attitude envers les dissipateurs : ni la fortune ni la dignité ne sauvait le coupable. 2. La vérité de tout ceci est attestée par l’histoire, qui s’exprime en ces termes : "Le premier, Appius Claudius fut nommé censeur. 3. Cette charge était l’une des plus élevées ; son travail consistait à enquêter sur la vie des citoyens, à porter un jugement sur celles-ci et à infliger un châtiment, avec des pouvoirs illimités, à ceux qui s’étaient mal conduits ; nul n’échappait à l’autorité des censeurs." 4. Il incombait également aux censeurs d’équiper la ville grâce aux travaux publics.

 


 

Le tribunat
44. 1. Les censeurs mettaient la masse en ébullition et poursuivaient les citoyens avec acharnement ; les créanciers se montraient particulièrement inexorables envers leurs débiteurs. Aussi le peuple se choisit-il deux tribuns, Gaius Licinius et Lucius Albinus, qui serviraient d’arbitres à la plèbe et surveilleraient le marché. 2. Ces tribuns portaient un glaive au côté ; ils disposaient pour les servir d’esclaves publics appelés vernaculi (ce terme désigne les esclaves nés dans la maison). 3. Là-dessus, le peuple dépassa les bornes ; il édicta une loi d’après laquelle les nobles eux-mêmes seraient cités en justice devant les ouvriers. Le consul dut alors, pour faire plaisir au peuple, faire passer une loi interdisant aux magistrats d’infliger un châtiment à un citoyen sans l’accord du tribun.

45. 1. Dans la suite, un nouveau dissentiment intervint entre l’élite et la plèbe. Les deux parties s’accordèrent pour voter la déposition des consuls et pour confier la gestion des affaires publiques à dix législateurs. 2. A partir de la soixantième année des consuls et pendant cinquante ans, on nomma tantôt des tribuns militaires et tantôt des interrois ; l’instabilité régnait. 3. Alors l’État, pour la première fois, accorda aux soldats une allocation de nourriture d’un montant déterminé ; auparavant, ils pourvoyaient en temps de guerre à leur propre subsistance. 4. A ce moment, la cité fut en proie à l’anarchie pendant cinq ans ; puis il y eut de nouveau des consuls, ensuite quatre édiles, pris parmi les patriciens, deux questeurs et un second préteur ; le peuple désigna à nouveau cinq augures et quatre pontifes. 5. L’an deux cent soixante-trois des consuls, on nomma un second préteur, chargé d’arbitrer pour les étrangers. 6. Les préteurs ne restaient pas en charge plus d’une année. 7. Jusqu’à César, les consuls faisaient la guerre, tandis que les magistrats civils dirigeaient les affaires de la cité.

 


 

À quel moment on donna pour la première fois

aux soldats ce qu’on appelle des capita ; ce que signifie le terme capitum

46. 1. En l’an trois cent soixante-cinq de la Ville, sous le consulat de Lucius Genucius et Quintus Servilius, alors que les Romains faisaient la guerre aux Véiens, leurs voisins, la nécessité se fit sentir de passer non seulement l’été, mais aussi l’hiver à proximité de l’ennemi. C’est alors qu’il fut décidé pour la première fois que l’État fournirait aux soldats, y compris pour l’entretien des chevaux, ce que l’on appelle les capita. C’est le nom qu’ils donnaient aux paniers d’osier, de capere, c’est-à-dire "contenir" ; de là vient le nom latin des capitula, ce qui est un diminutif. 2. Depuis le début, le peuple allait au combat en masse ; ils décidèrent alors de mettre sur pied des troupes organisées et bien réparties : il y eut ainsi des unités de trois cents hommes armés de boucliers, appelées "cohortes", des alae, c’est-à-dire des escadrons [ilai], de six cents cavaliers ; des vexillationes de cinq cents cavaliers, des turmae de cinq cents archers à cheval, et des légions formées de six mille fantassins et des cavaliers cités ci-dessus. 3. Les subdivisions de la légion sont les suivantes :

alae de 600 cavaliers

vexillationes de 500 cavaliers

turmae de 500 archers à cheval

legiones de 6000 fantassins

 

4. tribuni, tribuns

ordinarii, officiers supérieurs

signiferi, porte-enseignes

optiones, soldats d’élite ou scribes

vexillarii, porte-lances

mensores, mesureurs

tubicines, trompettes d’infanterie

bucinatores, trompettes de cavalerie

cornicines, sonneurs de trompe

andabatae, cuirassiers

metatores, arpenteurs

arcuites et sagittarii, archers et lanceurs de traits

praetoriani, attachés au général

lanciarii, lanceurs de javelots

decemprimi, les dix premiers

beneficiales, chargés de s’occuper des vétérans

torquati, porteurs de colliers ; ceux qui portent des anneaux au cou.

bracchiati ou armilligeri, ceux qui portent des bracelets

armigeri, porteurs d’armes

munerarii, ouvriers du génie

deputati, soldats chargés d’une mission

auxiliarii, troupes auxiliaires

cuspatores, gardiens. Les Romains donnent le nom de cuspi à des entraves en bois, de custodes pedum, "entraves de pieds", "gardiennes des pieds"

 

5. Imaginiferi, porteurs d’images

ocreati, fantassins avec des jambières de fer

armatura prima, première ligne

armatura semissalis, ligne supérieure

hastati, porteurs de lances

tesserarii, ceux qui, au moment de la transmission des mots d’ordre, font circuler dans la troupe les signes de reconnaissance

draconarii, porte-enseigne

adiutores, adjudants

samiarii, ceux qui astiquent les armes

vaginarii, fabricants de fourreaux

arcuarii, fabricants d’arcs

pilarii, lanceurs de javelots

uerutarii, lanceurs de disques [en fait de javelines]

funditores, frondeurs

ballistarii, soldats servant à la catapulte. La catapulte est une sorte de machine de siège que le vulgaire appelle "onagre".

 

6. Vinarii, soldats combattant sur les remparts

primoscutarii, soldats chargés d’en protéger d’autres ; ce sont ceux qu’on appelle aujourd’hui protectores.

primosagittarii, premiers archers

clibanarii, cuirassiers ; les Romains appellent les armures de fer celibana, au lieu de celamina.

 

7. Flammularii, ceux qui ont au bout de leur lance des morceaux d’étoffe rouge

expediti, fantassins légers, sans équipement, prêts au combat

ferentarii, tirailleurs

circitores, ceux qui circulent autour des combattants et leur fournissent des armes, sans encore savoir combattre eux-mêmes

adoratores, veterani, tirones : il faut, je pense, en parler plus longuement.

47. 1. Les Romains appellent adoratores les soldats démobilisés (adorea désigne en effet dans leur langue la gloire militaire, d’après le blé [donné en récompense] et les marques d’honneur reçues par ceux qu’ils ont honorés), ueterani ceux qui ont vieilli sous les armes (témoins Celse, Paternus, Catilina -- pas le conspirateur, l’autre --, et avant eux Caton l’Ancien et Frontin, ensuite Renatus [Végèce], tous Romains ; parmi les Grecs, Élien, Arrien, Énée, Onésandros, Patron, Apollodore dans son Traité des sièges, ensuite l’empereur Julien dans son Traité des machines). Frontin fait mention de ces ueterani dans son ouvrage De officio legati, c’est-à-dire Le métier de général, et Claudien le Paphlagonien, le poète, dans le premier de ses éloges de Stilicon. 2. Les tirones sont les soldats de catégorie inférieure, tout comme aujourd’hui ceux qu’on appelle les Triballes ; c’est l’épithète qu’Arrien applique aux Besses dans son livre sur Alexandre. 3. C’est à cause de leur pauvreté, et d’elle seule, que ceux qu’on appelle tirones s’engagent au service de ceux qui font vraiment campagne. Pendant cette période, ils ne sont pas dignes de porter le nom de soldats ni d’avoir, de plein droit, leur place dans le matricule, à cause de leur condition modeste et de leur inexpérience du combat. Il n’était d’ailleurs pas souhaitable que d’autres que les nobles combattent pour leur patrie. 4. Diodore rapporte dans le deuxième livre de sa Bibliothèque que Solon rédigea à l’intention des Athéniens la loi suivante, dont il avait eu connaissance en Égypte. La cité était divisée en trois parties : les nobles consacraient leurs loisirs à la sagesse et aux lettres, la deuxième classe était celle des agriculteurs et des guerriers, la troisième celle des travailleurs manuels et des artisans. Un dernier groupe était privé de droits ; ses éléments les plus misérables s’attachaient à la personne des agriculteurs et des guerriers ; ils étaient leurs esclaves et apprenaient d’eux à faire la guerre et à cultiver le sol. Ce sont ceux que les Italiens ont appelé tirones, parce que leur condition servile les accable [teirein] et les rend malheureux. 5. Car les Romains, qui ont imité les Athéniens en toutes choses, ont réparti leur population de la même manière. C’est pour cela qu’ils ont donné aux phulai le nom de " tribus ", à cause de la division de la cité en trois parties.

48. 1. D’après certains historiens, les tirones furent enrôlés pour former une unité d’appoint par Marius, qui devint tyran par la suite. 2. Ceux qui appartenaient depuis le début à l’escorte du maître de cavalerie reçurent uniformément le titre de promoti et furent répartis en quatre sections : biarchi, ducenarii, centuriones et centinarii...

[lacune]

3. ... "de tous ceux-là, il ne resta que dix tribuns, deux consuls, huit préteurs et six édiles pour s’occuper des affaires de la cité." 4. Voilà ce que dit Pomponius, qui cherche apparemment à éviter les longueurs et les détails du genre historique. 5. Ulpien, lui, a fait figurer dans ses livres intitulés Protribunalia des développements plus détaillés sur les préteurs en donnant aux uns le nom de tutelarii, aux autres celui de fideicommissarii. Comme ces questions ont déjà fait l’objet d’une étude, je n’ai pas jugé utile de les mentionner ici.

49. 1. Voilà donc les différents magistrats dont j’ai trouvé mention dans les ouvrages des historiens pour la période qui va des origines de l’État romain à l’excellent règne de Titus ; je puis donc m’arrêter ici en ce qui les concerne. 2. Je n’envisage pas, en effet, de mentionner les douze préfets urbains de Domitien ni les réformes de Bassianus, surnommé Caracalla. Les mesures prises par de mauvais empereurs, même bonnes en soi, ne méritent que le mépris.

 


 

Le préfet des vigiles

50. 1. Les Trévires, un peuple gaulois habitant sur les bords du Rhin, là où se trouve la ville de Trèves (les Italiens leur donnent le nom de "Sicambres" et les Gaulois d’aujourd’hui celui de "Francs"), vagabondaient à travers les Alpes par petits groupes dispersés, sous la direction de Brennus. Ils fondirent un jour sur l’Italie, comme dit Virgile, "à travers des solitudes inaccessibles et épineuses". 2. Puis, après avoir investi Rome par des souterrains, ils s’étaient rendus maîtres du Capitole lui-même, quand, dérangées par l’apparition des Barbares en pleine nuit, les oies du sanctuaire tirèrent de son sommeil le général Mallius (il habitait le voisinage) : il repoussa les Barbares et décida de faire établir à Rome en l’honneur des oies, une fête ainsi qu’une course de chevaux, et une mise à mort pour les chiens à la date où le soleil est en conjonction avec le Lion. 3. Ce fut après ces événements que l’on institua la loi créant des gardiens de nuit. Dans la mesure où cela date d’il y a très longtemps, j’aurais dû en faire mention auparavant ; 4. mais comme on ne considère pas habituellement ce département comme faisant partie des magistratures de l’État, et qu’il s’agit en fait d’une organisation et d’un corps de fonctionnaires mis sur pied dans l’intérêt du service public, il était naturel de faire de ce chapitre une sorte de conclusion à l’exposé sur les magistratures. 5. Non seulement ils préservent la ville des maux entraînés par une attaque ou un assaut de l’ennemi que l’on n’apercevrait pas à temps et des troubles en cas de dommage résultant d’une guerre civile mais ils apportent aussi leur aide à ceux qui subissent des préjudices du fait des incendies. 6. Témoin le jurisconsulte Paul ; il dit textuellement (je traduis) : "Le groupe des trois hommes [les tresviri] fut créé par les Anciens à cause des incendies ; on les appelait aussi "gardiens de nuit" d’après leur fonction. 7. Œuvraient avec eux les édiles, les tribuns ; ils avaient à leur service un collegium (c’est-à-dire une corporation), qui avait sa caserne près des portes de la ville et des remparts, de façon à être, en cas de besoin, faciles à trouver et à réunir aisément." 8. Voilà ce que dit Paul. 9. C’est là un propos avéré : on peut le voir aujourd’hui encore (à Dieu ne plaise !), parce que cela se passe de la même façon en ville ; ceux d’entre eux qu’on a d’aventure réussi à trouver crient, dans la langue d’origine des Romains : "Omnes collegiati, concurrite !", c’est-à-dire "A la rescousse, tous les compagnons !".

51. 1. Après que toutes ces institutions se furent mises en place et alors que s’était achevée la sept cent sixième année de la ville, César, investi d’un pouvoir monarchique, mit fin à toutes les magistratures et s’empara pour lui seul de toutes leurs prérogatives. 2. Il tint bon trois ans, puis il fut assassiné au Sénat. Il y eut alors César le Jeune, son neveu, et le pouvoir passa ensuite aux différents Césars.


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