Bibliotheca Classica Selecta - Autres traductions françaises dans la BCS - Énéide - Chant II (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page suivante

MOTEUR DE RECHERCHE DANS LA BCS


ÉNÉIDE, LIVRE II

 

CHUTE DE TROIE - MISSION D'ÉNÉE

 

Cheval et Grecs dans Troie (2, 1-267)

 

Récit d'Énée. Surprenante offrande à Pallas (2, 1-56)

À la demande de Didon, Énée accepte de raconter les derniers moments de Troie, malgré l'heure avancée et la douleur que provoque en lui cette évocation. Pour simuler leur départ, les Grecs vont se cacher dans l'île voisine de Ténédos, en laissant sur le rivage un énorme cheval de bois, soi-disant pour faire une offrande à Pallas, mais en fait c'est un piège de guerre (2, 1-24).

Les Troyens, heureux du départ de leurs assaillants, examinent le cheval avec curiosité, partagés entre confiance et défiance, tandis que le prêtre Laocoon les met en garde (2, 25-56).

Conticuere omnes, intentique ora tenebant.

Inde toro pater Aeneas sic orsus ab alto :

« Infandum, regina, iubes renouare dolorem,

Troianas ut opes et lamentabile regnum

Toute l'assistance se tut, les visages étaient tendus vers le grand Énée.

Alors, de son lit surélevé, le héros commença ainsi :

« Tu m'ordonnes, reine, de raviver une souffrance indicible,

en te racontant la manière dont l'opulente Troie et son lamentable royaume

2, 1

eruerint Danai ; quaeque ipse miserrima uidi,

et quorum pars magna fui. Quis talia fando

Myrmidonum Dolopumue aut duri miles Ulixi

temperet a lacrimis? Et iam nox umida caelo

praecipitat, suadentque cadentia sidera somnos.

furent mis à sac par les Danaens, les malheurs affreux dont je fus témoin,

et la part importante que j'y pris moi aussi. Devant de tels récits,

qui parmi les Myrmidons ou les Dolopes, quel soldat du cruel Ulysse

pourrait contenir ses larmes ? De plus, l'humidité de la nuit déjà

tombe du ciel, et les astres qui s'effacent invitent au sommeil.

2, 5

Sed si tantus amor casus cognoscere nostros

et breuiter Troiae supremum audire laborem,

quamquam animus meminisse horret, luctuque refugit,

incipiam. Fracti bello fatisque repulsi

ductores Danaum, tot iam labentibus annis,

Mais, puisque ton désir est si grand de connaître nos malheurs

et d'entendre relater brièvement l'ultime épreuve de Troie,

même si mon esprit se hérisse à ces souvenirs et recule devant la douleur,

je vais commencer. Brisés par la guerre et refoulés par les destins,

après tant d'années écoulées déjà, les chefs des Danaens,

 2, 10

instar montis equum diuina Palladis arte

aedificant, sectaque intexunt abiete costas :

uotum pro reditu simulant ; ea fama uagatur.

Huc delecta uirum sortiti corpora furtim

includunt caeco lateri, penitusque cauernas

inspirés par la divine Pallas, fabriquent un cheval haut

comme une montagne, aux flancs de planches de sapin tressées ;

ce serait, c'est le bruit qui court, une offrande pour leur retour.

En cachette, ils enferment dans les flancs aveugles de l'animal

des hommes d'élite tirés au sort et remplissent de soldats armés

2, 15

ingentis uterumque armato milite complent.

Est in conspectu Tenedos, notissima fama

insula, diues opum, Priami dum regna manebant,

nunc tantum sinus et statio male fida carinis :

huc se prouecti deserto in litore condunt.

 

les profondes cavités du ventre de la bête.

Du rivage on aperçoit Ténédos, île très fameuse,

opulente tant que vécut le royaume de Priam,

aujourd'hui simple baie et port peu sûr pour les bateaux :

les Danaens s'y rendent et s'y cachent sur le rivage désert. 

 

2, 20

Nos abiisse rati et uento petiisse Mycenas :

ergo omnis longo soluit se Teucria luctu ;

panduntur portae ; iuuat ire et Dorica castra

desertosque uidere locos litusque relictum.

Hic Dolopum manus, hic saeuus tendebat Achilles ;

Nous, nous les croyions partis à la faveur des vents pour Mycènes.

Dès lors la Troade tout entière se libère d'un long deuil ;

on ouvre les portes ; on se plaît à courir au camp des Doriens,

à visiter ces lieux désertés et le littoral abandonné :

ici campaient les Dolopes ; ici le farouche Achille avait planté sa tente ;

2, 25

classibus hic locus ; hic acie certare solebant.

Pars stupet innuptae donum exitiale Mineruae,

et molem mirantur equi ; primusque Thymoetes

duci intra muros hortatur et arce locari,

siue dolo, seu iam Troiae sic fata ferebant.

ici était l'endroit réservé à la flotte, là d'habitude ils s'entraînaient au combat.

Certains restent stupéfaits devant le funeste présent à la vierge Minerve,

et s'étonnent des dimensions du cheval ; Thymétès, le tout premier,

suggère de l'introduire dans les murs et de l'installer sur la citadelle ;

était-ce fourberie, ou le destin de Troie était-il à l'oeuvre déjà !

2, 30

At Capys, et quorum melior sententia menti,

aut pelago Danaum insidias suspectaque dona

praecipitare iubent, subiectisque urere flammis,

aut terebrare cauas uteri et temptare latebras.

Scinditur incertum studia in contraria uolgus.

Mais Capys et les mieux inspirés recommandent

soit de précipiter dans la mer le piège des Danaens

et leur présent suspect, d'y bouter le feu et de le brûler,

soit de forer le ventre du cheval et d'en explorer les coins secrets.

Le peuple indécis est divisé en partis opposés.

2, 35

Primus ibi ante omnis, magna comitante caterua,

Laocoon ardens summa decurrit ab arce,

et procul : ʻ O miseri, quae tanta insania, ciues?

Creditis auectos hostis ? Aut ulla putatis

dona carere dolis Danaum ? Sic notus Ulixes ?

Alors, en tête d'une importante troupe qui l'escorte,

Laocoon dévale, tout excité, du sommet de la citadelle, et de loin s'écrie :

ʻ Malheureux, quelle est cette immense folie, mes amis ?

Croyez-vous les ennemis partis ? Pensez-vous que des Danaens

un seul présent soit exempt de pièges ? Ne connaissez-vous pas Ulysse ?

 2, 40

Aut hoc inclusi ligno occultantur Achiui,

aut haec in nostros fabricata est machina muros

inspectura domos uenturaque desuper urbi,

aut aliquis latet error ; equo ne credite, Teucri.

Quicquid id est, timeo Danaos et dona ferentis. ʼ

Ou des Achéens sont enfermés et cachés dans ce cheval de bois,

ou cette machine a été fabriquée pour franchir nos murs,

observer nos maisons, et s'abattre de toute sa hauteur sur la ville,

ou encore elle recèle un autre piège ; Troyens, ne vous fiez pas au cheval.

De toute façon, je crains les Danaens, même porteurs de présents. ʼ

2, 45

Sic fatus, ualidis ingentem uiribus hastam

in latus inque feri curuam compagibus aluum

contorsit : stetit illa tremens, uteroque recusso

insonuere cauae gemitumque dedere cauernae.

Et, si fata deum, si mens non laeua fuisset,

Et cela dit, de toutes ses forces il fait tournoyer une longue pique

vers le flanc du monstre et son ventre courbe de poutres jointes.

Elle s'y fiche en vibrant, les flancs du cheval en sont ébranlés,

tandis que résonnent et gémissent ses profondes cavernes.

Si les dieux ne l'avaient arrêté, si nos esprits n'avaient été aveuglés,

2, 50

impulerat ferro Argolicas foedare latebras,

Troiaque, nunc stares, Priamique arx alta, maneres.

il nous eût poussé à profaner de nos lances les cachettes des Argiens,

Troie maintenant serait debout, et tu subsisterais, altière citadelle de Priam !

 2, 55

 

Le traître Sinon explique sa présence à Troie (2, 57-144)

À ce moment, des bergers amènent au roi Priam un jeune Grec qui s'est livré à eux ; hostiles a priori mais intrigués, les Troyens interrogent le captif, qui d'emblée réussit à les apitoyer. C'est Sinon (2, 57-75).

Le prisonnier explique qu'il fut contraint de fuir le camp grec, où il était tombé en disgrâce après la mort de Palamède, son compagnon d'armes, victime d'une injustice d'Ulysse. Comme il avait juré de venger son camarade, Sinon était à son tour devenu la cible d'Ulysse, qui cherchait à le perdre par tous les moyens (2, 76-104).

Sinon poursuit son récit devant les Troyens de plus en plus intéressés. Selon lui, les Grecs qui désiraient rentrer chez eux auraient été informés par un oracle d'Apollon qu'ils n'obtiendraient des vents favorables qu'en sacrifiant un Argien ; pressé par Ulysse, Calchas avait fini par le désigner, lui Sinon, comme victime (2, 105-131).

Il s'était enfui le jour prévu pour le sacrifice et s'était caché en attendant le départ des Grecs. Aujourd'hui, privé de sa patrie et de ses proches, il en était réduit à implorer la pitié des Troyens (2, 132-144).

Ecce, manus iuuenem interea post terga reuinctum

pastores magno ad regem clamore trahebant

Dardanidae, qui se ignotum uenientibus ultro,

Entre-temps, on aperçoit un homme, les mains liées derrière le dos ;

des bergers dardaniens au milieu des cris le traînaient vers le roi.

Cet inconnu s'était spontanément présenté à eux sur la route,

2, 57

hoc ipsum ut strueret Troiamque aperiret Achiuis,

obtulerat, fidens animi atque in utrumque paratus,

seu uersare dolos, seu certae occumbere morti.

Undique uisendi studio Troiana iuuentus

circumfusa ruit, certantque inludere capto.

dans ce but précis et pour ouvrir Troie aux Achéens ;

il était plein de détermination et tout aussi résolu

à mener à bien ses ruses qu'à affronter une mort certaine.

Poussés par la curiosité, les jeunes Troyens se ruent de toutes parts,

entourent le prisonnier, le maltraitent à l'envi.

2, 60

Accipe nunc Danaum insidias, et crimine ab uno

disce omnes.

Namque ut conspectu in medio turbatus, inermis

constitit atque oculis Phrygia agmina circumspexit :

ʻ Heu, quae nunc tellus' inquit 'quae me aequora possunt

Écoute maintenant les fourberies des Danaens,

et à partir du crime d'un seul, apprends à les connaître tous.

Donc, dès que, bouleversé, sans armes, il se trouva debout,

au centre des regards, il parcourut des yeux les troupes phrygiennes, et dit :

ʻ Hélas ! quelle terre désormais, quelles mers pourraient m'accueillir ?

2, 65

accipere? Aut quid iam misero mihi denique restat,

cui neque apud Danaos usquam locus, et super ipsi

Dardanidae infensi poenas cum sanguine poscunt ? ʼ

Quo gemitu conuersi animi, compressus et omnis

impetus. Hortamur fari ; quo sanguine cretus,

Que reste-t-il maintenant au malheureux que je suis ?

Je n'ai plus de place nulle part chez les Danaens, et de plus,

les Dardanides, hostiles, exigent pour moi la peine de mort. ʼ

Ces plaintes retournent nos esprits, toute pression retombe.

Nous l'invitons à parler : quelle est sa race, que propose-t-il,

2, 70

quidue ferat, memoret, quae sit fiducia capto.

 

Ille haec, deposita tandem formidine, fatur :

ʻ Cuncta equidem tibi, Rex, fuerit quodcumque, fatebor

uera, inquit ; neque me Argolica de gente negabo :

hoc primum ; nec, si miserum Fortuna Sinonem

quelle confiance faire à un captif ? qu'il s'explique !

 

Lui, finalement abandonnant toute crainte, dit :

ʻ Assurément, roi, quoi qu'il advienne, tout ce que je te dirai

sera la vérité ; je ne cacherai pas que je suis de race argienne ;

c'est la première chose ; et si la Fortune a fait de Sinon un malheureux,

2, 75

finxit, uanum etiam mendacemque improba finget.

Fando aliquod si forte tuas peruenit ad auris

Belidae nomen Palamedis et incluta fama

gloria, quem falsa sub proditione Pelasgi

insontem infando indicio, quia bella uetabat,

si mauvaise soit-elle, elle n'en fera ni un fourbe ni un menteur.

Peut-être, au hasard d'une conversation, un nom a-t-il frappé tes oreilles,

celui de Palamède, le Bélide, à la renommée célèbre. Les Pélasges,

l'accusant injustement de trahison sur la foi d'une infâme dénonciation,

envoyèrent cet innocent au supplice, parce qu'il s'opposait à la guerre ;

2, 80

demisere neci, nunc cassum lumine lugent.

Illi me comitem et consanguinitate propinquum

pauper in arma pater primis huc misit ab annis,

dum stabat regno incolumis regumque uigebat

consiliis, et nos aliquod nomenque decusque

et maintenant qu'il est privé de lumière, ils le pleurent.

Comme compagnon de cet homme, mon proche par les liens du sang,

je fus envoyé ici, à la guerre, dès mon tout jeune âge, par mon pauvre père.

Aussi longtemps que Palamède vécut sain et sauf dans son royaume

et influent dans les assemblées des rois, mon nom aussi était connu,

2, 85

gessimus. Inuidia postquam pellacis Ulixi -

haud ignota loquor - superis concessit ab oris,

adflictus uitam in tenebris luctuque trahebam,

et casum insontis mecum indignabar amici.

Nec tacui demens, et me, fors si qua tulisset,

j'ai joui d'un certain renom. Depuis que la haine du perfide Ulysse -

je ne dis que des choses connues -, l'a éloigné des rives terrestres,

j'ai traîné dans l'affliction une vie obscure et endeuillée,

m'indignant en mon coeur de la chute d'un ami innocent.

Et, fou que j'étais, je ne me suis pas tu, je me suis même promis,

2, 90

95 si patrios umquam remeassem uictor ad Argos,

promisi ultorem, et uerbis odia aspera moui.

Hinc mihi prima mali labes, hinc semper Ulixes

criminibus terrere nouis, hinc spargere uoces

in uolgum ambiguas, et quaerere conscius arma.

si le destin le permettait, si je rentrais vainqueur à Argos, ma patrie,

d'être son vengeur. Par ces paroles, j'ai suscité d'âpres haines ;

c'est ainsi que j'ai commencé à glisser dans le malheur : sans cesse,

Ulysse m'accablait de nouveaux griefs, faisait courir dans le peuple

des sous-entendus et, préparant son coup, fourbissait ses armes.

2, 95

Nec requieuit enim, donec, Calchante ministro ...

sed quid ego haec autem nequiquam ingrata reuoluo?

Quidue moror, si omnis uno ordine habetis Achiuos,

idque audire sat est? Iamdudum sumite poenas,

hoc Ithacus uelit, et magno mercentur Atridae. ʼ

 

En effet, avec la complicité de Calchas, il ne s'arrêta pas avant d'avoir…

Mais pourquoi donc ressasser en vain ces souvenirs désagréables ?

Ou pourquoi traîner ? Si vous jugez tous les Achéens à la même aune,

s'il vous suffit d'entendre ce nom, infligez-moi sur le champ ma punition :

c'est le voeu de l'homme d'Ithaque, et les Atrides le payeraient cher. ʼ

 

2, 100

Tum uero ardemus scitari et quaerere causas,

ignari scelerum tantorum artisque Pelasgae.

Prosequitur pauitans, et ficto pectore fatur :

ʻ Saepe fugam Danai Troia cupiere relicta

moliri, et longo fessi discedere bello ;

Alors, nous brûlons véritablement de l'interroger, de comprendre,

ignorants que nous étions de si grands forfaits et de la fourberie pélasge.

Il poursuit alors en tremblant et, le coeur plein de duplicité, dit :

ʻ Souvent les Danaens ont voulu s'enfuir, abandonner Troie

et s'éloigner, épuisés qu'ils étaient par cette guerre sans fin.

 2, 105

fecissentque utinam ; Saepe illos aspera ponti

interclusit hiemps, et terruit Auster euntis.

Praecipue, cum iam hic trabibus contextus acernis

staret equus, toto sonuerunt aethere nimbi.

Suspensi Eurypylum scitantem oracula Phoebi

Ah ! Que ne l'ont-ils fait ! Souvent l'âpre tempête marine les retenait

et, quand ils voulaient se mettre en route, l'Auster les effrayait.

Puis surtout, tandis que déjà se dressait ce cheval en planches d'érable,

les nuages grondèrent dans toute l'immensité du ciel.

Indécis, nous envoyons Eurypyle interroger les oracles de Phébus ;

2, 110

mittimus, isque adytis haec tristia dicta reportat :

'Sanguine placastis uentos et uirgine caesa,

cum primum Iliacas, Danai, uenistis ad oras ;

sanguine quaerendi reditus, animaque litandum

Argolica.' Volgi quae uox ut uenit ad auris,

il rapporte du sanctuaire les tristes paroles que voici :

'Par le sang d'une vierge immolée, Danaens, vous avez apaisé les vents,

lorsque vous avez abordé pour la première fois aux rives d'Ilion ;

dans le sang aussi, vous devrez chercher le retour ; il vous faut sacrifier

une âme argienne'. Dès que l'oracle eut frappé leurs oreilles,

2, 115

obstipuere animi, gelidusque per ima cucurrit

ossa tremor, cui fata parent, quem poscat Apollo.

'Hic Ithacus uatem magno Calchanta tumultu

protrahit in medios ; quae sint ea numina diuom,

flagitat ; et mihi iam multi crudele canebant

les assistants restent stupéfaits, parcourus jusqu'aux os d'un tremblement

qui les glace : de qui préparait-on la mort ? Quelle victime réclamait Apollon ?

Alors l'homme d'Ithaque entraîne le devin Calchas parmi la foule,

dans un grand brouhaha ; il exige de connaître ces ordres des dieux.

Déjà beaucoup me prédisaient le forfait cruel de cet être plein d'artifice

2, 120

artificis scelus, et taciti uentura uidebant.

Bis quinos silet ille dies, tectusque recusat

prodere uoce sua quemquam aut opponere morti.

Vix tandem, magnis Ithaci clamoribus actus,

composito rumpit uocem, et me destinat arae.

et, en silence, pressentaient ce qui allait se produire.

Durant dix jours, le devin se tait ; retiré chez lui, il refuse

de prononcer la parole qui livrera un homme et l'enverra à la mort.

Finalement, amené avec force cris par l'homme d'Ithaque,

Calchas, comme convenu, rompt son silence et me désigne pour l'autel.

2, 125

Adsensere omnes, et, quae sibi quisque timebat,

unius in miseri exitium conuersa tulere.

 

Iamque dies infanda aderat ; mihi sacra parari,

et salsae fruges, et circum tempora uittae :

eripui, fateor, leto me, et uincula rupi,

Tous approuvèrent ; et le sort que chacun redoutait pour soi,

tous acceptèrent qu'il tournât à la perte d'un seul malheureux.

 

Déjà le jour fatidique était arrivé ; près de moi, on dispose les objets rituels,

les farines salées et les bandelettes autour de mes tempes.

Je me suis arraché à la mort, je l'avoue, j'ai brisé mes chaînes

2, 130

limosoque lacu per noctem obscurus in ulua

delitui, dum uela darent, si forte dedissent.

Nec mihi iam patriam antiquam spes ulla uidendi,

nec dulcis natos exoptatumque parentem ;

quos illi fors et poenas ob nostra reposcent

et, près d'un lac boueux, la nuit, je me suis tapi, dissimulé

dans les roseaux, attendant qu'ils hissent les voiles, au cas où ils le feraient !

Désormais, je n'ai plus aucun espoir de retrouver mon ancienne patrie,

ni mes chers enfants ni mon père, que j'ai tant souhaité revoir ;

peut-être ces gens vont-ils les châtier à cause de ma fuite

2, 135

effugia, et culpam hanc miserorum morte piabunt.

Quod te per superos et conscia numina ueri,

per si qua est quae restet adhuc mortalibus usquam

intemerata fides, oro, miserere laborum

tantorum, miserere animi non digna ferentis.ʼ

et venger ma faute en mettant à mort ces malheureux !

Au nom des dieux d'en haut et des divinités qui connaissent la vérité,

au nom aussi de la bonne foi inviolée, si tant est qu'elle subsiste

en un endroit du monde, aie pitié de si grandes épreuves,

je t'en prie, aie pitié d'un coeur accablé par un sort immérité.ʼ

2, 140

 

Les Troyens abusés par Sinon et par la mort de Laocoon (2, 145-227)

Avec un art consommé de la duplicité, Sinon explique la signification du cheval aux Troyens et à Priam, qu'il réussit même à apitoyer. Il leur donne l'impression de les aider, en leur révélant les secrets des Grecs. Selon lui, Pallas-Athéna, protectrice immémoriale des Grecs, avait été offensée par l'impiété de Diomède et d'Ulysse, qui avaient dérobé de son sanctuaire troyen le Palladium ; la déesse avait manifesté son mécontentement par des prodiges (2, 145-175).

Sur les conseils de Calchas, poursuit Sinon, les Grecs sont retournés à Mycènes pour en ramener le Palladium, - condition exigée par la déesse pour anéantir Troie -, et des armes, tout en bénéficiant à nouveau de la faveur divine. Le cheval laissé sur le rivage est une offrande à Minerve (Pallas), pour expier leur sacrilège. Les proportions gigantesques du cheval doivent en principe empêcher les Troyens de l'introduire dans leurs murs (en réalité, elles ont pour but de les y pousser, puisque un oracle aurait annoncé un désastre pour les Troyens si ils profanaient la statue, mais que, s'ils l'introduisaient dans la ville, ils porteraient la guerre en Grèce même). Ce récit plein d'astuce emporte la conviction de ses interlocuteurs (2, 176-198).

À cela vient s'ajouter la mort tragique du Troyen Laocoon et de ses fils, étranglés par deux serpents sortis de la mer, ce qui est immédiatement interprété comme une manifestation de la colère divine. Laocoon avait en effet manifesté son opposition au projet troyen d'introduire le cheval dans la ville (2, 199-227).

His lacrimis uitam damus, et miserescimus ultro.

Ipse uiro primus manicas atque arta leuari

uincla iubet Priamus, dictisque ita fatur amicis :

ʻ Quisquis es, amissos hinc iam obliuiscere Graios ;

noster eris, mihique haec edissere uera roganti :

Émus par ces larmes, nous lui laissons la vie, le prenant même en pitié.

Le premier, Priam ordonne de retirer les fers de ses mains,

de desserrer ses liens ; il s'adresse à lui avec bienveillance :

ʻ Qui que tu sois, oublie désormais ces Grecs que tu as quittés,

tu seras des nôtres ; et réponds à mes questions en toute sincérité :

2, 145

Quo molem hanc immanis equi statuere ? Quis auctor ?

Quidue petunt ? Quae religio, aut quae machina belli ? ʼ

Dixerat. Ille, dolis instructus et arte Pelasga,

sustulit exutas uinclis ad sidera palmas :

ʻ Vos, aeterni ignes, et non uiolabile uestrum

Pourquoi avoir dressé ce cheval énorme ? Qui en est l'auteur ?

Que veulent-ils ? Est-ce une offrande ? Une machine de guerre ? ʼ

Priam s'était tu. Sinon, formé aux ruses et aux artifices des Pélasges,

leva vers le ciel ses mains dégagées de leurs liens et dit :

ʻ Feux éternels à la puissance inviolable, je vous prends à témoin ;

2, 150

 testor numen ʼ ait ʻ uos arae ensesque nefandi,

quos fugi, uittaeque deum, quas hostia gessi :

fas mihi Graiorum sacrata resoluere iura,

fas odisse uiros, atque omnia ferre sub auras,

si qua tegunt ; teneor patriae nec legibus ullis.

vous, autels et glaives maudits auxquels j'ai échappé,

bandelettes sacrées que j'ai portées comme victime :

j'ai le droit de renier mes engagements sacrés envers les Grecs,

j'ai le droit de haïr ces hommes et de révéler tous les secrets

qu'ils peuvent cacher ; aucune loi de ma patrie ne me retient désormais.

2, 155

Tu modo promissis maneas, seruataque serues

Troia fidem, si uera feram, si magna rependam.

 

Omnis spes Danaum et coepti fiducia belli

Palladis auxiliis semper stetit. Impius ex quo

Tydides sed enim scelerumque inuentor Ulixes,

Toi, du moins, respecte tes promesses, et une fois sauvée, ô Troie,

garde-moi ta foi, si je dis vrai, pour tout ce que je t'apporte en échange.

 

Tout l'espoir des Danaens, leur confiance dans la guerre entreprise

a reposé, de tout temps, sur les secours de Pallas. Mais pourtant,

dès le jour où l'impie fils de Tydée et Ulysse, ce fauteur de crimes,

2, 160

fatale adgressi sacrato auellere templo

Palladium, caesis summae custodibus arcis,

corripuere sacram effigiem, manibusque cruentis

uirgineas ausi diuae contingere uittas ;

ex illo fluere ac retro sublapsa referri

entreprirent d'enlever du temple sacré le Palladium fatidique,

quand ils eurent, après le massacre des gardes de la haute citadelle,

saisi l'effigie sacrée et osé, de leurs mains baignées de sang,

toucher les bandelettes virginales de la déesse, dès ce jour,

l'espoir des Danaens se mit à diminuer, s'écoulant et refluant,

2, 165

spes Danaum, fractae uires, auersa deae mens.

Nec dubiis ea signa dedit Tritonia monstris.

Vix positum castris simulacrum, arsere coruscae

luminibus flammae arrectis, salsusque per artus

sudor iit, terque ipsa solo - mirabile dictu -

leurs forces se brisèrent, la faveur de la déesse se détourna.

Et la Tritonienne le leur fit comprendre par des prodiges évidents.

Sa statue venait d'être placée dans le camp : d'ardentes flammes

embrasèrent ses yeux fixes ; une sueur salée couvrit ses membres

et par trois fois, miracle indicible, elle se souleva du sol,

2, 170

emicuit, parmamque ferens hastamque trementem.

 

Extemplo temptanda fuga canit aequora Calchas,

nec posse Argolicis exscindi Pergama telis,

omina ni repetant Argis, numenque reducant,

quod pelago et curuis secum auexere carinis.

d'elle-même, avec son bouclier et sa lance qui tremblait.

 

Aussitôt le devin Calchas s'écrie qu'il faut prendre la mer et fuir,

que les Argiens n'anéantiront Pergame sous leurs traits

que s'ils reprennent les auspices à Argos, et en ramènent le Palladium,

qu'ils ont emporté avec eux par-delà la mer, sur leurs nefs creuses.

2, 175

Et nunc, quod patrias uento petiere Mycenas,

arma deosque parant comites, pelagoque remenso

improuisi aderunt : ita digerit omina Calchas.

Hanc pro Palladio moniti, pro numine laeso

effigiem statuere, nefas quae triste piaret.

Maintenant, à la faveur du vent, ils ont regagné Mycènes, leur patrie,

ils s'y arment et se ménagent la faveur des dieux, prêts à retraverser la mer,

et à revenir à l'improviste. Voilà comment Calchas comprend les présages.

Sur son conseil, au lieu du Palladium, les Grecs ont dressé une statue

en l'honneur de la divinité offensée, pour expier leur funeste sacrilège.

2, 180

Hanc tamen immensam Calchas attollere molem

roboribus textis caeloque educere iussit,

ne recipi portis, aut duci in moenia possit,

neu populum antiqua sub religione tueri.

Nam si uestra manus uiolasset dona Mineruae,

Toutefois Calchas a ordonné d'élever ce monument gigantesque

de planches assemblées, et de le faire monter jusqu'au ciel,

pour qu'il ne puisse franchir les portes, ni être introduit dans vos murs,

ni assurer à votre peuple la protection de son culte ancestral.

Car si de votre main vous aviez profané l'offrande à Minerve,

2, 185

tum magnum exitium quod di prius omen in ipsum

conuertant ; Priami imperio Phrygibusque futurum ;

sin manibus uestris uestram ascendisset in urbem,

ultro Asiam magno Pelopea ad moenia bello

uenturam, et nostros ea fata manere nepotes.ʼ

 

un grand désastre - que les dieux retournent plutôt ce présage

contre le devin !- en résulterait pour le royaume de Priam et les Phrygiens.

Mais si vos propres mains avaient hissé le cheval dans votre ville,

ce serait l'Asie même qui irait porter une guerre terrible

sous les murs de Pélops ; tel est le destin réservé à nos descendants ! ʼ

2, 190

Talibus insidiis periurique arte Sinonis

credita res, captique dolis lacrimisque coactis,

quos neque Tydides, nec Larisaeus Achilles,

non anni domuere decem, non mille carinae.

 

Hic aliud maius miseris multoque tremendum

Grâce à ces machinations et à l'habileté du parjure Sinon,

on fit crédit à son récit, et ses ruses entremêlées de larmes

abusèrent ceux que n'avaient domptés ni le fils de Tydée

ni Achille de Larissa, ni dix années de guerre ni mille navires.

 

Un autre prodige, plus grave, se manifeste alors aux infortunés Troyens ;

 2, 195

obicitur magis, atque improuida pectora turbat.

Laocoon, ductus Neptuno sorte sacerdos,

sollemnis taurum ingentem mactabat ad aras.

Ecce autem gemini a Tenedo tranquilla per alta

- horresco referens - immensis orbibus angues

beaucoup plus effrayant, il trouble nos cœurs pris au dépourvu.

Laocoon, que le sort avait désigné comme prêtre de Neptune,

immolait solennellement un énorme taureau sur les autels.

Or voici que de Ténédos, sur des flots paisibles,

deux serpents aux orbes immenses, - ce récit me fait frémir -,

2, 200

incumbunt pelago, pariterque ad litora tendunt ;

pectora quorum inter fluctus arrecta iubaeque

sanguineae superant undas ; pars cetera pontum

pone legit, sinuatque immensa uolumine terga.

Fit sonitus spumante salo ; iamque arua tenebant,

glissent sur la mer et, côte à côte, gagnent le rivage.

Poitrines dressées sur les flots, avec leurs crêtes rouge sang,

ils dominent les ondes ; leur partie postérieure épouse les vagues

et fait onduler en spirales leurs échines démesurées.

L'étendue salée écume et résonne ; déjà ils touchaient la terre ferme,

2, 205

ardentisque oculos suffecti sanguine et igni,

sibila lambebant linguis uibrantibus ora.

Diffugimus uisu exsangues : illi agmine certo

Laocoonta petunt ; et primum parua duorum

corpora natorum serpens amplexus uterque

leurs yeux brillants étaient injectés de sang et de feu

et, d'une langue tremblante, ils léchaient leurs gueules qui sifflaient.

À cette vue, nous fuyons, livides. Eux, d'une allure assurée,

foncent sur Laocoon. D'abord, ce sont les deux corps

de ses jeunes fils qu'étreignent les deux serpents, les enlaçant,

2, 210

implicat, et miseros morsu depascitur artus ;

post ipsum auxilio subeuntem ac tela ferentem

corripiunt, spirisque ligant ingentibus ; et iam

bis medium amplexi, bis collo squamea circum

terga dati, superant capite et ceruicibus altis.

les mordant et se repaissant de leurs pauvres membres.

Laocoon alors, arme en main, se porte à leur secours. Aussitôt,

les serpents déjà le saisissent et le serrent dans leurs énormes anneaux.

Deux fois, ils ont entouré sa taille, deux fois ils ont enroulé autour de son cou

leurs échines écailleuses, le dominant de la tête, la nuque dressée.

2, 215

Ille simul manibus tendit diuellere nodos,

perfusus sanie uittas atroque ueneno,

clamores simul horrendos ad sidera tollit :

quales mugitus, fugit cum saucius aram

taurus, et incertam excussit ceruice securim.

Aussitôt de ses mains, le prêtre tente de défaire leurs noeuds,

ses bandelettes sont souillées de bave et de noir venin.

En même temps il fait monter vers le ciel des cris horrifiés :

on dirait le mugissement d'un taureau blessé fuyant l'autel

et secouant la hache mal enfoncée dans sa nuque.

2, 220

At gemini lapsu delubra ad summa dracones

effugiunt saeuaeque petunt Tritonidis arcem,

sub pedibusque deae clipeique sub orbe teguntur.

Mais les deux dragons en un glissement fuient vers les temples,

sur la hauteur, gagnant la citadelle de la cruelle Tritonienne,

où ils s'abritent aux pieds de la déesse, sous l'orbe de son bouclier.

2, 225

 

Les ennemis dans la ville (228-267)

Les explications de Sinon et la mort de Laocoon finissent par persuader les Troyens, qui vont jusqu'à percer leurs murailles pour introduire le cheval qu'ils hissent jusqu'au centre de la cité, au milieu des hymnes sacrés, dans l'inconscience et la liesse générales, en dépit de signes suspects et des avertissements de Cassandre (228-249).

La nuit suivante, quand les Troyens sont endormis, la flotte grecque est revenue de Ténédos. Au signal lumineux lancé par le navire de commandement, Sinon ouvre les flancs du cheval d'où se laissent glisser de nombreux guerriers, dont Ulysse. Ces hommes se répandent dans la ville endormie, tuent les gardes et ouvrent les portes à leurs compagnons (250-267).

Tum uero tremefacta nouus per pectora cunctis

insinuat pauor, et scelus expendisse merentem

Alors en nos coeurs s'insinue une terreur inconnue,

qui nous fait tous trembler ; Laocoon a mérité, dit-on,

 

Laocoonta ferunt, sacrum qui cuspide robur

laeserit, et tergo sceleratam intorserit hastam.

Ducendum ad sedes simulacrum orandaque diuae

numina conclamant.

Diuidimus muros et moenia pandimus urbis.

d'expier son crime : son arme a outragé le chêne sacré,

il a lancé sur l'échine du cheval son épée criminelle.

On crie en choeur qu'il faut transporter la statue à sa place,

et implorer la toute puissance de la déesse !

Nous perçons la muraille et ouvrons les remparts de la ville.

2, 230

Accingunt omnes operi, pedibusque rotarum

subiciunt lapsus, et stuppea uincula collo

intendunt : scandit fatalis machina muros,

feta armis. Pueri circum innuptaeque puellae

sacra canunt, funemque manu contingere gaudent.

Tous se mettent à l'oeuvre. Sous les pieds du cheval, on glisse

un train de roues ; autour de son cou, on tend des cordes de chanvre ;

la machine fatale, pleine d'hommes armés, franchit les remparts.

Des enfants, des jeunes filles chantent tout autour des hymnes sacrés,

et trouvent plaisir à toucher de la main les cordes de l'engin.

2, 235

Illa subit, mediaeque minans inlabitur urbi.

O patria, O diuom domus Ilium, et incluta bello

moenia Dardanidum, quater ipso in limine portae

substitit, atque utero sonitum quater arma dedere :

instamus tamen inmemores caecique furore,

Celui-ci monte et, menaçant, pénètre jusqu'au centre de la ville.

Ô patrie, ô Ilion, demeure des dieux ! Et vous, qu'illustra la guerre,

remparts des Dardaniens ! Quatre fois, au seuil même de la porte,

la machine s'arrête ; quatre fois en son ventre les armes résonnent ;

et pourtant, nous insistons, inconscients et aveuglés par notre folie,

2, 240

et monstrum infelix sacrata sistimus arce.

Tunc etiam fatis aperit Cassandra futuris

ora, dei iussu non umquam credita Teucris.

Nos delubra deum miseri, quibus ultimus esset

ille dies, festa uelamus fronde per urbem.

 

et nous installons en notre sainte citadelle ce monstre de malheur.

À ce moment aussi, Cassandre ouvre la bouche, dévoilant l'avenir,

elle que, sur ordre d'un dieu, les Troyens n'ont jamais crue.

Et nous, malheureux, qui vivions notre dernier jour dans la ville,

nous ornons les temples des dieux de feuillages de fête.

 

2, 245

Vertitur interea caelum et ruit oceano nox,

inuoluens umbra magna terramque polumque

Myrmidonumque dolos ; fusi per moenia Teucri

conticuere, sopor fessos complectitur artus :

et iam Argiua phalanx instructis nauibus ibat

Pendant ce temps, le ciel tourne ; la nuit monte de l'océan,

enveloppant de son ombre infinie la terre et la mer,

et les ruses des Myrmidons ; les Troyens, épars le long des murs

se sont tus ; le sommeil a engourdi leurs membres épuisés.

Mais déjà, dans le silence complice d'une lune amie,

2, 250

a Tenedo tacitae per amica silentia lunae

litora nota petens, flammas cum regia puppis

extulerat, fatisque deum defensus iniquis

inclusos utero Danaos et pinea furtim

laxat claustra Sinon. Illos patefactus ad auras

sur ses navires alignés la phalange argienne arrivait de Ténédos,

cinglant vers le rivage familier. Dès que le vaisseau royal

eut envoyé un signal lumineux, alors, fort des iniques décrets divins,

Sinon détache furtivement les cloisons de pin et délivre les Danaens

enfermés dans le ventre ; le cheval ouvert rend à l'air libre

2, 255

reddit equus, laetique cauo se robore promunt

Thessandrus Sthenelusque duces, et dirus Ulixes,

demissum lapsi per funem, Acamasque, Thoasque,

Pelidesque Neoptolemus, primusque Machaon,

et Menelaus, et ipse doli fabricator Epeos.

ces hommes qui, tout joyeux, sortent de leur antre de bois :

les chefs Thessandre et Sthénélus, et l'impitoyable Ulysse

glissent le long d'une corde qu'ils ont lancée, ainsi qu'Acamas et Thoas,

et Néoptolème, descendant de Pélée, et, en tête, Machaon

et Ménélas et Épéos, celui-là même qui avait fabriqué le piège.

2, 260

Inuadunt urbem somno uinoque sepultam ;

caeduntur uigiles, portisque patentibus omnis

accipiunt socios atque agmina conscia iungunt.

Ils envahissent la ville ensevelie dans le sommeil et le vin ; 

ils abattent les veilleurs et, par les portes ouvertes, font entrer

tous leurs compagnons ; les troupes complices sont ainsi réunies.

2, 265

Hypertexte louvaniste - Page suivante


 Notes (1, 1-267)

Toute l'assistance... (2, 1). C'est la continuation immédiate du livre 1, qui se terminait dans la salle de banquet à la demande de Didon. La reine, désireuse de prolonger la réunion, a prié Énée de raconter la fin de Troie et les pérégrinations des fugitifs avant leur arrivée à Carthage (1, 754-756).

de son lit surélevé (2, 2). Énée occupait une place d'honneur, sur un lit vraisemblablement plus haut ou plus décoré que les autres.

Danaens (2, 5). Les Grecs sont souvent désignés ainsi, d'après le fondateur d'Argos, Danaus, qui avait été contraint de fuir d'Égypte (1, 30).

la part importante (2, 6). À ne pas comprendre comme un désir d'Énée de se faire valoir, mais plutôt pour attester de sa qualité de témoin.

Myrmidons... Dolopes... Ulysse (2, 7). Les Myrmidons et les Dolopes étaient deux peuples de Thessalie, venus à Troie sous les ordres d'Achille ; ils étaient réputés pour leur vaillance. Énée évoque ici Achille et Ulysse, deux des héros grecs les plus acharnés contre les Troyens.

après tant d'années écoulées déjà (2, 14). Le siège de Troie avait duré dix ans.

inspirés par la divine Pallas (2, 15). Cfr 1, 39. On peut penser que Pallas est citée ici à double titre, c'est-à-dire comme inspiratrice des arts et techniques, et comme protectrice attitrée des Grecs.

Ténédos (2, 21). Cette île est aujourd'hui turque (Gökçeada). Sa position dans la mer Égée, près de l'entrée du détroit des Dardanelles, lui donne une grande importance stratégique et elle fut souvent, dans l'histoire, l'objet d'invasions et de pillages. Selon Énée, cette île tenait sa prospérité de la puissance de Troie.

Mycènes (2, 25). Ville du Péloponnèse, patrie d'Agamemnon. Cfr 1, 284 avec la note.

Doriens (2, 27). Le terme désigne ici les Grecs. On le trouve une fois encore en 6, 88, toujours pour désigner le camp des Grecs (Dorica castra). Au sens propre, les Doriens représentent la dernière vague des envahisseurs indo-européens venus du nord, censés avoir atteint la Grèce vers 1100-1000 et occupé tout particulièrement le Péloponnèse. Homère n'utilise jamais ce mot pour désigner les Grecs : dans la chronologie légendaire, leur arrivée en Grèce était postérieure à la Guerre de Troie.

Dolopes (2, 29). Cfr 2, 7n.

Minerve (2, 31). Minerve est le nom de la divinité latine généralement assimilée à Pallas-Athéna, appelée aussi Parthenos, c'est-à-dire la vierge. Cfr 1, 39 et 2, 15.

Thymétès... (2, 32-34). Selon Homère (Iliade, 3, 146), Thymétès était un proche parent de Priam. Dans son commentaire à Virgile, Servius fait allusion à une légende racontée par le poète Euphorion de Chalcis. Selon ce dernier, Cilla, l'épouse de Thymétès, avait mis au monde un enfant au même moment qu'Hécube, l'épouse de Priam. Comme un oracle avait annoncé que ce jour-là devait naître celui qui causerait la ruine de Troie (l'oracle visait évidemment Pâris, le fils d'Hécube), Priam, ne voulant pas appliquer la prédiction à son propre fils, fit mettre à mort Cilla et son enfant. Virgile semble se demander (cfr « était-ce fourberie », du vers 34) si l'attitude deThymétès ne pourrait pas avoir été dictée par la rancune.

Un personnage du même nom se retrouve dans la suite de l'Énéide : en 10, 123, un Thymétès, fils d'Hicétaon, est cité parmi les Troyens chargés de résister à l'assaut de leur camp par les Rutules ; en 12, 364, il tombe victime de Turnus.

Capys (2, 35). Un personnage de ce nom est cité comme un des compagnons d'Énée, momentanément disparu lors du naufrage près de Carthage (1, 183) ; de même un Capys se distinguera lors de combats singuliers (9, 576), et laissera son nom à Capoue (10, 145).

Laocoon (2, 41). Prêtre troyen ; époux d'Antiopé et père de deux fils. En fait les détails de sa légende varient selon les auteurs, même si le récit de Virgile est le mieux connu. La tradition en fait tantôt le prêtre d'Apollon, tantôt celui de Neptune (cfr 2, 201) ; elle hésite sur le nombre des victimes (Laocoon seul, Laocoon et un de ses fils, Laocoon et ses deux fils) ; elle ne s'accorde pas non plus sur les causes de la colère divine. Ainsi Laocoon se serait attiré la colère d'Apollon pour s'être marié ou pour avoir eu des relations sexuelles avec sa femme devant la statue du dieu ; pour Virgile et pour Hygin, il aurait payé de sa vie son opposition au Cheval. En tout cas, le poète a certainement retravaillé les données anciennes, qui figuraient déjà chez Sophocle et chez Euphorion de Chalcis. Un groupe de marbre très célèbre illustre brillamment la mort de Laocoon et celle de ses enfants sous l'attaque des serpents. Dû aux sculpteurs rhodiens Hagésandre, Polydore et Athanodore (Ier siècle avant J.-C.), il fut découvert mutilé à Rome en 1516 et se trouve actuellement au musée du Vatican. La restauration dont il fut l'objet est discutée.

Danaens... Achéens... Argiens... (2, 43-55). Termes divers qui désignent les Grecs, vus comme descendants de Danaus, fondateur d'Argos (cfr 2, 5), ou comme habitants de l'Achaïe.

je crains les Danaens (2, 49). La formule est passée en proverbe. Le latin dit Timeo Danaos et dona ferentes. Le sens en est qu'il faut toujours se défier d'un ennemi, quelque généreux qu'il apparaisse.

un homme (2, 57). Ici commence l'épisode célèbre de Sinon, un proche d'Ulysse. Ce personnage de traître est antérieur à Virgile (il apparaît chez Aristote et chez Plaute, par exemple), mais c'est chez le poète augustéen qu'on trouve la version conservée la plus détaillée. Des auteurs postérieurs apporteront à sa légende des embellissements littéraires : ainsi chez Quintus de Smyrne (12, 243ss), Sinon se laissera couper le nez et les oreilles avant de révéler son prétendu secret.

dardaniens (2, 58). C'est-à-dire troyens. Cfr 1, 38n.

dans ce but précis (2, 60). Celui de se faire capturer et emmener auprès des Troyens.

phrygiennes (2, 68). C'est-à-dire troyennes, Troie se trouvant en Phrygie (cfr 1, 182 ; 1, 381 ; 1, 618 ).

Dardanides (2, 72). Les descendants de Dardanus, c'est-à-dire les Troyens. Cfr 1, 38n.

de race argienne (2, 78). C'est donc un Grec.

Palamède, le Bélide (2, 81-85). Fils de Nauplios, roi d'Eubée, Palamède descendait de Danaus, et donc aussi de Bélus, roi d'Égypte, père de Danaus, d'où le terme « Bélide ». On distinguera ce Bélus, ancêtre de Palamède, du Bélus, présenté par Virgile comme l'ancêtre de Didon (1, 621 ; 1, 729). La légende de Palamède était bien connue en Grèce et à Rome ; la tradition lui faisait l'honneur d'un grand nombre d'inventions (par exemple certaines lettres de l'alphabet ; l'usage de la monnaie ; certains jeux) ; il passe aussi pour avoir subi une mort injuste, victime des machinations d'Ulysse. Parmi les versions qui circulaient à ce propos, nous épinglerons celle que voici.

Participant aux préparatifs de la guerre de Troie, Palamède aurait été amené à démasquer Ulysse, qui simulait la folie pour se soustraire à l'expédition. Ne lui pardonnant pas cette intervention, Ulysse aurait voulu se venger en produisant une lettre soi-disant envoyée par Priam à Palamède, en réalité écrite sous la contrainte par un prisonnier troyen pour faire croire que Palamède était un traître. Ulysse l'accusa alors d'intelligence avec les Troyens et, pour étayer ses allégations, cacha de l'or, prix de la trahison, dans la tente de Palamède. Cet or découvert, Palamède fut lapidé par les Grecs.

Pour certains auteurs anciens (et le motif est présent dans les paroles que Virgile prête à Sinon), Palamède aurait tenté d'éviter la guerre de Troie et d'obtenir un réglement pacifique de l'affaire.

Pélasges (2, 83). C'est-à-dire les Grecs (cfr 1, 624 ; 8, 600 ; 9, 154).

mon proche (2, 86). Selon Servius, Sinon n'était pas apparenté à Palamède, mais bien à Ulysse. C'étaient des cousins germains, ayant tous deux pour grand-père Autolycus, un voleur célèbre (Homère, Odyssée, 19, 395-466).

Calchas (2, 100). Célèbre devin grec, fils de Thestor. Il intervient, comme devin attitré de l'expédition des Grecs contre Troie : il est présent lors du sacrifice d'Iphigénie ; il révèle la raison de la colère d'Apollon, au début de l'Iliade (1, 68-120) ; il prédit la durée de la guerre de Troie (Iliade, 2, 299-332). Son nom revient à diverses reprises dans la suite de cet épisode (2, 122 ; 2, 176 ; 2, 182 ; 2, 185).

L'homme d'Ithaque (2, 104). C'est Ulysse, roi d'Ithaque. « Rien ne pouvait mieux disposer les Troyens en faveur de Sinon que cette haine prétendue d'Ulysse, détesté d'eux entre tous les Grecs » (M. Rat).

Atrides (2, 104). Agamemnon et Ménélas, fils d'Atrée (cfr 1, 458).

Auster (2, 111). Vent du sud-est, aussi appelé Notos en grec (cfr 1, 84-86n).

Eurypyle (2, 114). Seule mention dans l'Énéide de ce personnage, un chef thessalien, qui participa à l'expédition contre Troie, cité à plusieurs reprises dans l'Iliade (notamment en11, 804-848, où, blessé, il est secouru par Patrocle et laisse entendre que tout est perdu pour les Achéens).

oracles de Phébus (2, 114). Sinon ne donne aucune précision sur le sanctuaire consulté. L'impression qui se dégage de cette évocation d'une ambassade à Apollon est que le départ des Troyens est voulu par la divinité.

vierge immolée (2, 116-117). Allusion au sacrifice d'Iphigénie, fille d'Agamemnon et de Clytemnestre. Bloqués à Aulis, les Grecs l'avaient immolée à la déesse Artémis pour obtenir des vents favorables à leur traversée ; ils agissaient ainsi sur la foi d'un oracle du devin Calchas, dont il a été question en 2, 100. Ce récit, absent chez Homère, est le sujet d'une tragédie conservée d'Euripide, Iphigénie à Aulis. Il est également évoqué par Virgile, en 4, 426. La légende présente de nombreuses variantes.

Apollon (2, 121). C'est l'oracle de Phébus que Eurypyle était allé consulter (2, 114).

objets rituels (2, 133). Dans l'Énéide, le sacrifice est conçu à la mode romaine. Deux détails précis sont donnés dans le vers suivant.

farines salées (2, 134). Avant le sacrifice, on répandait sur la tête de la victime de la mola salsa, c'est-à-dire de la farine de froment mêlée de sel, préparée par les Vestales. C'était le rite de l'immolatio, au sens technique du terme (cfr 2, 133). L' opération était complétée par une libation de vin et une fumigation d'encens, dont il n'est pas question ici. On retrouvera cette mola salsa en 5, 745.

bandelettes (2, 134). Les bandelettes (en latin uittae ou infulae), généralement de couleur blanche ou écarlate, étaient des marques de consécration, qui décoraient la tête de la victime. Les prêtres portaient aussi des bandelettes (cfr 10, 538).

ces gens (2, 139). Les chefs grecs, dont Ulysse.

je t'en prie (2, 144). Sinon semble s'adresser ici au seul Priam.

qui que tu sois (2, 148-9). C'était, selon Servius, la formule avec laquelle on accueillait les transfuges.

fils de Tydée (2, 164). Le fils de Tydée est Diomède, dont il a déjà été question en 1, 96-98 (général) et en 1, 469-473 ainsi qu'en 1, 752 (pour son rôle dans l'histoire des chevaux de Rhésus).

Palladium (2, 165). Le Palladium était une statue de Pallas-Athéna, tombée du ciel ou amenée à Troie par Dardanus. Un oracle avait déclaré que Troie ne pourrait pas être prise, aussi longtemps qu'elle conserverait le Palladium dans ses murs. Diomède et Ulysse commirent l'impiété de dérober la fameuse statue, ce qui provoqua l'ire de la déesse. En réalité, la légende est plus complexe que ne le laisserait entendre le récit virgilien. S'il faut en croire une autre version, Dardanus, par mesure de précaution, aurait fait faire un second Palladium, à l'imitation du premier. C'est le faux Palladium qu'auraient volé Diomède et Ulysse. La statue véritable, sauvée par Énée, aurait été emmenée par lui en Italie et aurait abouti à Rome dans le temple de Vesta. Mais comme cette façon de voir les choses contredisait l'oracle, d'autres auteurs affirmaient que Diomède et Ulysse avaient bien enlevé le vrai Palladium, mais que Diomède l'aurait rendu plus tard aux Troyens en Calabre, soit à Énée lui-même, soit à un de ses compagnons, Nautès. Selon cette version aussi, la statue aurait été accueillie à Rome, dont la survie dépendait de ce gage d'inviolabilité. Cfr aussi 6, 839.

toucher les bandelettes (2, 168). C'était un sacrilège de toucher les objets sacrés avant de s'être purifiés dans de l'eau vive les mains qui avaient été souillées par le sang (cfr 2, 718).

la Tritonienne (2, 171). Pallas-Athéna (Minerve dans l'interprétation latine) était aussi appelée Tritonia, « la Tritonienne ». C'est le décalque latin du grec « Tritogénie », une épiclèse dont l'origine est relativement obscure. Ce terme aurait désigné au départ une divinité indépendante, identifiée dans la suite à Pallas Athéna. Le mot renverrait à un lac ou à un fleuve du nom de Triton, qui aurait été le père de cette divinité ou près duquel aurait eu lieu sa naissance. « Tritogénie » aurait été élevée en compagnie d'Athéna, qui l'aurait tuée accidentellement. Peu importe. Ici, comme en d'autres endroits de l'Énéide (2, 226 ; 2, 615 ; 5, 704 ; 11, 483),Virgile a simplement repris en latin une épiclèse grecque.

ardentes flammes (2, 172). Ses yeux parurent jeter des flammes.

sueur salée (2, 173). Autre prodige que cette sueur salée qui semble sortir de la statue.

se souleva du sol (2, 174). Phénomène de lévitation, d'autant plus frappant qu'il se produit à trois reprises. On sait l'importance religieuse du chiffre trois.

Pergame (2, 177). Troie. Cfr 1, 466.

Palladium (2, 178). Cfr 2, 162-170.

Argos... Mycènes (2, 178, 180). Cfr 1, 30 ; 1, 284-285 ; 1, 650-653.

sous les murs de Pélops (2, 194). L'expression désigne la Grèce. Fils de Tantale, roi de Lydie, Pélops avait dû fuir l'Asie Mineure et gagner l'Europe, apportant ses richesses à Pise en Élide, où il devint roi. Le Péloponnèse (« île de Pélops ») lui doit son nom.

destin réservé à nos descendants (2, 194). Ces vers contiennent sans doute une allusion à la conquête effective de la Grèce par les Romains, successeurs des Troyens. Cfr 1, 284-285, avec l'évocation par Jupiter de la conquête de la Grèce par la « maison d'Assaracus ».

le fils de Tydée (2, 197). Il s'agit de Diomède (cfr 1, 96-98).

Achille de Larissa (2, 198). Achille venait de la Phthie, proche de la ville de Larissa, en Thessalie.

prêtre de Neptune (2, 201). D'après Servius, Laocoon, déjà prêtre d'Apollon, aurait été désigné par le sort pour remplacer le prêtre troyen de Neptune, lapidé par ses concitoyens pour n'avoir pas empêché les Grecs de débarquer. On a dit plus haut (2, 41n) que la tradition hésitait sur le statut exact de Laocoon.

Ténédos (2, 203). L'île où les Grecs s'étaient repliés (2, 21).

ses jeunes fils (2, 214). On a évoqué plus haut (2, 41n) les hésitations de la tradition sur le nombre de victimes. Il se pourrait d'ailleurs que Virgile ait transformé en fils de Laocoon des personnages qui à l'origine n'étaient que de simples assistants du prêtre.

Tritonienne (2, 226). Pour l'adjectif, cfr 2, 171n. Les serpents vont donc se réfugier dans le temple de Pallas Athéna.

Ilion (2, 241). Troie (cfr 1, 68).

Cassandre (2, 246-247). Fille de Priam et d'Hécube, et soeur jumelle d'Hélénus, elle avait reçu, comme son frère Hélénus, le don de prophétie. Mais la tradition n'est pas unanime à ce propos. Selon une version très répandue, Apollon, amoureux d'elle, avait promis de lui apprendre à prophétiser si elle consentait à se livrer à lui. Elle avait accepté et reçu les leçons du dieu. Mais une fois instruite, elle avait alors repoussé le dieu Apollon qui, pour la punir, lui avait retiré le don de la persuasion : elle prophétiserait toujours la vérité mais personne ne la croirait. Sur Cassandre, cfr aussi 2, 343 ; 2, 404 ; 3, 183 ; 3, 187 ; 5, 636 et 10, 68.

Myrmidons (2, 252). Ce sont les soldats d'Achille (cfr 2, 7), mais le mot désigne ici les Grecs en général.

Ténédos (2, 255). Cfr 2, 21 et 2, 203.

envoyé un signal lumineux (2, 257). Plus loin dans l'Énéide (6, 518-519), Déiphobe racontera qu'Hélène, du haut de la citadelle de Troie, avait envoyé un signal lumineux aux Grecs.

Thessandre (2, 261). Thessandre n'est cité qu'ici, et semble inconnu par ailleurs.

Sthénélus (2, 261). Sthénélus n'est cité qu'ici chez Virgile. Le nom lui a sans doute été inspiré par celui de Sthénélos, fils de Capanée, chef argien, compagnon de Diomède, mentionné à diverses reprises dans l'Iliade (notamment en 2, 559-568). En 12, 341, Virgile désigne sous ce nom un Troyen, qui meurt de la main de Turnus.

Acamas et Thoas (2, 262). Ces deux guerriers grecs ne sont cités qu'ici dans l'Énéide. Acamas, fils de Thésée, semble avoir été introduit dans la légende de Troie après Homère ; par contre, Thoas, fils d'Andrémon, roi de Calydon en Étolie, est présent dans l'Iliade (2, 638).

Néoptolème (2, 263). Ce personnage, désigné aussi sous le nom de Pyrrhus, est le fils d'Achille et donc le petit-fils de Pélée. Après la mort d'Achille, les Grecs l'envoyèrent chercher, un oracle ayant prédit que Troie ne pourrait être prise sans sa participation. Devant Troie, le jeune homme se comporta comme un nouvel Achille et reçut comme butin de guerre Andromaque, la veuve d'Hector. Il précipita Astyanax du haut d'une tour, et égorgea Polyxène sur la tombe d'Achille. Diverses versions entourent les événements qui suivirent son retour de Troie. Selon un courant de la tradition, il fonda un royaume en Épire, épousa sa captive Andromaque, qu'il abandonna ensuite à Hélénus, pour épouser Hermione, la fille de Ménélas. Il finit par être assassiné par Oreste. Sur ce personnage, voir aussi 11, 264n.

Pyrrhus joue un grand rôle dans la suite du chant 2, avec l'assaut du palais ainsi qu'avec la mort de Politès et de Priam (2, 469-558) ; Énée évoquera encore le personnage en racontant son séjour à Buthrote, et sa rencontre avec Andromaque (3, 296 ; 3, 319 ; 3, 333 ; 3, 469).

Machaon (2, 263). Cité seulement ici, ce personnage est connu comme fils d'Esculape. Il participa à l'expédition de Troie, au cours de laquelle il pratiqua la médecine, un art qu'il tenait de son père ; il aurait notamment soigné Ménélas.

Ménélas (2, 264). Fils d'Atrée, frère d'Agamemnon, époux d'Hélène, et roi de Sparte. Après l'enlèvement d'Hélène par Pâris, il participa à l'expédition dirigée par son frère Agamemnon. Cfr aussi 11, 261-263.

Épéos (2, 264). Fils de Panapée, sa principale contribution à la guerre de Troie fut la construction du cheval ; guerrier sans grande envergure, semble-t-il, il n'est cité qu'ici chez Virgile.


Autres traductions françaises dans la BCS - Énéide - Chant II (Plan) - Hypertexte louvaniste - Page suivante

Bibliotheca Classica Selecta - UCL (FLTR)