FEC -  Folia Electronica Classica (Louvain-la-Neuve) - Numéro 26  - juillet-décembre 2013


 

Des statues et un miroir. Chapitre 4 : Les listes de « merveilles virgiliennes »

 

H. Synthèse et conclusion

 

Jacques Poucet

Professeur émérite de l'Université de Louvain
Membre de l'Académie royale de Belgique
<jacques.poucet@skynet.be>

 

Que dire sur les notices aux statues magiques intégrées dans les listes de merveilles virgiliennes ?

L'élément le plus important peut-être est la marque virgilienne qui s'imprime désormais sur le complexe aux statues magiques. Ce n'était pas le cas auparavant. La tradition des Miracula mundi n’attribuait jamais cette réalisation à Virgile et celle des Mirabilia urbis, elle aussi, déclinait ses versions du bâtiment aux statues magiques sans faire appel à Virgile. Jean d’Outremeuse, qui fait pourtant partie de la tradition des Mirabilia, a innové en faisant explicitement de Virgile le créateur du complexe aux statues alors que ses modèles ne connaissaient pas cette attribution. Mais il est le seul dans son cas.

L'introduction de Virgile dans Ly Myreur s’expliquait probablement par l’intérêt tout particulier du chroniqueur liégeois pour les merveilles virgiliennes. Mais le rappel de quelques dates pourrait avoir de l’intérêt. Jean d’Outremeuse rédige son Myreur au XIVe siècle, alors que Vincent de Beauvais écrit au milieu du XIIIe et que le de naturis rerum de Neckam date de la dernière décennie du XIIe. Virgile était donc mis en rapport avec le complexe aux statues magiques bien avant le XIVe siècle.

 

Quoi qu'il en soit, les listes de merveilles virgiliennes, en tant que genre, sont nées et se sont développées indépendamment des traditions des Miracula mundi et des Mirabilia urbis. Elles ont emprunté leurs matériaux là où elles les trouvaient. Ce qui explique les différences constatées dans les descriptions des statues. Certains rédacteurs, comme Alexander Neckam, s'inspirent davantage de la tradition des Miracula mundi, d’autres, comme Vincent de Beauvais, de formes – anciennes ou déjà évoluées – des Mirabilia urbis. Peut-être les versions qu’ils consultaient ne contenaient-elles pas le nom de Virgile, mais cela n’avait pour eux aucune importance. Ils n'avaient même pas besoin de les modifier et d'y ajouter le nom de Virgile. Les insérer dans leurs listes suffisait, même sans la moindre adaptation, pour que Virgile en devienne le créateur.

 

On aura aussi noté l’importance relative de Neckam et de Vincent, qui, en ce qui concerne en tout cas la description des statues, ont l’un et l’autre « fait école ». Ainsi Jean de Galles (XIIIe) dépend nettement du premier ; le pseudo-Burley (1326) et le rédacteur du Renart le Contrefait (1ère moitié du XIVe), du second. L’auteur du manuscrit du fonds Magliabechi (fin XIIIe-début XIVe) et Jean Mansel (milieu du XVe) sont plus difficiles à classer.

 

Le chapitre quatrième a présenté un certain nombre de listes des merveilles virgiliennes. Il n’a en fait retenu que celles qui intégraient le motif des statues magiques, mais il en existe d’autres. La question des listes sera traitée ailleurs pour elle-même, mais nous avons jugé utile dans l’appendice qui suit d’évoquer deux autres listes susceptibles d’ouvrir une perspective intéressante.

 

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