FEC - Folia Electronica Classica (Louvain-la-Neuve) - Numéro 8 - juillet-décembre 2004
Les langages secrets dans l'Antiquité gréco-romaine.
Chapitre deuxième : La stéganographie
par
Brigitte Collard
Licenciée en langues et littératures classiques
Diplôme complémentaire en relations internationales et politique comparée
Professeur au Collège Saint-Michel (Bruxelles)
Les FEC poursuivent ci-après la publication de la seconde partie du mémoire rédigé sous la direction du Prof. Jean-Marie Hannick et présenté par Brigitte Collard à l'Université de Louvain en 2002 en vue de l'obtention du grade de Licencié en langues et littératures classiques. Intitulé : Les langages secrets. Cryptographie, stéganographie et autres cryptosystèmes dans l'Antiquité gréco-romaine, il aborde un sujet généralement mal connu ou ignoré et propose avec clarté un aperçu des différentes techniques en usage chez les Grecs et chez les Romains.
Le fascicule 7 (janvier-juin 2004) a livré d'abord l'introduction générale du travail, la table des matières du mémoire ainsi que la bibliographie générale, puis, répartie sur quatre fichiers, l'intégralité du premier chapitre, qui traitait de la cryptographie.
Le présent fascicule 8 (juillet-décembre 2004) publie en deux parties les deux derniers chapitres ainsi que la conclusion générale : d'abord (ci-dessous) le chapitre deuxième consacré à la stéganographie; ensuite le chapitre troisième, sur la signalisation, suivi de la conclusion générale du mémoire. La bibliographie figure dans le fascicule 7.
Note de l'éditeur - 25 juillet 2004
Chapitre premier : La cryptographie (publié dans FEC 7)
Chapitre deuxième : La stéganographie (le présent fichier)
· La stéganographie linguistique
o Le code camouflé : les nulles
o Les avancées de la technique
§ 3.1. Les sémagrammes
§ 3.2. Le code camouflé : les nulles
§ 2.1. Le corps humain
§ 2.2. Les chaussures
§ 2.3. Les bijoux
§ 2.4. L'équipement militaire
§ 2.5. Une bande sur une blessure
§ 2.6. Les animaux
§ 2.7. Le lécythe
§ 2.8. Un lieu
§ 2.9. Tablettes et tableaux
o Les avancées de la technique
§ 3.1. Les encres invisibles
§ 3.2. Les camouflages physiques
Chapitre troisième : La signalisation (FEC 8 2004)
Conclusion générale du mémoire (FEC 8 2004)
Bibliographie (FEC 7 2004)
CHAPITRE DEUXIEME
LA STEGANOGRAPHIE
« La nature aime à se cacher.»
Héraclite
[cfr Wrixon (2000), p. 479-481 ; Singh (1999), p. 21-22 ; Kahn (1980), p. XVII]
Si autrefois ‘stéganographie[1]’ a été synonyme de ‘cryptographie’, le terme a été redéfini en 1967 par l’historien américain David Khan dans son ouvrage « The Codebreakers : The Story of Secret Writing[2] ». Ce procédé, dont l’appellation est formée à partir du grec steganos (=couvert) et graphein (=écrire), consiste à dissimuler non pas le sens d’un message – comme la cryptographie – mais l’existence même du message, éventuellement codé ou chiffré. Ce mode de communication constitue, avec la cryptographie, un moyen incontournable et efficace pour préserver le secret d’une missive.
Bien que la cryptographie et la stéganographie soient deux disciplines indépendantes, il est possible de les superposer en brouillant le sens du message et ensuite en dissimulant l’existence de celui-ci. Dans ce cas de figure, la stéganographie n’est plus que la dernière étape de l’encodage. Nous verrons que Jules César n’hésitait pas à procéder de cette façon.
La complémentarité de ces techniques de communication découle probablement de la faiblesse fondamentale de la stéganographie. En effet, son usage n’offre que peu de sécurité. Si le messager est fouillé et que la lettre est trouvée, le contenu de la communication secrète est immédiatement révélé. Néanmoins, la longévité de la stéganographie prouve que malgré cette fragilité, elle garantit un minimum de sécurité.
Le stéganographe peut recourir à deux types de transmission : les modes de dissimulation linguistique et la stéganographie technique qui camoufle physiquement le message. Cette dernière est la plus largement répandue.
L’usage de la stéganographie remonte à l’Antiquité : l’histoire nous a légué maintes techniques relevant de cette discipline. Le chapitre XXXI de la Poliorcétique d’Énée le Tacticien (cfr Ière partie, note 6) figurant sous le titre Peri epistolôn kruphaiôn est presque entièrement consacré à cette discipline. Cet auteur est la référence la plus importante de ce chapitre car il innova énormément en la matière. Néanmoins, de nombreux historiens et stratèges antérieurs et ultérieurs à Énée ont, eux aussi, beaucoup contribué à notre connaissance de l’usage que les Grecs et les Romains faisaient de cette technique.
[Plan]
La stéganographie linguistique peut se diviser en deux types de camouflage : le sémagramme et le code camouflé (Wrixon, 2000, p. 479). L’objectif de ces procédés consiste à dissimuler un message sous une lettre anodine ou dans la disposition d’un objet qui n’éveille pas les soupçons afin de ne pas attirer les regards de potentiels observateurs.
Énée le Tacticien est la seule source antique qui traite de cette discipline. Le stratège nous a transmis un sémagramme qui fait partie de ses inventions. Il décrit également le code camouflé en usage dans l’Antiquité : celui-ci consiste à pointer des lettres repérées dans une missive. Ces lettres pointées indiquent le véritable contenu du message secret. Avant de présenter ces différents systèmes, Énée insiste sur leur complexité (Pol., XXXI, 16) :
« Je vais exposer maintenant le mode de transmission le plus secret, mais le plus compliqué : la transmission sans caractère d’écriture. »
L’auteur parle avec raison de « mode de transmission le plus secret ». En effet, une lettre chiffrée ou codée a toujours attiré l’attention des cryptologues à cause de son contenu dépourvu de sens. Les camouflages linguistiques, « c’est l’art de faire transiter un message sans même que l’on soupçonne qu’il en est un »
(cfr http://www.bnf.fr/pages/pedagos/dossier/je-code.htm). [lien inexact]
Selon D. Kahn (1980, p. 334), ce procédé stéganographique pose encore un problème délicat à toute personne qui désire contrer ce type de communication car le recherche d’une information dissimulée dans une correspondance est une tâche plus que délicate : « le censeur[4] est incapable de dire si un message se cache derrière un style maladroit ou des fautes d’orthographe».
Le terme ‘sémagramme’ vient du grec sêma et gramma : il représente l’une des deux grandes catégories de la stéganographie linguistique. Ce procédé permet de transmettre un message qui n’est pas composé de lettres ou de chiffres mais dont le sens est véhiculé par une combinaison d’objets, de signes ou de symboles (Wrixon, 2000, p. 491 et 644). Le système stéganographique échappe donc totalement à l’observateur.
Le système qu’Énée le Tacticien a conçu[5] est ingénieux : le chiffrement consiste à passer un fil à travers des trous qui représentent les lettres de l’alphabet. Ces trous peuvent être percés dans un osselet (Én., Pol., XXXI, 17), dans un morceau de bois d’un empan (ibid., XXXI, 20; un empan mesurait quelque 22 cm), ou dans un disque de bois (ibid., XXXI, 21). Les propos d’Énée tentent à démontrer que le disque de bois garantit le mieux la sécurité de la missive et donc sa confidentialité. Selon D. Kahn (1980, p. 334), il s’agit du premier sémagramme connu.
Pour faire parvenir une missive au moyen d’un osselet, il suffit de percer vingt-quatre trous, à raison de six sur chaque face. Étant donné que « chaque trou représente une lettre (Én., Pol., XXXI, 17) » et que celles-ci ne sont pas notées, il faut garder en mémoire l’ordre des trous en partant de celui qui indique l’alpha. D’une façon plus détaillée, Énée nous expose ce système par la transcription de son nom (Pol., XXXI, 18) :
« Par exemple, si vous voulez écrire ‘Aineian’ à l’aide d’un fil passé dans l’osselet, vous partez de la face où se trouve l’alpha, vous piquez dans ce premier trou et, sautant les trous remplaçant les lettres suivantes, vous piquez derechef quand vous en êtes à la face où est l’iota. Sautant les trous suivants, piquez là où se trouve être le nu. Sautant encore les trous suivants, faites passer le fil dans l’ei <…> et, transcrivant de même le reste du mot, piquez dans les trous conformément au principe que nous venons de poser quant à notre nom. »
Lorsque le chiffreur doit employer deux fois la même lettre, il doit faire passer le fil dans le même trou après l’avoir enroulé une fois autour de l’osselet :
« Chaque fois qu’il se trouve passer deux fois dans le même trou, parce que la même lettre est répétée deux fois de suite, l’enrouler tout autour du morceau de bois avant de le repasser dans le trou. » (Én., Pol., XXXI, 20)
Cet osselet entortillé dans du fil sera envoyé au déchiffreur qui procédera de la manière inverse, inscrivant les lettres sur une tablette au fur et à mesure qu’il déroulera le fil. Cette étape semble être la plus difficile aux yeux de l’auteur :
« Mais son déchiffrage donne plus de mal que le travail même de la préparation. » (Én., Pol., XXXI, 19)
Néanmoins, Énée considère que la tâche du déchiffreur est facilitée si l’émetteur se sert d’un morceau de bois plutôt que d’un osselet. Pour garantir plus de sécurité, l’emploi d’un disque de bois permettra de compliquer la tâche d’éventuels décrypteurs : alors que les trous représentant les lettres de l’alphabet seront disposés sur le contour du disque, d’autres trous percés au centre du disque brouilleront les pistes. Si un mot nécessite la répétition d’une lettre, il faudra passer le fil dans un des trous centraux avant de repasser le fil dans le même trou.
« Pour déjouer les soupçons, percer d’autres trous au milieu du disque. » (Én., Pol., XXXI, 21)
Les procédés décrits avec beaucoup de minutie par Énée le Tacticien sont ingénieux car un osselet ou un morceau de bois même recouvert de fil n’attire pas immédiatement l’attention comme le fait justement remarquer Anne-Marie Bon (Énée, 1967, p. 72, n. 1). Encore faut-il qu’il soit quelque peu dissimulé parmi d’autres objets car un observateur scrupuleux pourrait déceler son caractère insolite. Leur inconvénient majeur réside dans leur complication, surtout ressentie par le déchiffreur.
[Plan]
[cfr Wrixon (2000), p. 483, 501-505 ; Singh (1999), p. 45 ; Kahn (1980), p. 9 et 333]
Le chiffrement par nulles est un genre de code camouflé. Cette méthode consiste à marquer d’un signe particulier certaines lettres d’un texte : seules ces quelques lettres sont porteuses de sens. Celles-ci sont dites ‘repérées’. Le reste des lettres encadrant les lettres repérées sont appelées des nulles : elles sont dépourvues de signification. Leur mission est de tromper tout oeil indiscret puisque le libellé de la missive ne sert qu’à masquer le texte réel.
Ce deuxième pan de la stéganographie linguistique a connu un grand succès jusqu’au XXe siècle. Il s’agit pour le déchiffreur de ne prendre en considération que les lettres repérées selon un critère précis défini avec l’émetteur. Énée (Pol., XXXI, 2-3) suggère de marquer les lettres dont la succession fournit le texte secret soit d’une piqûre d’épingle soit d’une taille différente, dans un livre ou dans tout autre document.
D’une façon plus explicite, Énée propose d’insérer dans un bagage un livre ou un autre document sur lequel les lettres d’une ligne avaient été piquées « de piqûres minuscules et tout à fait invisibles sauf pour le destinataire (Én., Pol., XXXI, 2) ». Un autre procédé graphique consistait à écrire soi-même une lettre en y évoquant un sujet quelconque avec nombre de détails afin d’y marquer les lettres qui feront parvenir au destinataire un message secret plus bref (Én., Pol., XXXI, 3). Enfin, Énée (Pol., XXXI, 3) considère que l’émetteur peut employer à sa guise la technique des piqûres minuscules ou des lettres plus grandes que les autres (Én., Pol., XXXI, 3).
Comme le dit le stratège grec, tous les moyens sont bons du moment que « le message sera déchiffrable pour le destinataire et que ces détails n’éveilleront aucun soupçon chez les autres (Én., Pol., XXXI, 3) ».
Au cours des siècles, les sémagrammes et les codes camouflés se sont développés en s’adaptant aux inventions des stéganographes. Les nulles, malgré quelques innovations dans la présentation, sont encore aujourd’hui organisées selon un principe de base identique à celui de l’Antiquité. Une plus grande diversité dans les techniques a marqué l’histoire des sémagrammes mais le cadre de notre mémoire et nos capacités dans cette matière ne nous permettent pas d’approfondir tous les types en usage. Nous allons nous contenter de présenter quelques techniques remarquables par leur ingéniosité.
Jusqu’à la Première Guerre mondiale, les sémagrammes occupent une place importante dans la stéganographie militaire : tous les objets permettent de véhiculer un message. Les Allemands en firent usage d’une manière permanente tout au long des guerres mondiales. Mais petit à petit, le besoin de communications rapides et plus sécurisées va conduire à l’abandon d’un genre jusque là fleurissant (Wrixon, 2000, p. 493 et 497).
F. Wrixon (2000, p. 491) mentionne l’usage de ce procédé stéganographique durant la seconde guerre mondiale par des agents allemands basés en Angleterre. Pour communiquer avec les services de renseignements nazi, ils envoyaient un pull-over en Allemagne. Le procédé employé ressemble quelque peu à celui inventé par Énée le Tacticien puisque le pull-over était soigneusement démaillé. Au fur et à mesure de cette tâche, des noeuds se révélaient : chaque noeud représentait une lettre. Pour comprendre le message, les Allemands devaient placer l’extrémité du fil sur le sol, contre un mur sur lequel l’alphabet avait été reproduit. Une longueur convenue d’avance séparait les lettres : en ayant disposé l’extrémité du fil sur le sol, il suffisait de tendre la laine pour que le noeud se place automatiquement sur une lettre. La deuxième lettre apparaissait en plaçant le premier noeud sur le sol et ainsi de suite. Ce procédé permit de transmettre des informations concernant les navires alliés.
L’usage des sémagrammes développa d’une manière considérable la censure des pays en guerre : D. Kahn (1980, p. 334) rapporte que durant la seconde guerre mondiale, la censure de New-York modifia la position de toutes les aiguilles d’un lot de montres exportées de peur que celles-ci puissent donner une information.
Les lettres repérées connurent un vif succès dans le domaine de la stéganographie. Mais leur usage ne s’est pas limité à cette discipline puisque certains systèmes cryptographiques ont employé les nulles pour brouiller les pistes des cryptologues [référence inexacte ?].
Plus de deux mille ans après Énée le Tacticien, les stéganographes utilisèrent la méthode qui est décrite dans le chapitre XXXI de la Poliorcétique. Par exemple, D. Kahn (1980, p. 9-10) nous apprend que les espions allemands employèrent ce code camouflé durant la première guerre mondiale. Par contre, au cours de la seconde guerre, les Allemands l’améliorèrent en cochant les lettres des journaux avec une encre sympathique.
L’omniprésence de ces techniques lors des conflits militaires aiguisa les contrôles de la censure lors de la seconde guerre mondiale. Les patrons des couturières, les journaux furent passé au crible par des experts. Les timbres furent même remplacés par des cachets aux États-Unis après l’attaque de Pearl Harbor (Wrixon, 2000, p. 481). Chaque objet, chaque inscription est potentiellement porteur d’un message secret et suscite donc la méfiance des censeurs.
[Plan]
La stéganographie peut recourir à des moyens de transmission purement physiques : ce type de communication relève de la stéganographie technique. À nouveau, cette méthode stéganographique remonte à l’Antiquité. Les Grecs comme les Romains ont opté pour deux modes techniques : les encres invisibles, appelées les encres sympathiques, et différents systèmes de camouflage physique.
Le recours à ce type de communication se développa au fil des âges. Mais l’objectif reste immuable : transmettre un message clair ou chiffré sans que l’ennemi soupçonne son existence. Le message doit disparaître. Nous verrons que la stéganographie technique peut renforcer le procédé linguistique : au XXe siècle, l’encre sympathique a servi à pointer les lettres des missives envoyées pendant les guerres.
Il s’agit de l’un des premiers procédés stéganographiques techniques et certainement l’un des plus connus. Pour tromper la vigilance des ennemis, l’ingéniosité des Romains semble avoir été insatiable. L’encre invisible est probablement l’une des méthodes les plus élaborées (Wrixon, 2000, 483). Ce système a longtemps été imparable et son efficacité a été prouvée autant au service de la politique qu’à celui des intrigues amoureuses.
Il existe deux catégories d’encre sympathique : les liquides organiques et les produits chimiques. Toutes les deux sont déjà représentées dans l’Antiquité. Les premiers deviennent visibles sous l’effet d’un léger chauffage : le lait, le citron, la sève, l’urine entre autres appartiennent à cette catégorie. Les produits chimiques sont invisibles une fois secs. Des caractères colorés apparaissent seulement après avoir été en contact avec un autre produit chimique appelé le réactif.
Les Anciens utilisaient comme liquides organiques du lait frais ou du suc légèrement visqueux d’un espèce d’euphoribacée, le tithymale. Avec ces liquides, ils écrivaient des messages en des caractères invisibles et les faisaient apparaître sous la chaleur de la cendre ou de la poudre de charbon. Celles-ci adhéraient à la matière grasse ou visqueuse laissée sur le papier par le liquide[6].
Ovide (43 av. J.-C. – 17 apr. J.-C.) aborde ce sujet au livre III de son Art d’aimer. Tandis qu’il traite des lettres d’amour, il prodigue quelques conseils utiles afin d’éluder la surveillance des maris et l’ouverture indue de lettres coupables. Après avoir proposé différents camouflages que nous verrons par après, il garantit l’infaillibilité des deux techniques suivantes. Afin de « tromper les yeux (Art, 627) », il suffit d’écrire avec du lait frais que l’on saupoudrera de charbon pour rendre les caractères lisibles (Art, 627-628). De même, le message qui est inscrit avec le suc issu d’une fine tige de lin (umiduli acumine lini) assurera la confidentialité du message (Art, 629). Par conséquent, toute personne qui interceptera la lettre, ne trouvera rien et sera dupée puisque « la tablette, qui semblera intacte, portera des caractères invisibles (Art, 630) ».
Pline l’Ancien explique dans son Histoire naturelle comment il est possible d’obtenir de l’encre invisible avec la sève de l’euphorbe tithymallus, un nom abandonné depuis Littré (1753). Comme nous l’apprend le naturaliste, cette plante était appelée chez les Romains « l’herbe à lait (herbam lactariam, Hist. Nat., XXXVI, 39) ». Le lait du tithymale permettait d’écrire des caractères invisibles sur le corps d’une personne complice. Selon les dires de l’auteur (ibidem), certains amants optèrent pour ce moyen de communication plus fiable que les billets.
« On raconte que si l’on écrit sur le corps avec le lait de cette plante et, qu’une fois sec, on le saupoudre de cendre, les caractères tracés apparaissent aussitôt. »
Au IVe siècle de notre ère, le poète latin Ausone (310-393 apr. J.-C.) traite de l’encre sympathique dans une lettre adressée à Paulinus. Il fait allusion à ce procédé en le conseillant à son ami pour dissimuler un message. Le passage qui suit précède la mention de la scytale lacédémonienne (cfr supra, chap. I).
« Inscris les lettres au moyen de lait, le papier en séchant présentera toujours des caractères invisibles, le texte apparaît grâce à des cendres chaudes. » (Aus., Epist., XXII, 21-22)
L’encre séchée est invisible, et l’on fait réapparaître le texte, coloré en brun, par un léger chauffage. Selon S. Singh (1999, p. 21), « beaucoup de fluides organiques riches en carbone ont la même propriété ».
Dans ces différents exemples, l’emploi de lait ou l’emploi de la sève permet de dissimuler un message, tandis que l’application de cendres ou de charbon le fait apparaître. Philon de Byzance au IIe siècle av. J.-C. mentionne un autre type d’encre sympathique qui relevait d’une véritable réaction chimique[7]. Il mentionne une encre obtenue à partir de noix de galle concassée. Les caractères inscrits sur une peau au moyen de cette encre étaient invisibles. Pour rendre visibles ces traces, il suffisait d’employer comme réactif du sulfate de cuivre.
Les auteurs antiques que nous avons conservés traitent de l’encre sympathique en la confinant à un usage privé. Néanmoins, il est concevable que son champ d’action ne se limitait pas à cet emploi et qu’elle était également exploitée dans la sphère publique et politique.
[Plan]
Un autre type de stéganographie technique fut largement répandu dans l’Antiquité gréco-romaine : les camouflages physiques. Ils consistent à dissimuler les messages dans des objets ou sur des parties du corps d’un animal ou d’un homme. Ils résultent en général d’initiatives ponctuelles (Coulet, 1996, p. 171). Certains parlent de ‘ruse’ (Desbordes, 1990, p. 81) ou même de ‘truc’
(cfr <http://www.cl.cam.ac.uk/~fapp2/kerchoffs/>). [lien inexact]
En réalité, ils avaient une place importante dans la transmission des missives politiques à une époque où la stéganographie occupait le devant de la scène. La force de ces techniques est la conséquence de l’ingéniosité de ceux qui pour la première fois utilisèrent ces méthodes. L’ensemble de la stéganographie technique semble tirer ses origines de cette époque (Wrixon, 2000, p. 479).
En de nombreuses occasions, le corps humain a été un support d’écriture et un moyen de transport efficace – ce que nous avons pu constater avec les encres invisibles (cfr supra). Le crâne, la poitrine, le bras, la main et le mollet de l’homme se sont mis au service d’intrigues politiques ou amoureuses sans jamais éveiller le moindre soupçon.
De nombreux stratèges et historiens[8] ont rapporté « un des plus étranges moyens de communication secrète que l’on connaisse (Kahn, 1980, p. 8) ». Un certain Histiée de Milet (mort en 494-493 av. J.-C.) qui se trouvait à Suse, à la cour de Perse, décida de prendre contact avec son gendre Aristagoras, gouverneur de Milet, afin que les cités ioniennes se révoltent contre l’autorité du Grand Roi Darius. Mais il craignait à juste titre qu’une lettre fût interceptée,
« Vu que les routes étaient gardées et qu’il n’était pas facile de porter une lettre sans être découvert. » (Én., Pol., XXXI, 28)
Par précaution, il opta par conséquent pour un « écrit clandestin » (furtiuo scripto, Gell., XVII, IX, 20). Il imagina de raser la tête d’un de ses esclaves dont la fidélité était certaine et de tracer un message avec une pointe rougie par le feu sur son crâne. Lorsque les cheveux eurent repoussé, il envoya cet homme à Aristagoras sans autre commission que de l’inviter à lui raser la tête :
« Il expédia l’homme à Milet, sans lui donner autrement d’instructions sinon de dire à Aristagoras, quand il serait arrivé à Milet, de lui raser les cheveux et de lui examiner la tête. » (Hérod., V, 35)
Aristagoras, après avoir suivi les instructions de l’esclave, put lire le message qui lui donnait le signal de la révolte contre la Perse. La révolte eut lieu en 499 av. J.-C. Darius qui avait toujours confiance en Histiée lui permit de se rendre en Ionie pour mater les opposants. Mais Histiée échoua et comme tant Suse que Milet se méfiaient désormais de lui, il s’engagea dans la piraterie.
Il s’agit certainement du premier cas dans l’histoire d’une révolte née d’un crâne rasé ! Malgré son aspect anecdotique, le subterfuge a de fortes retombées politiques : grâce à ce crâne, les Grecs des cités ioniennes soutenues par Athènes, se sont soulevées et ont mis en échec le Grand Roi (Wrixon, 2000, p. 479-480). Mais malgré les victoires des troupes grecques, les Perses se remirent de leurs pertes et envahirent l’Ionie en 494 av. J.-C. De plus, selon F. Raynal, F. Petitcolas et C. Fontaine, cette méthode était encore utilisée par des espions allemands au début du XXe siècle[9].
Ovide nous transmet une pratique utilisée par les femmes pour correspondre avec leurs amants : elles faisaient porter leurs missives cachées contre la poitrine d’une complice. Il conseille vivement ce procédé stéganographique pour déjouer la vigilance des gardiens. Pour faire parvenir un billet doux, il suffit de le confier à une complice qui le portera de la manière suivante :
« La lettre, une fois rédigée, peut être portée par une complice, qui la dissimulera sur sa tiède poitrine, sous le large corset. » (Ovide, Art, 621-622)
S’opposant à de telles pratiques, Juvénal (VI, 234-240; XIV, 25-30) fustige par deux fois ces femmes sans aucune vertu qui trompent leurs surveillants.
La main a servi de support d’écriture à l’insu des surveillants lorsque les documents écrits étaient abolis. En effet, Énée le Tacticien rapporte qu’un certain Glous[10], navarque du Grand Roi, détourna une interdiction comprise dans le cérémonial qui s’observait à la cour du roi de Perse. Alors qu’il n’était pas permis de se présenter devant le roi avec un carnet de notes, Glous usa de la ruse suivante pour se rappeler de son grand nombre d’affaires à traiter :
« Il écrivit dans les intervalles entre les doigts de sa main les sujets dont il devait parler. » (Én., Pol., XXXI, 35)
Énée conclut son chapitre consacré aux messages secrets par cet exemple. Il en profite pour exhorter une fois encore les surveillants à être extrêmement vigilants.
Pour faire passer des messages secrets, certains stratèges les attachèrent aux bras des soldats. Mais plutôt que du papyrus ou du parchemin, supports d’écriture quelque peu fragiles, certains employèrent pour cet usage des lames très minces d’étain ou de plomb[11]. Ces missives pouvaient alors être transportées sous l’eau par des plongeurs sans que l’écriture s’en trouve altérée ou effacée. Frontin, auteur d'un manuel de stratégie grecque et romaine en quatre livres (30-140 apr. J.-C.), rapporte que le consul Hirtius, ancien lieutenant de Jules César, communiqua sur ce type de support avec le républicain Décimus Brutus, assiégé à Modène par Antoine en 43 av. J.-C. Pour parvenir au camp, il fit passer les messages de la manière suivante :
« Des soldats les liaient à leur bras, et passaient à la nage la rivière Scultenna. » (Frontin, Strat., III, XIII, 7)
Au livre III de son Art d’aimer, Ovide conseille à la femme amoureuse de dissimuler contre le mollet d’une complice le message qu’elle tente de faire parvenir secrètement à son amant :
« Comment un gardien pourrait-il t’empêcher d’écrire, […] quand elle peut cacher le billet bien serré contre le mollet ? » (Ovide, Art, 619 et 623)
Chez les Grecs comme chez les Romains, la chaussure s’est révélé être une cachette idéale grâce à de fines lames d’étain ou de plomb qui étaient dissimulées dans la semelle du messager[12]. Si les uns utilisaient ce stratagème pour des missives politiques, d’autres s’en servaient dans leurs affaires privées.
énée le Tacticien (Pol., XXXI, 4) conseille de cacher le message à l’insu du porteur afin qu’il ne soit pas tenté de révéler le subterfuge ou afin qu’il ne manifeste pas son malaise ou sa crainte en traversant les lignes ennemies :
« Qu’on envoie un homme apportant une nouvelle de vive voix, ou une lettre sur d’autres sujets non secrets. Puis, quand il est en instance de départ, que l’on insère le message, à son insu, dans ses souliers, entre les feuilles de la semelle et qu’on l’y couse. »
L’usage de l’étain est privilégié par précaution, afin que la boue et l’eau n’effacent pas les caractères de la missive. Ensuite, une fois le messager arrivé chez son hôte, il sera dépouillé de ses chaussures pendant son sommeil : après avoir défait la couture, le destinataire prendra connaissance du contenu du message secret. Lorsqu’il aura écrit sa réponse, il placera sa propre lettre au même endroit et il prendra soin de recoudre la semelle de la chaussure sans que la couture soit visible. Grâce à cette minutie, la cachette n’éveillera pas de soupçon chez le messager. Le lendemain, il renverra l’homme en lui donnant ouvertement une réponse ou en lui donnant un message à porter sur un sujet anodin (Én., Pol., XXXI; 4bis-5).
Quelques siècles plus tard, Ovide conseillera la même pratique d’une manière plus légère et avec la complicité totale du porteur. Le message glissé sous le pied – et non sous la chaussure – permettra à une jeune femme de faire porter par sa complice une lettre adultère à un amant.
« Quand elle peut porter le doux message sous le pied bien chaussé. » (Ovide, Art, 624)
Ces deux exemples montrent que la stéganographie s’employait de la même façon dans la sphère publique et dans la sphère privée.
Un autre moyen de véhiculer les missives consistait à rouler et à attacher aux oreilles des femmes les lamelles d’étain ou de plomb qui contenaient le message. Celles-ci utilisées en guise de boucles d’oreilles n’éveillaient pas la méfiance des surveillants (Én., Pol., XXXI, 7).
Les complices de l’envoi des messages secrets étaient quelquefois des soldats. Pour transmettre les missives d’un camp à l’autre, l’ensemble de leur équipement fut mis au service des stratèges.
Énée le Tacticien rapporte le rôle d’un soldat dans la trahison d’un camp militaire. Celui-ci faisait partie des fourrageurs. Il portait une lettre fixée sous les bandes mobiles bordant sa cuirasse. Voici ce qu’il devait effectuer s’il rencontrait une troupe ennemie lors d’une de ses sorties :
« Il avait ordre, si l’ennemi se manifestait en quelque manière, de tomber de son cheval prétendument par accident et de se faire prisonnier, puis, une fois dans le camp, de remettre le document à qui de droit. » (Én., Pol., XXXI, 8)
Énée conclut en affirmant que le soldat accomplit fidèlement la mission qui lui avait été confiée.
Le vêtement du soldat peut facilement dissimuler un message, comme nous le confie le stratège Énée. En effet, si l’on transcrit une lettre sur un fin papyrus en prenant soin d’écrire de longues lignes en petits caractères, le soldat peut placer cette missive en dessous de la tunique, à l’endroit de l’épaule. Une fois la tunique repliée à cette endroit, le volume du message est à peine perceptible : le soldat passe les lignes ennemies sans éveiller le moindre soupçon (Én., Pol., XXXI, 23).
Comme il n’a pas toujours été possible aux messagers de pénétrer dans les places assiégées, les stratèges attachaient les lettres à des armes qu’ils envoyaient dans les camps retranchés. Ce procédé fut souvent employé par ceux qui voulaient répandre une nouvelle ou un bruit dans toute une place sans l’aide d’un messager. De nombreux auteurs à partir du Ve siècle av. J.-C. jusqu’au IIe siècle apr. J.-C. se sont faits l'écho de cette technique stéganographique qu’ils soient historiens ou stratèges.
Hérodote (490-425 av. J.-C.) est le premier à nous avoir transmis cette méthode. Son récit a fortement frappé les Anciens puisque Énée le Tacticien (Pol., XXXI, 25-27) le reprend en des termes équivalents. L’historien raconte qu’en 479 av. J.-C. Artabaze, après la fuite du Roi Darius, utilisa cette technique lors du siège de Potidée. Artabaze avait un allié à l’intérieur de la ville. En effet, le stratège Timoxénos avait conclu un accord avec lui pour lui livrer Potidée. Les deux complices ne pouvaient communiquer entre eux que par flèches interposées : ils envoyaient à des endroits convenus d’avance les flèches porteuses des messages :
« Toutes les fois que Timoxénos voulait envoyer un message qu’il avait écrit à Artabaze ou Artabaze à Timoxénos, ils enroulaient le message autour d’une flèche le long des fentes[13], le recouvraient de plumes et lançaient la flèche à un endroit convenu. » (Hérod., VIII, 128)
Mais leur manège fut bientôt découvert lorsqu’une de ces flèches lancée par le Perse se détourna de sa trajectoire pour aller se planter dans l’épaule d’un habitant de la ville assiégée. Les hommes qui vinrent lui porter secours découvrirent la lettre et la portèrent aux stratèges : Timoxénos était découvert.
Selon W.A. Oldfather (Aeneas Tacticus, 1948, p. 169, n. 3), cette méthode stéganographique fut souvent employée dans l’Antiquité mais son usage le plus connu est raconté par Jules César et repris par Dion Cassius[14]. Dans le livre V du De bello Gallico, le siège du quartier d’hiver de Q. Cicéron est encerclé par les Nerviens (cfr supra, ch. I). Pour prévenir le général de la situation critique dans laquelle il se trouve, Cicéron confie à un Nervien, Vertico, un message qu’il faut faire parvenir au camp de Jules César. Le Nervien charge à son tour un de ses esclaves de porter la lettre au général. Jules César, lorsqu’il apprend la situation critique de son légat, ordonne à un Gaulois de son entourage de traverser les lignes ennemies en portant, attaché à son javelot, le message destiné à Cicéron :
« L’homme emporte la lettre fixée à son javelot, passe au milieu de ses compatriotes sans éveiller aucun soupçon et parvient auprès de César. » (César, Gaules, V, XLV, 4)
César se sert du même subterfuge pour annoncer sa venue à Cicéron. De plus, il écrit sa réponse en lettres grecques afin que son contenu ne soit pas dévoilé au cas où elle tomberait entre des mains ennemies. Mais il recommande au Gaulois de lancer son javelot à l’intérieur des fortifications s’il s’avérait dangereux de s’approcher du camp assiégé :
« Le Gaulois, n’osant pas s’approcher, lance son javelot, selon les instructions qu’il avait reçues. Le hasard voulut que le trait allât se planter dans une tour, où il reste deux jours sans que les nôtres le remarquent. » (César, Gaules, V, XLVIII, 7-8)
Malgré cette infortune, la tragule fut remarquée par des soldats durant le troisième jour. Dès que ceux-ci s’aperçoivent qu’elle portait un message, ils l’arrachèrent et l’apportèrent à Cicéron qui prit connaissance des instructions de Jules César.
Au IIe siècle apr. J.-C., Plutarque relate les expéditions maritimes de Cimon au Ve siècle av. J.-C. Après la seconde guerre médique, Cimon libérait petit à petit les cités d’Asie Mineure du joug du Grand Roi. Cependant, une cité grecque, Phasélis, refusait de lui faire allégeance. Par conséquent, elle refusait de recevoir les bateaux de l’armée de Cimon en ses ports. Décidé à anéantir les habitants de cette ville, le stratège grec s’approcha de leurs murailles après avoir pillé les alentours. Des Chiotes étaient présents parmi ses troupes. Or ceux-ci étaient liés aux Phasélites par une vieille amitié. Pour concilier l’une et l’autre position, ils s’appliquèrent à apaiser la colère de Cimon et celle de leurs anciens alliés. Pour communiquer avec ces derniers, ils employèrent la ruse suivante :
« Ils lançaient aux Phasélites par-dessus les remparts des billets attachés à leurs flèches pour les informer de leurs démarches. » (Plut., Cimon, XII, 4)
Suite à ces pourparlers, Cimon accepta de conclure un accord avec cette cité dissidente : la ville lui versait dix talents et un contingent pour sa campagne en échange de la vie sauve.
Un dernier exemple de l’emploi de ce système de communication est rapporté par Frontin (Strat., III, VI, 7) et par Polyen (II, 29)[15]. Ce dernier raconte qu’en 279 av. J.-C., lorsque Cléonyme, roi des Spartiates, assiégea Troezène en Argolide, il plaça tout autour de la ville des machines destinées à lancer des traits. Ensuite, il donna l’ordre de catapulter des traits à l’intérieur de la ville assiégée avec l’inscription suivante : « Je viens pour libérer la cité (Polyen, II, 29) ». Pour confirmer ces mots, il relâcha les prisonniers sans rançon. Les captifs délivrés répandirent rapidement la nouvelle à l’intérieur de la cité en parlant avantageusement du roi spartiate : un groupe de dissidents prit la résolution de lui livrer la ville. Eudamidas, le stratège de Troezène, général de Cratère (absent lors du siège) décida de mater les révolutionnaires. Pendant qu’ils se battaient à l’intérieur de la ville, Cléonyme profita de ce désordre pour se rendre maître de Troezène.
Ammien Marcellin expose dans son livre XVIII la fuite des Romains et la prise d’Amida en Mésopotamie (aujourd’hui Dyaebékir) par le perse Sapor au IVe siècle apr. J.-C. Durant cette expédition, les Romains n’hésitèrent pas à utiliser diverses méthodes pour transmettre des messages secrets. L’auteur nous raconte un événement impliquant la réception d’un message triplement protégé par l’usage d’un chiffre, d’une technique de camouflage et d’un travestissement de l’actualité sous le voile de l’histoire ancienne (cfr supra, ch. I). La technique stéganographique employée était la suivante : le message chiffré se trouvait dans le fourreau d’un éclaireur.
« Nous découvrîmes, à l’intérieur d’un fourreau, un parchemin portant un message chiffré. » (Amm., XVIII, VI, 17)
La triple protection du message prouve avec quelle aisance les Romains de l’époque employaient ces différents types de méthodes et combien ils se méfiaient de la vigilance des ennemis. La méthode stéganographique employée dans cet exemple n’était pas inconnue des Romains puisque trois siècles auparavant Frontin écrivait que « d’autres écrivirent dans le fourreau de leurs épées (Frontin, Strat., III, XIII, 2) ». Les différents techniques stéganographiques étaient donc utilisées de la même façon d’une expédition à l’autre.
Le baudrier du soldat se transforma parfois en cachette pour faire passer un message à l’insu des ennemis. Lorsque Capoue, devenue alliée des Carthaginois en 216 av. J.-C., fut étroitement surveillée par les Romains, Frontin (Strat., III, XIII, 2) raconte qu’elle ne trouva que cette solution pour contacter ses alliés : envoyer un de ses soldats chez les ennemis en le faisant passer pour un transfuge. Celui-ci portait un message cousu dans son baudrier. Une fois parvenu dans les lignes ennemies, il attendit le moment favorable pour s’enfuir chez les Carthaginois.
Énée le Tacticien décrit comment un homme apporta un jour à éphèse une lettre écrite sur des feuilles appliquées en cataplasme sur une blessure que celui-ci avait à la jambe.
« Un homme portant un message rédigé sur des feuilles d’arbre fut envoyé <à Éphèse>, et ces feuilles étaient appliquées par une bande sur une blessure qu’il avait à la jambe. » (Én., Pol., XXXI, 6)
L'emplacement de la missive peut laisser supposer que la blessure était un ulcère. De plus, Isaac Casaubon pense qu'il pourrait s'agir de feuilles de mauve, prisées pour les pansements d’ulcère (cfr Plin., Hist. Nat., XX, 224). On comprend aisément que la blessure n’ait pas éveillé les soupçons des ennemis.
En de nombreuses occasions, les corps des animaux vivants et morts ont permis de faire transiter des messages secrets. Ce procédé permettait de se passer d’employer une tierce personne comme messager. La fragilité de quelques-unes de ces techniques réside dans la trop grande responsabilité du ‘bon-vouloir’ de l’animal.
Énée le Tacticien (Pol., XXXI, 9) rapporte qu’un message fut transporté secrètement à l’intérieur de la bride d’un mors. Il n’est pas possible d’affirmer à partir du témoignage du stratège si le cavalier était au courant ou non de ce subterfuge : les deux hypothèses sont possibles.
« Un autre, envoyant en mission un cavalier, cousit un document à la bride du mors. »
En Épire comme en Thessalie, il semble que pour le transport des lettres, les habitants utilisèrent aussi des chiens (Én., Pol., XXXI, 31-32). Toutefois, il ne semble pas que les Grecs les aient dressés spécialement en vue de ce service. Le procédé était simple : après que les émetteurs se soient emparés du chien du destinataire, il le renvoyait chez lui avec un collier sous lequel était attaché le message. Ce subterfuge réussissait pour autant que l’animal retournât bien chez son maître :
«L’ayant emmené avec eux en laisse, ils lui mirent au cou un collier de cuir, à l’intérieur duquel était cousue une lettre, puis ils le laissèrent retourner, de nuit ou pendant la journée, vers celui chez qui il était fatal qu’il revînt : celui chez qui ils l’avaient pris. » (Én., Pol., XXXI, 32).
Durant l’Antiquité, les pigeons servirent de messagers. Pour leur faire porter un message, les Anciens attachaient celui-ci à leurs pattes (Plin., Hist. Nat., X, 110)) ou à leur cou (Frontin, Strat., III, XIII, 8)). Comme nous l’apprennent ces auteurs, pendant le siège de Modène dont nous avons parlé (cfr supra), Décimus Brutus reçut et envoya des nouvelles au moyen de ces oiseaux. Cette méthode était très efficace.
« À quoi servirent à Antoine son retranchement, la vigilance des assiégeants et même les filets barrant le fleuve puisque le courrier passait dans le ciel ? » (Plin., Hist. Nat., X, XXXVII [53])
Frontin est plus explicite quant à la manière de procéder pour parvenir à établir un tel réseau de communication. Il nous apprend que le consul Hirtius gardait les précieux pigeons enfermés dans un endroit obscur sans leur offrir de nourriture. Ensuite, s’approchant au plus près de la muraille, il les libérait après avoir attaché une lettre autour de leur cou grâce à un fil de soie :
« Ces oiseaux, avides de lumière et affamés, s’allaient percher sur les édifices les plus élevés, où Brutus les faisait prendre. » (Front., Strat., III, 8)
Frontin nous apprend également que Brutus avait pris l’habitude de les nourrir au même endroit de manière à ce qu’ils s’accoutument à s’y poser directement. Ce qui sous-entend qu’ils avaient trouvé un système pour renvoyer le pigeon dans le camp d’Hirtius.
Frontin (Strat., III, 3) rapporte un autre procédé stéganographique employé par les Anciens : le messager parcourait le pays avec la dépouille d’un gibier ou d’un autre animal dans lequel avait été cousues des lettres. C’est en procédant de la sorte qu’au VIe siècle av. J.-C., un dignitaire mède nommé Harpage exhorta Cyrus à marcher contre le roi de Médie Astyage :
« Il prépara un lièvre, dont il ouvrit le ventre sans rien enlever du poil qui demeura intact, mit dedans une lettre où il exposait par écrit sa pensée ; puis, après avoir recousu le ventre du lièvre, il donna des filets à l’homme le plus sûr de sa maison, comme à un chasseur et l’expédia en Perse. » (Hérod., I, 123)
Ph.-E. Legrand (Hérodote, 1956, p. 145-146, n. 1) explicite quelque peu le terme grec correspondant au français « préparer » : Harpage devait trouver un moyen afin que le lièvre ne se gâtât pas en route. Par conséquent, il l’empailla sans doute afin de donner à ce lièvre l’apparence d’une pièce de gibier ordinaire que son messager déguisé en chasseur venait de prendre à son propre compte, en quelque lieu qu’on le rencontrât.
Les gardes rencontrés en chemin ne se doutèrent de rien et le document parvint sans encombre à son destinataire, le roi de Perse Cyrus, dont le pays était soumis aux Mèdes. L’homme envoyé par Harpage avait mission d’offrir le lièvre et d’ordonner que celui-ci soit découpé par les soins du roi lui-même sans que personne ne l’assiste. Cyrus trouva donc la lettre dans laquelle Harpage lui enjoignait de soulever les Perses et lui assurait son soutien pour fomenter une révolte interne en Médie. Le futur ‘Cyrus le Grand’ rassembla les Perses et marcha contre les Mèdes. Il fut bientôt le fondateur de l’Empire perse.
Frontin (Strat., III, 4) rapporte que certaines personnes introduisaient le message dont ils étaient chargés dans l’anus de bêtes de somme pour passer devant les postes de garde sans risquer d’être appréhendés. D’où l’art d’être messager sans porter de message…
« D’autres en introduisirent dans le fondement des bêtes de charge, en traversant les postes. »
Le dernier procédé stéganographique connu qui impliquait la dépouille d’un animal consistait à attacher un message à deux outres formées de peau de bouc. L’utilité d’un tel procédé s’est révélé lors du siège de Cyzique par Mithridate au Ier siècle av. J.-C. Alors que l’entrée de la ville assiégée était occupée par les garnisons ennemies, Lucius Lucullus, l’officier le plus fidèle de Sylla, décida de faire parvenir un message sur l’île informant ses habitants de son arrivée imminente :
« Il fit passer sur deux peaux de bouc enflées un de ses soldats, aussi habile à nager qu’à manoeuvrer un vaisseau. Une lettre était cousue à ces outres, qu’il avait jointes par deux attaches en bois. » (Frontin, Strat., III, XIII, 6)
Frontin termine son explication en racontant que l’ennemi prit cette étrange embarcation pour un monstre marin mais il ne rapporte pas comment le message est parvenu du rivage jusque dans l’enceinte de la ville.
Énée le Tacticien (Pol., XXXI, 10-13) raconte comment les Grecs inventèrent un système très ingénieux pour transmettre un message en se servant d’un lécythe. À la fois discret et pratique, ce procédé consistait à écrire une lettre avec du noir à enduit[16] sur une vessie que l’on avait préalablement gonflée et qui offrait une taille proportionnelle à la longueur du message que l’on désirait envoyer. Une fois l’écriture sèche, on vidait la vessie et on la faisait rentrer dans un lécythe d’une taille équivalente. On remplissait alors le vase d’huile afin que la vessie colle aux parois. Après l’avoir correctement ajustée en n’hésitant pas à couper ce qui dépassait par le goulot, on bouchait le récipient. Le message convenablement dissimulé, il n’y avait aucun risque à transporter le message au destinataire. Énée le Tacticien conseille même de le porter ouvertement.
« Boucher le lécythe et le transporter sans le cacher : on verra l’huile dedans, et rien de ce qu’il contient d’autre n’apparaîtra. » (Én., Pol., XXXI, 12)
Le destinataire qui recevait le lécythe n’avait qu’à vider l’huile pour en extraire la vessie. Ensuite, il suffisait de la gonfler à nouveau afin de pouvoir lire la dépêche. En effaçant avec une éponge la première écriture, il pouvait renvoyer sa réponse par le même procédé.
Afin de ne pas dépendre d’un messager et par mesure de prudence, émetteur et destinataire peuvent convenir d’un endroit qui leur servira de cachette. Dès lors, comme l’explique Énée le Tacticien (Pol., XXXI, 31), le destinataire comprendra qu’un message a été déposé à cet endroit lorsqu’il verra que le porteur se trouve en ville :
« Et de cette façon le porteur ne saura pas à qui il a apporté le message, et on ne saura pas que le destinataire en a reçu un. »
Les Anciens employèrent fréquemment des tablettes de bois comme supports de leur correspondance. Les tablettes furent également utilisées pour protéger les missives des regards indiscrets. De nombreux historiens et stratèges ont transmis ce procédé stéganographique (Hérod., VII, 239 ; Én., Pol., XXXI, 14 ; Polyen, II, 20 ; Gell., XVII, IX, 16-17). Une des plus importantes applications de ce type de communication s’est déroulée en 480 av. J.-C.
Xerxès s’apprêtait à attaquer la Grèce par surprise. Cependant, les Lacédémoniens avaient été informés des préparatifs du Grand Roi. En effet, les intentions de Xerxès avaient été dévoilées par un Grec expulsé de son pays et qui se trouvait à Suse, Démarate. La raison de l’envoi de cette lettre providentielle à ceux qui l’avaient banni semble obscure pour Hérodote :
« Démarate […] ne voulait pas de bien aux Lacédémoniens ; et l’on peut se demander s’il fit ce que je rapporte par bienveillance ou s’il obéissait à une joie maligne. » (Hérod., VII, 239)
Néanmoins, il prévint son ancienne patrie du danger imminent. Pour déjouer les gardes des routes, il grava sur le bois d’une tablette la décision du Roi et il recouvrit le message de cire. Les tablettes, vierges en apparence, ne suscitèrent aucune méfiance de la part des surveillants perses. Arrivées à destination, elles n’attirèrent pas davantage l’attention jusqu’à ce que Gorgo, épouse de Léonidas, roi de Sparte, suggéra d’enlever la couche de cire.
« Les Lacédémoniens obéirent, découvrirent le message et le lurent ; ils le mandèrent ensuite aux autres Grecs. » (Hérod., VII, 239)
Énée le Tacticien (Pol., XXXI, 14), qui ne mentionne pas son usage lors d’un événement particulier, conseille d’inscrire un message anodin sur la cire recouvrant le bois afin de ne pas éveiller les soupçons. Mais comme le remarque Anne-Marie Bon (Énée, 1967, p. 71, n. 1), Démarate n’avait rien convenu avec ses compatriotes. Par conséquent, le seul moyen de piquer la curiosité des Lacédémoniens était de faire transmettre des tablettes vierges.
Alors que l’annonce d’une invasion perse avait fait le tour de la Grèce, Xerxès ne bénéficiait plus de l’avantage de la surprise : le 23 septembre 480 av. J.-C., les Grecs attendaient la flotte perse.
Quelques siècles plus tard, Aulu-Gelle (XVII, IX, 16) raconte de quelle façon un héros carthaginois – « est-ce Hasdrubal ou quelque autre, je ne m’en souviens plus », écrit-il – procéda en vue de dissimuler un message secret. Il grava sur le bois d’une tablette neuve sa missive. Ensuite, il enduisit la tablette d’une couche de cire. Il envoya les tablettes sans aucune inscription à un destinataire qui, prévenu de la ruse, racla directement la cire pour lire l’inscription.
Énée le Tacticien propose de recourir à de faux ex-voto pour transmettre des messages secrets. Cette désinvolture dans l’utilisation d’objets sacrés montre la force de caractère et l’indépendance du stratège par rapport aux dieux (A.-M. Bon, Énée, 1967, p. XIX). Ici encore, les Anciens recouraient à une double couche de cire mais la seconde couche était gravée d’une inscription :
« On peut encore écrire tout ce qu’on veut sur un tableau votif fait pour un héros. Le passer ensuite à la peinture blanche et lorsqu’elle est sèche dessiner un cavalier porte-lumière ou tout autre au choix, en vêtements blancs et avec un cheval également blanc, ou sinon d’une autre couleur, mais pas noir. » (Én., Pol., XXXI, 15)
Le procédé consiste donc à dissimuler un message sous la représentation d’un héros. La couleur noire est proscrite car après un bain d’huile, l’encre du message ne transparaîtrait pas sous une couche de la même couleur qu’elle. Une fois que le tableau votif est achevé, il sera accroché dans une chapelle convenue d’avance où le destinataire viendra le chercher, reconnaissant le tableau à un signe distinctif. Celui-ci découvrira la teneur du message après avoir passé le tableau votif dans de l’huile (Én., Pol., XXXI, 15-16).
Pour tromper la vigilance des gardes des routes, les Anciens ont inventé une méthode plus élaborée que la camouflage physique : l’encre invisible. Cette méthode stéganographique, l’une des toutes premières, reste imparable. Depuis l’Antiquité, les recherches en ce domaine et son perfectionnement n’ont pas cessé.
Les Arabes en ont fait usage dès le VIIe siècle en mélangeant des plantes locales ; l’Europe s’intéresse de près à ces méthodes depuis le Moyen Âge. Vers la fin des années 1700, le phénomène se répand en Amérique. Au XXe siècle, les progrès de la chimie font apparaître de nouveaux produits. Durant les deux guerres mondiales, l’encre invisible occupe une place centrale : les agents inscrivaient des messages sous les timbres, sur les faces internes de papiers collés ou encore ils en marquaient les lettres repérées dans les journaux. Les censeurs se montrèrent de plus en plus vigilants, n’hésitant pas à confisquer les lettres suspectes ou à supprimer l’usage de timbres.
Petit à petit, les encres invisibles ont été supplantées par les avancées de la stéganographie technique : le micro-point devance aujourd’hui les encres invisibles car il permet de véhiculer un plus grand nombre d’informations dans un espace plus restreint.
Ce type de stéganographie technique remonte à l’Antiquité. Les Grecs et les Romains ont fait preuve d’ingéniosité dans son utilisation : tout élément pouvait devenir un véhicule des messages secrets. Les historiens antiques nous ont transmis beaucoup d’exemples de camouflage qui passent souvent inaperçus dans la lecture de leurs récits. Or, la longévité des camouflages physiques prouve que leur place dans la transmission des messages secrets fut essentielle.
Au cours des siècles, les techniques de camouflage se sont développées. Certains procédés ont refait surface mais en se protégeant doublement par l’emploi des méthodes cryptographiques. Énumérer l’ensemble de ses utilisations depuis l’Antiquité est un travail fastidieux car depuis ses origines le camouflage des dépêches se généralise tant dans le domaine public que dans le domaine privé. Mais nous savons que la pipe, le jeu de cartes, les poignées amovibles des dagues, la doublure d’un manteau ou les sacs à double fond ne sont qu’une infime partie de son usage durant le XXe siècle (Wrixon, 2000, p. 482-483; Kahn, 1980, p. 334-336).
[Plan]
La stéganographie a toujours été présente dans le domaine de la transmission des missives secrètes. Bien qu’elle ait occupé une place importante chez les Anciens et qu’elle se soit maintenue jusqu’à notre époque, peu d’ouvrages en traitent
(cfr toutefois <http://glu.freeservers.com/artsteg.htm>.
En effet, la stéganographie s’est développée à l’ombre de la cryptographie et le fait que les deux disciplines n’ont pas cessé de se croiser ne facilite pas la reconnaissance et l’étude de cette discipline.
Les Anciens ont énormément innové dans ce type de communication : la stéganographie occupait à cette époque le devant de la scène. Par conséquent, il n’est pas étonnant qu’Énée le Tacticien lui ait consacré un chapitre entier tandis qu’il n’accordait que quelques lignes à la cryptographie.
La force de cette discipline réside peut-être dans sa facilité d’adaptation et dans l’incroyable richesse de ses méthodes : tous les supports peuvent concourir à communiquer des messages. Sa longévité et l’usage continu de ses techniques durant le XXe siècle prouvent combien l’efficacité de ses méthodes n’a cessé de se confirmer.
[Plan]
Folia Electronica Classica (Louvain-la-Neuve) - Numéro 8 – juillet-décembre 2004
<folia_electronica@fltr.ucl.ac.be>
[1] Comme le font remarquer F. Raynal, F. Petitcolas, C. Fontaine, « L’art de dissimuler les informations » dans Pour la science, n° 36. L’art du secret (2002), p. 26, ce terme est ignoré de la plupart des dictionnaires. [Retour au texte]
[2] Une traduction française et une mise à jour de cet ouvrage ont paru à Paris en 1980 dans l’édition ‘Interéditions’ sous le titre La guerre des codes secrets.
[3] L’agencement et les différentes catégories de ce chapitre concernant la stéganographie doivent beaucoup à l’ouvrage de Wrixon (2000), p. 479-516.
[4] Le terme ‘censeur’ qu’utilise D. Kahn fait référence aux surveillants qui pendant la guerre étaient chargés de trier le courrier qui entrait dans le pays afin d’en extraire les lettres indésirables car suspectes. Dans l’Antiquité, les routes étaient surveillées par des gardes qui pouvaient intercepter les messages.
[5] W.A. Oldfather, Aeneas Tacticus (1948), p. 163 et Anne-Marie Bon, énée (1967), p. 72, note 1 s’accordent avec Isaac Casaubon pour affirmer qu’Énée est l’inventeur de cette technique. Ils se basent sur les nombreux détails qui accompagnent le procédé. Isaac Casaubon est l’auteur de l’editio princeps d’Énée. Cette édition accompagnée d’une traduction latine et de notes fut publiée à Paris en 1609.
[6] A. Jacob, « Epistolae Secretae », dans DAGR II 1 (D-E), 1892, p. 710.
[7] Thevenot, « Philon de Byzance », dans Mathematicae Veteres (1693), p. 102 ; Ch. Graux, « Philon de Byzance », dans Revue de Philologie , T. III, 1880, p. 83 ; A. Jacob, « Epistolae Secretae », dans DAGR II 1 (D-E), 1892, p. 710; Kahn (1980), p. 334.
[8] Én., Pol., XXXI, 28-29 ; Hérod., V, 35 ; Polyen, I, 24 ; Gell., IX, 18-27. La leçon d’Hérodote est la plus complète.
[9] F. Raynal, F. Petitcolas et C. Fontaine, « L’art de dissimuler les informations », dans Pour la science, n° 36. L’art du secret (2002), p. 8-17.
[10] Selon A.-M. Bon, Énée (1967), p. 132, Glous commanda la flotte perse dans la guerre contre évagoras de Chypre de 386 à 379 av. J.-C.
[11] A. Jacob, « Epistolae Secretae», dans DAGR II 1 (D-E), 1892, p. 709.
[12] A. Jacob, « Epistolae Secretae», dans DAGR II 1 (D-E), 1892, p. 709.
[13] Le sens du terme grec correspondant n’est pas exactement connu. Il peut désigner soit les encoches pratiquées dans le talon de la flèche qui permettent de fixer celle-ci sur la corde de l’arc, soit les fentes longitudinales de l’empenne.
[14] Dion Cass., XL, IX, 4. Dion Cassius expose en des termes identiques le siège du camp de Cicéron. La seule différence réside dans l’arme de jet : César parle de tragule (tragula), Dion de javelot (akontion). Cette opposition trouve sans doute son fondement dans le vocabulaire des langues puisque la tragule est une arme typiquement celtique.
[15] Le récit de Polyen est plus détaillé et ne contient aucune erreur contrairement à celui de Frontin qui fait de Cléonyme un Athénien.