FEC -  Folia Electronica Classica (Louvain-la-Neuve) - Numéro 26  - juillet-décembre 2013


 

Des statues et un miroir. Chapitre 3 : Autres témoignages de la littérature allemande

 

E. Observations finales

 

Jacques Poucet

Professeur émérite de l'Université de Louvain
Membre de l'Académie royale de Belgique
<jacques.poucet@skynet.be>

 

Les trois chroniques allemandes n’apportent pas grand-chose de nouveau concernant la description même des statues, sauf peut-être l’investissement du rédacteur de la Kaiserchronik et surtout de Jans Enikel dans un souci de diversification des statues en fonction des pays qu’elles représentent.

La question de l’utilisation du motif doit aussi être soulevée. Nous ne nous trouvons pas devant une simple présentation de la notice dans un contexte précis (les Miracula mundi ou les Mirabilia Romae), mais devant une utilisation de la notice à des fins très particulières. Les trois rédacteurs s’en sont servis en tant que technique narrative pour introduire un personnage important dans le récit, en l’espèce César.

C’était déjà au fond ce qui s’était déjà passé dans les Mirabilia primitifs avec l’affaire d’Agrippa, de la Perse en rébellion et de la fondation du Panthéon. Mais le procédé est devenu chez les trois chroniqueurs un véritable système, et Jans Enikel ira même jusqu’à s’en servir à trois reprises : une fois avec Crassus, une deuxième fois avec Lépide, une troisième fois – la bonne, si on peut dire – avec César.

Les rapports entre les trois chroniqueurs sont nets, mais le problème de l’origine de la notice sur les statues présente dans la Kaiserchronik ne peut pas être résolu en toute certitude. Toutefois la correspondance relevée entre la technique d’utilisation du motif des statues dans la version la plus ancienne des Mirabilia Romae et ce que nous lisons dans la Kaiserchronik (et dans les chroniques ultérieures) donne à penser que le rédacteur de la Kaiserchronik s’est étroitement inspiré de la notice des Mirabilia primitifs, ou d’une version qui en était assez proche.

En ce qui concerne les trois autres auteurs allemands, sur le plan du contenu, leur traitement du motif n’apporte rien de fondamentalement neuf par rapport à ce que livrent la tradition des Mirabilia et celle des chroniqueurs allemands, même si Hermann von Fritzlar, avec ses développements sur les clochettes, apparaît un peu plus original que les deux autres.

Ce qui en tout cas sépare ces auteurs des chroniqueurs, c’est l’utilisation qu’ils font du motif des statues. C’est clair pour les deux poètes. En effet, pour autant qu’on puisse valablement en juger, ils se servent du motif pour comparer la situation de la Rome ancienne avec celle de leur temps. Ils travaillent dans une optique de critique politique et sociale. Mais pour Hermann von Fritzlar, le texte dont nous disposons est trop isolé pour autoriser un jugement définitif. Peut-être après tout son œuvre n’est-elle qu’une compilation de textes légendaires...

 

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